Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin" UMR 7366 CNRS-uB |
|
Territoires contemporains | |
La musique psychédélique et la contre-culture des années soixante : une utopie concrète à l’identité protéiforme devenue « réalité globale » | ||||||
De William Blake aux Doors. Les Portes de la Perception dans l’esthétique psychédélique | ||||||
Éléonore Willot | Résumé | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Annexes | Notes | Références | Outils | |||||
RÉSUMÉ
Personne n’aurait imaginé que l’artiste préromantique William Blake serait un jour associé à l’un des plus grands groupes de rock de tous les temps. Environ deux cents ans séparent le poète et peintre anglais du xviiie siècle du groupe psychédélique américain des années soixante : The Doors. Le nom du groupe lui rend en effet hommage. Il s’agit d’une référence aux écrits prophétiques de Blake que l’on retrouve dans Le Mariage du ciel et de l’enfer, livre paru en 1793 dans lequel on lit que « si les portes de la perception étaient purifiées, chaque chose apparaîtrait à l’homme telle qu’elle est, infinie ». Cette théorie fut ainsi associée à l’expérience hallucinogène et extatique du LSD et de la mescaline, tant leur processus empirique concorde à la perfection. Synesthésie, Imaginaire et Métaphysique : c’est en purifiant les Portes que nous atteindrons l’Infini. Ainsi, musiciens et artistes des sixties exalteront ce périple psychédélique à travers leur pratique – une pratique cosmique et enthéogène qui a concrétisé la mythologie de Blake en un mythe réel, quitte à s’en brûler les ailes, à vouloir toucher de trop près les flammes du plaisir absolu. |
||||||
MOTS-CLÉS
|
||||||
SOMMAIRE
|
||||||
TEXTE | ||||||
I. Les Portes de la Perception : ouverture vers une autre réalité [1] Juillet 1965. Venice Beach, Californie. Deux étudiants de l’UCLA Film School [2], la prestigieuse université de Los Angeles, discutent face à l’océan sous la chaleur écrasante d’un après-midi d’été tel qu’on les connaît sur la côte ouest des États-Unis. L’un d’entre eux se nomme James Douglas Morrison, alors passionné de cinéma expérimental, d’art et de littérature. Le second, Raymond Daniel Manzarek – de quelques années son aîné – est quant à lui musicien à ses heures perdues. À cet instant précis, ni l’un ni l’autre n’aurait pu s’imaginer qu’à l’issue de cette conversation ils fonderaient l’un des plus grands groupes de rock de toute l’histoire. On raconte que Ray Manzarek aurait demandé à Jim Morrison de lui faire entendre l’une de ses compositions, car en effet, en plus d’être un adorateur du septième art, Jim voue la plupart de son temps à l’écriture. Il dévoile une ferveur invétérée pour la poésie de Baudelaire ou de Rimbaud et dévore toute l’œuvre de Nietzsche, dont il s’inspirera tout au long de sa courte vie. Naissance de la tragédie devient alors sa bible. Ce livre lui révèle à quel point l’acte créateur, ainsi que les jouissances existentielles, sont le fruit d’un dualisme aussi extatique que tourmenté, que Nietzsche a érigé à travers les figures d’Apollon et de Dionysos. Imprégné par ces énergies, le jeune Jim ne pourra s’en défaire, jusqu’à sa mort. Fidèle à ses démons. Ainsi, il se met à chantonner des paroles qui deviendront plus tard le premier couplet d’un morceau intitulé Moonlight Drive :
Let’s swim to the moon Manzarek est subjugué. Il faut dire qu’à cette époque le rock’n’roll qui envahit les ondes de radio est jeune… et peut-être trop jeune justement ! Il fête à peine ses dix ans d’existence, mais malgré ce qui fut un raz de marée sans précédent, un cataclysme juvénile, une incitation outrageuse aux comportements les plus libidineux : le rock’n’roll s’essouffle. Ce genre qui a tant déchaîné l’ardeur des teenagers des années cinquante devient de plus en plus prévisible. Il reste non moins efficace avec son rythme binaire, mais, récupéré par l’industrie musicale, il génère une lassitude. Les paroles quelquefois édulcorées, pour ne pas dire niaises, ne sont peut-être plus au goût de cette jeunesse grandissant à l’aube des sixties, qui cherche autre chose qu’une musique devenue un hymne pour midinettes surexcitées, relatant la lascivité des flirts d’un soir. Ainsi, la réaction de Manzarek ne s’est pas fait attendre. Stupéfait par le lyrisme du texte, il propose à Jim de rejoindre son groupe. À cette époque, Manzarek est claviériste au sein de Rick and the Ravens, un groupe fondé avec ses frères, et recherche désespérément un chanteur. Une première démo est enregistrée en septembre 1965. Les six chansons qui la composent sonnent très rock’n’roll voire, rythm’n’blues, à l’exception d’un morceau intitulé Rampage, entièrement instrumental, typique de la surf music