Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin"
UMR 7366 CNRS-uB
Territoires contemporains


Écrire l’histoire du théâtre. L’historiographie des institutions lyriques françaises (1780-1914)
Castil-Blaze, historien des institutions lyriques de Paris : sources et méthodes de l’Académie impériale de musique
Séverine Féron
Résumé | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Annexes | Notes | Références | Outils
RÉSUMÉ

L’Académie impériale de musique ou Théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique. Histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1855, est un ouvrage ambitieux, achevé et édité par Castil-Blaze en 1855. Les sources et méthodes employées pour sa confection, ainsi que sa genèse – étroitement imbriquée à l’activité de chroniqueur de Castil-Blaze – seront interrogées, afin de mieux en cerner des contours parfois flous. Quant à sa finalité, elle est intimement liée à la personnalité complexe de Castil-Blaze qui envisage l’histoire de l’institution comme lieu privilégié des mutations politiques, sociales, esthétiques et artistiques de la société française, et qui en démonte les mécanismes à l’aune des modes et de l’évolution du goût musical. L’auteur y passe en revue la totalité des œuvres qui y seront jouées sur une durée de plus de deux siècles tout en mettant en relief ce qui devrait constituer pour lui le répertoire idéal de l’Opéra de Paris. Sa posture revendiquée d’historien cohabite avec des prises de positions esthétiques et politiques en faveur d’une réforme complète de l’institution qui l’éloignent parfois de l’impartialité. L’ouvrage n’en demeure pas moins le premier témoignage historiographique des théâtres lyriques parisiens.

MOTS-CLÉS
Mots-clés : Castil-Blaze ; histoire ; opéra ; littérature ; presses ; théâtres lyriques
Index géographique : France
Index historique : xixe siècle
SOMMAIRE
I. La fabrique de l’histoire
1) Écrire l’Histoire des Théâtres lyriques de Paris
2) Plan de L’Académie impériale de musique
II. La genèse de l’ouvrage
1) Les années 1835-1838 à la Revue de Paris
2) Les années 1842-1848 à la France musicale
III. Sources et méthode
1) La mosaïque des sources
2) Méthode
3) Un livre « en marche »
IV. Quelle histoire ?
1) L’histoire au service d’un projet de réforme
2) « L’histoire d’un théâtre est aussi l’histoire d’un peuple »
V. Conclusion

TEXTE

François-Henri-Joseph Blaze dit Castil-Blaze (1784-1857) est un personnage incontournable de la vie musicale française de la première moitié du xixe siècle qui a voué sa vie à la musique, et en particulier à l’opéra. D’origine comtadine [1], il portera sa vie durant un regard souvent distancié et critique sur la société française et ses institutions lyriques, regard de celui qui revendique sa singularité culturelle – la Provence – et dont témoigne en particulier son intérêt pour la collecte des musiques populaires [2]  ainsi que sa vindicte face aux élites parisiennes. Au cœur de ses préoccupations, la remise en question permanente de la logique de centralisation des théâtres lyriques au profit du développement des scènes provinciales et de la liberté de circulation des œuvres sur le territoire national.

Avocat de formation, il porte en lui le sens de la plaidoirie pour défendre ses idéaux. Épris de justice, il revendique en particulier l’abolition du système de subventions des théâtres parisiens et de leurs privilèges qui étouffent les musiciens français en quête de créativité et de débouchés. Érudit, c’est un rat de bibliothèque, un collectionneur, un collecteur. Linguiste, il est à la recherche des racines des mots, de leur sens, et combat en permanence pour la précision de leur emploi [3]. En empathie avec son temps, il est une sorte de réceptacle, attentif à tout ce qui se fait, se joue, s’édite, s’invente, et sa mémoire exceptionnelle lui permet de comparer des pans entiers du répertoire lyrique. Sa pensée en arborescence cherche à embrasser la totalité des pratiques de son temps. Obsédé par la précision, il compile, recopie, remet en cause chaque mot, adore les chiffres, les tableaux, les faits.

Fondateur de la critique musicale professionnelle en France [4], mais également connu pour ses adaptations d’opéras étrangers en langue française, il faut ajouter à son actif sa maîtrise des métiers du livre : il possède sa propre maison d’édition [5] et fut un temps, à Avignon, inspecteur de l’imprimerie et de la librairie de la fin de l’Empire au début de la Restauration [6].

Ce rapport amoureux au livre, à la réglementation, ainsi qu’aux chiffres, caractérise l’attitude du compositeur et musicographe provençal dans maints de ses articles de presse, et en particulier dans ses ouvrages [7]. « J’aime beaucoup les chiffres, les statistiques, écrira-t-il, c’est une manière de procéder aride et peu romantique, j’en conviens ; mais elle est claire, précise et sert à clore le bec à certains orateurs de salon [8] ».

De la même manière, cette volonté d’entrer dans le détail le fera s’attacher à donner à son lectorat des faits historiques authentiques et vérifiés. Il considère en effet cette démarche comme une nécessité du métier de journaliste musical, nécessité à laquelle il ajoute l’impératif de connaître la théorie, la pratique, et les moyens d’exécution de cet art. Historien ? Il se revendique comme tel, compulsant les archives du Conseil d’État et du Châtelet afin de rectifier l’année de la retraite définitive de Mlle Le Maure [9] ! ou bien – à propos des femmes professeurs de chant dans la première moitié du xviiie siècle – de renvoyer aux Mémoires du marquis d’Argenson qui, précise-t-il, « en musique […] raisonne comme une huître, mais [il] cite des faits [10] ».

En 1820, Castil-Blaze édite son premier ouvrage intitulé De l’opéra en France [11] au cours duquel il impose un point de vue moderne – patrimonial – sur les œuvres du répertoire.

Ce livre, qui témoigne d’une profonde érudition, n’est pas conçu de manière chronologique mais thématique, à la manière d’un traité de dramaturgie musicale, réfléchissant à la fois sur la poétique de l’art, sa théorie, et sa mise en pratique sur les scènes théâtrales ; pratiques dénoncées comme bien souvent catastrophiques, et qui le conduisent à poser les fondements d’une politique culturelle réformatrice à l’échelle du territoire français : « l’administration de tout ce qui concerne les arts doit être essentiellement libérale et dégagée de cette soif de lucre […] de cet esprit mercantile que l’on rencontre partout ».  Dans les arts poursuit-il « il faut des résultats » car c’est par « ces idées grandioses et vraiment libérales » que l’on peut faire « le bien de l’art et l’illustration du siècle [12] ».

En 1855, Castil-Blaze achève la rédaction d’un ouvrage intitulé Théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique. Histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1855 [13], qui nous invite à envisager l’histoire de cette institution comme lieu privilégié des mutations politiques, sociales, esthétiques et artistiques de la société française. L’institution est ainsi prise comme le témoin d’un espace public privilégié et d’un monde en évolution vers une société des spectacles. Castil-Blaze se donne ici pour tâche de faire comprendre à son lectorat les mécanismes qui font les modes et l’histoire du goût musical, en expliquant les faits musicaux par leurs causes afin de démonter les machines productrices de la réalité théâtrale de son temps. Il y passe également en revue la totalité des œuvres qui y seront jouées sur une durée de plus de deux siècles (plus précisément, deux cent dix ans), les signalant, les analysant, les comparant, mettant en relief ce qui devrait constituer pour lui le répertoire idéal de l’Opéra de Paris. D’ailleurs, sa posture d’historien sera ici entachée par des prises de position esthétiques et un discours réformateur qui l’éloignent parfois de l’impartialité.

Dans un premier temps, nous reviendrons sur la genèse complexe de l’ouvrage intrinsèquement liée à son activité de chroniqueur, puis, sur les sources et les méthodes qu’il emploie pour le confectionner afin de dégager, in fine, sa conception et sa vision de l’écriture de l’histoire de l’institution.

