Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin" UMR 7366 CNRS-uB |
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Territoires contemporains | |
L’Internationale communiste 1919-1943 : approches transnationales | ||||||||||||
Le Komintern et les femmes communistes, 1921-1926 | ||||||||||||
Darya Dyakonova | Résumé | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Annexes | Notes | Références | Outils | |||||||||||
RÉSUMÉ
Le mouvement des femmes communistes a marqué une avancée historique en ce qui concerne l’interaction entre la libération des femmes et la révolution. Ces femmes se battirent pour un certain nombre de mesures spécifiques qui ne concernaient que les femmes. Elles reconnurent que la radicalisation chez les femmes était présente dans toutes les couches sociales et coopérèrent donc avec des courants féministes sur des questions telles que le suffrage universel et les droits reproductifs. Les femmes communistes se rendirent vite compte que l’émancipation n’était pas une tâche facile ; les difficultés étaient liées à la fois au scepticisme du Komintern par rapport à l’autonomie du mouvement et à la déradicalisation des politiques soviétiques envers les femmes. Le déclin du Mouvement communiste des femmes tint également à la résistance des hommes communistes à l’activisme féminin au sein des partis communistes. |
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MOTS-CLÉS
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SOMMAIRE
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TEXTE | ||||||||||||
Le 30 juillet [1920] au soir, des colonnes de travailleuses portant des foulards rouges et tenant des banderoles se dirigent vers le Théâtre Bolchoï depuis les quartiers éloignés et les faubourgs de Moscou. On peut lire sur les bannières : « Par la dictature du prolétariat dans tous les pays à l’émancipation des femmes. » Un chœur de voix de femmes qui chantent l’Internationale se fait entendre dans les rues de Moscou. Les femmes prolétariennes de Moscou marchent joyeusement pour célébrer leur grande fête – l’ouverture de la Première conférence internationale des femmes communistes au Théâtre Bolchoï. Les déléguées étrangères s’y joignent également. [1] |
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C’est ainsi que les femmes révolutionnaires décrivirent l’ouverture de leur première conférence tenue à Moscou en juillet 1920. Vingt-et-une femmes représentant dix-neuf pays se réunirent alors pour discuter des questions relatives aux femmes dans le cadre du deuxième Congrès de la IIIe Internationale communiste (ou Komintern). Le Komintern avait été fondé juste un an plus tôt, en 1919, sur l’initiative de Vladimir Lénine pour regrouper les marxistes révolutionnaires de différents pays. L’émancipation des femmes a longtemps été un point important du programme socialiste. Le Komintern visait l’égalité totale des hommes et des femmes légalement et dans la pratique ; l’intégration des femmes dans la vie politique ; l’éducation et les soins médicaux gratuits pour les femmes ; des mesures sociales afin d’alléger le fardeau des tâches ménagères et de l’éducation des enfants. Il entendait également éliminer la pratique des « doubles standards » pour les hommes et les femmes. I. Communisme vs. féminisme, le communisme et le féminisme, ou le féminisme communiste ? Bien que les études sur les femmes communistes restent rares, de nombreuses universitaires occidentales ont critiqué les politiques communistes, et surtout soviétiques, envers les femmes. On a souligné surtout que ces politiques, formulées au début comme un projet radical d’émancipation, en pratique n’ont pas eu de conséquences positives pour les femmes. Les féministes libérales de l’époque de la Guerre froide et certains commentateurs plus récents ont souligné qu’après la Seconde Guerre mondiale les mouvements féministes dans les pays socialistes et dans les organisations internationales des femmes (telles que la Fédération démocratique internationale des femmes et son affilié américain, The Congress of American Women) ont mobilisé leurs membres principalement pour servir les objectifs des partis communistes plutôt que de mobiliser les partis pour servir les femmes. En revanche, les mêmes chercheur·es soulignaient l’autonomie et la neutralité politique supposément présentes dans les organisations féministes occidentales non-socialistes [2]. Les féministes socialistes ont à leur tour souligné les lacunes importantes sur la question de la libération des femmes dans la théorie marxiste classique : principalement