Le vote CPNT (1989-2002) : la chasse, du loisir à la politisation * |
« De tout temps, la chasse a été évoquée, racontée,
analysée : trophées de chasse, scènes de chasse, histoires de chasse ont
fait la joie des romanciers, des poètes, des sociologues [1] »,
à cette liste établie en 1985, on pourrait aujourd’hui ajouter les politistes
et les historiens du politique, même si ces derniers avaient pu déjà étudier le
braconnage et les délits forestiers sous l’angle d’une expression politique au
cours des siècles précédents.
La chasse, qui pendant longtemps a permis aux ruraux d’avoir
un complément de viande dans leur alimentation, est devenue peu à peu un loisir
populaire, essentiellement au cours du siècle dernier, sans pour autant
éclipser une chasse de distinction sociale, celle de la noblesse,
l'aristocratie et la bourgeoise [2].
Ce loisir, qui a sa presse spécialisée (en particulier Le Chasseur français [3],
concurrencé depuis par d’autres titres), ses commerçants, ses modes
vestimentaires et même depuis peu une chaîne télévisée sur le câble [4],
est bien structuré et encadré par une fédération nationale de chasse qui
regroupe de nombreuses associations agréées. C’est le régime de Vichy, qui dans
un souci centralisateur, de contrôle, mais aussi par son agrarisme particulier
caractérisant la Révolution nationale, a mis en place les Fédérations
départementales des chasseurs [5].
Comment alors expliquer le transfert d’un loisir vers le
champ politique ? Qu’est-ce qui permet d’expliquer l'émergence d'une
nouvelle force politique en France, fondée sur la défense de la chasse ?
C’est bel et bien un lieu inattendu du politique et qui permet de s’interroger
sur la politisation du monde rural.
Mais n'est-ce pas aussi une expression parmi d'autres, d'une
« crise du politique » ? En France, le clivage gauche-droite qui
structure le modèle républicain serait malmené depuis les années 1980 avec
l'émergence d'une opposition catholique-laïc, et qui se réalignerait peu à peu
sur « le critère de l’insécurité et de l’immigration », selon les
mots du politiste grenoblois Pierre Martin [6].
Il s'agit alors de présenter ce vote CPNT sous l'angle d'un « vote
anti-système, un vote éclaté [7] »
qui permet de dépasser le clivage traditionnel gauche/droite pour arriver à un
clivage ville/campagne. C'est ce que suggèrent avec finesse les géographes
Michel Bussi et Loïc Ravenel, dans leur étude sur les « écologistes des
villes et les écologistes des champs [8] ».
Ces enjeux de pouvoirs et d'espace s'inscrivent aussi dans un processus plus
ancien, une épaisseur historique, sans doute négligée, par l'étude spatiale de
nos collègues géographes, celle de l'agrarisme français.
CPNT puise, me semble-t-il, aussi bien dans une matrice
conservatrice et républicaine, réactivée après 1945, par les partis politiques
paysans (comme le Parti paysan de Paul Antier), puis le CNIP (Centre National
des Indépendants et Paysans) que dans des partis qui après la résistance
s'implantent avec succès dans les campagnes comme le PCF. Ce discours s'appuie
également sur celui de la FNSEA ou de la Coordination rurale.
En 1989, au moment où la République fête avec faste le
bicentenaire de la Révolution, d’aucuns profitent de cette commémoration pour
réaffirmer que ce droit de chasse est une conquête de la liberté, arrachée en
1789. Cette vision idyllique tend, toutefois, à occulter les périodes de
restrictions du droit de chasse en particulier au début du XIXe siècle.
Derrière cette image d’Epinal d’une conquête populaire du
droit de chasse, il ne faut pas oublier qu’au cours des années 1970-1980, on a
vu se développer un encadrement juridique important. Il s’agit d’une
législation plus forte afin de protéger la faune, mais aussi de structurer ce
loisir en fédérations contrôlées ; le permis de chasser devenant au cours
de cette période un véritable examen [9].
Cette évolution est liée aux changements profonds des sociétés
européennes ; urbanisation accentuée, émergence de l’écologie et
protection de la nature conduisent à la création d’un ministère de
l’environnement (1971). Les conflits récurrents entre les décideurs et les
chasseurs, puis les législateurs et les chasseurs scandent les manifestations
du malaise, voire de la fronde d’une partie du monde rural. D'autant qu'une
image dévalorisante de la chasse et des chasseurs a pris le pas dans notre
société sur celle idéalisée par Marcel Pagnol ou Maurice Genevoix [10].
Dès lors on peut comprendre la fondation et l’émergence de
Chasse Pêche Nature et Tradition qui offre au chasseur un outil de défense,
d’autant plus que la pratique de la chasse ne cesse de décliner (en 1972 il y
avait 2 026 376 permis délivrés, en
2001 il n’y en a plus que 1 425 163 [11])
et que les sondages d’opinion soulignent que près de 60% des Français la
réprouvent [12].
