Le Péril bleu. Images psychopathologiques de la femme artiste au passage du siècle

 

Depuis l’article fondateur de Linda Nochlin « Pourquoi n’y-a-t-il pas eu de grands artistes femmes ? » paru dans ARTnews en 1971 [1], suivi des essais de Germaine Greer [2] et de Griselda Pollock [3], jusqu’à ceux plus récents en France de Catherine Gonnard et Élisabeth Lebovici [4] et de Giovanna Zapperi et Anne Creissels [5], le discours autour de l’exclusion et de la marginalité des femmes dans l’histoire de l’art s’est progressivement développé. Au sein de cette histoire de l’art retravaillée par les études de genre, la période du passage du XIXe au XXe siècle a, en revanche, souvent été peu étudiée, voire négligée, alors qu’elle apparaît comme cruciale dans le trouble et l’ébranlement du clivage normatif « masculin créateur » / « féminin procréateur ». Les représentations contemporaines de la femme artiste jusque-là peu connues et analysées s’inscrivent dans ce contexte et révèlent un puissant discours sur le partage des genres.

Le choix de la terminologie de « passage du siècle », préféré ici à l’expression plus communément admise de « tournant du siècle », qui implique davantage l’idée d’un changement brutal, permet ainsi de mettre en lumière et d’interroger d’autres enjeux propres au « passage » comme celui du statut féminin qui évolue de l’amatrice à la professionnelle. La seconde moitié du XIXe siècle voit en effet en France la résurgence des bas-bleus qui désignent des femmes qui, par vanité intellectuelle, tentent de pénétrer les sphères de l’érudition réservées aux hommes. Nés à Londres au XVIIIe siècle, ces Bluestockings tiendraient leur origine du genre masculin, et plus précisément de Benjamin Stillingfleet, membre de l’entourage d’Elizabeth Montagu, qui avait pour habitude de porter des bas bleus [6]. Par extension, ce terme finit par s’associer exclusivement au féminin désignant, selon Lord Byron, les « malheureuses créatures féminines qui, renonçant à la beauté, à la grâce, à la jeunesse, au bonheur du mariage, aux chastes prévoyances de la maternité, à tout ce qui est le foyer domestique, la famille, le repos au-dedans, la considération au-dehors, entreprennent de vivre à la force de leur esprit » [7]. Si le bas-bleuisme concerne dans un premier temps la littérature où il fut très bien remarqué et analysé [8], il tend progressivement à se déplacer dans le champ de l’art où il demeure aujourd’hui méconnu. Pourtant, en 1841, Frédéric Soulié écrit sur le « bas-bleu artistique » [9] c’est-à-dire sur la femme critique d’art, et précipite la complète et définitive invasion du bas-bleuisme dans le champ de la créativité artistique. Dans sa lignée, Jules Barbey d’Aurevilly consacre en 1868 un ouvrage aux bas-bleus où il élargit sa diatribe aux femmes artistes [10] et Octave Uzanne rapproche, en 1894, dans un des chapitres de La Femme à Paris, les femmes artistes des bas-bleus [11].

À partir de cette figure méconnue de l’histoire de l’art [12] et dans ce climat extrêmement hostile à une émancipation du féminin, nous exhumerons et analyserons les différentes images de la femme artiste au passage du siècle, tant au travers des discours scientifiques que de la presse satirique et de la littérature populaire qui, en cristallisant les peurs, proposent le plus souvent une représentation comme étant contre-nature à l’ordre établi des genres. De la figure biologisante sans cesse ramenée à sa condition de procréation à l’hypervirile qui s’est détournée de sa vocation naturelle en se risquant à imiter les hommes, nous nuancerons ces images relevant d’une prédominance misogyne en nous intéressant également à celle plus marginale de l’artiste émancipée, de la « Pygmalionne » qui, en inversant les rapports de pouvoir entre l’artiste et son modèle, témoigne d’une crise de la virilité déjà bien amorcée.

 

L’artiste procréatrice

La mère : l’artiste ramenée à sa vocation maternelle

« Femme : femelle de l’homme, être humain organisé pour concevoir et mettre au monde des enfants. » [13]

Issue du Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, cette définition emblématique du clivage fin-de-siècle, a fait l’objet d’une déconstruction par les féministes telles Judith Butler qui, après Simone de Beauvoir et Monique Wittig, précise dans Trouble dans le genre que « réduire les femmes au sexe […] revient à assimiler la catégorie “femme” aux traits apparemment sexualisés de leur corps et c’est donc refuser aux femmes la liberté et l’autonomie dont les hommes sont censés jouir » [14]. Ces théories féministes se révèlent indispensables à la relecture d’un passage du siècle dont la misogynie massive avait atteint son apogée, à l’appui des nombreux traités médicaux de psychopathologie dont l’objectif consistait précisément à fournir l’argument d’autorité scientifique de l’infériorité biologique de la femme. On pense non seulement aux analyses de Cesare Lombroso et Guglielmo Ferrero pour qui l’intelligence féminine est caractérisée par le misonéisme, c’est-à-dire le refus panique d’aspirer à la nouveauté [15], mais également à celles d’un de leurs héritiers directs, l’allemand Max Nordau, plus connu pour son livre emblématique sur la décadence fin-de-siècle Dégénérescence que pour ses travaux scientifiques. En 1897, il publie pourtant Psycho-physiologie du génie et du talent [16] dans lequel il oppose deux lois, celle de la nouveauté et de l’avant-gardisme portée par le masculin à celle de l’hérédité et du conservatisme propre au féminin. Le génie et le talent ne peuvent donc qu’être le fruit du sexe masculin, le seul capable de porter un vitalisme original et renouvelé :

