Atelier de recherche
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Le populaire comme adjectif |
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Coordonné et animé par Vincent Chambarlhac
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Atelier de l'atelier : Le populaire comme adjectif - Introduction
27 mai 2021 de 14 h. à 17 h. – uB
Populaire, une ritournelle de
l’historien chiffonnier ?
Vincent Chambarlhac,
LIR3S UMR 7366 CNRS-uBFC
Il est ici question de la pratique et
de l’écriture de l’histoire culturelle et sociale dans son
rapport à l’adjectif populaire. Seulement. Dans ce rapport à
l’écriture, l’historien est exactement un écrivain de seconde
main, un chiffonnier des XVIIIe et XIXe
siècle [1]
pour qui l’épithète donne une forme sociale aux matériaux et
archives qu’il collecte. Ceci étant dit, « De l’autre côté du détroit,
un peu à l’écart du fleuve et de la grand-route, au bout de la
ligne des transports urbains, vit un autre peuple, à moins que ce ne
soit simplement le peuple [2]. »
Jacques Rancière ouvre ainsi son
livre, Courts voyages au pays du peuple. S’il paraît en
1990, l’ouvrage reprend, dans ses premières pages, des thématiques
développées dans la dernière livraison des Révoltes logiques
(Politiques du voyage, 1981). Née en 1975 et fille de mai
1968, la revue entendait, sous les auspices rimbaldiens de la
philosophie féroce de Démocratie [3],
explorer les « mémoires populaires des luttes ». Elle se
clôt donc sur une « politique du voyage » pour aborder
le peuple. Significativement structurée par les lexiques du voyage,
de la distance, de l’étrangeté et du différent,
l’introduction de cet ultime volume [4]
n’emploie jamais l’épithète populaire, pourtant alors au cœur
des débats depuis une décennie [5].
Il s’agit de rencontrer le peuple et, dans ces rencontres que
Jacques Rancière aborde en 1990 sous de multiples figures,
l’adjectif voisine très peu avec le nom, demeure quasiment en
hors-champ. Du peuple à son épithète populaire, y aurait-il une
distance ou un pas d’écart, une nuance vite oubliée, sinon
jamais exactement travaillée comme telle, tant populaire se
substantivant suppose un autre regard ?
Populaire est l’adjectif d’un
rapport dont seul finalement le premier terme serait tacitement
connu, un rapport dont l’épithète bornerait, sans jamais en
mesurer la distance, le second terme. Il se donne implicitement dans
les mots, à nouveau cités par Jacques Rancière dans ces Courts
voyages au pays du peuple, qu’adresse Georg Büchner à sa
fiancée strasbourgeoise en 1837 : « Tu apprendras d’ici Pâques à
chanter les Chants du peuple, si cela ne te fatigue pas ? Ici on
n’entend pas un air, le peuple ne chante pas [6]. »
Le peuple ne chante pas de Chants du
peuple, il n’y aurait pas de chansons populaires dans son
lien à Peuple ? Pourtant populaire se fredonne par
d’autres. Il est un rythme, sinon une goguette, dès-lors que
d’autres paroles se plaquent sur un air connu. Par l’adjectif,
les chansons jamais entonnées sont du peuple, car liées à sa
poétique. Il manque la rythmique -l’air. À celle qui n’est pas
du peuple d’ici de chanter. Territorialisation ?
Déterritorialisation ? Reterritorialisation du peuple par une
voix étrangère et féminine ? La demande de Georg Büchner à
sa fiancée précède de quelques années l’enquête Fortoul voulue
par Napoléon III sur les chansons populaires, l’épithète
patrimonialisant, inventant un canon, se faisant le lieu d’une
métrique jamais exactement réglée. « Le populaire se forge
ici par opposition à l’art littéraire […] comme par rapport à
un autre populaire urbain et commercial » écrit Isabelle
Mayaud scrutant cette enquête [7].
Populaire n’est ici que la qualification, par l’extérieur, d’un
écart à une norme donnée comme tacite. Il est ainsi impossible
d’essentialiser l’adjectif. Il n’est que creux dialectique
d’une ambition de rendre compte et rencontrer, décrire par les
mots. La proposition coïncide avec l’usage actuel et éditorial de
populaire par les historiens, dès-lors qu’on se saisit
épistémologiquement de l’adjectif. Si celui-ci embarrasse
selon l’heureuse formule de Dominique Julia [8],
il caractérise une pratique d’écriture, aux confins des objets
d’une histoire sociale et culturelle. Un court excursus sur
l’événement de ce retour de populaire dans le lexique de
l’écriture historique ouvre mon propos, en guise de prélude à
l’examen d’une expression et d’un tableau éponyme de Jules
Adler, Joies populaires (1898). Celui-ci, par analogie, fait
de l’historien travaillant sur le « populaire », un
chiffonnier plus qu’un flâneur ou un collectionneur, si l’on
s’appuie sur la distinction de ces figures forgées, pour
l’histoire, par Walter Benjamin [9].
Ceci se fredonne, puisque « qui dit chiffonnier dit
chansonnier [10] ».
On jugera là, par la récurrence de la musique et du chant (du
peuple) dans cet article en guise d’exemples d’une poétique
implicite du populaire chez les historiens, que l’adjectif vaut
ritournelle.
Faire avec l’embarras de
« populaire »
S’il ne peut être concept, fusse
sous sa forme substantivée, « populaire » est une notion
d’usage discontinu chez les historiens, une notion que n’énonce
aucune définition en SHS, qui ne s’aborde qu’en termes de
contours et/ ou d’oppositions, de controverses savantes sans
résolutions définitives. On peut ainsi considérer que l’emploi
même de l’épithète dans le champ de l’histoire participe d’une
pratique d’écriture discontinue dont il s’agirait de
circonscrire les lieux. Naguère la culture populaire entre 1960 et
1980, quand s’affirmait la possibilité d’une histoire
d’en-bas [11],
aujourd’hui son lieu semble davantage une réflexion sur les
conditions d’une écriture renouvelée de l’histoire sociale
parmi d’autres propositions [12].
