Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin" UMR 7366 CNRS-uB |
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Territoires contemporains | |
Varia | ||||
Philippe Contamine, Charles VII. Une vie, une politique, Paris, Perrin, 2017, 570 p. [1] | ||||
David Bardey | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Annexes | Notes | Références | Outils | |||
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C’est dans le cadre de ses recherches sur la guerre et la noblesse dans les derniers siècles du Moyen Âge que Philippe Contamine a rencontré Charles VII (1403-1461). La biographie qu’il lui consacre est le produit d’une longue vie d’historien, elle constitue une analyse fouillée de la situation politique du royaume de France dans les six premières décennies du xve siècle. Dès l’introduction, plusieurs hypothèses ambitieuses sont soulevées. La première est de définir le rôle réellement tenu par Charles VII dans sa conquête du pouvoir puis dans le processus d’affirmation de son autorité. En poursuivant les intuitions de Malcom Vale, selon lesquelles l’historiographie de son règne devrait être nuancée, Philippe Contamine examine un très grand nombre de sources lui permettant d’offrir un regard novateur sur ce roi et délivrant la complexité du personnage et de son action politique. Ces sources, tant narratives qu’iconographiques, ou issues des documents de la pratique, sont largement citées et rythment cette étude. Deux autres questions essentielles sont posées : est-il possible d’esquisser un tableau de l’« opinion publique » durant la période envisagée ? Et ce personnage peut-il être considéré comme un témoin de la naissance de l’« individu » ? À ces trois interrogations, Philippe Contamine apporte des réponses éclairantes et convaincantes au fil des treize chapitres qui retracent, dans une dynamique chronologique, le parcours et le règne de Charles VII. Pour cela, l’accent est mis sur sa personnalité, son entourage et plus largement sur l’exercice de son pouvoir. Du reste, l’ouvrage livre de nombreux éléments sur les autres puissants de l’époque, en particulier sur les ducs de Bourgogne Jean sans Peur et Philippe le Bon. Cette étude offre, par ailleurs, un appareil de notes, une bibliographie, un index et des annexes – notamment les cartes et les schémas généalogiques – qui s’avèrent fort utiles pour la compréhension de ce règne. Les deux premiers chapitres décrivent la situation du royaume au début du xve siècle, l’éducation du jeune Charles – qui devient dauphin à partir de 1417 – et la manière dont il se positionne en tant que régent du royaume et s’oppose aux ambitions de Jean sans Peur. Une lecture éclairante des troubles que connaît le royaume est apportée, dans le contexte du conflit opposant Armagnacs et Bourguignons, ainsi qu’une analyse détaillée de l’assassinat du duc de Bourgogne et de ses répercussions. Suivent trois chapitres dans lesquels est étudiée la guerre opposant le dauphin à ses rivaux anglais – d’abord Henri V, puis Henri VI – pour la couronne de France. Pour cela, l’itinéraire du dauphin et l’ensemble de ses choix politiques sont décrits tout en portant une attention particulière à ses conseillers tels que Richemont ou encore le sire de la Trémoille. La figure de Jeanne d’Arc est, elle aussi, longuement considérée avec l’objectif de saisir son rôle dans la reconquête du royaume et la place qu’elle a tenue auprès de Charles VII. Si le roi paraît influencé par son entourage, l’historien observe néanmoins que certaines de ses qualités sont décelables dès les premières années de son parcours politique, notamment la patience et la lucidité, et permettent de nuancer l’image de falot que lui attribuait l’historiographie. Le traité d’Arras de 1435, par lequel Philippe le Bon arrête de soutenir Henri VI et se rallie à Charles VII, marque une rupture et constitue une étape essentielle de la reconquête de son autorité sur le royaume de France. Ce processus est abordé au fil des chapitres VI à VIII, d’abord en étudiant le contexte géopolitique précédant la signature de ce traité et en analysant le ralliement du duc de Bourgogne à la cause de Charles VII. Philippe Contamine souligne l’habileté politique de ce roi qui, entre 1440 et 1449, a su affirmer son autorité et se faire reconnaître par les puissants étrangers et les princes du royaume et cela malgré de nombreuses difficultés. En effet, Charles VII doit notamment faire face à la gestion des gens de guerre, privés de ressources régulières, et qui dévastent le « plat pays ». La réforme militaire et la « taille des gens d’arme » de 1445 et 1446 résolvent ce problème lié à la sortie de guerre, mais témoignent aussi de l’autorité que Charles et son fils, le dauphin Louis, ont recouvrée. Ces chapitres sont aussi l’occasion de fixer