« Chez les êtres vivants différenciés sexuellement, la force vitale et sa puissance formative semblent être moindres – ou du moins plus inertes, moins explosives, – chez la femelle que chez le mâle. […] la femelle conserve le type de l’espèce, tandis que les mâles s’en écartent individuellement, souvent d’une façon très considérable. » [17]

Ce clivage masculin créateur/féminin procréateur, fonctionnant sur le principe de la différence et de la complémentarité des genres où l’acceptation de l’un doit forcément engendrer l’exclusion de l’autre, rejoint en ce sens la déconstruction entreprise par Michelle Coquillat dans La Poétique du mâle où sont analysés les mécanismes, les stratégies et les automatismes d’une littérature phallocentrée conduisant à la construction d’images mythiques d’un féminin évincé de l’intelligence et de la création :

« Car c’est bien un mystère que l’impuissance culturelle de la femme à se libérer de ses liens. Un mystère que toute notre littérature nous assène, par une série de savantes analogies, et qui maintient la femme dans la glaise élémentaire dont l’homme s’est libéré. Il domine alors les éléments dont elle fait partie. Elle est une part du cosmos dont il déchiffre les secrets et dont sa conscience le distingue. Transcendance à droite. Contingence à gauche. Or c’est précisément l’aptitude à la création qui est la seule et unique justification mâle à la transcendance. C’est parce qu’elle ne crée pas – ou peu, ou rarement, ou mal – que la femme est impitoyablement rejetée dans la contingence. C’est donc là qu’est le mystère. Là qu’il va s’exprimer. » [18]

Loin de rester confinée dans les cercles médicaux, cette question d’une biologisation du féminin se trouve largement reprise et vulgarisée par les caricaturistes qui vont proposer une image de l’artiste incapable de prétendre à la fois à la création et à la procréation. Alors que Jeanniot montre la femme peintre comme un être qui, détournée de son rôle de mère, ne sait pas faire les enfants [19], Dangon représente, quant à lui, une jeune fille pré-pubère qui peut créer car elle n’est pas encore en état physiologique d’enfanter [20]. Comme une illustration de la puissance assimilatrice – et non créatrice – propre au féminin, le dessin issu de Frou-frou représente une femme artiste sous les traits d’une copiste et crée la confusion en jouant tacitement de la double signification du terme « reproduction », reproduction créatrice d’abord, par le biais du multiple propre à la copie, mais aussi et surtout reproduction sexuée, au travers de l’enfant – la ménine – représenté par la femme artiste et l’allusion explicite à la fécondité dans la légende (« - Mademoiselle, vous faites l’enfant mieux que Velasquez lui-même!.../ - Qu’en savez-vous ?... Nous n’avons jamais essayé ensemble ! ») [21]. Sur un mode plus satirique, la caricature intitulée « Pour le Salon » d’Avelot parue dans Le Rire, illustre une nouvelle fois ce renvoi de la femme à la mère [22]. Dans un décor plus proche de l’espace domestique (« salon ») que de l’espace professionnel (« Salon »), elle représente une artiste qui a bien des difficultés à reproduire l’image du lapin devant ses yeux. Entourée d’animaux, un lapin et une poule ainsi que d’un petit cupidon, clairement connotés autour de ces questions de fécondité, la femme artiste est renvoyée à l’animalité, rappelant par cette proximité symbolique avec la nature [23] que le rôle dévolu au féminin n’est pas dans la création, mais bien dans la propagation de l’espèce [24].

L’objet sexuel : l’artiste hypersexualisée

La thèse la plus normative dans ce sens est celle de l’autrichien Otto Weininger qui, dans Sexe et Caractère, affirme que « les organes sexuels sont du point de vue physique le centre de la femme, l’idée sexuelle est au centre de sa nature mentale – la femme est sexuelle seulement, l’homme est aussi sexuel – la femme est sexuelle de manière continue, l’homme ne l’est que par intermittence » [25]. Le renvoi systématique de la femme à la sexualité, déjà abondamment commenté [26], s’illustre également et de façon moins connue dans le champ de la caricature sous le prisme de la relation hiérarchique entre le maître et son élève, comme chez Jean Plumet qui propose, dans Le Rire en 1901, une image significative de la femme artiste aux épaules dénudées, placée sous le contrôle du regard lubrique de son maître masculin plus âgé [27]. Dans cette scène, l’homme domine la scène par son regard, signe de son pouvoir d’influence qui activera ou non le processus de reconnaissance de la femme artiste et qui ne prendra effet que par un passage obligé dans la chambre à coucher avant d’accéder au Salon [28]. Par l’entremise du geste et de la force, l’autorité masculine est également convoquée dans la caricature de L. Borgex parue dans Le Sourire en 1906 [29] où, imitant la pose du personnage masculin avec la main droite glissée sous le gilet représentée par la jeune élève, le maître masculin détourne de façon licencieuse ce geste synonyme d’un « comportement social conforme à la bienséance » [30]. Corroborant le Dictionnaire des idées reçues de Flaubert qui définit ironiquement la femme artiste comme ne pouvant être qu’une catin [31], ces représentations satiriques autour de la relation maître-élève se retrouvent également dans le champ littéraire, à l’instar de La Massière de Jules Lemaître, pièce de théâtre qui prend place dans un atelier d’artistes femmes, où Juliette, jeune artiste talentueuse, éveille les soupçons de ses consœurs au sujet d’une liaison qu’elle entretiendrait avec leur maître plus âgé Marèze [32].