Dans ces conditions, CPNT serait alors le défenseur d’une
citadelle assiégée. Mais comment expliquer sa durée politique ? Est-ce
parce que le mouvement défend une « écologie autrement », une
certaine conception de la nature et des traditions ? Est-ce aussi parce
qu'il se propose de lutter contre une Europe technocratique ? C'est sans doute
là une des clefs de l'émergence de cette force politique qui conteste à sa
manière le libéralisme prôné et mis en œuvre par l'Europe et les gouvernements
européens ; les campagnes, avec les jachères imposées, les bureaux de postes
qui ferment se sentant sacrifiées.
Ces questions nous invitent à présenter comment se structure
le vote CPNT et dans quelles conditions.
Après avoir analysé les bastions et l'ancrage de CPNT, mais
aussi les zones réfractaires, en soulignant le rôle primordial du mode de
scrutin, j'évoquerai le discours identitaire de CPNT. Enfin, on s'interrogera
sur la nature de ce vote : s'agit-il d'un vote « de chasseurs en
colère ? »
L’étude des cartes électorales de 1989 à 2002 conduit à un
constat assez simple : l’espace politique et géographique de CPNT se situe
essentiellement à l’Ouest d'une ligne allant de Cherbourg à Nice. C’est la
France rurale qui vote CPNT. Remarque peu originale, en soi, qui amène
toutefois à proposer certains commentaires.
En premier lieu, la carte électorale de CPNT qui souligne
effectivement le clivage/ville campagne doit être mise en relation avec celle
du vote Verts, étude menée à plusieurs reprises par les politistes et les
géographes [13].
On voit ainsi poindre deux Frances, l’une rurale attachée à
la chasse, l’autre urbaine séduite par le discours écologiste. Le vote
écologiste sur la même période est donc avant tout urbain (tout comme récemment
le vote Chevènement).
Cette lecture en positif et négatif reste générale, dans un
maillage plus précis, on peut repérer un vote CPNT dans des villes au cœur de
ces bastions ruraux, et bien sûr des votes écologistes en milieu rural comme en
Bretagne ou en Alsace. Le jeu d'échelles ou le cadre de l'observation est ainsi
primordial pour appréhender au mieux ce suffrage : national, régional,
cantonal, communal ou même au bureau de vote.
Deuxièmement cette France rurale semble être celle des zones
de chasse au gibier d’eau, mais aussi au grand gibier des forêts : Baie de Somme et campagnes du Pas-de-Calais, Manche ;
Charentes-Maritimes et Sud-Ouest (Landes, puis Gironde). Pointent également les
régions de Sologne et de Brière. A contrario, d’autres zones de chasse sont absentes de cette carte
électorale : une partie des Ardennes ou au cœur de la Bourgogne, le
Morvan.
Enfin, comme le rappelle Jérôme Fourquet, qui a étudié à
plusieurs reprises CPNT, à propos des élections européennes de
1999 : « la carte du vote CPNT présente certaines ressemblances
avec la carte de l’abstention. L’abstention a été faible dans bon nombre de
régions où le vote CPNT a été important et inversement, l’abstention a été plus
forte dans des régions où le vote CPNT était plus faible [14] ».
Il s’agirait alors d’une offre nouvelle qui évite l’abstention, un vote refuge,
voire défouloir. Mais surtout, les différentes enquêtes montrent que pour les
électeurs CPNT, le vote est sacré ; c'est un devoir de citoyen. Marqueur d'une
culture républicaine, tantôt héritée du gaullisme, du socialisme ou du
communisme [15].
L’enseignement le plus important sans doute au regard des
différents scrutins électoraux entre 1989 et 2002, c’est l’enracinement du vote
CPNT. La chasse et les traditions seraient-elles au centre des préoccupations
des Français ? Pas seulement, le vote CPNT exprime d'autres malaises, sur
lesquels nous reviendrons.
Il y a une fidélisation de l’électorat et même une
propagation, une diffusion du vote. Si au début de son histoire, ce mouvement
Chasse Pêche et Tradition (nom utilisé aux élections européennes de 1989)
captait péniblement 750 000 voix, puis 800 000 en 1994 [16],
en 1999 il progresse fortement en passant à 1,2 million de suffrages (un
gain de 400 000), score confirmé en avril 2002 : Jean Saint-Josse
ayant 1 204 689 suffrages, soit 4,23%[17].
Ainsi au cours des élections, CPNT gagne des sièges et
occupe une place dans le système politique :
- aux régionales de 1992, 29 élus dans 13 régions (dont
Aquitaine :10 ; Midi-Pyrénées : 2, Nord-Pas-de-Calais : 2, etc.)