californienne. Bien que Manzarek soit crédité au chant sur l’ensemble des titres, il préfère céder sa place en proposant à Morrison d’intégrer le groupe comme chanteur attitré. Il enregistre ainsi quelques pistes avec Rick and the Ravens en utilisant les textes qu’il a déjà écrits. De ces enregistrements naîtront les toutes premières versions de Moonlight Drive, My Eyes Have Seen You, Hello, I Love You, Go Insane, Summer’s Almost Gone et End of the Night [4]. Cette formation compte alors six membres : Rick Manzarek à la guitare, Jim Manzarek à l’harmonica, Ray Manzarek au piano et aux chœurs, John Densmore à la batterie (rencontré au cours d’une conférence sur la méditation transcendantale), Patricia Hansen à la basse, et enfin, Jim Morrison au chant. Mais les deux autres frères Manzarek, Rick et Jim, n’apprécient guère la tournure que prend le groupe et ne tardent pas à quitter le projet. L’avant-gardisme et la personnalité de Morrison y sont sans doute pour quelque chose. Cela n’affectera en rien l’ambition des deux amis qui ne tarderont pas à faire appel à Robby Krieger pour remplacer Rick à la guitare. Ils se séparent au passage de Patricia Hansen. Le Rhodes piano Fender de Ray Manzarek fera alors office de basse. En décembre 1965, le line updéfinitif est au complet, reste à trouver un nouveau nom pour rebaptiser ce groupe. Morrison propose alors « The Doors », une référence, dit-il, aux « Portes de la Perception ». On pense souvent au livre d’Aldous Huxley du même titre. En effet, l’écrivain anglais, connu pour avoir publié en 1951 son roman d’anticipation Brave New World, s’essaie à un tout autre registre en publiant The Doors of Perception trois ans plus tard. Il y dépeint son expérience de la mescaline, une « drogue » issue du peyotl, un cactus que l’on trouve couramment dans le Sud des États-Unis, au Nouveau-Mexique. Réputée pour ses pouvoirs psychotropes, hallucinogènes et enthéogènes, la mescaline nous ouvrirait les portes d’un nouveau monde, d’une nouvelle perception. En ingérant cette substance, Huxley comprend alors que notre conscience n’est qu’une machine usée et fatiguée, au mécanisme désuet. Les rouages de notre cerveau peinent à fonctionner tant ils sont bridés par ce qu’il nomme des « valves de réduction » dont découle « l’esprit en général » – cet esprit sélectif et sclérosé de l’homme. Cela signifierait que le monde que nous voyons n’est que le pâle reflet d’une réalité limitée, estropiée, car amputée de sa dimension métaphysique. Grâce à la mescaline, Huxley comprend la réelle sensibilité du sublime esthétique, ressentie à son plus haut degré. Son âme est alors emportée par la beauté de la Création que perçoit chaque artiste face à la nature, dans le moindre objet, dans le moindre son, dans la moindre odeur qui émane de l’environnement. Ses cinq sens s’exaltent au sein d’une danse synesthésique battant au rythme des hallucinations. Il ne fait qu’un avec cette exquise volupté qui se trouve dans chaque Être et chaque Chose. Épris du mesmérisme contemplatif engendré par cette divine félicité, Huxley nous « dé-voile » ainsi la face cachée du réel : celle que nous ne voyons d’ordinaire, car inaccessible à l’inanité de notre prosaïque condition humaine. La substance miracle et salvatrice semble être la clef ouvrant les portes scellées de notre perception. Ce n’est pas anodin si une drogue telle que la mescaline appartient à la classe des psychédéliques, comme le sera plus tard le LSD (en allemand, Lysergsäurediethylamid). Le mot « psychédélique » a été inventé en 1957 par le psychiatre Humphry Osmond au cours d’une conférence à l’Académie des sciences de New York. D’ailleurs, c’est Osmond lui-même qui a introduit Huxley à la mescaline, lui permettant d’écrire The Doors of Perception. De son côté, Huxley avait proposé le néologisme « phanérothyme ». Cette appellation est un savant mélange entre deux mots provenant de l’ancien grec : le verbe phaneroein et l’adjectif thymos, qui pourraient se traduire par « qui rend l’âme visible, manifeste à la vue ». Il écrivait ainsi dans une lettre destinée à Osmond :
To make this trivial world sublime,
Pour rendre ce monde trivial sublime, Mais ce fut l’acception « psychédélique » proposée donc par Osmond – du grec psyche (« conscience/esprit/âme ») et delos (« clair.e/purifié.e/visible ») – qui suscita l’unanimité quant au choix final :
To fathom Hell or soar angelic
Pour sonder l’Enfer ou faire jaillir l’angélique,