L’écrasante domination de ces représentations collectées de la femme artiste réduite à sa sexualité laisse place à de multiples tentatives d’échapper à cette double subordination du maître masculin et de la procréation, pour aspirer à s’émanciper professionnellement. Bravant leur soi-disant « déterminisme biologique », ces artistes téméraires vont alors faire l’objet d’une puissante stigmatisation où se cristallisent les peurs de l’époque devant l’émancipation féminine.

 

L’artiste gynandre

La vieille fille : l’artiste détraquée

Le clivage masculin créateur/féminin procréateur se manifeste également dans tout un ensemble théorique autour de la mécanique des fluides corporels renforçant la dualité polaire entre système cérébral et système génital, à l’instar de l’écrivain suédois August Strindberg qui rend la menstruation coupable de l’infériorité intellectuelle des femmes, expliquant que ces saignées périodiques doivent forcément « atrophier le cerveau » [33]. Dès 1869, le médecin homéopathe Adrien Péladan, frère de Joséphin, fondateur fantasque de la Rose+Croix esthétique, propose une théorie de l’hypersécrétion des liquides séminal et vulvo-vaginal, dans laquelle il démontre notamment que seul le cerveau masculin peut accueillir la gestation intellectuelle, car pour la femme « une vie consacrée au travail cérébral est en opposition avec sa destination. C’est par l’utérus qu’elle doit créer » [34].

Pas à sa place, la femme qui se livre à une occupation intellectuelle surdéveloppe son cerveau et amoindrit par conséquent la vivacité de ses organes génitaux sur lesquels vont venir peser le soupçon de la frigidité comme de la stérilité. Dans son article consacré au célibat féminin intitulé « Le Troisième Sexe », Guglielmo Ferrero se base sur la société anglaise au travers des figures de la spinster et de la miss, qu’il relie à l’invasion des femmes dans les professions réservées jusqu’à présent aux hommes. Il explique que « la condition de la femme non mariée, la suppression de l’amour et de la fonction maternelle, altère et estropie sans doute la personnalité féminine de plusieurs côtés, car une femme qui n’est ni mère, ni épouse, est une femme incomplète » [35]. Si la solitude féminine – qu’elle soit choisie ou subie – est toujours à cette époque matière à la suspicion et à la moquerie [36], le célibat masculin reste, quant à lui, bien mieux accepté si ce n’est revendiqué, au travers notamment de la figure du dandy. Comme l’explique Michelle Perrot, la figure de la célibataire n’existe pas, « le substantif » étant « toujours employé au masculin » quand « au féminin, il devient adjectif : [l]e célibataire est toujours un mâle. Non mariée. La femme est fille ou “reste fille” : c’est-à-dire rien » [37].

La ménopausée : l’artiste virilisée

Appuyant cet argument, les médecins Charles Barbaud et Amédée Rouillard précisent que les femmes qui ont une activité sexuelle peu intense voire absente vont davantage être sujettes à une ménopause avancée. Voyant dans cet « âge critique, l’heure où sonnera le glas de la beauté » [38], ils poursuivent par une description de la transformation physique qui advient à la ménopause en s’appuyant sur Hippocrate :

« Elles se transforment, deviennent hirsutes et prennent l’aspect d’un homme. Hippocrate va peut-être plus loin, mais il est certain qu’à partir de l’âge critique, la femme se rapproche plus ou moins de l’homme. » [39]

Dans ce contexte, apparaît alors un nouveau dualisme où quand la femme prétend à produire de la beauté, elle doit forcément renoncer à la séduction. L’un des archétypes de cette féminité contrariée est bien celui de la ménopausée, proche de la figure inquiétante et fictive de la gynandre qui, selon Péladan, désigne « la femme prétendant à la mâleté, l’usurpatrice sexuelle : le féminin singeant le viril ! » [40]. De même, la romancière Rachilde, bien intégrée dans les milieux artistiques, témoigne des limites à penser le clivage manichéen des genres « féminin-féministe » / « masculin antiféministe », lorsqu’elle reconduit, dans Le Grand Saigneur, le topos misogyne [41] de la femme peintre désintéressée par la superficialité des mondanités et l’excès de coquetterie car avant tout happée par le résultat de son travail :

