Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin"
UMR 7366 CNRS-uB
Territoires contemporains


Varia
Pierre Lévêque, Souvenirs du vingtième siècle, Tome 1 : Jeunesse et formation d'un historien (1927-1963), Tome II : Carrière universitaire et action politique, Paris, L’Harmattan, 2012, 246 et 224 p. [1]
Philippe Poirrier
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MOTS-CLÉS
Mots-clés : histoire politique et sociale ; histoire des universités
Index géographique : France ; Bourgogne ; Dijon
Index historique : xixe-xxie siècle
SOMMAIRE

TEXTE

En hommage à Pierre Lévêque (1927-2017)

Les mémoires des historiens sont désormais un genre à part entière, théorisé par Pierre Nora (Essais d’ego-histoire, 1987) ; participent de l’exercice académique dans le cadre de l’Habilitation à diriger des recherches, et constituent même un objet de recherche dans le cadre de l’ANR « Histinéraires. La Fabrique de l’histoire telle qu’elle se raconte ». La démarche de Pierre Lévêque est légèrement différente, et relève davantage du récit de vie classique, véritable autobiographie, réalisée à la demande de ses enfants, et rédigée à partir de 2008. Ses « souvenirs » sont précis, confortés par le recours à une documentation personnelle. Ce récit est organisée en deux tomes ; l’un consacré à sa jeunesse et à sa formation, l’autre à sa carrière universitaire et à son engagement politique. La langue est classique, au service d’un récit linéaire qui se lit agréablement. Fils d’instituteurs, résidant à Izeure, petit village près de Genlis en Côte-d’Or, puis à Talant, dans la banlieue de Dijon, la trajectoire de Pierre Lévêque, née en 1927, est presque entièrement inscrite dans ce territoire. Il suit ses études au Lycée Carnot de Dijon jusqu’au baccalauréat en 1944 ; enseigne comme professeur d’histoire-géographie dans cet établissement de 1957 à 1963, après un bref passage de quatre années au lycée Bartholdi de Colmar ; avant de mener une carrière universitaire à l’université de Bourgogne de 1963 à 1991. La Bourgogne, celle du premier xixe siècle, est aussi au cœur de sa thèse d’État, d’inspiration labroussienne, soutenue en Sorbonne en 1977, et éditée en deux volumes en 1983 : Une société provinciale. La Bourgogne sous la monarchie de Juillet et Une société en crise. La Bourgogne au milieu du xixe siècle, 1846-1852. Cette traversée du siècle dernier est riche de renseignements pour l’historien de la Bourgogne.

Nous retiendrons essentiellement deux aspects. En premier lieu, ses « souvenirs » sont fortement emprunts du monde de l’enseignement ; celui des instituteurs à travers ses parents ; celui de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur. Pierre Lévêque restitue avec finesse, et souvent avec empathie, la vie au Lycée Carnot, comme lycéen pendant la Seconde Guerre mondiale puis comme enseignant dans les années 1950 ; puis à l’Université de Dijon. Il dresse dans ce cadre les portraits de quelques-uns de ses collègues, notamment le doyen Robert Folz qu’il admire. De nombreuses annotations permettent de saisir la vie universitaire dans une ville de province ; et tranchent avec une histoire encore trop souvent uniquement perçue par le prisme parisien. Pierre Lévêque accorde une grande place à l’encadrement des étudiants ; les prépare aux concours du second degré ; souci pédagogique que l’on retrouve dans son manuel sur l’Histoire des forces politiques en France, de la Révolution à nos jours, publié chez Armand Colin en trois volumes (1992, 1994 et 1997) ; ouvrage qui s’est imposé auprès des apprentis historiens. Occasion aussi de vérifier combien l’Université que décrit Pierre Lévêque appartient déjà au passé. La dernière décennie du siècle est marquée à la fois par un important renouvellement générationnel et une organisation de la recherche davantage collective, sous l’impulsion notamment de Benoît Garnot et de Serge Wolikow.

Ces deux volumes sont également fortement marqués par le rapport de Pierre Lévêque à la vie politique. Issue d’une famille laïque et républicaine, proche de la SFIO, l’auteur est fortement imprégné par le socialisme démocratique, même s’il adhère en 1952, comme toute une génération d’étudiants en histoire, au PCF ; parti qu’il quitte en 1961. Membre de la gauche non conformiste, lecteur de L’Observateur, Pierre Lévêque contribue ensuite à l’organisation de ses courants en Côte-d’Or au sein de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste, et ne rejoint le parti socialiste qu’à partir du Congrès d’Épinay en 1971. Il se reconnaît dans la stratégie d’union de la gauche portée par François Mitterrand. Homme de gauche convaincu, il demeure partisan d’une sociale-démocratie, sensible à l’écologie, attentive à rendre la société plus juste, et à combattre les effets dévastateurs du libéralisme. En annexe du second volume, Pierre Lévêque a ajouté une précieuse monographie sur l’histoire du socialisme en Côte-d’Or. Enfin, ceux qui connaissent Pierre Lévêque auront plaisir à retrouver à la lecture de ses deux volumes sa rigueur, sa précision, et surtout son humanisme.

Cette recension a initialement été publiée dans Les Annales de Bourgogne (2015, n° 1, p. 77-78).

AUTEUR
Philippe Poirrier
Professeur des universités en histoire contemporaine
Université de Bourgogne-Franche-Comté, Centre Georges Chevrier-UMR 7366

ANNEXES

NOTES

RÉFÉRENCES

Pour citer cet article :
Philippe Poirrier, « Pierre Lévêque, Souvenirs du vingtième siècle, Tome 1 : Jeunesse et formation d'un historien (1927-1963), Tome II : Carrière universitaire et action politique, Paris, L’Harmattan, 2012, 246 et 224 p. », Territoires contemporains - nouvelle série [en ligne], 6 février 2017, disponible sur : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC.html.
Auteur : Philippe Poirrier.
Droits : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC/credits_contacts.html
ISSN : 1961-9944

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