son incapacité à intégrer la centralité de la division sexuelle du travail dans tous les domaines et le manque d’intérêt pour les questions de sexualité et de reproduction ou encore de la violence envers les femmes [3]. De nouvelles recherches ont récemment nuancé et modifié ces interprétations. Elles ont critiqué le renforcement (après 1989) du paradigme triomphaliste de la Guerre froide [4]. Ces nouvelles contributions ont démontré que les féministes libérales sous-estimaient à quel point le programme d’émancipation des femmes était un élément fondamental du programme communiste de modernisation rapide [5]. Elles ont aussi soutenu que les femmes communistes travaillant dans les organisations d’État alignaient stratégiquement leurs programmes sur les objectifs plus larges du Parti communiste, jugeant cette politique plus efficace que d’utiliser les méthodes des féministes bourgeoises [6]. Ces recherches ont démontré en outre à quel point le programme d’émancipation des femmes était un élément fondamental du programme communiste et que les questions de la division du travail et de la sexualité n’étaient pas absentes de la réflexion des femmes communistes. J’adopte cette dernière perspective pour étudier les premiers jours du Mouvement communiste des femmes (MCF) [7] dont l’histoire n’est pas encore écrite [8]. Je vais essayer de démontrer que le programme communiste a placé la question des femmes au centre même du projet socialiste. En mettant de côté la politique soviétique envers les femmes je vais me concentrer sur le mouvement international. J’aborderai trois points en particulier : premièrement, les idées du mouvement sur l’émancipation des femmes (y compris la question de la division sexuelle du travail et des droits reproductifs) ; deuxièmement, les relations avec les mouvements des femmes non-communistes ; et troisièmement, la relation problématique avec les hommes dans les partis communistes. II. La Première conférence des femmes communistes : programme d’émancipation des femmes Les femmes communistes étaient dès la fondation du Komintern intégrées dans les partis communistes. Lors de leur première conférence, ces femmes décidèrent cependant de créer au sein des partis des sections d’agitation et de propagande spécifiques pour les femmes (auxquelles les hommes pouvaient appartenir aussi). Ces sections devaient coordonner le travail des comités féminins locaux. Vers 1922 en effet, presque tous les partis communistes européens mirent en place cette sorte de structures. Au sein du Komintern, un Secrétariat international des femmes (SIF) associé au Comité exécutif du Komintern fut créé. Une membre de ce secrétariat était également membre de l’exécutif du Komintern. Dès le début, le Secrétariat encouragea l’échange d’expériences et d’informations entre les différents pays. Cela devait se faire au cours des congrès annuels des femmes communistes mais surtout à l’aide de la correspondance et la publication d’un magazine mensuel international (parallèlement aux publications nationales et locales). Ce magazine intitulé Kommunistische Fraueninternationale (Internationale communiste des femmes) fut publié jusqu’en 1926. Dans la pratique, toutefois, les liens internationaux et l’échange d’information et d’expérience se développèrent lentement. En 1921, lors de la deuxième conférence des femmes communistes, la célèbre activiste communiste allemande Clara Zetkin souligna que les liens internationaux étaient faibles en raison de la désorganisation des chemins de fer en Europe, de la difficulté de maintenir des liens personnels et d’un climat politique hostile [9]. La première conférence des femmes communistes élabora les « Thèses pour le mouvement communiste des femmes ». Ces « Thèses » insistaient sur le fait que « l’égalité sociale complète avec les hommes dans la réalité et pas seulement sur les pages passives des livres de loi devait être réalisée par l’abolition de la propriété privée et l’intégration de l’activité des femmes dans la production sociale », en liant ainsi la libération des femmes et la lutte anticapitaliste [10]. Ces « Thèses » définissaient également les tâches plus spécifiques du Mouvement communiste des femmes, en fonction des régions (ou pays) où le travail devait être effectué : dans les pays socialistes, capitalistes ou précapitalistes. L’un des points importants était la transformation du travail domestique en une industrie sociale. Alexandra Kollontai, grande militante russe pour les droits des femmes, écrivait à ce propos en 1920 : « Le ménage individuel disparaît. Il cède