« Sans corset, une ceinture de dentelles défend mal ses seins, sous sa robe, dont la forme est un peu trop précisée par le corsage droit ; cependant, elle n’a pas la coquetterie de sembler le savoir ou la ruse d’en vouloir témoigner. Son corps, tassé sur son chevalet, penché ou collé au long du grand carton, épouse si exactement son labeur qu’il semble une machine remontée, tendue vers le résultat qu’elle en espère. » [42]

À côté de la littérature, le champ de la caricature reprend également ces théories physiologiques en développant, sur le ton de l’humour et de la satire, l’image de l’artiste ménopausée fusionnant avec celle de l’hommasse. Vieille, binoclarde et corpulente, le corps souvent engoncé dans des vêtements larges qui ne montre aucune chair ni formes superflues, sa représentation « antisexy » est quelquefois renforcée par un système d’échos avec son modèle mince et nu qui incarne, quant à lui, le cliché antagoniste d’une féminité fantasmatique et sexualisée, à l’instar d’Emmanuel Barcet qui, dans Le Sourire, confronte, par l’entremise du jeu de mots, le triste et âgé officier d’Académie au beau et sensuel modèle académique [43]. Mais c’est Tornié Esquius pour la revue Le Rire [44] qui propose sans doute l’une des caricatures les plus éloquentes à ce sujet, accompagnée de la légende suivante : « Il y a vingt-deux ans que je peins La Source… Hélas ! je suis toujours à sec ! » Si la formule « toujours à sec » peut faire référence aux difficultés financières auxquelles les femmes artistes étaient confrontées [45], elle rejoint également, au travers de la copiste, la panne d’inspiration et l’impossibilité féminine à pouvoir prétendre à la nouveauté. En reprenant la dialectique genrée aristotélicienne, bien étudiée par Françoise Héritier [46], autour du sec et de l’humide, du pur et de l’impur, se rapportant réciproquement aux fluides génitaux masculin et féminin, « toujours à sec » peut également soulever la question de la chasteté et du célibat, jouant à nouveau du système d’opposition entre la jeune fille nue, allégorie de la Source (c’est-à-dire de l’humide), et l’artiste, vieille binoclarde, le dos voûté sur son chevalet, incarnation de la sécheresse qui ne peut plus physiologiquement procréer. Par ailleurs, si la ménopause apparaît comme une déféminisation physique, elle vient également bousculer son état mental, comme en témoigne la thèse de médecine de Paul Bruant consacrée en 1888 à la mélancolie survenant à la ménopause :

« Malgré la lenteur de ses mouvements, l’incertitude de ses actions, son esprit ne reste pas inactif : ses facultés […] sont, au contraire, l’objet d’une surexcitation maladive. Tout ce qui passe dans son cerveau existe pour elle au dehors. » [47]

Mélancolique et triste, la ménopausée illustre ainsi le surmenage intellectuel, reprenant en ce sens les symptômes propres à la neurasthénie au sujet de laquelle Adrien Proust et Gilbert Ballet remarquent qu’elle est « plus commune chez l’homme que chez la femme » [48] car l’homme est davantage soumis à « l’influence prépondérante du travail opiniâtre, des soucis, des excès de toutes sortes, conséquence d[e son] rôle actif et plus militant […] dans la lutte pour l’existence » [49]. Si, au travers de la neurasthénie, la ménopausée contribue à renforcer le processus de virilisation de la femme artiste, sa « surexcitation maladive » la classe également parmi la longue liste des malades hypernerveuses propres au féminin que sont l’hystérique, la nymphomane, la prostituée, la criminelle ou encore la kleptomane [50].

Cette représentation pathologique de la femme artiste apparaît, par conséquent, comme l’une des incarnations d’un féminin émancipé atrophié et névrotique, placée à côté du bas-bleu ou de la féministe souvent montrés comme des hommasses dépressives. Elle fait, en ce sens, singulièrement écho aux déconstructions de la théorie freudienne sur la mélancolie entreprises par les féministes, telles Luce Irigaray qui voit dans la mélancolie une norme psychanalytique pour les femmes se fondant sur leur envie de pénis, c’est-à-dire leur aspiration à devenir masculine et l’inéluctable complexe qui en découle [51], ou encore Judith Butler qui relie la mélancolie à l’homosexualité, invoquant l’interdit politico-social qui considère l’homosexuel comme un être meurtri [52]. Du deuil d’un désir refoulé à l’acte de renonciation forcé, pèserait alors sur ces artistes ménopausées le soupçon d’une virilité frustrée et du lesbianisme.

 

Madame Pygmalion ou la revanche de l’artiste émancipée

Au sein des représentations largement misogynes de la femme artiste, se sont glissées des contre-offensives féministes plus marginales. Ces illustrations de l’émancipation du féminin instrumentalisent, en effet, le mythe de Pygmalion et le renverse en inversant les rapports de pouvoir entre l’artiste femme devenue sujet actif et le modèle masculin devenu objet soumis [53]. Alors que Linda Nochlin explique, dans Femmes, art et pouvoir, que le mythe de Pygmalion « vient admirablement concrétiser l’idée qui fait de l’artiste un créateur sexuellement dominant » puisque « l’homme – l’artiste – façonne pour lui-même un objet érotique idéal, une femme taillée à la mesure exacte de ses désirs » [54], Catherine Gonnard et Elisabeth Lebocivi remarquent que le renversement au XIXe siècle de ce mythe « n’est évidemment pas sans répercussions, à la fois sur la posture de l’artiste qui pose et sur le regard de l’artiste sur ses sujets » [55].