I. La fabrique de l’histoire

1) Écrire l’Histoire des Théâtres lyriques de Paris

L’ouvrage qui nous concerne fait donc partie d’un vaste et ambitieux ensemble que Castil-Blaze présente dès 1842 dans la France musicale comme son Histoire des Théâtres lyriques de Paris [14], et dont seront issus deux ouvrages qu’il éditera lui-même à la fin de sa vie : Théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique en 1855, et Théâtres lyriques de Paris. L’Opéra-italien, de 1548 à 1856 [15], l’année de sa mort. Quant à son Histoire de l’Opéra-Comique, elle restera à l’état de manuscrit jusqu’en… 2012 [16].

À cette trilogie sur les trois théâtres subventionnés de la capitale, il faut adjoindre un recueil intitulé Théâtres lyriques de Paris. Recueil de musique (de 1100 à 1855) en un volume, édité en 1855, et composé de cent quatre-vingt-neuf morceaux de musique [17], qui, selon Castil-Blaze, constitue une « bibliothèque historique à peu près inédite, […] précieux répertoire de chanteurs où les œuvres des anciens maîtres conduisent par degrés à ceux de la nouvelle école [18] ». Ce recueil est « gravé de morceaux de chant et de symphonie qui depuis deux-cents ans ont joui de la faveur du public, à ces trois théâtres, à diverses époques, ou bien ont marqué d’heureux essais dans le progrès de l’art, [et] sert de complément à ces trois histoires distinctes. Il comprend airs, duos, scènes, romances, airs de ballet, ouvertures, trios, quatuors, chœurs en partition ou avec accompagnement de piano [19] ».

Par ailleurs s’ajoutent encore trois titres d’ouvrages que Castil-Blaze présente à son lectorat de la France musicale comme des compléments à son livre Théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique. Seul le Mémorial du Grand-Opéra – qui en constitue l’épilogue [20] – sera édité (1847). Quant aux deux autres, à savoir Curiosités musicales et galantes sur le Grand-Opéra et Vérités sur le Grand-Opéra [21], il semblerait qu’ils soient restés à l’état de projets.

Voici comment Castil-Blaze présente ces trois ouvrages complémentaires :

L’utilité de ce Mémorial sera bientôt reconnue ; s’il a quelque succès l’auteur s’empressera de joindre l’amusant à l’utile en publiant : Curiosités sur le Grand Opéra, Vérités sur le Grand Opéra, livrets formés avec un millier de faits d’un intérêt piquant, d’une étrangeté quelquefois prodigieuse, mais qu’il ne pouvait admettre en totalité dans son histoire, sans en interrompre le fil à chaque instant [22].

Pour conclure provisoirement, le projet initial de son Histoire des Théâtres lyriques de Paris devait être composé de cinq ouvrages et d’un volume d’exemples musicaux. Le tableau ci-dessous tente de clarifier cet ensemble complexe.

OUVRAGEFINALITÉS
Titre de l'ouvrageAnnonce de publication dans la France musicale (FM) et date d'éditionNombre de pages par volume 
Histoire des théâtres lyriques de Paris1842 (FM)   
L'Académie royale de Musique. Histoire littéraire, musicale,..., de 1645 à 18441844 (FM)  
1847 (FM)Non paru
Théâtres lyriques de Paris. L'Académie impériale de musique... de 1645 à 1855 1855526 + 462Initialement présenté par Castil-Blaze comme son Histoire des Théâtres lyriques de Paris
Théâtres lyriques de Paris. L'Opéra-italien, de 1548 à 1856 1856544 
Histoire de l'Opéra-Comique de 1753 à 1856 (inachevé) 2012272 (+ 69) 
Théâtres lyriques de Paris. Recueil de musique (de 1100 à 1856) 1855433Illustre Théâtres lyriques de Paris
Mémorial du Grand-Opéra, épilogue de l'Académie royale de musique, de 1645 à 1847 184764Devait initialement compléter L'Académie royale de musique (paru ?)
Curiosités musicales et galantes sur le Grand-Opéra Non paru Id.
Vérités sur le Grand-Opéra Non paru Id.
Sur l'Opéra français, vérités dures et utiles, prélude et cadence finale de l'Opéra-italien de Paris, de 1545 à 1856 185688
Tableau 1. Synthèse des ouvrages historiographiques de Castil-Blaze

2) Plan de L’Académie impériale de musique

L’Académie impériale de musique est éditée sous forme de deux volumes, respectivement de cinq cent vingt-six pages et quatre cent soixante-deux pages découpées en vingt-neuf chapitres répartis en quatre grandes époques, et structurés en brèves périodes chronologiques. Les quatre derniers chapitres adoptent une logique thématique et chronologique (« les choristes et quadrilles du ballet », « l’orchestre », « les costumes, décors et mise en scène », « mise en claque, mise en recette, truks et puffs »).

Enfin, la fin de l’ouvrage livre une série de documents précieux dont un répertoire des six cent quarante-sept ouvrages ayant été créés au Théâtre impérial de l’Opéra ainsi qu’une liste de tout le personnel de l’Opéra classé par corps de métier. Un curieux épilogue sur les paroliers lyriques français permet enfin à Castil-Blaze de s’adonner entièrement à des sujets personnels et de conclure sur son opéra provençal (Belzébuth, ou les jeux du roi René) appelé à être prochainement joué à Bruxelles par Théodore Letellier, ainsi que par un mot d’amitiés envers ses confrères Grisar [23], Gevaert [24] et Limnander [25].

Première époque. Cambert, Lulli
de 1645 à 1672
de 1672 à 1697
de 1697 à 1730
Deuxième époque. Rameau
de 1730 à 1745
de 1745 à 1750
de 1750 à 1757
de 1757 à 1764
de 1764 à 1771
de 1771 à 1774
Troisième époque. Gluck
de 1774 à 1777
de 1777 à 1779
de 1779 à 1781
de 1781 à 1784
de 1784 à 1786
de 1786 à 1788
de 1788 à 1792 (fin vol. I)
de 1793 à 1795
de 1795 à 1802
de 1802 à 1807
Quatrième époque. Spontini, Weber, Rossini, Auber
de 1807 à 1815
de 1815 à 1823
de 1823 à 1830
de 1830 à 1837
de 1837 à 1848
de 1848 à 1855 Les choristes et les quadrilles du ballet
L’orchestre
Costumes, décors, mise en scène
Mise en claque, mise en recettes, truks et puffs
Répertoire général des opéras et ballets de 1645 à 1855
Post-scriptum
Administration et personnel du théâtre en 1855
Épilogue
Les prologues d’opéra sous le règne de Louis XIV

II. La genèse de l’ouvrage

Il faut brièvement rappeler la carrière de critique musical de Castil-Blaze pour mieux comprendre la genèse relativement complexe de l’ouvrage qui nous occupe. Cette activité débute à Paris au Journal des débats politiques et littéraires, le 7 décembre 1820, et s’achèvera l’année de sa mort en 1857, par une brève apparition dans la Revue de musique sacrée ancienne et moderne de l’Abbé Nisard. Au total, ce sont à l’heure d’aujourd’hui plus de huit cents chroniques que Castil-Blaze aura écrites sur près de trente-sept ans dans différents organes de presse dont la liste suivante est loin d’être exhaustive : le Journal des débats (1820-1834), le Constitutionnel (1832-1834), la Revue de Paris (1829-1844), le Ménestrel (1834-1835), la Revue et Gazette musicale de Paris (1834-1842), la France musicale (1839-1856), la Réforme (1848-1849), etc. [26]

1) Les années 1835-1838 à la Revue de Paris

Entre le 7 juin 1835 et le 7 octobre 1838, Castil-Blaze livre une série d’articles pour la Revue de Paris sous le titre générique d’« Académie Royale de Musique », qu’il classe par période, dans un ordre chronologique : depuis Cambert (1669), jusqu’à l’année 1838. L’on peut supposer que c’est en partie cet ensemble qui devait constituer la base de son ouvrage jamais paru intitulé L’Académie royale de Musique. Histoire littéraire, musicale,…, de 1645 à 1844.

7 juin 1835 : « L’Académie Royale de Musique, depuis Cambert (1669) jusqu’à Rameau (1733). - Première époque », p. 6, tome 18.

19 juin 1836 : « L’Académie Royale de Musique. - Seconde époque, deuxième article », p 145, tome 30.