la place dans notre société au ménage collectif. Au lieu que la travailleuse nettoie son propre appartement, la société communiste pourrait en charger les hommes et les femmes dont c’est le métier. » [11] L’idée n’était pas très neuve, elle avait déjà été exprimée par Friedrich Engels en 1884 dans son Origine de la famille. Le socialiste allemand August Bebel l’a popularisée plus tard dans son livre influent La femme et le socialisme, qui prônait des objectifs radicaux englobant le renversement du patriarcat dans la sphère domestique. C’était pourtant la première fois que la question du travail domestique et de la division du travail apparaissait comme un point crucial d’un programme socialiste pour la libération des femmes. Dans l’État soviétique naissant, les tâches ménagères étaient reconnues comme les principaux moyens de subordination des femmes et l’idée de créer des institutions publiques offrant différents types de services (garde d’enfants, cuisines publiques, cantines et salles à manger, buanderies communales et installations de nettoyage, centres de réparation de vêtements) semblait être prise au sérieux. Les « Thèses » suggéraient de s’efforcer d’établir de telles institutions au bénéfice des femmes des pays capitalistes et précapitalistes. De cette manière, le programme communiste plaça la question des femmes au centre même du projet socialiste en soulignant que leur émancipation n’était pas seulement la conséquence mais le but même de la transformation socialiste [12]. III. Les femmes communistes et les féministes bourgeoises Les femmes communistes soulignaient leur identité de classe en termes assez fermes : « les revendications du mouvement des femmes bourgeoises se sont révélées incapables d’assurer les pleins droits pour l’ensemble des femmes », parce qu’elles visaient simplement à « réformer l’ordre capitaliste au profit des épouses et des filles des classes possédantes » en ignorant ainsi les intérêts des femmes prolétariennes [13]. Cela ne signifiait pas pour autant que les femmes communistes étaient opposées à toute coopération avec des mouvements féministes non-prolétariens. L’une des revendications que les femmes communistes partageaient avec les féministes bourgeoises était le suffrage universel. Les communistes toutefois insistaient non seulement sur l’égalité des hommes et des femmes dans l’exercice du droit de vote, mais également sur l’abolition du suffrage censitaire qui écartait de la vie politique les hommes des classes sociales inférieures autant que les femmes. Alexandra Kollontai soulignait que « pour les féministes, la réalisation de l’égalité des droits avec les hommes dans le monde capitaliste contemporain était une fin en soi » ; tandis que pour les femmes prolétariennes, « l’égalité des droits n’est qu’un moyen à utiliser dans la lutte continue contre l’asservissement économique de la classe ouvrière. » [14] Les femmes communistes étaient également prêtes à coopérer avec les féministes bourgeoises dans d’autres domaines. Elles reconnurent ouvertement l’importance de nombreuses demandes et réalisations des féministes. Les féministes non-communistes elles-mêmes exprimèrent au début des années 1920 un intérêt et un soutien aux idées communistes relatives à l’émancipation des femmes. En Europe, c’était le cas de l’Union révolutionnaire des femmes de Hollande et d’un certain nombre de journaux féministes en France [15]. Au Canada, les femmes communistes étaient également actives dans les sections féminines des organisations basées sur des principes ethniques et culturels. Ces organisations incluaient des membres aux allégeances politiques de gauche diverses et soutenaient souvent des revendications des femmes qui n’étaient pas toujours considérées comme importantes par la direction du Parti Communiste du Canada [16]. En Allemagne, la Ligue rouge des femmes et des filles (Roter Frau Madchen Bund) réussit à recruter des femmes réticentes à adhérer au parti communiste en politisant les problèmes auxquels les femmes de la classe ouvrière étaient confrontées dans leur vie quotidienne, comme les salaires des femmes, l’aide sociale et le droit à l’avortement [17]. IV. Droits reproductifs et question de la maternité Les « Thèses » de la Première conférence soulignaient que ce n’était que « l’idéologie petite-bourgeoise et réactionnaire qui considérait que la seule véritable vocation naturelle des femmes était de donner naissance et prendre soin des enfants. » [18] Les femmes communistes voulaient donc manifestement se dissocier de cette vision traditionnelle du rôle de