- aux régionales de 1998, 32 élus dans 17 régions :
(Aquitaine : 8, Bourgogne : 2, Bretagne : 1, Centre : 1, Champagne-Ardenne
: 1, Franche-Comté : 1, Languedoc-Roussillon : 1, Limousin : 2, Lorraine : 1,
Midi-Pyrénées : 2, Nord-Pas-de-Calais : 2, Basse-Normandie : 2, Haute-Normandie
: 1, Pays de la Loire : 3, Picardie : 1, Poitou-Charentes : 2, Rhône-Alpes : 1)
Dans la foulée de ses succès CPNT obtient, après deux
tentatives infructueuses, six députés européens en 1999[18] qui participent à la création du groupe parlementaire européen indépendant
intitulé « Europe des démocraties et des différences (EDD) ». La
plupart des observateurs ont titré sur ce phénomène CPNT qui a plus de députés
que le PCF ou le FN [19].
CPNT progresse à la fois dans ses bastions et surtout
le mouvement élargit sa base par voisinage, on pourrait presque dire par
capillarité.
La carte synthétique du vote CPNT (publiée à plusieurs
reprises par le CEVIPOF ou encore l’UMR IDEES 6063 de Rouen) montre nettement
les bastions et les zones réfractaires. Les zones de force sont : la Somme, le
Calvados, les Charentes-Maritimes, la Dordogne, la Gironde et les Landes. Et
dans une moindre mesure le Lot, le Lot-et-Garonne, la
Corrèze, la Haute-Vienne, le Nord-Pas-de-Calais, la Corse. Cette logique n'est
pas départementale bien sûr, mais cantonale. Les zones réfractaires sont avant
tout urbaines, mais peuvent être aussi rurales.
Toutefois ce vote reste tributaire du mode de scrutin
Les réussites et les échecs de CPNT tiennent avant tout au
mode de scrutin et aux enjeux électoraux [20].
CPNT obtient de bons résultats lorsque les élections se font au scrutin
proportionnel ; mais aussi en fonction du caractère des élections.
Les enjeux régionaux ou européens lui sont favorables et
cela pour plusieurs raisons : d’abord sur le plan local, le rôle de
l’aménagement du territoire, sur le poids réel ou idéalisé des campagnes est
important. Cela se voit en Bourgogne où CPNT obtient 2 sièges aux élections de
1998 et permet à la droite de gouverner la région ; François Patriat peut alors
déclarer que CPNT est « une redoutable machine électorale qui transforme
des voix de gauche en électeurs de droite [21] ».
Mais ce ralliement n'est pas toujours à sens unique, il
permet à plusieurs régions d’avoir une majorité tantôt à gauche tantôt à
droite, même si en majorité, il s'agit d'un appui aux conseils régionaux de
droite ; peut-être s'agit-il d'un ralliement à la couleur politique dominante
traditionnellement dans ces régions (ou perçue comme telle par CPNT).
A l’échelle européenne, il s’agit de s’opposer aux
directives considérées comme anti-chasse primaire et de s'affirmer comme un
mouvement d'inspiration souverainiste, jouant là encore sur le mythe fondateur
de la Révolution française, tout en ayant à affronter la concurrence politique.
En 2002, c’est le succès de 1999 aux élections européennes,
qui a donné des ailes à Jean Saint-Josse, mais aussi la forte mobilisation
contre le gouvernement de Lionel Jospin, à la fois parce qu’il avait fait
entrer des écologistes au gouvernement et à cause de la réforme du cadre
législatif concernant le chasse. Le « monsieur chasse » du
gouvernement, François Patriat, n'a pas donné entière satisfaction à CPNT.
Ainsi, fort de cette fronde et d’une vague jugée porteuse,
CPNT a tenté de profiter des échéances électorales de 2002 ; aux
présidentielles, Jean Saint-Josse a confirmé les résultats de 1999. Toutefois,
aux législatives, CPNT qui a présenté, dans 85 départements, 405 candidats dont
186 femmes, ne totalise que 422 448 voix. Perte de
800 000 voix, soit les 2/3 de l'électorat ; il semble bien que le
clivage gauche-droite soit plus fort, soulignant ainsi l’échec relatif de CPNT.
Ce qui tend à bousculer quelque peu les analyses politiques récentes qui
soulignaient l'érosion du clivage gauche/droite. Il est vrai cependant que ces
élections marquent le rejet de la cohabitation et interviennent après la
secousse du 21 avril ; remettant peut-être le système politique sur
son axe bipolaire.
Les élections au scrutin uninominal à deux tours pointent
donc les difficultés de CPNT : les enjeux étant plus globaux bien sûr, et
ce, malgré les prétentions récentes de CPNT qui ne se définit plus seulement
comme un vote de chasseurs.