Got my psycho-delic feet Mais pour le moment, revenons à Venice Beach. Jim explique donc à son ami Ray qu’il ne fait pas allusion au livre d’Aldous Huxley, mais plutôt à une prophétie formulée presque deux siècles auparavant, en 1793 plus exactement, par l’artiste préromantique anglais William Blake, dans son ouvrage intitulé The Marriage of Heaven and Hell (Le Mariage du ciel et de l’enfer). Cela étant, Manzarek n’avait pas forcément tort en faisant le lien avec Huxley. L’écrivain a affirmé lui-même avoir emprunté cet énoncé à Blake, en ce sens qu’il lui semblait parfaitement approprié pour décrire l’ouverture d’une conscience dite élargie, induite par la mescaline : Lorsque pour utiliser l’expression de Blake, les Portes de la Perception n’étaient que partiellement nettoyées, un seul panneau était devenu presque transparent : le reste de la porte était encore maculé de boue [9]. Ainsi, dans la version d’origine – celle de Blake – nous lisons :
If the doors of perception were cleansed,
Si les fenêtres de la perception étaient nettoyées Cette traduction d’André Gide, qui date de 1922, fut l’une des premières transcriptions françaises. Pendant longtemps elle fut la version de référence pour les lecteurs francophones. Toutefois, sa transposition peut interpeller à bien des égards. Gide semble s’adonner à quelques digressions sémantiques. Ici, le mot doors, qui aurait dû être logiquement traduit par « portes », est remplacé par « fenêtres ». L’auteur a toujours assumé ce parti pris qui n’est nullement une étourderie intellectuelle de sa part. Aussi, il fait le choix de transcrire cleansed par « nettoyées ». Or, Blake n’utilise pas le verbe to clean qui veut bel et bien dire « nettoyer », mais le verbe to cleanse. Bien que les deux termes signifient de manière générale « nettoyer », une subtilité dans l’usage de l’un ou l’autre vient pourtant nuancer le sens profond des propos de Blake. On utilise couramment le verbe to clean pour désigner l’action de nettoyer, au sens de « rendre propre » quelque chose de sale, qui a été sali, terni. Il induit la notion de nettoyage par le « retrait » : enlever, essuyer, frotter ; en somme, on retire ces couches superficielles (un peu à la manière de cette « boue » à nettoyer dont parle Huxley, cité plus haut). Néanmoins, Blake n’appréhende pas les choses de cette façon. Il emploie le verbe to cleanse qui signifie surtout « purifier » ! Car l’homme n’est pas uniquement confronté à de simples salissures : il est souillé ! Ces souillures ne tâchent pas vulgairement, elles l’enlisent avant tout dans l’impureté. La perception de l’homme n’est pas uniquement parasitée, elle a été corrompue. Il ne s’agit pas simplement de dépoussiérer des fenêtres pour mieux voir au travers. Il ne s’agit pas d’enlever le voile ou la couche de saletés sur cette surface pour mieux voir. Or, mieux voir ne veut pas dire bien voir. On peut très bien « voir mieux » sans pour autant voir bien, c’est-à-dire, voir chaque Chose telle qu’elle Est. Cette dimension ne relève pas d’un banal « y voir plus clair », mais procède bien d’une profonde clairvoyance, laquelle ne pourra s’effectuer que par le biais d’une transcendance. Purifier les Portes de la Perception, plus que les nettoyer, devient une épreuve, une ascèse, un rite de passage : une traversée vers l’autre côté – the other side, tel que le clamait Morrison dans la chanson Break on Through. Nous regardons communément à travers une fenêtre puis contemplons, alors qu’une porte, nous l’ouvrons et nous la traversons. Selon Blake, l’action est d’une importance inconditionnelle. Dans les Proverbes de l’Enfer, ne dit-il pas que « le désir non suivi d’action engendre la pestilence [12] » ? Toute l’ampleur de cette prophétie réside dans l’élévation qualitative de la perception nous faisant pénétrer un autre monde et non dans l’élargissement quantitatif du champ de vision accessible derrière des parois vitrées. Car prostré derrière celles-ci, l’homme ne peut entrevoir qu’un espace limité qui s’offre à sa vue (si propre soit-elle) et qui reste lié à la capacité diminuée de sa conscience. Il faut voir de façon illimitée : voir les choses infinies. C’est pourquoi on ne parle pas de simple vision au sens d’une vue ordinaire, mais bien d’un troisième œil, l’œil spirituel, cosmique : l’œil du visionnaire. Dès l’instant où il est tombé sur terre, l’homme s’est vu destitué de sa divinité, ne percevant alors plus que par le corps physique (dé)limité – un refuge qui n’est autre que sa propre caverne dont les étroites fissures lui donnent accès à une perception fallacieuse subordonnée au triste règne de la matière et de la chair. Morne destin que cette pauvre réalité sous laquelle il croule péniblement. Pour résumer, si les Portes de la Perception étaient purifiées, l’homme aurait de nouveau accès au Royaume de l’Infini – celui du Divin. En recouvrant son état originel et illimité (car sacré), il ne ferait plus qu’un avec le Tout, avec l’Essence des Êtres et des Choses. Il