Cette question d’une revanche du féminin se trouve au centre du roman de Jacques Desroix La Gynécocratie ou la domination de la femme qui retrace la série d’humiliations (menaces verbales, violence, assujettissement par la nudité et le travestissement) dont le jeune narrateur Julien est victime sous l’autorité particulièrement castratrice de plusieurs femmes dont Maud, une jeune artiste peintre, alors perçue comme puissante et indépendante, loin de l’objet sexuel soumis ou de la créature hypervirilisée vus précédemment :

« Mademoiselle me regardait avec hauteur. Tout son être s’épanouissait avec la sensation si douce à la femme de son pouvoir sur un mâle. On aurait cru voir un bel oiseau de proie, une aigle femelle prêt à fondre sur sa victime. Elle se tenait raide, la tête renversée, faisant saillir son buste et faisant valoir sa taille si élancée, et son air déterminé et volontaire rehaussait tous ses charmes. » [56]

La femme artiste force alors le respect et l’admiration de son modèle masculin comme dans le dessin du Frou-frou, où sans déroger aux normes physiques, elle va jusqu’à adopter le comportement lubrique caractéristique du maître masculin [57]. Dans le dessin de Lucien Métivet pour Le Rire, inversion des rapports de force s’accommode, de manière plus radicale, avec inversion sexuelle, le modèle masculin incarnant cette fois, par sa coiffure, ses vêtements excentriques, la position rentrée de ses mains et de ses pieds et son accent italien, le stéréotype grotesque de l’efféminé [58].

 

Dans ce contexte peu favorable à l’éclosion, au développement et à la diffusion de la créativité féminine, de nombreuses artistes vont, à l’image de la Pygmalionne, déployer tout un ensemble de stratégies, afin non seulement de détourner le discours normatif extrêmement stigmatisant mais également de contourner le réseau artistique androcentrique mis en place. Si certaines choisirent de se plier aux règles légitimes d’une formation académique de plus en plus favorable, culminant en 1897 avec l’ouverture aux femmes de l’École des Beaux-arts, d’autres privilégièrent des cercles intellectuels et artistiques plus parallèles, comme celui des Salons de la Rose+Croix qui, contrairement à ce qui était officiellement stipulé dans leur règlement [59], permirent à plusieurs d’exposer leurs œuvres. À une époque de déhiérarchisation comme de fusion des arts, quelques-unes optèrent également pour une pratique artistique en sus et comme extension de leur pratique principale, quand d’autres trouvèrent dans le domaine des arts décoratifs et appliqués, comme dans celui du médiumnisme et de l’ésotérisme des champs particulièrement favorables au féminin. Mettant en lumière des enjeux peu connus comme celui du repli identitaire ou de la dépossession du geste créateur, ces différentes stratégies témoignent de la multiplicité des moyens déployés par les femmes pour parer, battre en brèche et transgresser leur soi-disant incapacité créative.

Charlotte Foucher
(InTRU, Université François Rabelais, Tours)