Encore faut-il retracer le cheminement souterrain de cette tentative
que portent, dans des horizons épistémologiques différents, les
ouvrages de Gérard Noiriel (2018), Michelle Zancarini-Fournel
(2016). Tous deux inscrivent leurs textes dans une proposition
éditoriale forgée à partir de la réception de l’ouvrage
d’Howard Zinn, Une histoire populaire des États-Unis chez
Agone. Si sa publication date de 2002, l’effet de celle-ci pour
parvenir à cette offre éditoriale nouvelle s’étire sur une
quinzaine d’années. Dans l’intervalle, populaire est bien
plus discret que l’un des proches de peuple, populisme
(et/ou populiste). Significativement, Hermès livre
en 2005 un numéro intitulé Peuple, populaire et populisme ;
Dominique Kalifa s’intéressait alors aux historiens et le
populaire, notant le mot démonétisé hors les promesses de
l’histoire culturelle alors en devenir [13].
Ce n’est pas dans cette perspective que se placent les dernières
livraisons, comme le rebond de l’intérêt des historiens pour le
populaire illustré notamment par la table-ronde de la RHMC, Faire
une histoire populaire [14]. À ce point, une remarque en suivant l’analyse de ce label éditorial
qu’est l’épithète populaire par Emilien Ruiz : ni Gérard
Noiriel, ni Michelle Zancarini-Fournel n’inscrivent leurs
propositions dans le sillage de la controverse ouverte en 1970 sur la
Beauté du mort [15],
expression éponyme de l’article s’opposant à la notion de
culture populaire employée par Robert Mandrou à propos de la
Bibliothèque bleue de Troyes (1964). Populaire n’est plus là le
lieu d’un débat épistémologique. Le premier (Gérard Noiriel)
fait de l’épithète le masque d’une pratique de la
socio-histoire, la seconde (Michelle Zancarini-Fournel), revendiquant
sa lecture de Gramsci et de Thompson dans la décennie 70, accorde
l’adjectif à une histoire des subalternes. Si les deux ouvrages,
comme l’indique leur réception, bousculent le genre canonique de
l’histoire de France, l’épithète est évanescente, tôt
subsumée par le lexique de la domination ou l’argument des
subalternes, par peuple entendu comme sujet politique. Le genre
qu’est l’histoire de France a ses règles, et l’on retient de
populaire l’idée d’un lectorat incapacité dans sa
lecture de l’histoire savante [16].
Populaire serait ainsi l’adjectif d’un sentiment de dénivellation
d’un savoir scientifique dont la traduction éditoriale ne serait
pas exactement celle de la vulgarisation, mais plutôt celle confuse
d’un type d’écriture à inventer. Un type d’écriture qui ne
dégraderait pas une « culture savante » comme dans le
cas paradigmatique de la Bibliothèque bleue de Troyes et de la
culture populaire [17].
L’épithète signerait une écriture autre, qui décalerait une
focale et des habitus professionnels (la note de bas de page) pour
produire une autre histoire, à usage d’un public à
inventer. Populaire serait là une qualité qui vaut lieu, une
épithète lovée dans un récit historique qui décale mezzo voce
les règles d’une écriture, d’un genre. Faut-il relier
l’adjectif aux possibilités d’une alter histoire [18] dont
il ne serait que l’une des pistes suivies bien après-coup ?
Je ne crois pas et au rebours de cette pente, entends populaire comme
un outil opératoire dans la pratique de l’histoire sociale dont il
s’agit de sonder les contours en s’accordant sur une évidence :
l’inachèvement intrinsèque de cet outil dans toute opération
historique. Populaire ne norme pas sur la longue durée, il est deuil
d’une conclusion définitive, épithète ouverte, sans cesse
reconfigurée. Lieu des possibles toujours renouvelés de
l’investigation historique pour qui s’attache à la chair du
social. Lieu mouvant, plastique, hétérotopique car foucaldien,
juxtaposant des espaces de sens irréductibles l’un à l’autre et
pourtant contenus en un point, celui d’un rapport sinon fugitif,
mouvant et situé.
Car si le mot « peuple »
dispose d’une historiographie conséquente [19],
l’épithète « populaire » jouit lui d’une situation
plus contrastée. L’adjectif qualificatif est par nature apposé,
toujours en tension face au nom commun qu’il détermine. Devenu
substantif, donc doté d’une qualité intrinsèque, « populaire »
s’apprécie de l’extérieur. « Populaire » serait,
dans sa forme substantivée ou adjectivale, et dans l’usage qu’en
font les historiens dès-lors qu’il n’est pas une réplique à
Howard Zinn [20],
un lieu indéfini, ou plus exactement l’expression d’une métrique
sans unité autre que son point de départ. Un lieu d’où l’on
parle pour désigner ce que l’on observe dans des confins qui ne
seraient ni exotiques, ni folkloriques, juste populaires car
étrangement familiers. Un lieu qui implique une pensée par cas où
se construit l’objet heuristique dont populaire serait la qualité
première. Dans ce mouvement, populaire ne peut être un concept.
Peut-être une notion pour son empirisme implicite ? Ce n’est
pas une position, mais un espace parcouru dont on ne décrirait que
le terme momentané, celui du temps fugitif de la sensation confuse
d’un dépaysement fugace qu’il faut nommer. Un espace
hétérotopique. Telle serait mon hypothèse, qui en aucune manière
n’entend signifier l’évidence d’une conclusion nihiliste.
