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Léon Rosenthal, militant, critique et historien d'art

Eug[ène] Vial, « Léon Rosenthal », Nouvelle revue du Lyonnais, n° 3, septembre 1932, p. [139]-140 :


« Léon Rosenthal, professeur d’Histoire de l’Art Moderne à la Faculté de Lyon et Directeur de nos Musées, est mort, à Lyon, le 15 août dernier, des suites d’une douloureuse maladie, supportée depuis deux ans, avec un admirable courage. Pendant de longs mois, il avait souffert, plus encore que de son mal, de l’inactivité forcée qui le retenait loin de la Faculté et de son Musée, cependant si proche ; sa haute intelligence, son fervent amour de l’Art et des Artistes lui avaient fait du travail une joie et un besoin.
Léon Rosenthal n’était âgé que de 62 ans. Né à Paris le 2 juin 1870, reçu agrégé d’Histoire et de Géographie en 1893, après de brillantes études à Louis-le-Grand et à l’École Normale Supérieure, professeur, de 1894 à 1924, aux lycées de Nevers, Montauban, Dijon et Versailles, puis à Louis-le-Grand et à l’École Supérieure de Sèvres, il avait été nommé, en 1924, professeur à la Faculté des Lettres de Lyon et directeur des Musées de la ville.
L’œuvre qu’il laisse témoigne à la fois de sa grande érudition et de la finesse pénétrante de son esprit ; de l’émotion profonde qu’il éprouvait devant un objet d’art, et du talent qu’il avait d’en analyser, d’en raisonner, d’en exprimer la beauté ; d’en juger l’auteur en psychologue autant qu’en historien.
Une bibliographie, même sommaire, ne saurait être donnée en quelques pages ; je citerai seulement les livres ou plaquettes de Léon Rosenthal sur Carpaccio (1906 ; en collaboration avec Mme Gabrielle Rosenthal), sur Louis David (1904), Géricault, Daumier (1912) ; son volume sur la Gravure (1909, manuel dont il préparait une réédition) ; ses études : la Peinture Romantique, Essai sur l’évolution de la peinture française de 1815 à 1830 (1906), Du Romantisme au Réalisme, Essai sur l’évolution de la peinture en France de 1830 à 1848 (1914), la Verrerie française depuis 150 ans (1927). Et encore : le Martyre et la gloire de l’Art français (1916), Villes et villages français après la guerre (1918), le Florilège des Musées du Palais des Arts de Lyon (1928). Sans parler de très nombreux articles publiés dans l’Humanité, la France libre, la Gazette des Beaux-Arts, la Revue de l’Art ancien et moderne, et ailleurs.
Comme les lecteurs de Léon Rosenthal, ses auditeurs à la Faculté, aux conférences familières qu’il organisa au Palais des Arts ou à celles qu’il alla donner en Amérique, ont tous rendu hommage à l’écrivain et au conférencier dont ils goûtaient la compréhension, l’enthousiasme et l’esprit.
Au Musée de Lyon, il fut un directeur actif et avisé. Nous lui devons notamment, à Saint-Pierre, la réfection et le reclassement des salles des peintres français et des peintres lyonnais (cette dernière presque terminée) ; la réalisation d’une rétrospective de Seignemartin à l’occasion du cinquantenaire de la mort de ce peintre. Lorsque la maladie l’éloigna du Palais des Arts, Léon Rosenthal poursuivait l’aménagement de l’éclairage électrique dans les galeries du Palais et l’installation du futur Musée de Sculpture dans l’église de Saint-Pierre.
Dans son cabinet de directeur, les visiteurs venaient nombreux : artistes, collectionneurs ou simples curieux. Avec une courtoisie toujours aimable, il conseillait les uns, renseignait les autres, toujours heureux de mettre au service de tous son expérience et son savoir. Aussi fut-il, au Palais des Arts et à la Faculté, un chef et un maître aimés. Une de ses dernières joies fut de pouvoir encore réunir chez lui, pendant sa maladie, ses étudiantes et ses étudiants pour leur continuer son enseignement.
Il était droit, juste, et infiniment bon, et son souvenir sera fidèlement gardé par ceux qui, ayant connu son cœur, regrettent en lui l’homme et l’ami. »


(communication obligeante de Gérard Bruyère)