la femme dans la procréation et l’éducation des enfants. La question de la maternité fut théoriquement développée par Alexandra Kollontai qui publia en 1916 un ouvrage de 600 pages intitulé Société et Maternité. Kollontai voyait la maternité comme une responsabilité sociale, partagée entre la famille et la société. Son idée était que non seulement la mère (ou la famille) mais aussi les institutions socialisées devaient prendre soin du bien-être physique et psychologique des enfants [19]. Les femmes communistes, suivant l’exemple soviétique où un décret de 1918 visait à protéger légalement la maternité et établissait la garde d’enfants assurée par l’État, intégrèrent cette idée dans les « Thèses » de la Première conférence : « l’État doit faciliter une combinaison harmonieuse de maternité et d’emploi en créant des institutions sociales pour protéger la maternité, les enfants et les jeunes. » [20] En 1920, le gouvernement soviétique légalisa l’avortement. Le Secrétariat international des femmes fit ensuite circuler la littérature soviétique sur l’avortement parmi les sections de femmes communistes en dehors de Russie. La position des femmes communistes était pourtant assez complexe. Étant donné le contexte démographique de l’après-Première Guerre mondiale et le fait que le contrôle des naissances était souvent promu par les avocats de l’eugénisme, les femmes communistes résistèrent aux tentatives de stigmatisation des femmes ayant « trop » ou « trop peu » d’enfants. Elles considéraient l’avortement comme nécessaire aussi longtemps que la société serait incapable de garantir les moyens matériels nécessaires pour une enfance prospère et heureuse pour tous [21]. Elles protestèrent contre les lois anti-avortement, en France et (même) en Italie au début des années 1920 [22]. En Allemagne, les femmes communistes menèrent une campagne contre la législation anti-avortement sous le slogan, très progressiste pour l’époque, « Votre corps vous appartient » [23]. Au Danemark, elles créèrent le Bureau d’information, qui mit à disposition des femmes travailleuses des informations sur le contrôle des naissances. Au Canada, les femmes communistes exigèrent la création de « Cliniques des Mères », qui fourniraient des informations sur la contraception et les contraceptifs gratuits. Ces initiatives avaient souvent un caractère local et populaire et n’étaient pas coordonnées par le SIF [24]. V. Les femmes, le Komintern et les hommes des partis communistes Les recherches sur les femmes communistes de l’entre-deux-guerres, même si elles sont peu nombreuses, ont mis l’accent sur la déradicalisation du mouvement communiste des femmes à partir du milieu des années 1920. On a affirmé qu’à la fin de la décennie le but du mouvement n’était plus la promotion de la libération des femmes, mais leur mobilisation pour la promotion du Komintern. Le mouvement, selon ce récit, s’est donc affaibli à mesure qu’il a été rétrogradé d’un secrétariat à un département de l’exécutif du Komintern. L’affaiblissement et la déradicalisation subséquente ont été attribués à la montée du système stalinien en URSS, à la domination du PC soviétique au sein du mouvement communiste international ainsi qu’à la centralisation croissante de l’appareil du Komintern [25]. Ces interprétations, cependant, négligent un autre facteur important du déclin du mouvement communiste des femmes : le machisme et la résistance des hommes communistes – des dirigeants aussi bien que des cadres intermédiaires – à l’activisme des femmes au sein des partis communistes. Le chauvinisme masculin fut en effet l’une des questions discutées par les femmes communistes lors de leur Première conférence à Moscou. Selon une déléguée française, dans les mouvements socialistes d’avant-guerre, les travailleurs masculins « manifestaient non seulement de l’indifférence, mais même de l’hostilité à l’égard de l’organisation des travailleuses ». La déléguée danoise déclara ensuite que « les hommes ne voulaient pas engager leur camarades femmes dans la vie sociale et politique, mais préféraient les voir comme gardiennes du foyer. » [26] Des attitudes similaires – le chauvinisme dans la vie privée – n’étaient pas rares au sein du mouvement communiste allemand. Clara Zetkin était alors bien au courant de telles tendances. En 1921, elle souligna que « dans la plupart des pays, les femmes agissaient sans le soutien du Parti communiste, voire dans certains cas contre son opposition ouverte ou cachée. » [27] Les hommes qui étaient invités à participer aux comités des femmes des partis communistes