Un troisième échelon devrait être pris en compte ; c’est
celui des élections municipales où l’on assiste à certaines réussites de CPNT,
avec la conquête de nombreuses mairies, en particulier dans le sud-ouest. Ce
jeu d'échelle, ce maillage du territoire est essentiel pour comprendre
l'implantation de CPNT ; on retrouve là le poids des notables locaux et les
conclusions de l'enquête menée sous l'égide de Denis Peschanski et Gilles Le
Béguec sur les élites locales apportent un éclairage important pour comprendre
cette réussite ; certes il ne s'agit pas du même contexte, loin s'en faut, mais
la grille d'analyse des réseaux retrouve toute sa place et sa pertinence [22].
Ces cultures politiques différenciées régionalement doivent
être signalées. Pour une analyse plus fine, je renvoie aux données disponibles
à l’échelle des 36 000 communes de France : ces données ont été
rendues publiques par le Ministère de l’Intérieur et font l’objet d’analyses
précises par Michel Bussi[23].
Quelques exemples mettent en exergue le poids d’un leader
local, d’un notable CPNT, qui ayant la confiance de ses concitoyens, peut
prétendre à d’autres mandats. Quel discours réunit les cadres, les militants et
les électeurs CPNT ?
Le droit de chasse menacé ?
CPNT, qui au départ était simplement CPT, se structure
véritablement contre la remise en cause du droit de chasse. En septembre 1989,
l’association CPNT est créée. C’est la loi de 1901 sur les associations
– qui à elle seule aurait pu donner lieu à une communication lors de
ce colloque – qui préside comme pour la plupart des autres partis
aux destinées juridiques et structurelles de CPNT.
Cette association dénommée « Mouvement », selon
l’article 1 de ses statuts, article donnant la philosophie de
l’association, a pour objet « de regrouper et de défendre par tous les
moyens légaux toutes les personnes qui, sans exclusive, veulent œuvrer pour la
défense et la promotion des régions de France, dans le respect de leur diversité
et de leurs spécificités. Dans cette perspective, il s’attache notamment à la
défense des valeurs de la ruralité et des intérêts du monde rural, ainsi qu’à
la valorisation des activités traditionnelles ou culturelles sur lesquelles se
fondent les identités régionales, en particulier de la chasse et de la pêche.
Il a enfin pour objet la protection et la gestion de la
nature, patrimoine de l’Humanité, notamment par la recherche et le contrôle
scientifique de toute pollution de l’eau, de l’air, du sol, de la faune et de
la flore et des remèdes à y apporter [24] ».
Tout est dit, et il s’agit pour CPNT de décliner partout
cette profession de foi de défense de la nature, des traditions, des régions,
du monde rural. On retrouve ici un parfum d’agrarisme et un discours
communautariste proche des thèses de la nouvelle droite, mais qui a aussi ses
adeptes au sein d’une gauche à la culture républicaine de type
« cassoulet, ortolans, rugby et comices agricoles ». Toutefois,
derrière l'ironie facile, il ne faudrait pas oublier que cette mobilisation
veut donner une image valorisante du chasseur humilié par un discours
anti-chasse primaire. Cette culture de la chasse est vécue comme une
transmission, comme un patrimoine qu'il ne faut pas négliger. Si les chasseurs
ne sont plus majoritairement des ruraux, mais bien souvent des hommes ou des
femmes qui vivent au sein d'un monde périurbain, leur attachement à ce loisir
est révélateur d'un respect de la culture de leurs ancêtres [25];
c'est en quelque sorte l'expression d'une « identité de classe [26] ».
Les peurs et les dénonciations de CPNT
Ainsi on s’élève contre les technocrates européens,
réactivant en quelque sorte un populisme, voire un poujadisme des campagnes,
qui défend avant tout la France des terroirs contre l’Europe des directives. Le
premier axe de bataille est la remise en cause de la protection des oiseaux
migrateurs ; la directive 79-409 du 2 avril 1979 ayant ouvert la fronde
des chasseurs. L’appel de Pau, alors lancé par Jean Saint-Josse, Président de
la société de chasse de Coarraze (et militant RPR), reçoit le soutien de
10 000 chasseurs.
Dès lors, il s’agit pour ceux qui sont à l’origine de CPNT
de dénoncer les lointains fonctionnaires européens et l'écologie des villes,
afin de se présenter comme les vrais défenseurs de la nature, des traditions.
Il s'agit aussi pour CPNT de se défendre contre les associations de défense des
animaux, en particulier des oiseaux migrateurs. C'est
sur cette pierre d'achoppement qui se joue souvent dans un cadre juridique que
CPNT défend la chasse.
D’autant plus que les campagnes françaises connaissent
un malaise grandissant, lié à une politique d’abandon des services publics de
proximité au nom de la rentabilité ; après les fermetures des écoles, ce
sont les fermetures des bureaux de postes qui frappent le monde rural. Ainsi le
tissu de solidarité est déconstruit et CPNT peut alors exploiter ce mal-être du
monde rural qui doit en même temps faire face aux crises répétées de la
production agricole : à la fois par les mesures liées à la réforme de la
PAC, qui conduit à des jachères, mais aussi aux crises de la « vache
folle » ou du mouton, liées aux dérives du système productiviste. CPNT
redonne alors confiance et fierté aux « délaissés du système ».