« Populaire » qualifie, mais ce qu’exprime cette
qualification est et n’est pas exactement une identité que l’on
réfère politiquement à « peuple », voire dans la
grille marxienne à l’agrégat que seraient les « classes
populaires » ou les « gens », « gars de chez
nous », « ceux qui restent ». « Populaire »
est et n’est pas exactement une identité culturelle, ni un
territoire à parcourir au titre du lexique bourdieusien de la
domination. « Populaire » est et n’est pas cela, ni
même le rêve d’une histoire des subalternes, ou celui plus ancien
d’une histoire d’en-bas. « Populaire » participe du
registre de l’écart, du pas de deux, des espaces comme des
supports indécis où circule l’épithète. « Populaire »
serait pour moi toujours l’expression d’un mouvement, ou plus
exactement d’un horizon indéfiniment reculé : un jeu
d’échelles, un mot par quoi l’enquête en histoire sociale et
culturelle est possible.
Un mot pour braconner
Populaire serait ainsi un « faiseur
d’embarras », selon la formule de Dominique Julia [21]
revenant sur la longue controverse qui suivit la réception de
l’ouvrage de Mandrou sur la Bibliothèque bleue (1964). Il aurait
« la beauté du mort [22] »,
à tel point qu’en 1981, Carlo Ginzburg proposait de mettre le
terme en « hibernation prolongée [23] ».
Je ne reviendrai pas sur cette polémique, ni sur les propositions
que Pierre Bourdieu adresse aux sociologues comme aux linguistes en
1985 dans son article Vous avez dit populaire ? [24]
Mon propos n’est pas ici d’historiographie. Ce qui me retient est
davantage l’événement de ce retour dans l’écriture et les
travaux des historiens, quoique toujours le terme embarrasse. Et cet
embarras vaut position, car partage du sensible auquel l’historien
prend réflexivement sa part, braconnant dans l’après-coup sans
nécessairement expliciter le choix du qualificatif. Son emploi irait
de soi. À ce point populaire vaut rhizome, et qu’importe le point
d’entrée. L’épithète décale, décentre, la pratique des SHS.
Puisque pratiquant l’histoire sociale, je l’entendrai ici d’un
tableau, Joies populaires de Jules Adler. À titre de cas.
Rhizome : Joies Populaires
(Jules Adler, 1898)
Jules Adler, Joies populaires, 1898
Identification du bien ici |
Au Salon de 1898, Joies populaires
de Jules Adler obtient une médaille seconde classe. La toile succède
aux Las (1897) qui, selon son biographe Barbedette, le
consacre peintre des humbles. Joies populaires représente une
foule festive attroupée autour d’un violoniste, sans doute au
Champ de Mars ou sur l’Esplanade des Invalides [25],
un drapeau tricolore où domine le rouge claque. Casquettes (à
l’arrière-plan) et canotiers se mêlent, ainsi que des nourrices,
un enfant avec un cerceau. L’atmosphère est à la liesse,
l’attroupement de circonstance dans une déambulation plus large.
C’est une forme d’instantané de la vie parisienne qu’Adler
croque, en flâneur attentif des rues, comme il le fit pour d’autres
toiles. Son style, alors empreint du naturalisme, se refuse à
l’allégorie, participe d’une méthode documentaire qui ne cesse
de s’accuser tout au long de sa carrière [26].
Si le pluriel est là de rigueur, la composition du tableau place en
son centre, dans un enchevêtrement de visages attroupés, le
violoniste et son instrument. La musique signifierait l’une des
joies populaires du tableau, les autres s’esquissent peu, sinon par
la déambulation – enjouée, joviale ou tranquille semble-t-il – le
long du boulevard, par un mouvement qu’indique en haut à droite le
drapeau claquant à la brise, dont la pointe rouge rehausse le rythme
de la toile. Que faire de ce tableau, qui retint peu l’attention de
l’historiographie [27],
pour interroger l’épithète ? Considérons Joies
populaires, et singulièrement la question musicale portée par
le violoniste, comme « un petit outil sur le
dehors [28] »
de l’adjectif pour le penser en rhizome, cartographier afin que
l’historien arpente ce territoire de proches confins sociaux.
Joies populaires par son lieu
(place, esplanade) se distingue des goguettes du mitan du XIXe
siècle, elles aussi données comme populaires où l’ouvrier
chante, subvertit les airs d’une culture d’en haut par des
messages politiques [29].
Là les barrières, le sentiment d’avoir franchi une frontière
sociale que dénote la goguette, ici l’unité d’une fête.
Jacques Rancière évoque pour se saisir de ces goguettes une
« culture en désordre » de chansonniers subversifs,
poursuivie ensuite (comme la littérature de colportage) par le IIe Empire. Populaire serait alors, dans ces premiers mois de
l’Empire, l’adjectif synonyme de subversion chantée, d’airs
dénaturés par de nouvelles paroles, l’adjectif surtout d’une
poésie puisqu’il n’y a pas de composition populaire. On aurait
là, sans doute, l’une des solutions aux énigmatiques chants du
peuple dont on ne connait pas l’air évoqués par Büchner.
Quoiqu’il en soit, populaire est ici l’épithète d’une
disciplinarisation à venir, voulue par le pouvoir contre l’effroi
qu’est le peuple ouvrier (1848), puis paysan (1851). Une
disciplinarisation dont le qualificatif populaire est le lieu, mesuré
par la norme politique de l’ordre. L’adjectif appartient ici au
lexique de l’écart subversif, dérangeant sinon inquiétant car
non contrôlé, dans la logique d’un espace social dénivelé [30]
puisque ce sont des classes populaires dont le pouvoir se méfie.