goûterait de nouveau aux joies éternelles des délices métaphysiques. Ce n’est donc pas fortuit si Huxley a établi un lien entre son expérience de la mescaline et celle des Portes de la Perception de Blake. Les deux processus semblent très proches, pour ne pas dire similaires. Et si c’est la mescaline qui, dans les années cinquante, a mené Huxley sur les sentiers prophétiques de Blake, c’est l’expérience psychédélique du LSD qui, quelques années plus tard, conduira le jeune Morrison à immortaliser l’hommage au poète anglais en nommant ainsi son groupe The Doors. II. William Blake et Le Mariage du ciel et de l’enfer : une expérience psychédélique La pensée de Blake peut paraître complexe, parfois absconse, pour celui qui ne s’aventure pas plus intimement dans sa mythologie. Revendiquant l’influence de ses prédécesseurs John Milton, Jacob Boehme, Emmanuel Swedenborg et John Locke, il n’en a pas moins fondé un mythe exhaustif dont il est l’unique démiurge. Nourries par la religion, les récits bibliques, le dualisme de la morale et les énergies spirituelles, les prophéties énoncées dans Le Mariage du ciel et de l’enfer nous plongent dans les abysses d’une réalité faussement manichéenne. Tourmenté entre la Raison et l’Imagination, le Fini et l’Infini, le Monde Physique et Métaphysique, l’homme est bafoué dans le mensonge. Il est à « demi-éveillé », tel que le formuleraient les transcendantalistes américains [13]. De nombreuses figures jalonnent le récit et c’est à travers trois allégories, entre autres, que Blake illustre les fondements de son discours. Rintrah, Urizen et Los détiennent une signification importante dans la purification des Portes de la Perception. En premier lieu se trouve Rintrah. Enfanté par Los, il est le fils du Feu. Il est toujours représenté avec des flammes et symbolise les énergies. Chez Blake, la présence des énergies est primordiale au principe de Création. Il y a quelque chose de très prométhéen au fil de son œuvre. Les énergies du Mal et les flammes de l’Enfer participent à la Création de tout Être et de toute Chose. La seconde allégorie est celle d’Urizen. Représenté sous les traits d’un vieillard, il n’est autre que la Raison souveraine ; une Raison qui bien souvent peut mener à la décrépitude. En effet, si elle reflète une certaine forme de sagesse par la connaissance, celle-ci n’en est pas moins un fléau pour l’expérience, en ce sens qu’elle nous enlise dans l’inaction. Les chemins poussiéreux que nous dicte notre Raison ne nous font pas prendre de risques et la sécurité découle en partie de la morale établie. Rappelons une fois de plus que pour Blake « le désir non suivi d’action engendre la pestilence ». Il arrive souvent qu’Urizen soit représenté avec des chaînes autour des mains et des pieds – tel un esclave – l’empêchant ainsi d’avancer, le paralysant dans les limons de sa propre perte. Rampant au sol et portant parfois sur son visage la souffrance du fardeau tellurique, il se voit accablé par cette pesanteur et cette lourdeur qui le maintiennent dans « l’ici-bas ». Urizen est privé de toute élévation cosmique. L’homme doit s’extirper de cette torpeur. Il doit ébranler la perception unique dont il est tributaire et qui est liée à la suprématie du monde matériel – ce lieu aux entrailles moribondes. Il devra alors invoquer ce qui est l’antithèse de sa Raison, à savoir l’Être Sensible que Blake appelle le Génie Poétique ; un Être exalté dans sa totalité par l’incandescence de ses cinq sens. Le dieu qui sommeille en l’homme est la principale valeur de l’âme, et la réunion des cinq sens de manière simultanée et sans distinction demeure la clef suprême à l’ouverture des Portes vers le Monde Métaphysique : Quand je revins chez moi, sur l’abîme de mes cinq sens, là où un plateau surplombe abruptement le présent monde, je vis un puissant Démon enveloppé de nuages noirs, planant au-dessus des parois du roc : avec de corrodantes flammes il écrivit la sentence suivante, à présent perçue par les cerveaux des hommes et lue par eux sur la terre : « Ne comprends-tu donc pas que le moindre oiseau qui fend l’air est un immense monde de délices fermé par tes cinq sens [14] ? » C’est le personnage de Los (ennemi juré d’Urizen) qui incarne ainsi la figure du Génie Poétique. Il est le gardien du Royaume de l’Imagination Créatrice, laquelle nous ouvre à l’expérience de l’Infini. Chez Blake, le lien entre une forme d’empirisme synesthésique et le caractère divin de la nouvelle perception qui en dépend est indéfectible. Aussi relate-t-il dans Vision mémorable [15] qu’au cours d’une conversation avec les prophètes Ézéchiel et Isaïe, il demanda comment ces derniers pouvaient prétendre avoir parlé à Dieu. Isaïe répliqua : Certes, je ne