Le deuxième ennemi déclaré de CPNT, ce sont les Verts et en
particulier Dominique Voynet. Tout le discours tend à diaboliser les Verts,
alors que CPNT se présente comme un mouvement écologiste autrement, appuyant
son argumentaire sur une étude de CSA qui souligne que « 76 % de l’électorat CPNT tient à la valeur “nature”
défendue par le mouvement contre 49 % à peine pour la valeur “chasse”, qui
reste derrière la valeur “pêche” (55 %) et la valeur “traditions” (50
%) ». C'est ce qui fait la complexité et la variété de CPNT. Comme le rappelle
Henri Sabarot, maire de Carcans-Maubuisson et conseiller régional CPNT :
« L’électorat CPNT est avant tout rural. C’est celui des petites communes,
de la campagne. Il y a une dizaine d’années, la majeure partie de notre
électorat était celui d’une contestation au niveau de la chasse. Il a pas mal
évolué au fil des élections. Actuellement, il se compose d’un tiers à peine de
chasseurs. Le reste est un vote de sympathie, mais surtout de plus en plus de
ruraux qui votent pour des valeurs de défense de l’environnement. CPNT est
porteur d’une écologie de terrain, en opposition avec l’écologie citadine. Pas
mal de gens se retrouvent dans nos discours sur les valeurs de ruralité, comme
l’aménagement du territoire équilibré et l’analyse des services publics en milieu
rural. Nous sommes les vigies du monde rural ».
Ce constat fort judicieux montre
en fait l’espace pris par CPNT. Il s’agit de canaliser tout un courant
régionaliste, traditionaliste, que le Journal télévisé de 13 h. sur TF1
s’emploie à faire revivre. Mais derrière cette mise en scène, cette
folklorisation, la quête d’un « âge d’or » met en avant la crise du
monde rural, qui semble abandonné, voire sacrifié, sur l’autel des politiques
exigées par le traité de Maastricht et celles mises en œuvre par les gouvernements
de gauche comme de droite. CPNT ayant soutenu fermement le vote NON au
référendum de 1992, concurrence alors fortement les souverainistes du RPF et
comme le note Jérôme Fourquet : « les deux listes se sont
trouvées en concurrence sur ce segment de l'électorat, ce qui s'est traduit
géographiquement. Dans les cantons à fort vote CPNT, la liste Pasqua/Villiers a
généralement été “bloquée” ou limitée, et à l'inverse lorsqu'elle a obtenu de
bons résultats, la liste Saint-Josse a marqué le pas [27] ».
Le vote NON au référendum de Maastricht, majoritaire dans les campagnes
françaises permet de retrouver ce vote CPNT.
Le vote CPNT est alors un vote refuge, protestataire qui
canalise différentes cultures politiques. Là, ce seront les électeurs communistes
de la baie de Somme, ici ce seront les anciens RPR des campagnes encadrés par
la FNSEA, ou des socialistes des Landes.
Ce discours tend alors à donner une certaine image du monde
rural et de la ruralité. C'est un lieu où les traditions et la démocratie, la
culture républicaine issue de 1789 sont fortement ancrées. Comme si les
sociabilités villageoises, n'avaient pas disparu. C'est sans doute une
reconstruction au regard d'une réalité le plus souvent moins philanthrope.
D'ailleurs, le paradoxe, c'est que le programme économique de CPNT ne remet pas
en cause le libéralisme, dont il s'inspire. Mais il s'emploie à dénoncer les
politiques qui ont trahi, sur un mode populiste, tout en se présentant comme le
champion de la proximité, de l'élu de terrain. Ce poujadisme habillé d'un
discours offensif fait mouche au sein de populations fragilisées.
Il s'agit bel et bien du retour du local dans la vie
politique et « l'apparition de carrières […] articulées autour du
couple région-Europe témoigne de ce renouvellement [28] »,
en particulier pour CPNT.
En 2002, le slogan de CPNT valorise une forte
opposition : la campagne contre la ville ?
S’agit-il d’une rupture comme le soulignent certains
observateurs reprenant à leur compte le discours de CPNT ? Ce n’est pas si
simple, il semble bien qu’il s’agisse en fait d’un développement, pour ne pas
dire de l’aboutissement de l’idéologie communautariste qui préside à la
création de CPNT.
En fait CPNT, en fondant son argumentaire sur le droit aux
différences et la campagne à défendre, redécouvre le projet agrarien des années
30, mais aussi du CNIP et, sous certains aspects de La Terre. C'est pour cela d'ailleurs que le PCF s'évertue à
dénoncer dans L'Humanité et dans La
Terre CPNT, comme machine électorale servant
à capter l'électorat populaire au profit de la droite.