[1] Linda Nochlin, « Pourquoi n’y-a-t-il pas eu de grands artistes femmes », Femmes, art et pouvoir, et autres essais, Nîmes, Jacqueline Chambon, 1993 [1971], traduction française, p. 201-244.
[2]Women Painters and their Work, Londres, Secker & Warburg, 1979.
[3]Griselda Pollock et Rozsika Parker, Old Mistresses. Woman, Art and Ideology, Londres, Pandora Press, 1992 [1981] ; Griselda Pollock, Vision and Difference. Feminism, Femininity and the Histories of Art, Londres, Routledge, 2003 [1988] ; Griselda Pollock, Differencing the Canon. Feminist Desire and the Writting of Art’s Histories, Londres, Routledge, 1999.
[4] Catherine Gonnard, Élisabeth Lebovici, Femmes artistes, artistes femmes. Paris, de 1880 à nos jours, Paris, Hazan, 2007.
[5] Anne Creissels et Giovanna Zapperi, « Histoire de l’art et gender studies : un mariage contre-nature ? », Perspective, n° 4, 2007, p. 710-715 ; Anne Creissels et Giovanna Zapperi, « Questions d’identité sexuée : l’histoire refoulée de l’art », Histoire de l’art, n° 63, octobre 2008, p. 155-162.
[6] Émile Littré, Dictionnaire de la langue française, t. I, Paris, Librairie de L. Hachette et Cie, 1863, p. 304.
[7] Cité dans Jules Janin, « Le Bas-bleu », Les Français peints par eux-mêmes. Encyclopédie morale du dix-neuvième siècle, t. V, Paris, L. Curmer, 1840-1842, p. 201.
[8] Cf. Gisèle Corbière-Gille, « Les Bas-bleus et le féminisme », La Revue des lettres modernes, n° 351-354, 1973, p. 119-124 ; Thérèse Moreau, « Le bas-bleu : une monstruosité littéraire et sociale », Roman et société, actes du colloque international de Valenciennes, Thérèse Vichy [dir.], Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis, mai 1983, cahiers de l’UER Froissart, n° 8, hiver 1983, p. 227-234 ; Jean Rabaut, « On les appelait des bas bleus », Féministes à la Belle Époque, Paris, France Empire, 1985, p. 147-170 ; Christine Planté, « Les bas-bleus contre l’ordre social », La Petite Sœur de Balzac. Essai sur la femme auteur, Paris, éditions du Seuil, 1989, p. 39-61; Andrea Del Lungo et Brigitte Louichon [dir.], La Littérature en bas-bleus. Romancières sous la Restauration et la Monarchie de Juillet, 1815-1848, Paris, Garnier, 2010; Martine Reid, « Bas-bleus », Des femmes en littérature, [Paris] : Belin, 2010, p. 47-63.
[9] Frédéric Soulié, « Le Bas-bleu artistique », Physiologie du Bas-bleu, Paris, Aubert-Lavigne, ca. 1841, p. 97- 110. Pour une étude détaillée de cette figure, cf. Charlotte Foucher, « Le bas-bleu artistique. Portrait au vitriol de la femme critique d’art », Plumes et Pinceaux. Les discours des femmes sur l’art en Europe (1750-1850), vol. 1, Etudes : théories, discours, esthétiques, Melissa Hyde, Mechthild Fend et Anne Lafont [dir.], Dijon, Les Presses du réel, à paraître en 2012.
[10] Jules Barbey d’Aurevilly, Les Bas-bleus. Les Œuvres et les Hommes, t. V, Genève : Slatkine Reprints, 1968 [1868], p. XXII.
[11] Octave Uzanne, « Femmes artistes et bas-bleus », La Femme à Paris. Nos contemporaines. Notes successives sur les Parisiennes de ce temps dans leurs divers milieux, états et conditions, Paris, ancienne maison Quantin, Librairies-imprimeries réunies, 1894, p. 153-176.
[12] Cf. néanmoins plusieurs études s’intéressant aux femmes artistes au passage du siècle, Tamar Garh, Sisters of the Brush. Women's Artistic Culture in Late Nineteenth-Century Paris, New Haven-Londres, Yale University Press, 1994; Patricia Mathews, Passionate Discontent. Creativity, Gender, and French Symbolist Art, Chicago-Londres, The University of Chicago Press, 1999; Anne Rivière, « Les femmes artistes, l’histoire des Salons et la Société nationale des Beaux-Arts », Des Amitiés modernes. De Rodin à Matisse. Carolus-Duran et la Société nationale des Beaux-Arts 1890-1905, Roubaix, La Piscine, musée d’Art et d’Industrie André-Diligent, mars-juin 2003, Paris, Somogy, 2003, p. 47-55 ; Catherine Gonnard, Élisabeth Lebovici, op. cit.
[13] Pierre Larousse [dir.], Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, t. VIII, Paris, administration du Grand Dictionnaire universel, 1866-1890, p. 202.
[14] Judith Butler, Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l’identité, Paris, La Découverte/Poche, 2006, traduction française [1990], p. 88.
[15] Cesare Lombroso, Guglielmo Ferrero, La Femme criminelle et la prostituée, Paris, Félix Alcan, 1896 [1893], traduction française.
[16] Max Nordau, Psycho-physiologie du génie et du talent, Paris, Félix Alcan, 1897.
[17] Ibid., p. 21.
[18] Michelle Coquillat, La Poétique du mâle, Paris, Gallimard, 1982, p. 27.
[19] Jeanniot, Le Rire, n° 100, Paris, 31 décembre 1904, p. 1 : « La femme peintre : Ce qui me désole, c’est que je ne sais pas faire les enfants !/ Le Rapin : Tranquillisez-vous, rien n’est plus simple… je vous aiderai ».