Populaire est là l’épithète d’une inquiétante étrangeté
dans l’ordre voulu du politique. Ce qu’il qualifie doit être
surveillé, contrôlé, relié et intégré à la communauté
politique tout en marquant une différence. Populaire est l’étranger
dans la maison ordonnée du Peuple, sujet politique quelles qu’en
soient la déclinaison : suffrage universel masculin, suffrage
censitaire, césarisme… Désigner par ce qualificatif des activités
assigne une place, fait police (des mœurs, des comportements, du
politique…). À cette première strate d’usage de l’épithète,
le point d’entrée de la musique oppose, avec l’enquête Fortoul,
une autre configuration. Il s’agit là, par l’application d’une
norme d’État, et dans la logique d’invention des traditions
nationales, de recenser les chansons populaires. Le savant est
convoqué dans cet horizon du politique, et la définition s’impose
d’en haut. Il s’agit, selon Isabelle Mayaud d’édicter une
norme, qualifiée par des propriétés sociales et l’anonymat de
l’auteur (populaire appartient là au registre indistinct de la
masse), anti-historique puisqu’est populaire ce qui est ancien,
immémorial, et un style, par opposition au littéraire : le
naïf, le simple, le rustique [31].
Importe dans ce crible du savant et du politique dans la fixation
d’une définition du canon populaire la quête implicite d’une
authenticité dont les critères se donnent sous la forme
ramassée du style conjuguée à l’origine sociale, l’anonymat
(indistinction du peuple) et de l’immémorialité. Si l’entreprise
est concomitante à ce qui s’énonce sous le nom de folklore, cette
synchronicité n’est que de façade. Le terme de folklore
s’articule alors au monde savant et littéraire dans l’horizon de
l’invention des traditions [32],
quand le populaire de l’enquête de Fortoul réclame l’intercession
du politique, et l’imposition d’une norme. Cette grille de
lecture est ici aussi distincte de celle précédemment observée
pour les goguettes et les cafés, dont pourtant le développement, et
la surveillance par l’État, est parallèle. Un point d’entrée
les relie néanmoins, fait rhizome : la proximité de l’épithète
avec le politique de peuple, qu’il s’agisse de surveiller,
réprimer, ou figer dans l’illusion généalogique des racines,
pendant social des masses de granit du IIe Empire.
L’emploi de populaire est le signe d’une altérité construite,
imposée, assignée, dans l’ordre du politique et de ses
dépendances.
Devant ces deux exemples juxtaposés
dans le temps, Joies populaires suppose une lecture décalée.
Certes la matière diffère, et derrière le titre, ce sont peu les
mots qui constituent le matériau de l’étude mais la chose
représentée. Ces joies populaires qu’Adler peint, il les a
d’abord croquées au vif de la ville qu’il arpente, dont il
saisit la population. Son tableau est éponyme d’une toile de
Théophile Steinlein (Les Joies populaires) de 1895,
soulignant le compagnonnage et l’intimité des deux peintres.
Théophile Steinlein fixe une ambiance festive évoquant le 14
juillet : dans la presse de l’époque « joies
populaires » apparaît comme une expression récurrente pour se
saisir de l’atmosphère de la fête nationale. La loi Raspail
l’instituait le 6 juillet 1880, il s’agissait là de
républicaniser. Jules Adler livre donc, après Steinlein son
compagnon de peinture d’alors, sa version des joies populaires.
Qu’en écrire devant la confrontation avec son pair d’alors en
peinture pour s’emparer de l’épithète ? Dans la production
d’Adler, a priori, populaire comme adjectif n’apparait
qu’à cette occasion, quand Steinlein est plus prolixe, l’utilisant
également pour une huile sur toile, Manifestation populaire (sd).
L’usage de l’épithète par Jules Adler ressort à la liesse qui
neutralise dans l’adjectif le séparatisme implicite s’attachant
au qualificatif, donné comme à distance. Joies populaires se
propose à la vue du spectateur comme un spectacle d’unité, Peuple
(sujet politique) et peuple (soit ici le monde ouvrier parisien), se
superposent, conjurant l’amphibologie inhérente au mot [33]
sans pour autant la nier, puisque dans styles vestimentaires qui se
côtoient se figure la différence apaisée des classes dans
l’horizon républicain. Cette neutralisation, Jules Adler
l’effectue par l’adjectivation et le vocabulaire de la liesse.
Dans sa peinture le cadre national de la fête républicaine se donne
uniquement par le drapeau qui claque sous la brise, impliquant la
dynamique du tableau, quand la joie est musique (le violoniste, le
chanteur), cœur des lignes de force du tableau. Populaire, là
aussi, est musique. Il y a là sans doute une ligne de fuite à
suivre, pour le second XIXe siècle. M’importe
uniquement ici ce qui se joue dans ce républicanisme adlerien qui ne
convoque, dans les titulatures de ses toiles, ni l’argument du
national, ni celui du patriotisme plus attendu, sans doute
compte-tenu de ses représentations politiques [34].
Joies populaires, déjouant la vertu d’une adjectivation
supposant le multiple ou à tout le moins la distance, donne à voir
l’unicité du sujet politique Peuple. Cette unicité, quand tout
concourt contextuellement à cette représentation du peuple
républicain, se signifie par un retrait de la conflictualité
inhérente au système démocratique, puisque joies -et seulement
joies- il y a. L’épithète pour supposer le peuple sujet politique
réclamé par le drapeau, vaut écart. Populaire dans son pluriel
signifie une somme que le peintre n’énumère jamais exactement,
puisqu’aux alentours du groupe rassemblé autour de la tâche rouge
du violoniste, circulent d’autres silhouettes, d’autres agrégats,
sans qu’aucune gravitation ne se décèle – ainsi l’enfant au
cerceau, la nourrice, s’éloignent, quand des couples sans doute
plus bourgeois, déambulent. Qu’entendre dans ce déplacement où
ici l’épithète réunit quand ailleurs, il discipline, assigne une
place ? Dans ce jeu, la classe a sa place dégondée de toute
conflictualité sans pour autant que ne se signifie la
disciplinarisation. Le politique de populaire – sous le signe de la
concorde nationale – s’impose au prix de son effacement par la joie.