avaient tendance à esquiver ce travail. Les réalisations des femmes communistes pourtant différaient d’un pays à l’autre. Le nombre de femmes semblaient augmenter considérablement au sein des partis communistes d’Europe du Nord et de l’Est, tandis qu’en France, en Espagne et en Italie, les femmes continuaient à représenter moins de 10 % des membres [28]. Cependant, même cette proportion était élevée, comparée à la pénétration des femmes dans la politique bourgeoise à cette époque, ou à la présence des femmes dans les partis socialistes avant 1919, dont certains ne comptaient aucune militante. VI. Conclusion En résumé, le MCF a marqué une avancée historique, en particulier en ce qui concerne l’interaction entre la libération des femmes et la révolution. Certaines femmes devinrent elles-mêmes des actrices politiques prééminentes et, à ce titre, avec les hommes, contribuèrent à la lutte révolutionnaire. En outre, le réseau international des femmes communistes se battit également pour un certain nombre de mesures spécifiques qui ne concernaient que les femmes. Ces mesures étaient en fait elles-mêmes un but (plutôt qu’une conséquence) de la transformation socialiste. Alexandra Kollontai l’a formulé ainsi : « La question de la femme doit être la question de l’homme, la question de toute l’humanité, de toute la Troisième Internationale » [29]. Bien que le MCF ait fermement lié la lutte pour la libération des femmes à l’émancipation de la classe ouvrière, il admit que la radicalisation des femmes était présente dans toutes les couches sociales. Les femmes communistes coopérèrent donc avec des courants féministes sur des questions telles que le suffrage universel et les droits reproductifs. Ainsi, en pratique et en particulier au niveau local, l’application de la politique d’émancipation conçue par les femmes communistes ne visait pas exclusivement les femmes prolétariennes. Il s’agissait d’attirer un public plus large en s’attaquant à l’ordre du jour spécifique des femmes et, par la suite, de les gagner à la cause révolutionnaire. Les femmes communistes se rendirent vite compte que l’émancipation n’était pas une tâche facile. Les difficultés étaient liées à la fois au scepticisme du Komintern par rapport à l’autonomie des femmes communistes et à la déradicalisation des politiques soviétiques envers les femmes. Le déclin du MCF résulta, entre autres facteurs, de la résistance des hommes communistes à tous les niveaux vis-à-vis de l’activisme féminin au sein des partis communistes. Malgré le discours officiel égalitaire du Komintern, le MCF fit face à des pressions machistes tendant à exclure les femmes du mouvement révolutionnaire. |
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AUTEUR Darya Dyakonova Doctoresse en histoire de l’université de Montréal Chercheuse invitée au département d’histoire internationale, Institut de hautes études internationales et du développement, Genève |
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ANNEXES |
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NOTES
[1]
Alexandra Kollontai et Polina Vinogradskaia (éd.), Otchet o pervoi mezhdunarodnoi konferentsii kommunistok [Report on the First International Conference of Communist Women], Moskva, Gosizdatelstvo, 1921, p. 19-20.
[2]
Voir par exemple : Barbara Wolfe Jancar, Women under Communism, Baltimore, John Hopkins University
Press, 1978 ; Nanette Funk et Magda Mueller,
Gender Politics and Post-Communism: Reflections from Eastern
Europe and the Former Soviet Union, New York, Routledge, 1993 ; Ulf Brunnbauer,
« “The Most Natural Function of Women”.
Ambiguous Party Policies and Female Experiences in Socialist
Bulgaria », dans Shana Penn et Jill Massino,
Gender Politics and Everyday Life in State Socialist Eastern
and Central Europe, New York, Palgrave Macmillan, 2009 ; Barbara Einhorn,
« Mass Dictatorship and Gender Politics: Is the Outcome
Predictable? », dans Jie-Hyun Lim et Karen Petrone
(dir.), Gender Politics and Mass Dictatorship, Palgrave
MacMillan, 2010, p. 34-62 ; Damani Partridge,
Hypersexuality and Headscarves: Race, Sex and Citizenship in
the New Germany, Bloomington, Indiana University Press, 2010.
[3]
Sonia Kruks, Rayna Rapp et Marilyn Young (dir.), Promissory Notes: Women in the Transition to Socialism, New
York, Monthly Review Press, 1989, Introduction, 8. Pour des critiques féministes marxistes, voir également Lise Vogel, Marxism and the Oppression of Women: toward a Unitary Theory, Leiden, Brill, 2013 ; Sharon Smith, Women and Socialism: Essays on Women’s Liberation,
Chicago, Haymarket, 2012.