vis ni n’entendis aucun Dieu par quelque perception limitée de mes organes, mais mes sens découvrirent l’infini dans chaque chose [16]. Ézéchiel complètera en affirmant qu’il faut élever l’homme à la perception de l’Infini. Urizen, Rintrah et Los participent donc à la purification des Portes de la Perception, ce qui nous amène au quatrième et dernier point indissociable de la mythologie de Blake : le mariage des contraires. Dans « This Way to the Egress », une interview de 1967 pour le magazine Newsweek, Manzarek s’exprime à propos des Doors et de la signification du nom donné au groupe. Il dit : There are things you know about and things you don’t, the known and the unknown, and in between are the doors – that’s us. We’re saying that you’re not only spirit, you’re also this very sensuous being. That’s not evil, that’s a really beautiful thing. Hell appears so much more fascinating and bizarre than heaven. You have to break on through to the other side to become the whole being [17]. Il y a ce que l’on connaît, ce que l’on ne connaît pas, le connu et l’inconnu et entre les deux, il y a nous – les portes – c’est ce que nous sommes. Nous ne sommes pas qu’un esprit, nous sommes également des êtres sensibles. Ce n’est pas diabolique, c’est quelque chose de réellement beau. L’Enfer est tellement plus fascinant et étrange que le Paradis. Tu dois passer de l’autre côté pour devenir un être intègre. Si les propos de Manzarek concernant l’entre deux mondes restent assez fidèles à la conception de Blake, son appréhension du Ciel et de l’Enfer n’est, quant à elle, pas tout à fait juste. Il nous dit clairement que l’Enfer est bien mieux que le Paradis, induisant qu’il n’y aurait aucun mal à vénérer cette sphère d’ordinaire répudiée, pouvant susciter de remarquables fascinations. Or, en affirmant ceci, Manzarek établit une échelle de valeurs et instaure une hiérarchie entre le Paradis et l’Enfer, chose que Blake ne concède pas. La notion des contraires chez Blake n’est pas non plus un basculement des valeurs morales. Le Mal ne devient pas le Bien, les Ténèbres ne remplaceront jamais la Lumière. L’un comme l’autre resteront toujours sur un plan équivalent. Même s’il fustige cette absurdité dichotomique qui scinde toute notre conception du monde, Blake n’en désire pas moins conserver leur nature respective. Nul renversement n’a lieu d’être au sein de ces couples, et on le comprend bien lorsque Blake ne cesse d’utiliser l’oxymore « Sagesse Infernale » pour désigner ladite accointance entre ces concepts dualistes. Le mode opératoire des contraires et les tensions qui en émanent ne procèdent donc définitivement pas d’une permutation et encore moins d’une résorption. L’un ne supplantera pas l’autre. Selon le point de vue de Blake, les choses sont tout simplement incomplètes. Et c’est en prenant compte de toutes les dimensions de ces choses – dans leur intégrité paroxystique – que l’on pourra enfin atteindre l’esprit errant du voyageur de l’Éternel, du Génie Poétique et de sa perception illimitée. C’est par la nécessité d’un mariage des contraires que s’accomplira la prophétie : Sans contraires, il n’est pas de progrès. Attraction et Répulsion, Raison et Énergie, Amour et Haine, sont nécessaires à l’existence de l’homme. De ces contraires découle ce que les religions appellent le Bien et le Mal. Le Bien (disent-elles) est le passif qui se soumet à la Raison. Le Mal est l’actif qui prend source dans l’Énergie. Bien est Ciel, Mal est Enfer [18]. Et ce mariage aura lieu pour le meilleur et pour le pire au sein d’une coexistence constamment tiraillée entre les contraires – sorte de tension libérée par des attracteurs chaotiques en perpétuel mouvement. Ce concept d’union des opposés avait déjà été esquissé par Jacob Boehme en 1623 et par Emmanuel Swedenborg qui formulait déjà l’hérésie de vouloir résorber les contraires, qu’il nommait la « sottise du ciel [19] ». Revenons à présent au xxe siècle. Tel que nous l’avons précédemment souligné, si c’est l’usage expérimental de la mescaline par Huxley dans les années cinquante qui a pu faire écho aux prophéties de Blake, c’est le LSD qui ouvrira les portes à toute une génération – cette drogue qui embrasera toute la contre-culture des fameuses Psychedelic Sixties. Le LSD devient alors le plus fidèle compagnon de voyage. L’acide lysergique fut découvert pour la première fois en avril 1938 par Albert Hofmann, un chimiste suisse travaillant à cette époque pour les laboratoires Sandoz. Le LSD provient de l’ergot de seigle, tissu d’un champignon parasite nommé Claviceps purpurea pouvant se développer sur la céréale. S’il est ingéré, il peut être responsable d’une intoxication appelée ergotamine – sorte d’empoisonnement