Populaire serait là l’épithète qui s’instaure justement aux
marges du conflit qui structure la démocratie, par l’argument de
la part des sans parts, tout en désamorçant sa potentialité
conflictuelle. Il est là l’addition du peuple (classes populaires)
au Peuple. À nouveau, l’adjectif souligne des configurations
instables bien qu’aucune inquiétude ne colore ici la palette du
peintre. Il n’y a pas, contrairement à la canonique définition
ethno-historique du carnaval, une inversion des valeurs. Il y a le
Peuple, communauté apaisée dans les joies. Terme qui, dans
l’esthétique adlérienne se conjugue aisément à son
républicanisme dreyfusard où toujours le Peuple (sujet politique)
dans sa dimension populaire se saisit dans l’expression de son
triomphe, soit dans la reconnaissance de son intégration à la
communauté républicaine [35].
Du multiple que suppose l’épithète populaire car toujours
corrélée à un nom, expression d’une spécificité, Jules Adler
entend signifier le processus d’une unicité en construction,
Peuple [36],
dans un système, la République.
Joies populaires est là
l’expression d’une configuration fugitive, sinon singulière. Le
tableau est à la charnière de deux époques dans la manière dont
on use de l’épithète pour qualifier. À sa façon, Joies
populaires s’inscrit encore dans l’horizon de l’enquête de
Jules Michelet de 1846, Le peuple. L’historien romantique se
livrait à une enquête, qu’il livre sous la forme d’un tableau
de la France. Tout comme les notes du livre que Michelet assure
« avoir ramassé sur les routes [37] »
et les rues en flânant, Jules Adler a croqué sur le vif les scènes
qui composent sa toile. Tous deux décrivent la diversité populaire,
ce qui la distingue de la bourgeoisie, et comment cet ensemble fait
communauté. Tous deux composent un tableau ordonné, situé dans
l’espace social. Populaire, dans ce mouvement désigne et donne à
voir des types sociaux, que ce soit sous un jour harmonieux
(Michelet, Adler) ou plus inquiétant ailleurs, objet de
surveillance, de répression ou de quadrillage. Populaire désigne
aussi des objets, des figures du peuple au XIXe siècle.
Toutes ont à voir avec l’affirmation du cadre national et la
question ouverte par la Révolution française de la souveraineté
nationale. Cet emploi de l’adjectif colore tout le siècle.
Populaire est ici simultanément le lieu de la liaison et la
déliaison sociale. L’enquête, l’errance, le voyage, ont toute
leur place dans la production de cette qualification adjectivale.
L’épithète est là à la fois facteur de différenciation et
d’intégration implicite à un ensemble plus vaste. Il est l’espace
qu’un autre (ie distinct des classes populaires) arpente, et
mesure, se confronte, territorialise, dans la différence tout en
désignant par l’adjectif [38].
Populaire serait là la forme d’une rencontre, celle qui informe et
situe dans l’espace social.
À la charnière du XXe
siècle, un nouvel usage de l’épithète surgit : celui-ci
s’institutionnalise peu ou prou, ce que l’on aperçoit, par
exemple, dans la formule « théâtre populaire ».
L’adjectif désigne ici un public à venir, à inventer pour
ressourcer la pratique théâtrale. Il n’est pas rencontre et
identification, mais horizon d’un public à inventer, à dévoiler.
On retrouve plus ou moins cette même logique d’institutionnalisation
ensuite dans l’entre-deux-guerres avec, par exemple, la fondation
des ATP et la muséographie qui lui est liée, comme dans les études
sur les savoirs populaires. Ici, il s’agit, dans l’après-coup,
par l’enquête toujours, de nommer ce qui s’abîme, s’oublie.
Populaire enfin, en ces années tournantes de l’entre-deux-guerres,
peut qualifier une ressource comme l’implique, par exemple, cette
citation de Michel Leiris à propos des concerts populaires : « Le café-concert populaire,
actuellement, est à peu près le seul élément grâce auquel le
théâtre “sérieux” conserve encore quelques chances
de pouvoir, un jour, se revivifier [39]. »
L’heure, alors est à l’intérêt
pour les arts populaires, primitifs, comme pour la culture américaine
du cinéma, des pulps et des comics, toujours
implicitement saisis par opposition à une « high culture ».
L’épithète ici n’est que l’avers social de cette « high
culture », il est le reste qu’il faut nommer pour que la
première s’en saisisse, la fasse sienne, se ressource. Dans
l’usage anthropologique et artistique de l’adjectif se niche le
développement d’une science supposée à même d’embrasser tous
les signes et aspects d’une civilisation quand justement, sous les
auspices du politique, la société se reconfigure en front
populaire [40].
Avec la rencontre de l’anthropologie et de l’histoire, ce cours
nouveau de populaire colore ensuite, à partir de l’entre-deux-mai
le travail des historiens (cf. supra). La littérature
populaire devient un objet d’enquête. Le populaire se construit,
s’analyse au titre de l’histoire des mentalités sur la longue
durée (Mandrou) au prix de l’oubli de la fugacité des
configurations, ou s’investigue dans le projet des Révoltes
logiques de construire une généalogie discontinue de Mai 68 par
la révolte. Ce qui s’écrit alors sous le signe de l’adjectif
l’érige en lieu d’une géométrie sociale toujours recommencée
puisque l’épithète ne peut jamais atteindre à la précision
d’une grammaire sociologique. À ce point, plus qu’une boucle
bouclée, ces quelques exemples pris à la volée dans
l’interrogation d’un tableau questionnent l’écriture
historique, dans l’abord de ses matériaux comme dans l’usage du
qualificatif. Que produit-on comme effets de réels en caractérisant
par une épithète plastique, toujours en rapport, un fait, un objet,
une culture ?