[4]
Voir en particulier : Wang Zheng, « “State
Feminism”? Gender and Socialist State Formation in Maoist
China », Feminist Studies, vol. 31,
n° 3, 2005, p. 519-551 ; « Creating a
Socialist Feminist Cultural Front: Women of China
(1949-1966) », The China Quarterly,
n° 204, 2010, p. 827-849 ; Raluca Maria Popa,
« Translating Equality between Women and Men across Cold
War Divides: Women Activists from Hungary and Romania and the
Creation of International Women’s Year », dans
Shana Penn et Jill Massino (dir.), op. cit.,
p. 59-74 ; Chiari Bonfiglioli,
Revolutionary Networks: Women’ Political and Social
Activism in Cold War Italy and Yugoslavia (1945-1957), université d’Utrecht, thèse d’histoire,
2012 ; Kristen Ghodsee, « Rethinking State Socialist
Mass Women’s Organizations The Committee of the Bulgarian
Women’s Movement and the United Nations Decade for Women,
1975-1985 », Journal of Women’s History, vol. 24, n° 4, 2012, p. 49-73 ; Kristen
Ghodsee, « Research Note: The historiographical
challenges of exploring Second World-Third World alliances in the
international women’s movement », Global Social Policy, 14, 2, 2014, p. 244-264 ;
Francisca de Haan, « Continuing Cold War Paradigms in the
Western Historiography of Transnational Women’s
Organisations: The Case of the Women’s International
Democratic Federation (WIDF) », Women’s History Review, vol. 19, n° 4,
2010, p. 547-573 ; Francisca de Haan, « The
Women’s International Democratic Federation (WIDF): History,
Main Agenda, and Contributions, 1945-1991 », dans Thomas
Dublin et Kathryn Kish Sklar (dir.), Women and Social Movements
(WASI) Online Archive, (essay online from October 2012). En
ligne :
http://alexanderstreet.com/products/women-and-social-movements-international, page consultée le 15 avril 2018.
[5]
Kristen Ghodsee, « State-Socialist Women’s
Organization in Cold War Perspective. Revisiting the work of Maxine
Molyneux », Aspasia, vol. 10, 2016,
p. 111-121, p. 115.
[6]
Francisca de Haan, « Continuing Cold War
Paradigms », p. 547-573, p. 564-565.
[7]
La dénomination « Mouvement communiste des
femmes » n’était pas officielle et
apparaît rarement dans les documents du Komintern. Cependant
les femmes communistes elles-mêmes utilisaient habituellement
cette expression pour décrire leur mouvement. Voir par exemple
John Riddell (dir.),
Toward the United Front: Proceedings of the Fourth Congress of
the Communist International, 1922, Leiden, Brill, 2012, p. 838.
[8]
Pour la bibliographie sur l’histoire du MCF, voir :
Elizabeth Waters, « In the Shadow of the Comintern: the
Communist Women’s Movement, 1920-1943 », dans Sonia
Kruks, Rayna Rapp et Marillyn Blatt Young (dir.), Promissory Notes: Women in the Transition to Socialism, New
York, Monthly Review Press, 1989, p. 29-56 ; Aurelia
Camparini, Questione feminili et Terza Internazionale, Bari,
De Donato, 1978 ; Bernhard H. Bayerlein, « Zwischen
Internationale und Gulag. Praliminarien zur Geschichte der
internationalen kommunistischen Frauenbewegung
(1919-1945) », International Newsletter of Communist Studies Online,
vol. 12, n° 19, 2006, p. 27-47 ; Brigitte
Studer, « Communisme et féminisme », Clio. Femmes, Genre, Histoire, n° 41, 2015,
p. 139-152 ; Brigitte Studer, The Transnational World of the Cominternians, London,
Palgrave Macmillan, 2015 ; Helmut Gruber et Pamela Graves, Women and Socialism/ Socialism and Women, New York-Oxford,
Berghahn Books, 1998, p. 321-347.
[9]
« Second International Conference of Communist
Women », juin, 9e session, Moscow, 11
juin 1921.
[10]
John Riddell (dir.),
Workers of the world and oppressed peoples, unite!: proceedings
and documents of the Second Congress, 1920, vol. 2, New York, Pathfinder, 1991, p. 977-978.
[11]
Alexandra Kollontai, « Communism and the Family
(1920) », dans Alix Holt (éd.), Selected Writings of Alexandra Kollontai, London, Allison
& Busy, 1977. En ligne :
https://www.marxists.org/archive/kollonta/1920/communism-family.htm, page consultée le 23 août 2018.
[12]
Elizabeth Waters, art. cit., p. 32-33.
[13]
John Riddell, op. cit., p. 978.
[14]
Alexandra Kollontai, « Introduction to The Social Basis of the Women’s Question », dans Alexandra Kollontai, Selected articles and speeches, Moskva, Progress
Publishers, 1984.
[15]
« Second International Conference of Communist
Women », juin, 9e session, Moscow, 11
juin 1921; Elizabeth Waters, art. cit., p. 36.
[16]
Margarett Hobbs et Joanne Sangster (éd.), The Woman Worker, 1926-1929, St. John’s, Newfoundland,
Canadian Committee on Labour History, 1999.