26 juin 1836 : « L’Académie Royale de Musique. - Seconde époque, troisième article », p. 228, tome 30.

11 décembre 1836 : « L’Académie Royale de Musique. - 3ème époque, 4ème article », p. 81, tome 36.

1er janvier 1837 : « L’Académie Royale de Musique. - 3ème époque, 5ème article », p. 5, tome 37.

24 septembre 1837 : « L’Académie Royale de Musique. - 4ème époque. 6ème article », p. 217, tome 45. 

1er octobre 1837 : « L’Académie Royale de Musique. - 4ème époque. 7ème article » p. 133, tome 46.

25 février 1838 :« L’Académie Royale de Musique. – Époque impériale. », p. 209, tome 50.

2 septembre 1838 : « L’Académie Royale de Musique. - Musique de l’empereur », p. 32, tome 57.

7 octobre 1838 : « les Théâtres lyriques de Paris. – L’Académie Royale de Musique. - L’Époque de la restauration », p. 279, tome 58.

2) Les années 1842-1848 à la France musicale

Quatre ans plus tard, dès le 20 février 1842, Castil-Blaze annonce dans les colonnes de la France musicale qu’il est occupé à la préparation d’une Histoire des Théâtres lyriques de Paris [27], et que Lefebvre, « mort depuis peu » lui a donné « le manuscrit d’une Histoire de l’Académie royale de Musique » ainsi que « dix-neuf plans de l’orchestre de l’Opéra, avec indication de la place, du nombre des pupitres, et de la qualité des symphonistes [28] ». Le 4 septembre de la même  année, il précise que son Histoire des Théâtres lyriques de Paris a été publiée « en partie » dans la Revue de Paris [29].

Deux ans plus tard, le 21 juillet 1844, il annonce cette fois la publication d’un premier ouvrage intitulé Théâtres lyriques de Paris. L’Académie royale de musique. Histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, politique et galante de ce théâtre, depuis 1645 jusqu’en 1845 […], « Avec la musique des morceaux les plus remarqués à toutes les époques, et des plans authentiques de l’orchestre de l’Académie royale, depuis sa création jusqu’à nos jours [30] », en l’accompagnant de l’explication suivante :

Ce titre annonce tous les genres de curiosité que le livre de M. Castil-Blaze doit satisfaire. C’est un cours complet de musique et de littérature dramatiques, bien souvent égayé par les dits faits et gestes des virtuoses qui, pendant deux siècles, ont brillé sur notre grande scène lyrique. Les triomphes de nos guerriers depuis la bataille de Denain jusqu’aux victoires de Jemmapes et de Wagram, l’arrestation du prince Edouard d’Écosse, les conjuration de Cellamare, d’Aréna, la mort du duc de Berry, bien d’autres faits encore, accomplis dans l’enceinte de ce théâtre, lui donnent une importance politique et l’attachent à l’histoire du peuple français.

Il serait curieux de suivre la chaîne musicale ayant pour premier encan Cambert et se déployant jusqu’à…. Ce n’est pas sans intérêt que l’on pourra comparer l’ouverture de Pomone avec les ouvertures d’Iphigénie en Aulide et d’Anacréon de Cherubini, le fameux trio des Parques de l’Alceste de Lulli, avec le trio de Guillaume Tell, les airs de ballet des Indes-Galantes avec ceux de Gustave ; de voir enfin Cambert, Lulli, Campra, Rameau, Philidor, préparer les voies à Gluck qui devait révolutionner ce théâtre jusqu’alors si paisible dans ses passions, et le lancer dans une carrière toute nouvelle.

Ce livre est le résultat de quarante ans d’études ; les faits en ont été recueillis dans plus de six mille volumes ; beaucoup d’erreurs trop long-temps propagées par des littérateurs incapables de les reconnaître, et qui se copiant les uns les autres, ont été reconnues, et l’auteur a pu rectifier les faits en remontant à leur source première. De notables extraits de cette histoire sont imprimés déjà dans les quinze journaux, qui, depuis trente-quatre ans, ont compté M. Castil-Blaze parmi leurs collaborateurs. Tous ces fragmens épars, réunis, remis en œuvre, seront reproduits en tout ou bien en partie ; non pas en ordre diatonique [31], mais intercalés en leurs places nouvelles. L’ouvrage, refondu, recomposé, doublé par des additions précieuses dont l’auteur a pu l’enrichir dans ces derniers temps, forme à présent un discours suivi, lié dans toutes ses parties.

Cette histoire sera publiée, par livraisons, dont la première paraîtra dimanche prochain, dans le corps de ce journal, et successivement jusqu’à la fin du volume. Ce sera notre roman-feuilleton [32], et certes, les vérités incontestables de notre histoire, auront bien souvent l’intérêt, le caprice, le fantastique du roman.

Nos abonnés recevront aussi les planches qui doivent accompagner les livraisons [33].

Le 13 décembre 1846, il relaie à nouveau son annonce de publication de l’ouvrage qui, dit-il, est « terminé » et « sous presse » [34], et en livre au lectorat de la France musicale deux extraits : « Le placet dansé » et « le Ré de poitrine [35] ». Il ajoute également cette notable épigraphe au titre général de l’ouvrage : « L’histoire d’un théâtre est aussi l’histoire d’un peuple [36] » sur laquelle nous reviendrons. Il précise en outre que l’ensemble du projet éditorial totalise un ensemble de douze mille pages « loyalement remplies […] accompagnées d’un Recueil gravé de tous les morceaux de chant et symphonie, qui, depuis deux cents ans, ont joui de la faveur du public, à l’Académie royale, à diverses époques, ou bien ont marqué d’heureux essais dans le progrès de l’art, depuis Cambert jusqu’à Rossini, depuis Pomone jusqu’à Robert Bruce [37] ». Bref, Castil-Blaze est en train de mettre en place, sous les yeux du lectorat de la France musicale, son grand œuvre, L’Académie royale de musique n’étant, de ce point de vue, qu’une petite partie d’un vaste ensemble [38].

Cette annonce de publication sera reprise jusqu’à la fin de l’année 1846. Les 20 et 27 décembre 1846 paraissent tour à tour deux autres extraits du livre : le « Prélude de l’ouvrage » et les « Tablettes du Grand-Opéra. Singularités » [39].

C’est le 20 décembre qu’il explicite à nouveau sa démarche en livrant ses sources, saluant notamment l’importance des travaux de Beffara qui « avait colligé soigneusement une infinité d’actes, notes, pièces et documents pour servir à l’histoire de l’Académie royale de musique : quarante-cinq gros volumes in-4e manuscrits. Beffara m’avait communiqué cette collection précieuse, dont il n’a malheureusement légué qu’une part à la bibliothèque de la ville de Paris ; l’autre s’est égarée [40] ».

Entre le 3 janvier et le 11 juin 1847, de nouveaux extraits de son Académie royale de musique sont publiés [41], ainsi que de son Mémorial du Grand-Opéra [42].

Enfin, le 26 septembre 1847, il précise que les personnes qui achèteront avant le 1er janvier 1848 son histoire de l’Opéra recevront en sus le Mémorial plus deux autres recueils du même genre : Curiosités sur le Grand-Opéra [43], et Vérités sur le Grand-Opéra.

L’ouvrage définitif et complet sera finalement édité en 1855, Castil-Blaze ayant actualisé son propos jusqu’à cette date, et sous le titre définitif d’Académie impériale de musique, compte tenu du changement de régime politique.

En somme, si la Revue de Paris des années 1830 (et les quinze autres journaux dont Castil-Blaze fait mention) avait en partie servi d’antichambre à l’élaboration partielle de son histoire de l’Opéra de Paris, la France musicale des années 1840 contribuera, elle, à en promouvoir la diffusion tout en en publiant de nouveaux extraits.

