29 mai 2015 - Salle des séminaires de la MSH de Dijon - 14 h. - 17 h. (plan d'accès ici)

Séminaire « Patrimoine et anthropologie, quoi de neuf ? Actualité d’un domaine de recherche » : Le patrimoine devant le vivant (et les humanités environnementales)

Avec le soutien de la MSH


Organisateur
: Jean-Louis Tornatore (CGC)

 

En 1996, l’historien Jean Chesneaux pointait les limites de l’histoire historienne : à n’être tournée que sur le seul passé et à oublier que celui-ci « n’a de réalité que dans le mouvement du temps », elle risquait de se rendre aveugle au fait même d’habiter le temps. En ce sens, estimait-il, « le passé et l’histoire sont bien trop importants pour être laissés aux seuls historiens ». Cette critique participait chez Chesneaux d’une réflexion sur le droit au temps, sur le déni dont il était l’objet et sur la nécessité de sa reconquête : il invitait à travailler l’épaisseur du présent plutôt qu’à céder aux sirènes d’un « présentéisme » « qui tronçonne le temps en dissociant passé, présent et avenir », de telle manière à faire du temps un lieu fort de notre culture politique. [Lire la suite]

 

 

  • Isabelle Arpin (IRSTEA, Labex Innovation et territoires de montagnes, Grenoble)
    Les justifications mouvantes de la patrimonialisation des espèces « remarquables ». L’exemple du bouquetin des Alpes.

La présentation s’inscrira dans une réflexion sur la patrimonialisation de la nature. Elle portera plus précisément sur la capacité des entrepreneurs de patrimonialisation à faire évoluer les justifications sur lesquelles repose leur action à propos d’une espèce animale sauvage, le bouquetin des Alpes. Cette espèce offre un cas particulièrement approprié pour explorer la succession des justifications avancées pour enclencher puis poursuivre le processus de patrimonialisation. La mise en récit de sa longue patrimonialisation permet d’interroger la notion de « charisme animal » proposée par Jamie Lorimer (2007) et de montrer que la patrimonialisation d’une espèce est moins fondée sur des critères prédéfinis qu’elle n’est justifiée en situation : les entrepreneurs de patrimonialisation produisent des arguments qui prennent en compte les effets de leur entreprise et les réactions qu’elle suscite, ainsi que l’émergence d’initiatives visant à patrimonialiser d’autres espèces et susceptibles de la concurrencer. L’enquête conduit à une réflexion sur le rôle de l’attachement dans les processus de (dé)patrimonialisation.

Isabelle Arpin est sociologue au centre Irstea de Grenoble. Elle travaille notamment sur et avec les espaces protégés alpins. Elle s'intéresse aux façons d'étudier et de gérer la nature à l'ère de la biodiversité et porte une attention particulière à l'interface entre chercheurs et gestionnaires de la nature.



  • Elise Demeulenaere (CNRS, UMR Eco-anthropologie et Ethnobiologie, MNHN, Paris)
    Patrimonialiser un paysage culturel vivant. Le cas des terrasses agroforestières konso (Ethiopie)

La convention de UNESCO pour la protection du patrimoine mondiale, culturel et naturel (1972) a été décrite comme une institution diffusant une vision du monde occidentale, fondée sur des principes comme l’universalisme, l’opposition nature/culture, la matérialité du patrimoine, sans parler de la notion même de patrimoine… et ce, malgré des initiatives régulières pour dépasser cet ethnocentrisme (en 1992, création de la catégorie de « paysage culturel » ; en 1994, le tournant anthropologique ; en 2003, la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel). Cependant la procédure pour enregistrer un site sur la liste de l’UNESCO prévoit que la candidature est portée par le pays dans lequel se trouve ledit site. Comment les experts, qui peuvent être originaires du pays, voire de la région candidate, font-ils converger leur appréciation du site, et notamment les représentations des populations qui l’habitent, avec les catégories de l’UNESCO ? Cette communication analyse le travail de traduction, de sélection, d’ajustement mené par une chaîne d’experts impliquée dans la candidature du pays konso (Ethiopie) et qui a conduit en 2011 à son inscription comme « paysage culturel ». Les contours retenus par l’institution de l’objet patrimonial soulèvent par contraste la question de ce à quoi les communautés locales sont attachées. Cette analyse se fonde sur une ethnographie d’un an et demi au pays konso au début des années 2000, dans le cadre de mes recherches doctorales sur les perceptions émiques du paysage, et sur un suivi au long cours du processus de classement, incluant des entretiens formels et informels avec les principaux acteurs, une consultation des documents rendus à l’UNESCO, et un terrain en Éthiopie en février 2015.

Elise Demeulenaere est chargée de recherche au CNRS, au laboratoire d’Eco-anthropologie et ethnobiologie. Elle se place dans une tradition de recherche qui étudie les relations matérielles et idéelles des sociétés ou groupes sociaux à leur milieu, tout cherchant à articuler cette perspective avec les visions conflictuelles et les dispositifs à diverses échelles qui sous-tendent les politiques de la nature.

 

 

Entrée libre, sans inscription

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Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin"
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