Une poétique historienne de la
ritournelle (coda)
L’épithète populaire qualifie, chez
les contemporains ou dans l’après-coup de l’écriture
historique, des situations, des figures, des objets, des moments,
bigarrés. Elle fabrique inlassablement de la discontinuité pour qui
énumère ses usages. Si elle a la beauté du mort, c’est qu’elle
se refuse au temps étiré, à l’essentialisation de la longue
durée d’une histoire à visée anthropologique. L’adjectif est
fugace jusque dans la répétition de son emploi, multiple dans les
lignes de fuite convoquée pour celui scrutant qui qualifie de
populaire l’objet de son propos. Il esquisse moins une structure,
davantage un rhizome. Il s’aborde en tous points, se refuse à
faire exactement catégorie ou norme de l’écriture. Il est la
marque dans cette dernière du terme d’une distance sociale
parcourue, assignation d’une étrangeté mesurée. Populaire à ce
jeu est refrain, ritournelle, et lieu conclusif de la mise en
écriture d’un objet au fil d’une cartographie ou d’une
topographie sociale qui ne s’énonce jamais comme telle. Qualifier
de ritournelle ce retour de l’épithète dans l’écriture de
l’histoire sociale implique une affaire de temps, par sa
répétition, et de différenciation, par les espaces sociaux
discontinus qu’il convoque. Je prendrai ici comme hypothèse que
l’adjectif dans son emploi qualifie moins un milieu qu’il ne le
configure, dans une temporalité toujours accolée au lieu social
et/ou politique de l’observateur, ou du lieu d’où écrit, dans
l’après-coup, l’historien. Populaire serait donc ici le mot
désignant un rapport. Il découpe des scènes où importe moins la
saisie d’une subjectivité irréductible que son lien avec le
social et/ou le politique considéré. Populaire s’intrique ici
étroitement à la question sociale et s’entend liaison pour
décrire ce qui est aux marges, singulier et étrange, et pourtant
familier. Il est ainsi l’expression du terme d’un voyage et d’une
enquête dont finalement il ne dit rien du trajet, du parcours, du
travail heuristique effectué. Il est l’expression concrète de
temps sociaux pluralisés souvent discordants, et pourtant tenus
ensemble : une unité descriptive sans jamais que l’on ne
puisse exactement en définir la métrique. Celle d’un temps
habité, parcouru, qui ressort aux sociétés sous la forme d’une
structure feuilletée sans cesse reconfigurée, dont il constitue
l’un des rythmes [41].
Ces auspices, pour qui s’enquière de
l’usage du terme chez les historiens du social et du culturel,
supposent une poétique chiffonnière. Cette forme d’histoire est
celle de l’histoire sociale qui, tressant sa problématique,
enquête, explore, et recueille dans sa hotte de chiffonnier les
matériaux de son étude. Le terme dans une tradition
historiographique marquée par l’héritage des Annales et de
l’histoire des mentalités peut s’avérer périlleux. Il s’agit
là moins de récuser Lucien Febvre fustigeant l’historien
chiffonnier d’une histoire historisante [42]
qui va sans but (problématique), et davantage d’entendre cette
poétique chiffonnière dans l’horizon de la cartographie des
espaces sociaux telle que l’histoire sociale et culturelle la
pratique souvent. Marc Bloch notait, recensant la première livraison
de la revue L’Art populaire en 1930, que l’expression même
pour l’historien constituait un « instrument d’analyse
sociale », quoique la définition de « populaire »
fasse (déjà) pour les rédacteurs « embarras ». Il
indiquait :
« Il n'est plus question – maint auteur de mémoires l'a noté – d'opposer à l'art savant je
ne sais quel libre langage esthétique, sorti des tréfonds de l'âme
des humbles ; les motifs inventés dans les villes et les cours,
toutes les révolutions du goût qui ont agité d'abord les cercles
cultivés ont peu à peu pénétré dans les plus rudimentaires
ateliers de campagne. Dans cette conquête, ce qui surtout intéresse
l'historien des sociétés, c'en est le rythme, avec ses longs
retards et ses arrêts ; ce sont aussi les divers canaux par où la
pénétration put se faire. [43] »
Populaire est déjà ici affaire de
circulations et de topographies note-t-il, et l’adjectif marque des
différences à l’intérieur du peuple [44].
Il délimite, trace des frontières. L’historien, qualifiant
de populaire tel objet, telle pratique, use alors d’une poétique
de chiffonnier. Le qualificatif emprunte à Walter Benjamin qui fait
de cette figure du XIXe siècle une métaphore de la
pratique de l’histoire sociale, métaphore qui « dérange les
habitudes historiennes [45] ».
Populaire embarrasse, chiffonnier dérange. Le nouage
de ces termes vaut pour notre propos poétique. En amont même des
propositions de Benjamin [46],
l’analogie du travail de l’historien avec ce type social du XIXe
siècle, la figure du chiffonnier comprend par analogie quelques
traits propres à l’emploi de l’épithète dans l’écriture
historique. Pour Antoine Compagnon, le chiffonnier est d’abord et
avant tout un philosophe de la borne dont la hotte dit le rapport au
temps, le reste, le déchet, qu’il va recycler [47].