Castil-Blaze profitera des dernières années de sa vie pour tenter d’achever ce projet ambitieux et inédit consacré à l’édition, par sa propre société, de son Histoire des Théâtres lyriques de Paris, dont on sait qu’il n’y parviendra pas tout à fait puisque son Histoire de l’Opéra-Comique, inachevée, sera finalement éditée en 2012, et que deux ouvrages sont pour l’heure introuvables : Curiosités musicales et galantes sur le Grand-Opéra et Vérités sur le Grand-Opéra. On peut supposer que les fonds nécessaires pour une telle entreprise éditoriale n’ont pu être réunis. En effet, dès le 19 septembre 1847, il écrivait au sein de la France musicale : « Si j’avais moi-même un éditeur, il serait inflexible, inexorable ; mais je n’ai pas voulu de cet associé ; je reste donc libre d’agir à ma fantaisie [44] ».

L’Académie impériale de musique reste ainsi à redécouvrir comme une énorme synthèse, une compilation complexe, une savante mosaïque qui s’enracine au cœur même de son métier de chroniqueur.

III. Sources et méthode

L’ampleur et l’ambition du projet s’avèrent d’ailleurs telles, que, sur la durée, sa réalisation ne put maintenir l’unité désirée dans le propos de départ. L’Académie impériale de musique repose en effet sur un montage dont les coutures restent parfois visibles à cause même du mélange que l’on y trouve entre des pages purement historiques et d’autres qui relèvent du ton de la chronique ou du roman-feuilleton.

Certes aussi, la logique de Castil-Blaze nous surprend parfois dans ses enchaînements, mais il fait tenir miraculeusement le tout parce qu’il exprime là une véritable vision historique, philologique, linguistique, pratique et sociale de l’institution.

1) La mosaïque des sources

Selon les dires mêmes de Castil-Blaze, ont été collectés pour la réalisation de ce travail :

Cinq à six mille volumes où l’on trouve pêle-mêle les registres du théâtre, les écrits périodiques, les arrêts du parlement, les jugements rendus par les tribunaux inférieurs, les mémoires manuscrits, les récits que je tiens directement des anciens tels que Grétry, Gossec, Méhul, Perne, Henri Plantade, Cherubini, Le Sueur, Henri-Montan Berton, Gardel, Beaupré, Maze, François-Charlemagne Lefebvre, Cartier, Louis-Grégoire, Cellérier, Chéron, Lainez, Mlle Chevigny, Mme Saint-Aubin et même Sophie Arnould, les causeries de foyer, ce que j’ai vu de mes yeux depuis un demi-siècle [et qui] m’ont fourni les matériaux que j’ai disposés, alignés, en ordre diatonique [45].

Castil-Blaze emploie en effet une multitude de sources qu’il a – nous dit-il – consultées dans les bibliothèques (impériale, Arsenal, Conservatoire, etc.) et les archives (Châtelet, Conseil d’État…) : lettres, discours, mémoires, presse, ouvrages généraux (livres, dictionnaires et mémoires), méthodes musicales et partitions, sources iconographiques, actes notariés, éléments financiers, règlements divers, etc.

Aussi, sans viser à l’exhaustivité, pouvons-nous remarquer à titre d’exemple que la première partie du livre (soit de 1645 à 1795, chapitre XVII inclus) puise tantôt dans les mémoires et journaux de bord du temps, tantôt dans des listes de chiffres, des actes notariaux ou articles de lois. Castil-Blaze se tourne aussi vers la presse, les almanachs des spectacles, les écrits des philosophes et écrivains des xviie et xviiie siècles. Les Mémoires dont il s’est nourri pour cette période sont, pour les plus célèbres, signés Saint-Simon, Dangeau ou Casanova [46]. Mais il s’inspire aussi grandement du Journal d’Edmond-Jean-François Barbier qui se veut le reflet de la réalité et le témoignage d’un spectateur désintéressé contemplant son époque, et dans lequel l’auteur enregistre, au jour le jour, pendant cinquante-sept ans (de 1718 à 1762), les petits faits, les événements, les histoires intimes de la bourgeoisie, sans oublier les liaisons des actrices et danseuses avec les notabilités du temps qu’il émaille de détails piquants [47].

Pour la période suivante (1762-1787), Castil-Blaze puisera amplement dans les volumes des Mémoires secrets de Bachaumont et ajoutera encore d’autres sources collectées chez les historiens comme François-Charlemagne Lefebvre, bibliothécaire et chef de la copie de l’Académie de musique, dont l’histoire s’arrête en 1710 [48], ou encore Louis-François Beffara (1751-1838), « historien de l’Opéra [49 » déjà cité.

De plus, l’avocat venant au secours de l’historien lui fait compulser une multitude de pièces comptables et juridiques.

D’une manière plus générale et sur l’ensemble du propos, il est manifeste que Castil-Blaze se pose ici comme le digne continuateur de Bachaumont dont les Mémoires constituaient son livre de chevet [50]. À son frère, il écrit avec précision : « Tu dois avoir trouvé des volumes dépareillés des Mémoires secrets. Je les ai, mais il me manque les tomes 7-21-24-34-36. Je crois que deux de ceux qui me manquent sont parmi les tiens ; tu me les garderas [51] ».

D’ailleurs, s’il est une attitude qui caractérise à la fois Bachaumont et Castil-Blaze, c’est bien l’immensité du champ culturel qu’ils choisissent de brasser et d’interroger au travers d’une information événementielle élargie jusqu’à l’anecdotique. On y retrouve cette même diversité des modes critiques utilisés (archives, comptes-rendus, lettres, etc.), cette multiplicité des regards, faisant appel à toutes les figures sociales et musicales du goût (amateurs, spécialistes, critiques, personnages politiques, chanteurs, compositeurs, petit personnel, directeurs de théâtre, etc.). On y retrouve encore cette vocation archivistique et périodique qui organise le champ culturel et dévoile les enjeux sociaux à partir de l’espace réel et symbolique que représente ce lieu. On y retrouve enfin cette même politisation de l’analyse esthétique, ce même ton journalistique, cet esprit nouveau qui souffle sur une histoire envisagée comme un présent en perpétuel devenir à l’intérieur de laquelle prend tout naturellement sa place le projet de réforme de Castil-Blaze. Propos mosaïque dont rend compte, de manière très prosaïque, le titre et sous-titre de l’ouvrage : Histoire des théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique. Histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1855 [52].

2) Méthode

Dans l’ensemble, le livre adopte une progression chronologique et un assemblage des données par juxtaposition, sorte de puzzle qui repose aussi bien sur l’inventaire, le constat de faits avec datation que sur la citation (avec ou sans précision de source) ou les paroles rapportées sous forme de « on dit », etc. Soulignons que Castil-Blaze y est soucieux, en permanence, de donner à son lecteur des informations authentiques, dont les dates sont vérifiées. Ainsi relève-t-il de multiples erreurs qu’il rectifie en « historien exact et fidèle [53] ».

Mais cette progression est fréquemment rompue par : des synthèses (qui l’obligent à faire des points de chronologies synchroniques), des critiques, l’insertion par collage de chroniques ou d’extraits de chroniques (sortes de commentaires, de développements) puisés au Journal des débats, à la Réforme, etc., des souvenirs personnels (il a une mémoire exceptionnelle), des digressions diverses, des analyses, des prises de positions, des renvois (à d’autres ouvrages mais aussi aux siens propres), ainsi qu’aux planches d’exemples de partitions.

Il se livre en outre – à propos de répertoire ou d’interprétation – à de fréquentes comparaisons entre son présent et les faits passés. Cette méthode, déjà adoptée dans son livre De l’opéra en France quand il s’agissait de parler des œuvres du répertoire, est ici appliquée à l’histoire. Elle deviendra de plus en plus prégnante à mesure que Castil-Blaze se rapprochera de son époque.

Pour comprendre en détail comment Castil-Blaze écrit l’histoire, prenons pour exemple le tout début du chapitre XVII. Années 1793-1795 (vol. 2) appartenant à la Troisième époque. Gluck. Le sommaire annoncé est le suivant :

Premières vêpres chantées à la chapelle du roi. – La Marseillaise, Offrande à la Liberté. – Vingt-deux proscrits. – Un habitué des coulisses. – Chansons patriotiques. – Soupers improvisés. – Le Jugement de Pâris, ballet. – Apothéose de Marat et de Lepelletier. – Le Mariage de Figaro. Le Tombeau des Imposteurs, la Fête de la Raison, la Passion de Jésus-christ, opéras. – Une affiche de l’Opéra-National. – Méhul, Horatius Coclès. – La réunion du 10 août, sans-culottide en cinq actes. – Un temple de la Raison. – Fête de l’Être-suprême. – Concert effrayant. – Changement de spectacle. – Déménagement. – La Rosière républicaine. – On revient aux anciens opéras [54].