provoqué par l’intolérance à l’alcaloïde [20] présent dans le seigle. Malgré des recherches aux résultats peu probants, le corps pharmaceutique persévère, persuadé de l’avenir prometteur de cet ergot. Au début du xxe siècle, il est testé sur le système hormonal et neurovégétatif. Son action sur le cerveau l’intronisera plus tard en psychiatrie. Au fur et à mesure des années, les scientifiques isoleront divers alcaloïdes plus ou moins stables provenant de l’ergot (ergotoxine, ergobasine, etc.) jusqu’au jour où Walter A. Jacobs et Ernst Burckhardt obtiennent le fameux acide lysergique. C’est sur cette base qu’Hofmann concevra ce qui allait devenir le LSD25. Bien que synthétisé en 1938, le LSD ne connaît un destin explosif qu’en 1943, au cours d’un après-midi d’avril durant lequel Hofmann fait l’expérience hasardeuse des premiers effets de son « enfant terrible ». Travaillant toujours sur les caractéristiques vasodilatatrices et respiratoires de sa trouvaille, Hofmann aurait malencontreusement ingéré une infime particule de ladite substance au cours d’une manipulation. Il est soudainement perturbé par d’étranges troubles sensoriels dont il ignore la provenance. Le chimiste était alors loin de s’imaginer qu’il allait vivre le tout premier trip hallucinogène au LSD de l’histoire : Vendredi dernier 16 avril 1943 en plein après-midi, j’ai dû interrompre mon travail au laboratoire et me rendre à mon domicile : en effet j’ai été pris d’une angoisse étrange en même temps que d’un léger sentiment de vertige. À mon domicile, je me suis allongé et j’ai sombré dans un état second, qui n’était pas désagréable, puisqu’il m’a donné à voir des images fantasmagoriques extrêmement inspirées. J’étais dans un état crépusculaire, les yeux fermés […] j’étais sous le charme d’images d’une plasticité extraordinaire, sans cesse renouvelée, qui m’offraient un jeu de couleurs d’une richesse kaléidoscopique. Au bout de deux heures environ, l’effet se dissipa [21]. Trois jours plus tard, il décide de réitérer l’expérience en âme et conscience pour être bien sûr de l’origine de son delirium. Voici des fragments de son témoignage à l’ingestion d’une microdose de LSD de 0,25 mg :
Auto-expérimentation du 19 avril 1943 : Bien que l’on parle souvent de bad trip (vision cauchemardesque, phase démoniaque, angoisse, démence et paranoïa) et d’ecstatic trip (plénitude, béatitude et illumination), l’expérience du LSD est régie par bien plus d’étapes. L’apogée du trip reste sans conteste cette phase d’extase totale durant laquelle le « moi » se dissout. Le pouvoir enthéogène du LSD révèle le dieu qui est en chacun de nous. Il nous fait goûter à l’exquise allégresse de la perception divine de l’Infini. Des vertus thérapeutiques au vécu mystique : les frontières semblaient bien minces et poreuses. Une fois de plus, si la parole prothétique de Blake a tant été assimilée à l’expérience psychédélique, c’est qu’en tout point, le trip au LSD nous ouvre les Portes de la Perception. Bien qu’Hofmann ait également divisé l’expérience psychédélique en deux parties – le stade esthétique (hallucinations) puis le stade profond (extase), comme nous le disions plus haut –, cela reste trop réducteur pour ce qui procède d’une richesse bien plus profonde relative au voyage mystique du LSD. Pour mieux nous rendre compte de cela, nous pouvons nous référer au descriptif des paliers successifs qu’ont établis Robert Masters et Jean Houston dans leur ouvrage intitulé L’art psychédélique [23] paru en 1968. Voici un tableau récapitulatif qui nous montre l’intensité grandissante et évolutive d’un trip au LSD. Les deux auteurs y déterminent quatre niveaux, correspondant tous à l’élargissement progressif de la conscience que l’on appelle également « états de conscience modifiée » :
Figure 1. Tableau récapitulatif des étapes d’un trip au LSD. D’après les théories de Robert Masters et Jean Houston dans leur ouvrage L’art psychédélique (1968). © Éléonore Willot III. Vers une esthétique psychédélique Le principe d’équivalence entre les Portes de la Perception et le LSD prendrait ainsi forme sous cet angle :