[20] Henri Dangon, Le Sourire. Journal humoristique hebdomadaire illustré paraissant tous les samedis, n° 420, 16 novembre 1907, non paginé : « LE CONSEIL DU MAÎTRE : - Faites du plâtre, Mademoiselle, faîtes du plâtre, vous n’êtes pas encore en état de faire des enfants ».
[21] Guydo, « Les Petites Copistes », Le Frou-frou, n° 499 (numéro consacré aux femmes artistes), mai 1910.
[22] H. Avelot, « Pour le Salon », Le Rire, n° 379, 7 mai 1910, p. 2 : « « On m’avait pourtant dit que les lapins se reproduisaient facilement ».
[23] Cf. Charles Baudelaire, « Mon cœur mis à nu », Œuvres complètes, Paris, Robert Laffont, 1980 [1887], p. 406 : « La femme est naturelle, c’est-à-dire abominable ».
[24] Le renvoi de la femme à l’animalité s’exprime également sémiotiquement dans plusieurs traités en allemand où le terme « Weib » (la femelle) est privilégié à celui de « Frau » (la dame). Cf. Arthur Schopenhauer, Essai sur les femmes, Paris, éditions mille et une nuits, 2005 [1885]; P. J. Dr Mœbius, De la débilité mentale physiologique chez la femme, Paris, Solin, 1980, traduction française [1898]. Pour une analyse de cette analogie entre la femme et l’animal, cf. Bram Dijkstra, « La génétique et la gynandre “ma bête favorite” Léda, Circé et la froide caresse du sphinx », Les idoles de la perversité. Figures de la femme fatale dans la culture fin de siècle, Paris, Seuil, 1992 [1986], traduction française, p. 293-355; Jean de Palacio, « La féminité dévorante. Sur quelques images de manducation dans la littérature décadente », Figures et formes de la décadence, Paris, Séguier, 1994, p. 53-74.
[25] Otto Weininger, Sexe et Caractère, Lausanne, L’âge d’homme, 1975 [1903], traduction française, p. 9.
[26] Sur cette question, cf. Diego Romero De Solis, « El miedo a la mujer (arte, sexualidad y fin de siglo) », Daimon. Revista de Filosofìa, n° 14, 1997, p. 155-166; Bram Dijkstra, op. cit. ; Lynda Nead, The Female Nude. Art, Obscenity and Sexuality, Londres-New York, Routledge, 1992; Tamar Garb, Bodies of Modernity. Figure and Flesh in Fin-de-Siècle France, Londres, Thames and Hudson, 1998; Elvan Zabunyan et alii, Cachez ce sexe que je ne saurais voir, Paris, éditions Dis Voir, 2003; Elizabeth K. Menon, Evil by Design. The Creation and Marketing of the Femme Fatale, Urbana-Chicago, University of Illinois Press, 2006.
[27] Jean Plumet, Le Rire, n° 100, 31 décembre 1901.
[28] Cf. littérature sociologique sur les cadres de formation, de diffusion et de légitimation des carrières des femmes artistes, Tamar Garb, « Revising the Revisionists : the Formation of the Union des Femmes Peintres et Sculpteurs », Art Journal, vol. XLVIII, n° 1, printemps 1989, p. 63-70; Marina Sauer, L’entrée des femmes à l’École des beaux-arts, 1880-1923, Paris, ENSB-A, 1991; Germaine Greer, « 'A tout prix devenir quelqu'un' : the Women of the Académie Julian », Artistic Relations. Literature and the Visual Arts in Nineteenth-Century France, Peter Collier et Robert Lethbridge [dir.], New Haven – Londres, Yale University Press, 1994, p. 40-58; Gabriel P. Weisberg [dir.], Overcoming all Obstacles: the Women of the Académie Julian, Williamstown, The Sterling and Francine Clark Institute, New York, The Dahesh Museum, Memphis, The Dixon Gallery and Gardens, octobre 1999-septembre 2000, New York – New Brunswick, Dahesh Museum-Rutgers University Press, 1999; Barbara Casavecchia, « Sans nom. La difficile ascension de la femme artiste », dans Antonello Negri [dir.], Art et artistes de la modernité, Rodez, éditions du Rouergue, 2003, traduction française [2002], p. 75-98; Catherine Gonnard, « Les femmes artistes et les institutions avant 1950 », Camille Morineau [dir.], elles@centrepompidou. Artistes femmes dans la collection du musée national d’art moderne, Paris, éditions du Centre Pompidou, 2009, p. 286- 289.
[29] L. Borgex, Le Sourire, n° 333, 10 mars 1906.
[30] Fleckner Uwe, « La rhétorique de la main cachée. De l’Antiquité au Napoléon, Premier Consul de Jean-Auguste-Dominique Ingres », Revue de l’art, n° 123, 2000, p. 29.
[31] Gustave Flaubert, « Artistes », Le dictionnaire des idées reçues, [Bègles], Le Castor Astral, 1995 [1913], p. 13.
[32] Jules Lemaître, « La Massière », L’Illustration théâtrale, n° 7, 4 mars 1905, p. 1-33 : « MADELEINE – Ne le dites à personne. Mais maman connaît une des amies de Mme Marèze. Et cette amie a dit à maman que Mme Marèze lui avait dit que le cher maître s’occupait beaucoup de Juliette, même en dehors du cours, et qu’elle était toujours fourrée chez lui, dans son atelier, pour une raison ou pour une autre » (acte I, scène 1, p. 5).
[33] August Strindberg, De l’infériorité de la femme, Nantes, L’Élan, 2005 [1895], p. 60.
[34] Adrien Péladan, Traitement homéopathique de la spermatorrhée, de la prostatorrhée et de l’hypersécrétion des glandes vulvo-vaginales, Lyon, chez l’auteur, 1869, p. 95.
