| Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin" UMR 7366 CNRS-UBE |
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| Territoires contemporains | |
| Produire, traiter et diffuser les données : les enjeux pour les SHS | |||||
| Introduction | |||||
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Hervé Marchal et Marie Mbome |
Résumé | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Annexes | Notes | Références | Outils | ||||
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RÉSUMÉ
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MOTS-CLÉS
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SOMMAIRE |
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En 2013, Kenneth Cukier et Viktor Mayer-Schönberger [1] écrivaient qu’« au IIIe siècle avant notre ère, on disait de la bibliothèque d’Alexandrie qu’elle renfermait la totalité du savoir humain. De nos jours, la masse d’informations disponibles est telle que, si on la répartissait entre tous les Terriens, chacun en recevrait une quantité trois cent vingt fois supérieure à la collection d’Alexandrie : en tout, mille deux cents exaoctets (milliards de milliards d’octets). Si on enregistrait le tout sur des CD, ceux-ci formeraient cinq piles capables chacune de relier la Terre à la Lune ». Depuis 2013, la masse de données a évidemment considérablement augmenté ; c’est dire si le sujet de la « donnée » est central dans nos sociétés contemporaines et doit être pensé et interrogé dans toutes ses dimensions. Et ce d’autant plus à l’heure de l’Intelligence artificielle et des tentatives politiques actuelles de captation ou suppression des données, comme c’est le cas aux États-Unis et ailleurs… Questionner ce qu’est une donnée en science, c’est d’emblée se rappeler qu’aucune donnée n’est précisément donnée de façon magique, comme si elle tombait du ciel. Aucune donnée ne vient de nulle part, ne peut prétendre être neutre ou parfaitement pure. Aussi faut-il être très prudent lorsqu’on parle de données « brutes », car les données sont toujours travaillées, préparées, cuisinées. En effet, les données ont besoin au préalable d’être construites et imaginées comme telles pour répondre à un questionnement initial, séminal, pour confirmer ou non des hypothèses, pour valider ou non des pistes et orientations de recherche ; bref, pour développer une problématique de recherche. Autrement dit, il faut insister sur le fait qu’une donnée est toujours « donnée » [2], dans le cadre d’une interprétation de la réalité. Par extension, il s’agit de saisir les conditions dans lesquelles les données deviennent justement des données à prendre en compte, à analyser, à exploiter et donc à diffuser : « L’enjeu principal, il me semble, une fois que l’on admet que les données sont toujours des “obtenues” comme le disait Bruno Latour lorsqu’il observait le travail quotidien des scientifiques, c’est de comprendre dans quelles conditions elles deviennent malgré tout des “données” pour certains » [3]. À cet égard, les questions qui se posent de façon centrale consistent ici à savoir comment, pour qui, avec qui, sans qui, contre qui et pour quoi les données sont précisément données, construites ou produites. Mais comment s’y prendre ? Comment, par exemple, éviter de mettre en récit « d’en haut » les pratiques des acteurs quels qu’ils soient et, partant, de construire des interprétations analytiques indexées à leurs expériences, à leur vécu ? Qu’est-ce que les chercheurs sont prêts à mobiliser et à donner – en termes de temps, de disponibilité et d’outils – pour collecter des données significatives et sensibles, entre autres ? Comment les paroles, ici habitantes, là associatives, ailleurs étudiantes ou retraitées peuvent-elles être recueillies comme autant de mises en forme singulières d’un rapport au monde spécifique ? Comment est-il possible de donner à voir ce qui, justement, ne se voit pas aisément ? Les méthodes quantitatives peuvent-elles se suffire à elles-mêmes en sciences humaines et sociales (SHS) ? Ne faut-il pas s’attacher à des méthodes mixtes conjuguant par définition techniques d’enquêtes quantitatives et qualitatives ? Inversement, quels sont les impensés des méthodes qualitatives considérées dans leur diversité ? Parce que toute donnée est précisément donnée dans un cadre de recherche, parce que toute donnée rend visibles certaines dimensions de la réalité – et donc en invisibilise d’autres –, les réponses aux questions ici posées revêtent des enjeux cruciaux, et ce d’autant plus quand on entend motiver la décision politique à partir de ce qui est donné à voir par les chercheuses et chercheurs. C’est à partir de ces questionnements que ce numéro prend sens. Plus précisément, ce dernier fait suite à des réflexions pluridisciplinaires (histoire, sociologie, économie, gestion, sciences du langage…) sur les données en SHS qui ont été menées dans le cadre de la semaine DATA SHS (décembre 2024) organisée par la Plateforme universitaire de données (PUDD) de la Maison des Sciences sociales et des Humanités (MSH) de Dijon en lien étroit avec l’Infrastructure de recherche nationale PROGEDO. |
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AUTEUR Hervé MARCHAL Marie MBOME |
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ANNEXES |
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NOTES
[1] Kenneth Cukier et Viktor Mayer-Schönberger, « Mise en données du monde, le déluge numérique », Le Monde diplomatique, 1 juillet 2013, p. 1-20-21. En ligne : https://www.monde-diplomatique.fr/2013/07/CUKIER/49318.
[2] François Laplantine, La description ethnographique, Paris, Armand Colin, 2015.
[3] Jérôme Denis, Le travail invisible des données, Paris, Presses de l'École des Mines de Paris, 2018.
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RÉFÉRENCES Pour citer cet article : Hervé Marchal et Marie Mbome, « Introduction », dans Produire, traiter et diffuser les données : les enjeux pour les SHS, Hervé Marchal et Marie Mbome [dir.], Territoires contemporains - nouvelle série [en ligne], 28 novembre 2025, n° 22, disponible sur : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC.html. Auteurs : Hervé Marchal et Marie Mbome Droits : http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/TC/credits_contacts.html ISSN : 1961-9944 |
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OUTILS |