InformationType d'informationsSourceNombre de lignes, page
Impôt au profit des pauvres Historique de l'impôt de 1669 à 1790Non citée (N. C) 9 lignes, p. 5
Marie-Anne Quinault, actrice de l'OpéraNotice nécrologique(N. C.)18 lignes, p. 5-6
Taux des amendes imposées aux acteurs Historique et évolution du règlement de 1713 à 1791(N. C.)10 lignes, p. 6
Le théâtre de la Comédie-Italienne s'appelle Théâtre national de l'Opéra-ComiqueInformation(N. C.)2 lignes, p. 6
Mention de répertoireInformation (N. C.)8 lignes, p. 6
Décret du 22 jt 1791 et du 15 janv. 1792 à propos des affichesInformation(N. C.)7 lignes, p. 6-7
Bacchus et Ariane, ballet de Gardel 11 déc. 1791Information(N. C.)2 lignes, p. 7
Récit d'un incident lors d'un office de la chapelle des Tuileries (août 1792)Anecdote politique (N. C.)10 lignes, p. 7
Bilan du montant des pensions royales perçues par l'Académie de musique à la chute du trôneInformation financière(N. C.)4 lignes, p. 7
Acte de cession de l'Académie de musiqueFait et explication de la dette de l'OpéraRapport de J.-J. Le Roux11 lignes, p. 7
Acte du 8 mars à propos d'un terrain pour construire nouvelle salle d'opéraRappel des faits puis inclusion d'une citation Citation en petits caractères avec références incomplètes (manquent date et page) : Mercier, De la convention nationale15 lignes, p. 7-8
Relâche du 3 juin 1792 : Fête du Triomphe de la LoiChronologie 2 lignes, p. 8
Recette de la représentation du 17 août 1792 au bénéfice des veuves du 10 août (Renaud, Psyché)Bilan financier 2 lignes, p. 8
Recette du 18 sept. (Renaud, Psyché)Idem  
Recette du 3 oct. (Renaud, Psyché).Idem  
Gardel et Gossec : La Marseillaise, Offrande à la LibertéInformation et citation suivie d'un compte-rendu de la représentation.Un écrivain du temps (citation en petits caractères en retrait)40 lignes, p. 8-9
Tableau 2. Analyse systématique du traitement qualitatif et quantitatif des informations par Castil-Blaze dans L’Académie impériale de musique, vol. 2, p. 5-9.

La « méthode » qu’il emploie au cours de ces premières pages est généralisée à l’ensemble du chapitre dans lequel on peut lire, sans transition, les informations suivantes : un avis de décès (cantatrice ou musicien) suivi (parfois) d’une courte notice nécrologique ; une ligne pour signaler un changement de nom (par ex. l’Opéra de Paris devenant le Théâtre des arts) ; un nouveau décret sur l’administration théâtrale ; une phrase nominale pour signaler le titre d’une œuvre, son auteur et sa date de sa création ; un bref souvenir symbolique (messe aux Tuileries) ; le bilan des pensions des chanteurs ; la citation d’un discours d’un membre de la Convention Nationale ; la recette d’un spectacle ; l’analyse de la Marseillaise de Gardel (musique, texte, ballet, caractère musical, interprétation, public) ; la description réglementaire du fonctionnement de l’opéra ; les termes techniques du théâtre et ses usages (côté du roi/de la reine changés pendant la Révolution Française en côté cour et jardin) ; un encart sur les bateliers du Rhône pour désigner la rive droite et la rive gauche du fleuve et, par extension le côté de l’épître et le côté de l’évangile pour désigner la droite et la gauche à l’église.

S’y trouvent également consignés : le règlement de la vie des acteurs par la ville de Paris, le portrait d’un chanteur déloyal, des propos rapporté par un des membres de l’Opéra, le dialogue entre un chanteur et un habitué du public, la citation d’une liste d’hymnes exécutés sur la scène de l’Opéra (avec le nom de l’auteur), la préface d’un opéra et l’avis personnel de Castil-Blaze, la description d’un décor, la tête d’affiche d’un spectacle, tel ou tel usage, un extrait du Journal des spectacles et du Moniteur, un arrêté du Conseil-Général de la Commune de Paris, le mandat d’arrêt contre Francœur (directeur de l’Opéra), un dialogue burlesque entre le perruquier de l’Opéra et Lays, une phrase pour signaler le changement dans l’heure de début des spectacles, la description (souvent aussi drôle que savoureuse) d’une représentation ou d’un événement spectaculaire, la citation des Mémoires d’un sénateur, la liste des théâtres, une diatribe contre le gouvernement  et contre les privilèges, une critique de l’institut, un parallèle entre une époque, un événement musical et un événement de l’histoire de France plus ancien, les gains de l’Opéra pour l’année ainsi que le nombre de représentations comparés à une autre année, un air connu parodié, une chronique complète sur Horatius Coclès de Méhul (empruntée à la Revue de Paris) et une information sur ce qu’il reste de ce répertoire en 1855 (joué au concert par exemple), un article (extrait) de presse recopié à propos d’une représentation (sans précision quant aux sources, exceptée la date précise donnée à la manière d’un journal de bord), ses souvenirs personnels de jeunesse à Cavaillon, un encart historique sur le ballet ambulatoire qui reparaît en 1789 (avec un renvoi à son livre La Danse et les Ballets depuis Bacchus jusqu’à Mlle Taglioni [55]). On y trouve également un passage curieux sur l’imprimerie ambulatoire, l’inclusion de citations latines, et la recopie des paroles d’un chœur.

3) Un livre « en marche »

L’ouvrage laisse cependant percevoir à ses lecteurs sa propre évolution. C’est ainsi que, à partir du chapitre VI – c’est-à-dire la venue des Italiens à Paris – le discours de Castil-Blaze se montre moins haché tout en offrant plus de liens entre les éléments qu’il rapporte. On sent l’auteur plus familier avec cette époque qui représente à ses yeux les débuts de l’art musical : « la musique en progrès, la musique rajeunie, et l’art du chant dont on n’avait pas encore la moindre idée en notre capitale, qui certes, n’était point alors celle du monde civilisé [56] ». Dans le chapitre VII (1757-1764), à partir du moment où il introduit les propos de Sophie Arnould [57] (qu’il a rencontrée à Paris chez le peintre Ducreux au tout début des années 1800), le discours se personnalise encore. Il reprend alors la défense des œuvres de ses compositeurs fétiches (Gossec, Méhul, Cherubini), saluant les réformes qu’ils portent, tout en se lançant dans « son » combat contre les librettistes et les routiniers, et la presse non informée :

C’est justement depuis que la presse est libre de tout dire que l’on ne sait plus rien. […] Si quelque innocent, crédule au dernier point, s’avisait d’écrire l’histoire de nos théâtres d’après les gazettes de notre époque, tous les misérables pastiches mis en scène à l’Opéra depuis 1837 auraient le titre de chef-d’œuvre, et celui de cantatrice devrait être accordé libéralement à plus d’une chanteuse [58].

Le tournant du livre se trouve résolument au chapitre XVIII, volume II (de 1795 à 1802) à partir du moment où Castil-Blaze devient l’historien de sa contemporanéité :

Je m’installe au théâtre de la République et des Arts ; maintenant je vous conterai ce que j’ai vu de mes yeux, entendu de mes oreilles. J’ai franchi l’antiquité, le moyen-âge de notre Académie impériale de musique ; j’arrive aux temps modernes, et pourtant il me reste encore à vous parler de ses exercices pendant cinquante-cinq ans. Je voudrais bien n’en avoir pas tant vu [59].