[35] Guglielmo Ferrero, « Le Troisième Sexe », La Revue des revues, vol. XII, 1er janvier 1895, p. 3-4.
[36] L. Couailhac, Physiologie du célibataire et de la vieille fille, Paris, Aubert et Cie – Lavigne, 1841 ; Docteur Caufeynon, Physiologie du célibat et de la chasteté. Continence, virginité, célibat religieux. La Vieille fille, le célibataire, Paris, Librairie des publications populaires, [1906]. Pour une étude plus approfondie, cf. Cécile Dauphin, « Histoire d’un stéréotype. La vieille fille », Arlette Farge et Christiane Klapisch-Zuber [dir.], Madame ou Mademoiselle ? Itinéraires de la solitude féminine XVIIIe – XXe siècle, [Paris], Montalba, 1984, p. 207-231.
[37] Michelle Perrot, « En marge : célibataires et solitaire », Philippe Ariès et Georges Duby [dir.], Histoire de la vie privée, t. IV, Paris, Seuil, 1987, p. 291.
[38] Charles Barbaud, Amédée Rouillard, Troubles et accidents de la ménopause (âge critique de la femme). Traitement thermal aux eaux de Luxeuil, Paris, Jouvet & Cie, 1895, p. 29.
[39] Ibid., p. 30.
[40] Joséphin Péladan, La Gynandre. La Décadence latine. Éthopée, t. IX, Genève, éditions Slatkine, 1979 [1891], p. 43.
[41] Dans son pamphlet au titre explicite, Pourquoi je ne suis pas féministe (Paris : éditions de France, 1928), Rachilde reprend l’idée d’une infériorité féminine : « les femmes sont les frères inférieurs de l’homme, simplement parce qu’elles ont des misères physiques les éloignant de la suite dans les idées » (p. 10). Sur cette question délicate du féminisme chez Rachilde, cf. Maryline Lukacher, « “Questions brûlantes” : Rachilde, l’affaire Douglas et les mouvements féministes », Nineteenth-Century French Studies, n° 22, automne-hiver 1993-1994, p. 195-207; Diana Holmes, Rachilde. Decadence, Gender and the Woman Writer, Oxford-New York, Berg, 2001, p. 69-87; Michael Finn, «Rachilde : Une décadente dans un réseau de bas-bleus », @nalyses. Revue de critique et de théorie littéraire [revue en ligne], consulté le 14 août 2011, http://www.revue-analyses.org/index.php?id=1139.
[42] Rachilde, Le Grand Saigneur. Roman, Paris, Ernest Flammarion, 1922, p. 8.
[43] Emmanuel Barcet, Le Sourire. Journal humoristique hebdomadaire paraissant tous les samedis, n° 445, 9 mai 1908.
[44] Torné Esquius, Le Rire. Journal humoristique paraissant le samedi, n° 205, 5 janvier 1907, p. 4
[45] Marina Sauer, op. cit., p. 8.
[46] Françoise Héritier, Masculin-Féminin. La pensée de la différence, Paris, Odile Jacob, 1996.
[47] Paul Bruant, De la mélancolie survenant à la ménopause, thèse pour le doctorat en médecine, 22 mars 1888, Paris, Imprimerie des écoles, 1888, p. 25.
[48] Adrien Proust, Gilbert Ballet, L’hygiène du neurasthénique, Paris, Masson, 1897, p. 11.
[49] Ibid., p. 12.
[50] Cf. Patricia O’Brien, « The Kleptomania Diagnosis. Bourgeois Women and Theft in Late Nineteenth-Century France », Journal of Social History, n° 17, automne 1983, p. 65-77 ; Gladys Swain, « L’Âme, la femme, le sexe et le corps. Les Métamorphoses de l’hystérie à la fin du dix-neuvième siècle », Le Débat, 24, 1983, p. 107-127 ; Elaine Showalter, Sexual Anarchy. Gender and Culture at the Fin de Siècle, Londres, Blomsbury, 1992 ; Jann Matlock, Scenes of Seduction. Prostitution, Hysteria and Reading Difference in Nineteenth-Century France, New York, Columbia University Press, 1994.
[51] Luce Irigaray, Ce sexe qui n’en est pas un, Paris, Les éditions de Minuit, 1977.
[52] Judith Butler, La Vie psychique du pouvoir. L’assujettissement en théories, [Paris], éditions Léo Scheer, 2002 [1997], traduction française, p. 209.
[53] Pour une étude plus approfondie, cf. Charlotte Foucher, « Madame Pygmalion. Rire transgressif et représentations de la femme artiste au passage du siècle (XIX-XXe siècles) », dans Ariane Bayle et Florence Fix [dir.], Rire et émancipation féminine, Paris, L’Harmattan, à paraître.
[54] Linda Nochlin, op. cit., p. 198.
[55]Catherine Gonnard, Élisabeth Lebovici, op. cit., p. 50.
[56] Jacques Desroix, La Gynécocratie ou La Domination de la femme, Paris, Charles Carrington, 1902, p.117.
[57] Le Frou-frou, 8 novembre 1907.
[58] L. Métivet, Le Rire, n° 187, 4 juin 1898, p. 6.
[59] [Péladan Joséphin], Salon de la Rose+Croix. Règles et monitoires, Paris, E. Dentu, éditeur, 1891, p. 14.


Pour citer cet article :
Charlotte Foucher, « Le Péril bleu. Images psychopathologiques de la femme artiste au passage du siècle » in Image de l'artiste, sous la direction d'Éric Darragon et Bertrand Tillier, Territoires contemporains, nouvelle série - 4 - mis en ligne le 3 avril 2012.
URL : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/publications/image_artiste/Charlotte_Foucher.html
Auteur : Charlotte Foucher
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