Ces propriétés, appliquées à populaire, circonscrivent une
part du travail de l’historien. Populaire est l’expression d’une
distance, d’un rapport : si l’historien ne circonscrit
jamais le trajet qui fait ce rapport, il campe au terme du parcours,
son lieu est la borne du chiffonnier. Un lieu où, pour reprendre les
mots de Marc Bloch, se mesure les canaux de diffusion, les retards,
les arrêts, les nuances, par quoi une idée, une esthétique, une
pratique sociale, se dissémine dans l’espace social. La poétique
de l’historien tient en ce lieu où il collecte des matériaux
épars – des rebuts, des restes, des papiers, dans le langage
chiffonnier – qui forment le socle de son récit. En ce lieu, armé de
sa problématique, l’historien n’est pas flâneur – sinon sa
collecte serait sans but ni structure –, mais le chiffonnier de
Benjamin, « méthodique réfléchi et implacable [48] ».
L’étude de ces matériaux, l’objet de la recherche, tiennent
dans un rapport à la modernité – marchande, sociale, culturelle,
littéraire… Et d’une certaine manière, cet objet et ses
pratiques que l’historien qualifie de populaires, circonscrivent un
passage – dans le lexique benjaminien –, un court voyage au pays du
peuple dans le lexique de Jacques Rancière, ou dans l’ordre
historiographique, une diffusion, une dégradation de la high
culture vers la low culture, et dans l’ordre
sociologique, en empruntant à Richard Hogarth, des espaces sociaux
dénivelés mis en rapport.
Soit. D’où proviennent alors
l’embarras de populaire, et le dérangement des habitudes
historiennes ? Le nouage tient sans doute à la qualité de
ritournelle qu’à l’emploi de populaire pour qualifier l’objet
d’une recherche. La ritournelle interdit la saisie d’un éternel
recommencement « sorti du tréfonds de l’âme des humbles »,
tout en supposant, car refrain, un « éternel contrepoint »,
pourtant toujours insaisissable, car jamais égal à lui-même. Il y
a là tout l’argument de la beauté du mort opposé au
travail de Robert Mandrou sur la Bibliothèque bleue de Troyes et la
littérature populaire. Car l’épithète n’est que le
qualificatif apposé à une dynamique simultanément sociale
(passage, voyage, diffusion…) et temporelle dans l’après-coup de
l’historien. Populaire ici n’est toujours que l’expression d’un
reste, d’un rebut, à recycler et qualifier, il ne tient que dans
des configurations toujours hétérotopiques car vouées à se
déplacer en regard de la modernité. En l’espèce, populaire n’est
qu’une forme, selon les mots de Beckett, « capable d’héberger
le foutoir [49] ».
[1]
Sur cette figure, Antoine Compagnon, Les chiffonniers de Paris,
Paris, Gallimard, 2017, p. 320 et suivantes.
[2]
Jacques Rancière, Courts voyages au pays du peuple, Paris,
Seuil, 1990, p. 7.
[3]
Vincent Chambarlhac, “Nous aurons la philosophie féroce”. Les
Révoltes logiques (1975-1981), La Revue des revues,
n° 49, Printemps 2013.
[4]
« Politiques du voyage », Les Révoltes logiques,
n° 14-15, 1981, p. 2-3.
[5]
Dominique Kalifa, Les historiens français et le populaire, Hermès,
n° 42, 2005.
[6]
Jacques Rancière, « Le chant du peuple », In Courts
voyages au pays du peuple, op. cit., p. 69
[7]
Isabelle Mayaud, Le politique, le savant et le populaire,
L’institution d’un canon des chansons populaires de tradition
nationale française au mitan du XIXe siècle, Genèses,
n° 3, 2019, p. 20.
[8]
Dominique Julia, « Un faiseur d’embarras ?», les
historiens et les débats autour de la culture et de la religion
populaire (1960-1980), Archive des sciences sociales des
religions, n° 176, octobre 2016.
[9]
Walter Benjamin, Paris, capitale du
XIXe siècle.
Le Livre des passages, trad. de l’allemand par
J. Lacoste, Paris, Éd. Le Cerf, 1989.
[10]
Antoine Compagnon, Les chiffonniers de Paris, Paris,
Gallimard, 2017, p. 320.
[11]
François Dosse, « Mai 68, les effets de l’histoire sur
l’Histoire », Politix, n° 6, printemps 1989, p. 47-52. Kristin
Ross, Mai 68 et ses vies ultérieures, Bruxelles, Complexe/Le Monde
diplomatique, 2005. Fédérico Tarragoni, La méthode d’Edward P.
Thompson. Politix, 2017, n° 2, p. 183-205.
[12]
Emilien Ruiz, L’histoire populaire : label éditorial ou
nouvelle forme d’écriture du social ?, Le Mouvement
social, n° 260-270, 2020.
[13]
Dominique Kalifa, Les historiens français et le populaire, Hermès,
n° 42, 2005.
[14]
« Faire une histoire populaire », Revue d’Histoire
Moderne et Contemporaine, 2020, n° 2.
[15]
Michel de Certeau, Dominique Julia et Jacques Revel, « La Beauté
du mort, le concept de culture populaire », Politique
aujourd'hui, décembre 1970, p. 3-23
[16]
Je me contente ici de faire miennes les conclusions d’Emilien Ruiz
pour Le Mouvement social. Emilien Ruiz, L’histoire
populaire, label éditorial…, op. cit., p. 227-228.
[17]
Robert Mandrou, De la culture populaire au XVIIe
et XVIIIe siècles : la Bibliothèque
bleue de Troyes, Paris, Stock, 1964
[18]
Daniel Milo, Alain Boureau, Alter histoire. Essais d’histoire
expérimentale, Paris, Les Belles Lettres, 1991.