Les souvenirs personnels et les témoignages affluent, le ton devient plus critique, voire polémiste. S’il accumule encore avec neutralité un certain nombre de faits bruts (il continue à signaler semaine par semaine les œuvres jouées au rythme des événements politiques et culturels, des rubriques nécrologiques, des biographies de chanteurs ou de danseurs, etc.), ainsi nous livre-t-il ici son propre regard sur l’institution, ses pratiques et son répertoire. Sous la profusion des informations, l’exubérance du ton, et la liberté de paroles, Castil-Blaze impose néanmoins à ses lecteurs une ligne conductrice : celle de sa réforme.

IV. Quelle histoire ?

1) L’histoire au service d’un projet de réforme

Si Castil-Blaze agit en historien, c’est en quête de sens et dans le but de construire une société lyrique idéale. L’Histoire est pour lui un socle de connaissances sur lequelles il s’appuie pour parler vrai, et auxquelles il se réfère pour les confronter au présent. Il y cherche des explications, des raisons, il s’en inspire, il analyse le passé afin que le présent ne commette pas les mêmes erreurs. De ces analyses, il tire une morale, une politique et une pensée originales, libérées des préjugés et des effets de modes.

En réfléchissant sur cette histoire, il s’en nourrit, car celle-ci lui permet de prendre des distances et de mettre à l’épreuve les idées qu’elle lui inspire.

Si Castil-Blaze est historien, c’est également par nécessité de poser les fondements d’une critique au-dessus de la critique. Par volonté de parler vrai, il adopte la déontologie d’un musicien professionnel : d’où sa passion pour la terminologie musicale [60]. Chaque chose ayant un nom, chaque nom aura donc une signification précise. Le parler vrai de Castil-Blaze est en fait un parler juste. L’Histoire lui donne ainsi l’occasion d’affirmer le sérieux et la rigueur de son savoir, et donc d’ancrer la musique dans ses spécificités techniques : ce qui rend d’autant plus concret son projet de réforme.

Mais Castil-Blaze n’est pas un pur historien (au sens où on l’entend aujourd’hui), et ce même si sa démarche reste le plus souvent historique. C’est en revanche un musicien qui a eu besoin de l’histoire car elle l’aide à réfléchir le présent, et c’est pourquoi, chaque fois qu’il agit en « historien », nous voyons pointer le réformateur de la vie musicale française de son temps.

De la même manière, s’il emprunte un style journalistique (le roman-feuilleton par exemple), il se refuse à n’être que journaliste. Une profession à l’encontre de laquelle il aura par ailleurs des mots féroces car Castil-Blaze est conscient de la responsabilité de la presse face à l’histoire :

Le journalisme n’est pas de l’histoire, bien s’en faut. Le gazetier a toujours une revanche à prendre ; d’ailleurs, le vent emporte les feuilles quotidiennes. Un livre reste, et si l’historien se tait sur un fait essentiel, d’autres, moins discrets, le révéleront avec accompagnement de critiques dirigées sur un prédécesseur ignorant ou mal renseigné [61].

L’histoire qu’écrit Castil-Blaze sera donc celle des pratiques et des usages qui vont lui permettre d’argumenter en faveur d’une nouvelle démarche vis-à-vis des œuvres, ce, pour la défense de la langue lyrique française (sur le modèle des langues à accents comme l’Italien, l’Allemand et le Provençal), et pour une réforme de l’art lyrique en France.

2) « L’histoire d’un théâtre est aussi l’histoire d’un peuple »

Quel est le sens de l’épigraphe qu’il choisit d’inscrire en tête de son Histoire des Théâtres lyriques de Paris ?

Pour Castil-Blaze, le théâtre est une affaire hautement importante. D’une part c’est une affaire personnelle puisqu’il faut rappeler ici que, sur la totalité de sa production musicale, la musique lyrique vient largement en tête : sept pastiches, quatorze adaptations d’opéras de Mozart, Rossini, Weber, etc., trois opéras (Belzébuth ou les jeux du roi René, Pigeon-vole, Choristes et liquoristes), et une grande quantité d’arrangements d’airs d’opéras pour formation chorale.

Il connaît donc de l’intérieur les rouages de l’administration théâtrale, il s’y heurte, s’y débat, pour le meilleur et aussi pour le pire comme en témoignent ses déconvenues personnelles à propos du fiasco de son Pigeon-vole ou de son opéra provençal Belzébuth qui échouera à être joué à l’Académie de musique, ou encore les très nombreux succès qu’il rencontre avec ses opéras traduits comme son Robin-des-bois d’après le Freischütz de Weber.

Qu’il revendique – en bourgeois libéral, de surcroît doué pour le commerce – la liberté de circulation des œuvres et des marchandises ainsi que la décentralisation théâtrale, n’est donc guère étonnant et sert, bien entendu, son propre intérêt. Après tout, n’a-t-il pas tout à gagner à vendre ses adaptations d’opéras traduits dans les théâtres de province et à déplorer l’instauration d’une taxe sur les droits d’auteur ? Mais il serait cependant réducteur voire erroné de ne voir en lui qu’un esprit mercantile et mesquin.

Car, dans le même temps, il est animé d’une réelle générosité ainsi que d’un véritable esprit réformiste prônant toutes sortes de progrès à mettre en place en faveur de la vie musicale française : ne martèle-t-il pas sans cesse qu’il faut donner des débouchés aux jeunes compositeurs et musiciens dont la situation est bien souvent préoccupante ?

Ses trente-six chroniques rédigées pour le journal républicain la Réforme entre octobre 1848 et juin 1849 [62] – dans un contexte marqué par l’absence de toute censure – nous permettent de mieux mesurer encore la force de son engagement politique. Elles plaident inlassablement et à livre ouvert pour la décentralisation et la gestion municipale des théâtres, dégagés de l’emprise du pouvoir centralisé, de sa politique de subventions et de ses dérives gestionnaires : « Nos représentants vont nous rendre cette liberté précieuse, qui fit éclore comme par enchantement tant de chefs-d’œuvre en cet âge d’or de la musique française », écrit-il dans son feuilleton du 9 octobre 1848. « En attendant la ruine imminente des privilèges, ruine que nos auteurs sollicitent depuis un demi-siècle de souffrances et de strangulation, entrons au palais de Nabucodonosor [63] ».

Dans son feuilleton du 30 octobre 1848, Castil-Blaze poursuit son combat en rappelant la loi du 13 janvier 1791 qui avait aboli la « peste des privilèges » et favorisé la liberté des théâtres. Cette loi fut supprimée par le décret impérial du 29 juillet 1807 qui provoqua la fermeture de « vingt-cinq spectacles dans la ville de Paris, d’un seul coup, sans indemnité pour les entrepreneurs alors en plein exercice. […]. Provoquée par des raisons politiques, cette razzia, cette odieuse suppression, devint bientôt une mine d’or que les escrocs administratifs, tout un bagne ministériel, surent merveilleusement exploiter [64]. » Un peu plus loin, X. X. X [65] souligne le contexte de la révolution de 1830 en matière de liberté théâtrale : « Le trafic des subventions et des privilèges fit de notables progrès jusqu’à la révolution de 1830, qui le détruisit, en abolissant de nouveau ces denrées indigènes. On ressaisit à l’instant la position libre que la loi du 13 janvier 1791 avait faite à nos théâtres ». Castil-Blaze qui qualifie cette loi de « loi d’amour, s’il en fut jamais, loi qui permettait de jouer tout et partout. [… et qui] fut le seul fruit des victoires de juillet » fut malheureusement supprimée avec le retour de la royauté « avec une impudeur, une imprudence inconcevables [66] » souligne-t-il avec force. En 1848,  Castil-Blaze reprend farouchement le combat ; mais avec amertume, il écrit :

Pourquoi n’a-t-on pas pris en février 1848 la même licence qu’en 1830 ? […] Pourquoi n’ont-ils pas appelé sur leur scène ces milliers de chanteurs, que les désastres des théâtres de la province ont exilés dans la capitale ? […] Vive la République ! Vive la liberté ! Ces mots, solennellement proclamés, ne disaient-ils pas tout ce qu’ils pouvaient dire ? Ces mots ne brisaient-ils pas les scellés apposés depuis quarante-un ans par trois despotismes sur la loi du 13 janvier 1791 ? […] Après un semblable triomphe, voudrait-on établir une enquête pour former des castes de privilégiés, d’hommes libres, d’ilotes et de parias ? Une idée aussi cruellement bouffonne pourrait-elle surgir dans l’imaginative de nos gouvernants [67] ?