Pour exister politiquement, CPNT a su organiser la colère
des chasseurs. Ce fut l'appel de 1979, suivi de multiples manifestations. La
dernière en date fut la réussite de la mobilisation du 14 février 1998 à Paris,
avec pour slogan « En février, je chasse, en mars je vote ». Slogan
éminemment politique de CPNT qui selon le Figaro mettait Dominique Voynet, « sous pressions [29] »
en réunissant plus de 100 000 chasseurs.
L'ampleur de cette manifestation annonçait les succès aux
élections régionales de mars 1998. Même L'Humanité, sous la plume de Lucien Degoy voyait en cette
manifestation un sursaut de la démocratie : « Conquête
révolutionnaire de 1789, la chasse traverse aujourd'hui une crise d'adaptation
face au développement des loisirs de nature. A tel point que le promeneur, le
cycliste, le randonneur, le coureur à pied n'y voient pas une pratique sociale
comme une autre, un processus de construction et de civilité collective, mais
seulement une gêne pour l'autre, quand ce n'est pas un péril. Il suffisait là
encore d'arpenter les rangs de la manifestation, samedi, pour comprendre
combien l'univers de la chasse reste, dans les campagnes, les bourgs ou les
petites villes, l'une des bases de l'organisation de la citoyenneté. Parce
qu'elle est de plus en plus normée, encadrée, organisée, elle tend du même
coup, elle aussi, à se rapprocher d'un loisir de nature, l'occasion de prendre
l'air entre amis, de partager un bon repas en famille... Pourquoi cette culture
n'aurait-elle pas toute sa place dans notre démocratie ? [30] ».
C'est en particulier sur ce registre que CPNT s'organise et se renforce.
Toutefois, CPNT a su aussi
mobiliser plus violemment, comme pour la chasse à la palombe dans le Médoc. Les agitations plus musclées ont également ces dernières années
caractérisé certaines pratiques comme celle de la baie de Somme où Vincent
Peillon, député socialiste, a été « sauvé » par les gendarmes.
La violence s'est également produite contre les Verts : on
peut noter les agressions répétées lors des meetings de Daniel Cohn Bendit en
1999 et contre des leaders écologistes. Cette radicalisation des pratiques, ces
démonstrations de force, ont même conduit à des arrestations de militants
connus de CPNT : par exemple, Alain Roure, élu régional de CPNT, a été condamné
par le tribunal correctionnel de Privas pour outrages et provocation à la
rébellion.
Violences physiques et verbales peuvent être alors de mise.
Lors du meeting de CPNT à Hesdin (Nord) le 10 avril 2002, Yves Butel, député
européen, après s’être moqué de Dominique Voynet et Guy Hascoët, en appelle à
« chasser deux nouvelles espèces : Le Mamère à moustache et le Cochet frisé [31] ».
C'est pourquoi, entre autres, Jean-Claude Lefeuvre, professeur ornithologue et
membre du Muséum national d'histoire naturelle, ayant préparé un rapport pour
le gouvernement Jospin, déclare que « le gros problème, avec certains
chasseurs, c'est que lorsque des données scientifiques ne leur plaisent pas,
leur riposte, c'est l'insulte [32] ».
Cette violence rappelle aussi celle du monde rural. Violence
ancienne, réactivée par les comités de défense, les syndicats comme la FNSEA ou
le CDJA [33]. On pense
au saccage du Ministère de Dominique Voynet qui fut organisé par des
céréaliers, en février 1999. Mais CPNT se démarque
toujours officiellement de ces brutalités. Pourtant, il peut exister certains
dérapages.
La carte de la répartition nationale des permis délivrés en
France permet de comprendre en partie ce vote. En partie seulement, pour
différentes raisons : d'abord un chasseur peut faire valider son permis dans
plusieurs communes et départements, ce qui fausse quelque peu le nombre de
chasseurs.
Deuxièmement tous les chasseurs ne votent pas CPNT ; il y a
des nuances importantes. Et à l'inverse le seul nombre des chasseurs dans un
département ne suffit pas au décompte de toutes les voix CPNT. Dans l'ensemble,
on retrouve le vote CPNT avec la répartition des permis délivrés. Il faut noter
l'exception des Côtes d'Armor ou des Bouches-du-Rhône,
où le nombre des permis n'induit pas un vote CPNT, là le poids des cultures
politiques traditionnelles est plus fort.
Qui chasse aujourd'hui ? Et Comment ?
Ce n'est plus le braconnier Raboliot, ce n'est plus le
paysan qui connaissait son écosystème, les chasseurs sont pour majorité des urbains
ou périurbains. Ayant hérité de la culture populaire de leurs ancêtres ruraux ;
si la culture est toujours là, la pratique a évolué ; les véhicules tout
terrain 4X4, les carabines longues portées, les tenues kakies, remplacent les
marches, les fusils manufrance et les habits de velours. CPNT valorise et
idéalise cette culture ; le chasseur est celui qui protège et aime la
nature. En ce sens, il participe à la valorisation de l'écosystème. Ce sont là
des traits communs du discours politique qui se retrouve jusque sur les
voitures avec un autocollant paradoxal, pour certains : « la chasse, c'est
naturel ».