un état de l’« opinion publique ». Ainsi est décrite la déception des Parisiens, constatant que le roi ne s’installe pas dans leur ville malgré sa reddition, tout comme l’indignation des contemporains à l’égard de la « belle Agnès » et de sa relation avec le roi. Enfin, la conquête de la Normandie et de la Guyenne, qui achève la reconquête du royaume, permet de souligner le rôle politique de ce souverain qui apparaît maître de son discours et de ses actions. Les chapitres IX à XI traitent de la dernière partie de la vie de Charles VII, principalement entre 1453 et 1461, au moment où son autorité est assurée. Un regard est porté sur sa personnalité : son rapport aux femmes, sa piété et les traits de son caractère sont mis en relation avec l’exercice de son pouvoir. Cette période constitue une étape importante dans le processus d’affirmation du pouvoir monarchique. Pour démontrer cette idée, Philippe Contamine met l’accent sur les innovations du régime fiscal, sa politique extérieure, mais aussi l’exercice de la justice – dont témoigne l’analyse des procès de Jacques Cœur, du duc d’Alençon ainsi que celui réhabilitant Jeanne d’Arc – qui sont autant de ressorts que le roi mobilise afin de restaurer et légitimer son autorité. Le onzième chapitre, plus particulièrement, est consacré à la dimension extérieure du gouvernement royal. L’analyse de sa politique étrangère, notamment en direction de la péninsule italienne, des royaumes de Navarre et d’Écosse, permet de souligner la cohérence politique de Charles VII et, par conséquent, celle de l’exercice de son pouvoir. Durant ces années, le roi est confronté à trois problèmes majeurs : ses relations avec son fils turbulent, le dauphin Louis, sa position à l’égard de Philippe le Bon et enfin la recrudescence des tensions avec l’Angleterre et le duc de Bourgogne. L’opposition à ce dernier est claire au regard des affaires du Luxembourg, mais aussi en montrant que Philippe le Bon refuse la souveraineté de Charles VII dans plusieurs domaines : la justice et la politique étrangère qu’il entend mener sans son accord. La mort du roi survient le 22 juillet 1461. Philippe Contamine décrit cet épisode ainsi que ses funérailles et parvient, à partir des sources narratives, à déceler une véritable « émotion collective » liée au trépas d’un souverain ayant ramené la paix et gouverné avec « clémence et justice, prudence et sagesse ». Enfin les deux derniers chapitres constituent une mise en perspective permettant d’embrasser l’ensemble du règne et de nuancer le rôle tenu par les conseillers aux mains desquels le roi n’aurait été qu’une marionnette. Philippe Contamine souligne que ce règne ne doit pas être considéré comme un ensemble monolithique où les pratiques de gouvernement n’auraient pas évolué : un tournant est, en effet, décelable au milieu des années 1430-1440 durant lesquelles le roi semble s’affirmer davantage en écoutant ses conseillers puis en prenant les décisions. Dans l’ultime chapitre, l’historien, dresse une description du royaume durant les six premières décennies du xve siècle. Les maux des temps sont explicités – guerres de l’extérieur et de l’intérieur, épidémies, disettes – et leurs impacts sont mis en relation avec l’itinéraire et la politique de Charles VII. Enfin, les relations qu’il a entretenues avec ses sujets sont esquissées, en particulier à partir des entrées royales et des assemblées d’états, et permettent de dresser un tableau de l’« opinion publique » dans le royaume de France. La conclusion, quant à elle, livre une analyse des portraits du roi, figurés et narratifs, produits par ses contemporains et donne de véritables éléments de connaissance sur ce personnage longtemps déprécié par l’historiographie. Philippe Contamine conclut en soulignant la cohérence politique du personnage et de son parcours. Indubitablement, cette biographie constitue une véritable histoire politique de ce règne et justifie pleinement son sous-titre : « Une vie, une politique ». |
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AUTEUR David Bardey Professeur agrégé d’histoire, doctorant Université de Bourgogne Franche-Comté, ARTEHIS-UMR 6298 |
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ANNEXES |
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NOTES |
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RÉFÉRENCES Pour citer cet article : David Bardey, « Philippe Contamine, Charles VII. Une vie, une politique, Paris, Perrin, 2017, 570 p. », Territoires contemporains - nouvelle série [en ligne], 1er février 2018, disponible sur : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC.html. Auteur : David Bardey. Droits : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC/credits_contacts.html ISSN : 1961-9944 |
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