Figure 2. Comparatif entre les étapes d’un trip au LSD et les étapes de l’expérience de purification des Portes de la Perception selon William Blake. © Éléonore Willot Les comptes rendus des premières expérimentations au LSD sur des patients volontaires (souvent des malades psychiatriques, mais aussi des artistes !) témoignent précisément de la similitude des synesthésies ressenties par les sujets. Dans la majorité des cas, les personnes interrogées ont affirmé avoir pu entendre les couleurs, percevoir les vibrations auditives des images et voir la musique physiquement ! Et les descriptions qu’ils en faisaient étaient étrangement identiques. Mais pour ouvrir les Portes de la Perception, la réunion synchronique des sens ne fait pas état de leur simple confusion. Il s’agit à la fois d’une permutation des catégories sensorielles, mais surtout d’une dédifférenciation des sens. Ce type de synesthésie du plus haut niveau est appelé « synalgie » par les psychologues Alfred Binet et Théodore Flournoy. Il n’y a plus de frontières ni de division qualitative entre la vue, l’ouïe, le toucher, l’odorat et le goût. Cette particularité physiologique s’apparente nettement aux caractéristiques des êtres unicellulaires, lesquels ne possèdent qu’un seul organe déclenchant tous les sens simultanément. Binet et Flournoy évoquent un retour à un être « unitaire », un être que Blake aurait pu désigner comme « originel ». D’ailleurs Jacob Boehme, dont Blake s’est largement inspiré, rappelons-le, ne disait-il pas « l’Être des êtres n’est qu’un être unique [26] », précisant bien qu’à son enfantement l’homme a été divisé en son sein. Seul l’homme qui recouvre cette unité peut percer le Monde Métaphysique et toucher l’Infini. Et cet accès à l’Infini ne pourra s’opérer que si l’on franchit la deuxième étape du processus. C’est l’entrée dans le Royaume de l’Imaginaire que dépeint Blake et qui trouve son parallèle dans la seconde phase du trip psychédélique : la phase hallucinogène. À l’instar des synesthésies, l’Imaginaire de Blake en tant que Royaume Métaphysique n’est nullement édifié par des images interprétatives. Ce que nous percevons n’est inféodé à aucune subjectivité. L’Imaginaire n’est pas l’art d’inventer « des images à l’image » de mon mental (lui-même filtré par la Raison). Les hallucinations visuelles ne sont d’ailleurs pas non plus considérées comme de simples images. Dans le jargon psychédélique, on les qualifie d’« images eidétiques » (ainsi relatives à l’Essence des Choses). Sans nier pour autant quelques traces d’empreintes personnelles sur les hallucinations, force est d’admettre que les trips se ressemblent. D’un individu à l’autre, les visions rapportées sont étonnamment les mêmes. Comment autant de personnes sous LSD (avec leur singularité, leur vécu propre) peuvent-elles percevoir la même chose ? Inconscient collectif et archétypes jungiens ? Ou tout simplement perte totale de l’ego, telle que nous l’évoquions plus haut – cette dissolution du « moi » qu’évoquait Hofmann ? Sans ego, il n’y a plus de perception empirique subjective : il n’y a plus d’idiosyncrasie. Des drogues telles que l’héroïne, la morphine, la MDMA ou l’ecstasy provoquent aussi, à leur manière, ce sentiment de perte d’ego. Le mental s’anesthésie peu à peu, le corps flotte, l’âme se délie : l’ego vole en éclat, emportant avec lui les brisures de souffrances rattachées au Monde Physique. Seuls subsistent l’Un et le Tout sur un plan cosmique. Le sujet « plane » au point d’avoir l’impression d’être hors de son corps [27], tel que le décrit Hofmann au cours d’un trip. Rencontre avec le Divin : son propre Divin. Sens et perception s’extasient. Dans sa préface à L’Herbe du Diable et la Petite Fumée de Carlos Castaneda, Yves Buin suggère que l’extase est permise avec la liberté infinie de se mouvoir sans corps [28]. Transcendance et dé-corporéité sont les maîtres mots de ce Royaume des plaisirs infinis que nous promet la purification des Portes de la Perception. De William Blake l’hérétique au dionysiaque Jim Morrison, en passant par toute la jeunesse enivrée des sixties, il n’y eut qu’une infime traversée. Une infime envolée rapprochant tout homme, tout artiste de ce qui se cache au-delà des Portes au point, parfois, de ne plus être capable d’en revenir – goûtant éternellement aux délices de l’ailleurs : Ce Monde de l’Imagination est le Monde de l’Éternité, il est le sein divin dans lequel nous irons tous après la mort du corps Végétatif. Ce Monde de l’Imagination est Infini et Éternel [29]. |
||||||
AUTEUR Éléonore Willot Docteure en arts (esthétique) Chercheure associée au LIR3S-UMR 7366, université de Bourgogne |
||||||
ANNEXES |
||||||
NOTES
[1]
Une licence CC BY-NC-ND 4.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/deed.fr) a été appliquée par l’auteure à la présente contribution.
[2]
University of California, Los Angeles, département de cinématographie.
[3]
Premier couplet de la chanson Moonlight Drive écrite par Jim Morrison, qui figurera sur l’album des Doors Strange Days sorti en septembre 1967 chez Elektra Records.
[4]
Titres qui paraîtront sur les albums futurs des Doors.
[5]
Voir la lettre du 30 mars 1956 d’Aldous Huxley à Humphry Osmond dans Aldous Huxley, Moksha. Expériences visionnaires et psychédéliques 1931-63, Paris, Les éditions du lézard, 1998, p. 156.
[6]
Ibid.