Dans cette évolution, c’est surtout l'encadrement qui
diffère et les modifications législatives sont importantes. Les sociétés et les
fédérations de chasse offrent un maillage particulier
Sans entrer dans le dédale des fédérations de chasse, il
faut noter comme l’a fait en décembre 1999, la Cour des comptes que
l'organisation de la chasse en France est « complexe ». Les
fédérations départementales de chasseurs (FDC), associations privées, ont la
mainmise sur l'Office national de la chasse (ONC) et peuvent confisquer à leur
profit une partie des taxes cynégétiques finançant cet établissement public
censé contrôler leurs activités. Le document, qui analyse les comptes de l'ONC
pour 1992-97 souligne que l’ONC a permis à plusieurs fédérations de financer
des activités politiques en faveur de CPNT, comme en Gironde et en
Loire-Atlantique.
Sans juger, il nous appartient de souligner ici les
imbrications, les réseaux qui existent et qui permettent de comprendre les
relais utilisés pour asseoir l'implantation de CPNT.
C'est pour cela que le législateur a voulu mettre ou
remettre de l'ordre dans ce maquis. En France tout propriétaire pouvait chasser
sur ses terres (chasse banale) ou il pouvait « en céder l'usage à un tiers
(location) ou à une société communale de chasse. […]. C'était la loi du 10
juillet 1964, [fameuse loi Verdeille] qui oblige(ait) les propriétaires à céder
leur droit de chasse à une ACCA (association communale de chasse agrée) [34] ».
Toutefois, la loi n° 2000-698 de
juillet 2000 relative à la chasse modifie le code rural (article L. 220-1
et suivants) en ce qui concerne l’acte de chasse [35].
Si elle établit un schéma départemental de gestion cynégétique qui reconnaît
une mission accrue aux fédérations départementales des chasseurs, aux ACCA, la
grande nouveauté, c'est la possibilité de retirer ses terres pour convictions
personnelles du droit de chasse. D'où la colère des chasseurs sans parler du règlement
des jours de promenade…
Mais comme : « Tout
chasseur doit adhérer à une Fédération départementale des chasseurs qui à ce
titre perçoit une cotisation statutaire. […] Les Fédérations départementales
des chasseurs constituent l’ossature de l’organisation de la chasse en
France » et servent véritablement de réseau au vote CPNT. L'associatif
débouche sur le politique : en ce sens la notoriété des cadres de CPNT vient de
leur militantisme au sein des fédérations.
Dans ces conditions qui vote CPNT ?
« Le profil
socio-démographique de l’électorat CPNT apparaît assez marqué » comme
l’analyse Jérôme Fourquet, et l’auteur d'ajouter que « l’électorat (est)
le plus masculin (63 % d’hommes) […]. Les agriculteurs sont également
sur-représentés puisque près de 30 % ont été voté pour la liste Saint-Josse en
1999. On observe également que l’électorat CPNT est un électorat
populaire : plus de 20 % d’ouvriers et 14 % d’employés contre 7 % de
cadres. Dans le même ordre d’idée, les titulaires du bac ou d’un diplôme de l’enseignement
supérieur ne sont que 20 %, soit quasiment la plus faible proportion de tous
les électorats [36] ».
Cette analyse pour les élections régionales de 1998, reste tout à fait
pertinente et définit bien la socio-graphie de l'électorat CPNT en 2002 [37].
Ce qui souligne que le vote CPNT
est surtout un vote rural, un vote des campagnes et pas seulement de chasseurs
en colère. Il a su capter des identités multiples pour apparaître comme le seul
défenseur du monde rural. Dans un communiqué récent, ce mouvement déclare même
en parlant d'une éventuelle réforme de la PAC, qu'il « ne laissera
pas faire, et continuera de défendre les agriculteurs français [38] ».
CPNT est un vote rural, même si des zooms régionaux,
soulignent l'ancrage d'autres cultures politiques et surtout le poids du FN…
Ainsi, en avril 2002, Jean Saint Josse est en tête dans 50 cantons (sur un total de 4 214).
CPNT a un espace particulier dans le paysage politique en
France comme d’autres groupes de pression catégorielle ailleurs (par exemple le
parti des automobilistes en Suisse). On comprend mieux ainsi la complexité d’un
mouvement dont les sympathisants se situent pour 40% à droite, 30% à gauche, le
reste à l’extrême droite ou se déclare a-politique…
Mais au-delà du lobby, CPNT incarne dorénavant une force
politique qui compte dans un monde rural qui se sent abandonné, à la dérive.