Que sous les diverses tyrannies qui nous opprimaient, on n’ait songé qu’à doter la capitale des agréments, des spectacles, des édifices, et de toutes les séductions nécessaires au projet d’une centralisation complète, je n’en suis point étonné. Mais sous le régime paternel de la République, il me semble que les départements doivent être comptés pour quelque chose [68].

Le projet d’écriture de son histoire de l’Opéra est donc bien le suivant : analyser la vie politique française à travers ses manifestations artistiques. La perte des idéaux révolutionnaires y est donc perçue à travers la gestion politique de l’institution dont il fait remonter les causes à son fondateur, Lully. Il analyse ainsi les conséquences des prises de positions politiques sur la culture et son institution phare qu’est l’Opéra de Paris en pointant ensuite le fait que le xixe siècle, en détruisant les idéaux révolutionnaires, a mis la culture sous cloche en la privant de la liberté qui lui était nécessaire pour s’épanouir pleinement. C’est en tous les cas le constat qu’il fait quant aux conséquences culturelles néfastes qu’eurent les privilèges institutionnels au sein de l’art lyrique en France ainsi que la centralisation parisienne. Recherchant les causes du malheur qui accable l’art lyrique, le projet d’écriture de son histoire est donc intimement lié au constat d’échec que Castil Blaze établit en se penchant sur l’état de l’art lyrique à son époque. Une telle attitude lui permet ainsi de remonter aux sources de ses constats et d’expliquer par là même les rouages qui en sont les causes afin de tenter de les éradiquer, ou tout du moins de les infléchir.

AUTEUR
Séverine Féron
Attachée temporaire d’enseignement et de recherche
Université de Bourgogne-Franche-Comté, Centre Georges Chevrier-UMR 7366

ANNEXES
Synthèse des ouvrages historiographiques de Castil-Blaze
Synthèse des ouvrages historiographiques de Castil-Blaze
Analyse systématique du traitement qualitatif et
quantitatif des informations par Castil-Blaze dans <i>L’Académie impériale de musique</i>, vol. 2, p. 5-9
Analyse systématique du traitement qualitatif et quantitatif des informations par Castil-Blaze dans L’Académie impériale de musique, vol. 2, p. 5-9
Ouvrages édités de Castil-Blaze
Ouvrages édités de Castil-Blaze