[7]
La mescaline avait été synthétisée avant tout pour mieux comprendre et découvrir le système nerveux des patients atteints de troubles psychiatriques. Le LSD a tout d’abord été reconnu pour ses propriétés vasodilatatrices et antihémorragiques, ainsi que pour ses bénéfices en thérapies psychiatriques. Il a longtemps été commercialisé sous forme de Delysid par l’industrie pharmaceutique.
[8]
Sur l’album éponyme The Holy Modal Rounders, sorti en 1965 sur le label Prestige.
[9]
Traduit de l’anglais par Jules Castier dans Aldous Huxley, Les Portes de la perception, Monaco, Éditions du Rocher, 1954, p. 14.
[10]
William Blake, The Marriage of Heaven and Hell, Paris, Éditions Allia, 2012, p. 46.
[11]
Traduit de l’anglais par André Gide dans William Blake, Le Mariage du ciel et de l’enfer, Paris, Librairie José Corti, 1922, p. 41.
[12]
William Blake, Le Mariage du ciel et de l’enfer, op. cit., p. 23.
[13]
Courant littéraire américain du xixe siècle principalement nourri par une pensée spirituelle et philosophique anachorétique, impliquant des questions existentielles telles que la place de l’homme au sein d’une société néfaste ne lui permettant pas de transcender la réalité – réalité qu’il ne pourra atteindre qu’en retournant vivre dans la Nature tel un ascète.
[14]
William Blake, Le Mariage du ciel et de l’enfer, op. cit., p. 20-21.
[15]
Blake soutenait que les anges, prophètes et autres divinités venaient lui rendre visite la nuit afin qu’il retransmette leurs conversations. Beaucoup diront qu’il était simplement sujet des hallucinations.
[16]
William Blake, Le Mariage du ciel et de l’enfer, op. cit., p. 35.
[17]
Ray Manzarek, « This Way to the Egress », Newsweek Magazine, 1967, cité par Gloran Blazeski, « The Doors Took Their Name from Aldous Huxley’s Book “The Doors of Perception” », The Vintage News [en ligne], 30 janvier 2016, disponible sur https://www.thevintagenews.com/2016/01/30/last-known-photos-of-jim-morrison-in-paris-on-june-28-1971/, page consultee le 11/03/2024.
[18]
William Blake, Le Mariage du ciel et de l’enfer, op. cit., p. 13-14.
[19]
Pierre Leyris et Jacques Blondel paraphrasant l’expression d’Emmanuel Swedenborg dans Pierre Leyris, Jacques Blondel, William Blake, Œuvre. III, Paris, Aubier, 1974, p. 22.
[20]
Un alcaloïde est l’appellation que l’on donne à diverses molécules organiques dites azotées et d’origines végétales. Celles-ci peuvent révéler des vertus thérapeutiques pouvant donc être exploitées à bon escient dans le milieu médical. Néanmoins, elles peuvent aussi s’avérer extrêmement toxiques. À titre d’exemples, la théine, la caféine et la mescaline sont des alcaloïdes et le premier à avoir été isolé fut la morphine.
[21]
Albert Hofmann, LSD, mon enfant terrible, Paris, Les éditions du lézard, 1998, p. 55.
[22]
Ibid., p. 58-59.
[23]
Robert Masters, Jean Houston, L’art psychédélique, Paris, Robert Laffont, 1968.
[24]
Alfred de Neuville, « Un nouveau cas de Paradis artificiel, le Mescal », Revue des revues, 1er février 1898, cité par Pascal Rousseau, « Confusion des sens. Le débat évolutionniste sur la synesthésie dans les débuts de l’abstraction en France », Cahiers du musée national d’Art moderne, 2000, 74, p. 7.
[25]
Pascal Rousseau, « Confusion des sens », art. cité, p. 7.
[26]
Jacob Boehme, Mysterium Magnum, cité par Pierre Leyris, William Blake, Œuvre. I, Paris, Aubier, 1974, p. 43.
[27]
« J’avais l’impression d’être en dehors de mon corps », dans Albert Hofmann, LSD, mon enfant terrible, op. cit., p. 59.
[28]
Yves Buin dans l’introduction à Carlos Castaneda, L’Herbe du Diable et la Petite Fumée, Paris, 10/18, 1985, p. ix.
[29]
William Blake, Une vision du Jugement dernier, Paris, Librairie José Corti, 1999, p. 182.
|
||||||
RÉFÉRENCES Pour citer cet article : Éléonore Willot, « De William Blake aux Doors. Les Portes de la Perception dans l’esthétique psychédélique », dans La musique psychédélique et la contre-culture des années soixante : une utopie concrète à l’identité protéiforme devenue « réalité globale », Éléonore Willot [dir.], Territoires contemporains - nouvelle série [en ligne], 13 mai 2024, n° 20, disponible sur : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC.html. Auteur : Éléonore Willot Droits : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC/credits_contacts.html ISSN : 1961-9944 |
||||||
OUTILS |