Focus - juin/juillet 2017


Trois questions à Philippe Gonin sur Grandeur et Décadence des Pink Floyd


Pourquoi Grandeur et Décadence des Pink Floyd ?

L’idée vient en fait d’Hervé Duchêne, directeur des Éditions Universitaires de Dijon. Voulant profiter de l’exposition Pink Floyd (Their Mortal Remains) qui s’est ouverte à Londres le 13 mai dernier, il m’a commandé un ouvrage sur le Floyd pour la collection « Essais » (collection à laquelle j’avais déjà participé avec Le Rock à Papa). Son idée était de publier l’ouvrage simultanément en français et en anglais.

Partant de cette idée, je ne voulais pas faire un énième bouquin sur le Floyd racontant par le menu leur histoire mais créer une sorte de contrepoint à cette « déification » à laquelle peut se résumer l’expo – en grande partie sinon totalement contrôlée par les membres du groupe. L’angle choisi fut donc celui de la mise en perspective entre le processus de création d’une œuvre et les contraintes imposées par l’industrie musicale et, de fait, l’argent. Le titre est un double clin d’œil au couple Bertold Brecht/Kurt Weill et à David Bowie…

Quel est l’intérêt d’une version anglaise ?

Il est un fait et, pour faire simple : les anglophones semblent ne lire que très rarement les écrits des chercheurs francophones, surtout dans ce domaine dominé par les anglais et les américains que sont les Popular Music Studies. Les textes les plus souvent cités dans les bibliographies, quelle que soit la nationalité du chercheur, sont souvent les mêmes et en anglais. L’idée était donc d’atteindre un public anglophone, non seulement de chercheurs mais aussi un public plus large. Les EUD sont assez bien distribuées, notamment sur les sites de vente en ligne et, même si les objectifs de vente – car il faut bien en parler – restent modestes, le coup valait d’être tenté.

Je dois ici remercier mon ami Thomas Désarménien avec lequel nous avons passé un grand nombre d’heures à travailler certains points de traduction, notamment tous ceux faisant allusion à des bribes de textes ou des titres de chansons du Floyd.


Le titre, finalement, n’est-il pas un peu provocateur ?

Oui, totalement, mais c’est aussi l’esprit de cette collection dans laquelle le « chercheur » peut laisser pour un temps de côté les contraintes liées à des écrits scientifiques et livrer une « opinion » dès lors, bien entendu, qu’elle est solidement étayée. C’est ce que j’ai essayé de faire ici (tout comme dans le volume précédent). Il ne s’agit pas, comme le précise la quatrième de couverture de porter aux nues ou de vouer aux gémonies ce groupe qui, quoiqu’il en soit, marque l’histoire de la musique au sens large, mais de comprendre une partie des mécanismes de création dans un univers (la production de masse) soumis aux lois de marché de l’industrie musicale (qui, soit dit en passant, n’est pas infaillible non plus). La difficulté, avec ce type de musique, est de sortir de ce que Christophe Den Tandt appelle le fan-expert pour se concentrer sur un regard qui reste « académique » : c’est-à-dire faire appel à une méthodologie cohérente [voir Introduction à l'étude interdisciplinaire de la culture et de la musique populaires de Christophe Den Tandt]. Si le chercheur en ce domaine particulier (mais qui touche aussi, Den Tandt le rappelle, la littérature ou le théâtre) est parfois un fan-expert, son regard porté sur l’œuvre ne doit pas être biaisé ou faussé par un rapport affectif trop important sur son sujet – même « s’il se révèle impossible de séparer radicalement les regards du fan et du chercheur académique, » on peut, en s’auto appliquant quelques règles, parvenir à atteindre cet objectif. J’aime la musique des Pink Floyd, je l’écoute depuis près de quarante ans, mais si mon regard de chercheur se doit d’être distancié, je ne peux malgré tout faire totalement abstraction du plaisir – de fan – que je ressens au contact de cette musique. L’avantage de cette collection « Essais » est qu’elle laisse paradoxalement peut-être une place au fan-expert pour exprimer un point de vue que je ne me suis pas privé d’émettre.

 

Signalons aussi…

 

 

 

Dans le focus de La lettre du CGC - n° 25, Philippe Gonin nous présentait A Floyd Chamber Concerto.
Le concerto, enregistré par l'ensemble instrumental conservatoire de Dunkerque, sous la direction de Régis Kerckhove, est désormais en écoute :

 

 

 


La lettre du Centre Georges Chevrier - n° 56 - juin/juillet 2017
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