[17]
« Second International Conference of Communist
Women », compte rendu de la session de juin, Moscow, 15 juin 1921 ; Sara Ann Sewell,
« Bolshevizing Communist Women: the Red Women and
Girls’ League in Weimar Germany », Central European History, vol. 45, n° 2,
2012, p. 268-269.
[18]
John Riddell, Workers of the world, op. cit.,
p. 983.
[19]
Alexandra Kollontai, « “Vvedenie” in
“Obshchestvo i materinstvo” », dans
Marksistskii Feminizm. Kollektsiia tekstov A. M. Kollontai
(Féminisme marxiste. Recueil des textes), Tver,
Feminist Press-Rossia, 2003, p. 130-132, cité par Anna
Krylova, « Bolshevik Feminism and Gender Agendas of
Communism », dans Silvio Pons, Stephen A. Smith (dir.), The Cambridge History of Communism,
vol. 1: World Revolution and Socialism in One Country,
1917-1941, Cambridge, Cambridge University Press, 2017,
p. 431.
[20]
John Riddell, Workers of the World, op. cit.,
p. 989.
[21]
Elizabeth Waters, « In the Shadow of the
Comintern », art. cit., p. 41 ; John Riddell,
« The Communist Women’s Movement
(1921-1926) »,
https://johnriddell.wordpress.com, 12 juin 2011. En ligne :
https://johnriddell.wordpress.com/2011/06/12/the-communist-womens-movement-1921-26, page consultée le 20 avril 2018.
[22]
John Riddell, « The Communist Women’s
Movement », art. cit. Pour la lutte des femmes
communistes en faveur de l’avortement et contre les lois
anti-avortement en Europe voir : Christine Bard et Jean-Louis
Robert, « The French Communist Party and Women,
1920-1939 », dans Helmut Gruber et Pamela Graves (dir.), Women and Socialism/ Socialism and Women,
p. 321-347 ; Mary Gibson, « Women and the Left
in the Shadow of Fascism in Interwar Italy », dans Idem, p. 381-411.
[23]
Atina Grossmann, « German Communism and New Women:
Dilemmas and Contradictions », dans Helmut Gruber et
Pamela Graves (dir.), op. cit.,
p. 135-170 ; Sara Ann Sewell, art. cit.
[24]
Margarett Hobbs et Joanne Sangster (éd.), op. cit.,
p. 217-222 ; Elizabeth Waters, art. cit.,
p. 41-42.
[25]
Voir par exemple Elizabeth Waters, Brigitte Studer ou
Bernhard H. Bayerlein.
[26]
Alexandra Kollontai et Polina Vinogradskaia (éd.), Otchet o pervoi mezhdunarodnoi konferentsii kommunistok [Report on the First International Conference of Communist Women], Moskva, Gosizdatelstvo, 1921, p. 61.
[27]
John Riddell,
To the Masses: Proceedings of the Third Congress of the
Communist International, 1921, Leiden, Boston, Mass, Brill, 2015, p. 779.
[28]
En URSS, le Parti communiste de l’Union soviétique
comprenait 14 % de femmes ; en Allemagne,
16,5 % ; Tchécoslovaquie, 24 % en 1929 ;
en France, 3 % à 4 % en 1924 ; en Italie,
1 % à 2 % entre1921 et 1925. Voir Sara Ann Sewell,
« Bolshevizing Communist Women », art. cit.,
p. 280 ; Brigitte Studer, The Transnational World of the Cominternians, op. cit., p. 48 ; Christine Bard et Jean-Louis Robert,
« The French Communist Party and Women,
1920-1939 », art. cit., p. 323 ; Mary Gibson,
« Women and the Left in the Shadow of Fascism in Interwar
Italy », art. cit., p. 398.
[29]
Rossiislii Gosudarstvennyi arkhiv sotsialno-politicheskoi istorii
(RGASPI), f. 507, op. 1, d. 7, l. 225.
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RÉFÉRENCES Pour citer cet article : Darya Dyakonova, « Le Komintern et les femmes communistes, 1921-1926 », dans L’Internationale communiste 1919-1943. Approches transnationales, Serge Wolikow [dir.], Territoires contemporains - nouvelle série [en ligne], 17 décembre 2020, n° 13, disponible sur : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC.html. Auteur : Darya Dyakonova. Droits : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC/credits_contacts.html ISSN : 1961-9944 |
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