NOTES
[1] Il naît à Cavaillon en 1784 (le Comtat Venaissin ne sera rattaché à la France qu’en 1791) puis habite Avignon en 1805. Il se fixe à Paris vers 1820, mais retourne très régulièrement dans sa province.
[2] Précurseur du Félibrige, il n’aura de cesse de revendiquer sa singularité culturelle en écrivant, collectant et publiant du répertoire provençal tant poétique que musical : L’Écho d’Avignon, ou Chants des troubadours de Vaucluse, recueillis et mis au jour par Castil-Blaze (1815), Belzébuth, ou les jeux du roi René, mélodrame en quatre actes (1841), Douze chants populaires de la Provence pour chant et piano (1845).
[3] Cf. Molière musicien, Paris, Castil-Blaze, 1852, 2 vol.
[4] Sa première chronique date du 7 décembre 1820, Journal des Débats. « Je fonde la critique musicale en France » écrira-t-il dans son Académie impériale de musique (Paris, Castil-Blaze, 1855, vol. 2, p. 143). De fait, il est bien le premier musicien professionnel à rédiger des feuilletons dans la presse, bien avant Berlioz et Fétis.
[5] Il est associé avec Pierre Chaillot à Avignon en 1815, fondera en 1822 une société pour le commerce de la musique à Paris avec André Louis Lazare Rossi qui dissout la société le 5 février 1823. Il éditera ensuite seul, jusqu’à sa mort.
[6] Nommé le 20 novembre 1815 par le ministère de la Police générale, sa mission qui embrassait alors les départements de Vaucluse, du Gard, de l’Ardèche et de la Lozère, consistait à faire appliquer la stricte réglementation en matière d’édition (lois des 21 et 24 octobre 1814). Il occupe encore cette fonction au 1er novembre 1816.
[7] Cf. en annexe.
[8] Théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique : histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1855, Paris, Castil-Blaze, vol. 2, p. 416. Cet ouvrage, cité dans les notes sous l’abréviation AIM, est consultable en ligne sur Archiv.org : https://archive.org/details/lacadmieimpr02castil.
[9] AIM, vol. 1, p. 145.
[10] AIM, vol. 1, p. 460.
[11] De l’opéra en France, Paris, Janet et Cotelle, 1820, Sautelet, 1826, 2 vol.
[12] Castil-Blaze, De l’opéra en France, op. cit., vol. 2, p. 287-288.
[13] Le catalogue général de France propose deux titres différents pour cet ouvrage. Nous employons soit le titre complet sous cette forme Théâtres lyriques de Paris. L’Académie impériale de musique. Histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1855, soit la version abrégée : L’Académie impériale de musique. [Histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1855].
[14] France musicale (La), 20 février 1842, 5e année, n° 8, p. 75 (note) : « Je dois encore à ce dernier Lefèvre, mort depuis peu, des documents du plus haut intérêt pour mon Histoire des Théâtres lyriques de Paris. » À noter qu’il supprimera la mention d’« Histoire » dans la première partie du titre définitif pour ne garder que Théâtres lyriques de Paris. « Histoire » sera repoussé dans la troisième partie du titre : Histoire littéraire, musicale…
[15] Théâtres lyriques de Paris. L’Opéra-italien de 1548 à 1856, Paris, Castil-Blaze, 1856, 544 p.
[16] Histoire de l’opéra-comique, Lyon, Symétrie ; [Venise] : Palazetto Bru Zane, Centre de musique romantique française, 2012, 341 p. À noter que le manuscrit autographe porte le titre Histoire de l’Opéra-Comique.
[17] Théâtres lyriques de Paris. Recueil de musique (de 1100 à 1855). [Partition chant et piano], Paris, Castil-Blaze, 1855, 1 vol, 433 p.
[18] Annonce en page de garde de L’Opéra-italien, Paris, Castil-Blaze, 1856.
[19] Id.
[20] Mémorial du Grand-Opéra. Épilogue de l’Académie royale de musique, histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1847, Paris, Castil-Blaze, 1847, 64 p. À noter que la mention dans le titre d’« Académie royale de musique » s’est substituée à celle d’« impériale », pour correspondre au changement de régime.
[21] Ces ouvrages, Curiosités musicales et galantes sur le Grand-Opéra, et Vérités sur le Grand-Opéra plusieurs fois annoncés par Castil-Blaze n’ont a priori pas été édités. Les manuscrits n’ont pu être localisés.
[22] Castil-Blaze, Mémorial du Grand-Opéra, op. cit., p. 64.
[23] Il s’agit probablement du compositeur belge Albert Grisar (1808-1869).
[24] François-Auguste Gevaert (1828-1908), compositeur et théoricien de la musique, né en Belgique.
[25] Armand Limnander de Nieuwenhove (1814-1892), compositeur belge.
[26] Castil-Blaze fait remonter ses débuts de critique à l’année 1812. Nous ne sommes pas, pour l’heure, en mesure de le confirmer.
[27]  France musicale (La), 20 février 1842, 5 e année, n° 8, p. 75 (note).
[28] France musicale (La), 20 février 1842, 5e année, n° 8, p. 75 (note). François-Charlemagne Lefebvre (1775-1839), bibliothécaire de l’Opéra de Paris à partir de 1814 : État de la bibliothèque de la musique du roi [texte manuscrit], Paris, 1820, 2 volumes.
[29] France musicale (La), 4 septembre 1842, 5e année, n° 36, p. 307.
[30] France musicale (La), 21 juillet 1844, 7e année, n° 29, p. 230. À notre connaissance, l’ouvrage intitulé L’Académie royale de musique, histoire littéraire, musicale, chorégraphique, pittoresque, morale, critique, facétieuse, politique et galante de ce théâtre de 1645 à 1847, s’il existe à l’état de manuscrit ou édité, n’a pas été localisé. En revanche, la série d’articles parus dans la Revue de Paris entre 1835 et 1838 seront réunis au sein d’un recueil factice intitulé L’Académie Royale de Musique.
[31] Chronologique.
[32] Il confiait déjà avoir cherché à adopter le ton du roman dans une lettre que notre musicographe écrivit à son oncle le 27 mai 1833 : « Vous voyez par les annonces des journaux que l’on écrit maintenant une infinité de contes, de nouvelles, de chroniques, de petits romans. C’est le goût du moment et il faut s’y conformer ». Collection particulière de Mme Ch. G. B., que je remercie chaleureusement.
[33] France musicale (La), 21 juillet 1844, 7e année, n° 29, p. 230. Article non signé mais nous pouvons reconnaître le style de Castil-Blaze. De larges extraits de l’ouvrage seront publiés dans ce périodique après cette annonce.
[34] France musicale (La), 13 décembre 1846, 9e année, n° 50, p. 408.
[35] France musicale (La), 13 décembre 1846, 9e année, n° 50, p. 406-407.
[36] Cette mention est présentée par ailleurs comme extraite des « Pensées philosophiques de l’auteur, tome 63ème incomplet », dans le Mémorial du Grand-Opéra, Paris, Castil-Blaze, 1847, page de titre.
[37] « Le placet dansé. Le ré de poitrine », France musicale (La), 13 décembre 1846, 9e année, n° 50 p. 407.
[38] La somme de 12 000 pages interroge. Elle ne peut que renvoyer a minima à l’ensemble des ouvrages de Castil-Blaze, et non aux seules pages consacrées à son Histoire des Théâtres lyrique de Paris qui avoisinent les 2 000 pages à moins qu’il n’évoque ici les pages de ses manuscrits (cf. tableau 1).
[39] France musicale (La) du 20 décembre 1846, 9e année, n° 51, p. 416-417, et du 27 décembre 1846, 9e année, n° 52, p. 421-423.
[40] France musicale (La), 20 décembre 1846, 9e année, n° 51, p. 417. Louis-François Beffara (1751-1838) : Détail des différentes directions, régies et administrations de l’Académie Royale de musique, depuis la mort de J. B. Lully, avec les noms des directeurs et administrateurs et les époques où ils sont entrés en exercice de leurs places ; Dictionnaire alphabétique des auteurs qui ont composé des opéras, ballets et autres pièces lyriques pour le théâtre de l’Académie royale de musique, avec le catalogue de leurs pièces et les années de leurs premières représentations ; Dictionnaire alphabétique des tragédies, ballets-opéra… une table chronologique des mêmes pièces, un dictionnaire alphabétique des poètes et auteurs qui ont composé pour ce théâtre… [Textes manuscrits], Bibliothèque-Musée de l’Opéra de Paris.
[41] « Le machiniste parodiste » 3 janvier 1847 ; « Tablettes du Grand-Opéra » les 10, 17 et 31 janvier, 28 février, 28 mars, 30 mai et 13 juin 1847.
[42] 11 juillet et 26 septembre 1847.
[43] Curiosités musicales et galantes sur le Grand-Opéra est également signalé comme achevé dans le Mémorial du Grand-Opéra, op. cit., à la p. 64, ainsi que dans L’Académie impériale de musique, op. cit., t. 2, page de couverture.
[44] 10e année, p. 312-313.
[45] France Musicale (La), « Théâtres lyriques de Paris… », 20 décembre 1846, 9e année, n° 51, p. 417. L’ensemble de ces témoignages oraux ont probablement été recueillis à partir de 1799-1800, date de l’installation à Paris de Castil-Blaze comme élève du peintre Ducreux, et étudiant au Conservatoire.
[46] Louis de Rouvroy de Saint-Simon (1675-1755), Mémoires (1691-1723) ; Philippe de Courcillon de Dangeau (1638-1720), Journal (1638-1720) ; Giacomo Casanova (1725-1798), Mémoires.
[47] Chronique de la régence et du règne de Louis XV (1718-1763) ou Journal de Barbier, avocat au Parlement de Paris, première éd. complète, Paris, Charpentier, 1857-1866, 8 vol.
[48] Histoire de l’Académie royale de musique. Manuscrit contenant 22 plans de l’orchestre de l’Opéra de Paris, de 1671 à 1800. 3 vol.
[49] France musicale (La), 20 décembre 1846, 9e année, n° 51, p. 417.
[50] Louis Petit de Bachaumont (1762-1787), Mathieu-François Pidansat de Mairobert (1727-1779) et Barthélémy-François-Joseph Moufle d’Angerville (1729 ?-1794 ?), Mémoires secrets pour servir à l’histoire de la république des lettres en France, depuis MDCCLXII ; ou Journal d’un observateur, Londres, chez John Adamson, 1783-1789, 36 tomes en 18 vol.
[51] Lettre manuscrite de Castil-Blaze à son frère Henri-Barthelémy Blaze, notaire à Cavaillon, Paris, 25 février 1855. Collection particulière de Mme Ch. G. B.
[52] Cf. Christophe Cave, L’imaginaire culturel des Mémoires secrets, Paris, Honoré Champion, 2010.
[53] AIM, op. cit., vol. 1, p. 12.
[54] AIM, op. cit., vol. 1, p. 5.
[55] Paris, Paulin, 1832.
[56] AIM, vol. 1, p. 197.
[57] Célèbre actrice et cantatrice française (1740-1802).
[58] AIM, vol. 1, p. 271.
[59] AIM, vol. 2, p. 70.
[60] Cf. Sa liste de mots musicaux proposés à l’Académie Française au chapitre 27.
[61] Castil-Blaze, Molière musicien, op. cit., vol. 2, p. 454.
[62] Du 9 octobre 1848 au 4 juin 1849.
[63] Feuilleton de la Réforme. « Revue théâtrale. Nabucodonosor, opéra de Verdi. – Rentrée de M. et Mme Saint-Léon à l’Opéra. – La Monaco, chanson. – Le lion empaillé. L’Avenir dans le passé. – Les parades de nos pères.  », lundi 9 octobre 1838, n° 280, p. 2.
[64] Feuilleton de la Réforme : « Revue théâtrale. Lèpre des privilèges, peste des subventions. – Macbeth, de Shakespeare, par M. Émile Deschamps, Odéon. – Les Deux font la paire, Variétés. – Les Sept péchés capitaux, Ambigu-Comique. – Un Coup de pinceau, Vaudeville. – Andremo a Parigi ? Théâtre Italien. – La Muette, La Vivandière, Théâtre de la Nation. – Nouvelles. », lundi 30 octobre 1848, n° 301, p. 1.
[65] Pseudonyme de Castil-Blaze dans la presse.
[66] Cf. note 65.
[67] Ibid.
[68] Feuilleton de la Réforme. « Revue théâtrale. Peste des privilèges, lèpre des subventions, ruine de nos théâtres lyriques. – La Vieillesse de Richelieu, comédie en cinq actes, en prose, de MM. Octave Feuillet et Paul Bocage ; Théâtre de la République. – L’Île de Tohu-bohu, vaudeville en trois actes, de MM. Cogniard frères ; Porte Saint-Martin. – Le Cuisinier politique, de M. Varin ; Montansier », lundi 6 novembre 1848, n° 307, p. 2.

RÉFÉRENCES

Pour citer cet article :
Séverine Féron, « Castil-Blaze, historien des institutions lyriques de Paris : sources et méthodes de l’Académie impériale de musique », dans Écrire l'histoire du théâtre. L'historiographie des institutions lyriques françaises (1780-1914), Séverine Féron et Patrick Taïeb [dir.], Territoires contemporains - nouvelle série [en ligne], 27 novembre 2017, n° 8, disponible sur : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC.html.
Auteur : Séverine Féron.
Droits : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC/credits_contacts.html
ISSN : 1961-9944

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