[19]
Je me contenterai ici de citer trois textes comme balises. Giorgio
Agamben, Qu’est-ce qu’un peuple ? In Moyens sans fins,
Paris, Payot, 1995, p. 39-47. Jacques Rancière, La mésentente.
Politique et philosophie, Paris, Galilée, 1995. Deborah Cohen,
Peuple, Paris, Anamosa, 2020.
[20]
Sur ce point, dans une bibliographie abondante, je m’appuie
notamment sur les propositions de la microstoria, comme sur celles
défendues par Jacques Revel sur l’étude de cas.
[21]
Dominique Julia, « Un faiseur d’embarras ?»,
op. cit.
[22]
Michel de Certeau, Dominique Julia et Jacques Revel, « La Beauté du mort, le concept de culture populaire », Politique
aujourd'hui, décembre 1970, p. 3-23
[23]
Carlo Ginzburg cité par Dominique Julia, « Un faiseur
d’embarras ? », les historiens et les débats autour de la
culture et de la religion populaire (1960-1980,) op. cit., p. 135.
[24]
Pierre Bourdieu, Vous avez dit « populaire » ?, Actes
de la recherche en sciences sociales, n° 46, mars 1983.
[25]
Salons de 1898, Journal des artistes, n° 26, 26/06/1898, p. 1.
[26]
Vincent Chambarlhac, Amélie Lavin, Bertrand Tillier [dir.], Jules
Adler. Peindre sous la IIIe République, Milan,
Silvana Editoriale, 2017.
[27]
La médaille obtenue l’est, selon son biographe Barbedette, en
réparation de l’oubli des Las au Salon de 1897. Le succès
de La Grève au Creusot en 1899 éclipse Joies populaires.
Cf. Jules Adler. Peindre sous…, op. cit..
[28]
Gilles Deleuze, Félix Guattari, Rhizome, Éditions de Minuit,
1976, p. 73.
[29]
Jacques Rancière, Le bon temps ou la barrière des plaisirs, In Les
scènes du peuple, Paris, Horlieu éditions, 2003, p. 208-209.
[30]
Sur cette notion d’espace dénivelé, qui récuse toute autonomie
du populaire et suppose toujours une circulation dont l’adjectif
n’est qu’un pôle, voir l’introduction de Jacques Revel à
Richard Hogarth en France, textes rassemblés par Jean-Claude
Passeron, Paris, BPI / centre Georges Pompidou, 1999.
[31]
Isabelle Mayaud, Le politique, le savant et le populaire…,
op. cit.
[32]
Au sein d’une littérature pléthorique, Folklore. Artistes et
folkloristes, une histoire croisée, Paris, La Découverte /
Mucem / Centre Pompidou-Metz, 2020.
[33]
Gorgio Agamben, Qu’est-ce qu’un peuple, op. cit., p. 40.
[34]
Vincent Chambarlhac, La manifestation Ferrer, In Vincent
Chambarlhac, Amélie Lavin, Bertrand Tillier, Jules Adler,
Peindre sous la IIIe République, op. cit.
[36]
Laurent Bihl, le peuple multiple, le peuple unique : Jules
Adler et Théophile-Alexandre Steinlein, illustrateurs de leurs
temps (1893-1923), In Vincent Chambarlhac, Amélie Lavin, Bertrand
Tillier, Jules Adler, Peindre sous la IIIe République,
op. cit., p. 77-86.
[37]
Jules Michelet, A M. Edgar Quinet, Le peuple, Paris,
Garnier-Flammarion, p57-58.
[38]
Pascale Alexandre-Bergues [dir.], L’Idée de littérature à
l’épreuve des arts populaires (1870-1945), Paris, Classiques
Garnier, 2015, p. 8.
[39]
Michel Leiris, Documents, volume II, p. 306, cité par
Claude-Pierre Perez, Du « populaire » dans Documents
(1929-1930), In Pascale Alexandre-Bergues [dir.], L’Idée de
littérature, op. cit., p. 112.
[40]
Vincent Chambarlhac, « Les savoirs politiques sur le peuple »,
In Xavier Vigna, Jean Vigreux, Serge Wolikow, Le pain, la
paix, la liberté. Expériences et territoires du Front populaire,
Paris, Éditions sociales, 2006.
[41]
L’analogie avec la ritournelle, s’emprunte à Félix
Guattari, L’inconscient
machinique, Paris,
Recherche, 2009 (1979).
[42]
Lucien Febvre, Sur une forme d'histoire qui n'est pas la nôtre,
Annales. Économies, sociétés, civilisations, 3e année,
n° 1.
[43]
Marc Bloch, L'art populaire, Annales d’histoire économique et
sociale, 2e année,1930, n° 7, p. 405.
[45]
Arlette Farge, Walter Benjamin et le dérangement des habitudes
historiennes, Cahiers d’anthropologie sociale, n° 4, 2008, p. 27-32.
[46]
Cette archéologie, aidée par le travail d’Antoine Compagnon (Les
chiffonniers de Paris, Paris, Gallimard, 2017), est aussi la
reprise de la méthode de travail de Walter Benjamin débusquant la
figure du chiffonnier derrière celles du flâneur et du
collectionneur. Cf. Marc Berdet, Le chiffonnier de Paris. Walter
Benjamin et les fantasmagories, Paris, Vrin, 2015.
[47]
Antoine Compagnon, Les chiffonniers de Paris, Paris,
Gallimard, 2017, p. 15, p. 294 notamment.
[48]
Marc Berdet, op. cit., p. 9-10.
[49]
Samuel Beckett, Tom F. Driver, « Beckett by
the Madeleine », Columbuia
University Forum, Eté 1961, p. 3. Je
dois la découverte de cette citation et de l’entretien dont elle
est issue à l’article de Claude-Pierre Pérez, op. cit.
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