C’est là l’originalité de CPNT qui a su capter ce malaise profond. Même si sur
ce terrain, il y a de la concurrence, comme Noël Mamère des Verts le voit justement
« l'émergence de CPNT comme force politique dans le milieu rural doit être
prise au sérieux et analysée comme une recherche de dignité humaine face à la
domination d'un monde urbain sans convivialité et niant les valeurs de la
nature [39] ».
Deux écologies irréconciliables ?
C’est ce qui explique que CPNT est difficilement classable
sur l’échiquier politique. Une étude, au cas par cas, en fonction des cultures
politiques locales doit être nécessaire, comme l’évoque avec son humour
caustique l’analyse du Canard enchaîné : « En virée électorale en
Loire-Atlantique pour les européennes de 1999, les propagandistes de
Cohn-Bendit le découvrirent avec surprise : les chasseurs qui menaçaient
d'entraver leurs déplacements étaient pour la plupart des ouvriers communisants
des chantiers navals de Saint-Nazaire.[…] [40]. »
Le mouvement CPNT peut-il surmonter ses
contradictions ? Peut-il dépasser le clivage gauche-droite avec son
« pôle rural » ? Sans doute au regard de la fidélisation de son
électorat. Mais les élections de 2002 peuvent être un frein à cette dynamique
unitaire qui repose sur une négation des différences entre gauche et droite.
D'autant plus que CPNT doit maintenant payer les dettes des campagnes
électorales. Toutefois, CPNT a encore la capacité de rebondir en défendant les
langues régionales, les métiers ruraux et la biodiversité [41].
Il semble bien qu'il soit l’expression politique d’un nouvel
agrarisme inspiré entre autres par l’émergence d'un mouvement de défense et de
revalorisation de soi, mais aussi de la Coordination rurale.
D’autre part, sur certaines terres, CPNT a capté en 1999,
après la scission du FN, une partie de l’électorat d’extrême droite, tel est le
cas dans le Châtillonnais en Côte-d’Or. A contrario, depuis peu CPNT est concurrencée par Droit de
chasse (proche du MNR). On comprend pourquoi Mégret s’empare ici ou là du
régionalisme et des traditions.
Si Jean Saint Josse s’est affirmé républicain, dans un
discours ambigu entre les deux tours des présidentielles, son électorat n’a pas
toujours voté Jacques Chirac, et là où il avait voté massivement au premier
tour pour le candidat CPNT, il s’est reporté sur Le Pen comme en
Charente-Maritime où le candidat du FN gagne 7 000 voix, dans les
Landes 4 000 voix et en Pyrénées-Atlantiques 7 500 voix.
Ce qui semblerait donner raison au chanteur Henri Tachan qui
dénonçait, il y a quelques années déjà, la chasse :
« Sur un'e boîte de conserve, sur un pigeon d'argile,
vains dieux, c'est pas pareil :
Pour les chasseurs, les vrais, il faut de la chair tiède avec
du sangVermeil,
Pour les chasseurs, les vrais, il faut que ça palpit'e de
plumes et de Ramage,
Il faut que ça ait peur, il faut que ça se sauve, bref, que
ce soit “Sauvage”...
La Chasse,
C'est le défoul'ment national, c'est la soupape des frustrés,
La Chasse,
C'est la guéguerr'e permise aux hommes en temps de paix !
Chaque mois de septembre, le plumet au chapeau, ils part'ent
comme en Quarante,
Ranimer la flaflamme du Chasseur Inconnu qu'avait du poil au
ventre,
En cart'e comme les putes, ils dragu'ent à Rambouillet, ils
tapin'ent en Sologne,
Mais quand ils tir'ent leur coup, le client de passag'e se
réveille Charogne...
La Chasse,
C'est le défoul'ment national, c'est le coït des frustrés,
La Chasse,
C'est la guéguerr'e permise aux hommes en temps de paix !
Regardez-les marcher, l'arrogance au visage, le cœur sur la
gachette,
Ces spadassins rentrés, ces héros d'Epinal, ces tueurs de
fauvettes,
Regardez les marcher, ces Zaroff de banlieue, ces Hemingway
d'Neuilly,
Vers le trou à lapin, vers la mare à canards, y fair'e leur
safari...
La Chasse,
C'est le défoul'ment national, c'est la Villette des
frustrés,
La Chasse,
C'est la guéguerr'e permise aux hommes en temps de paix !
Les soldats ça s'enraye, les soldats ça se rouille, c'est
comm'e les Carabines,
Le servic'e militair'e ça s'continue plus tard à coups de
chevrotines :
Pour le chasseur français y avait le perdreau boche ou le
lièvre fellouze,
Pour le chasseur franquiste l'anarchiste rouge-gorge et la
chienne Andalouse...
La Chasse,
C'est le défoul'ment national, c'est le p'tit Vietnam des
Frustrés,
La Chasse,
C'est la guéguerr'e permise aux hommes en temps de paix,
De paix ?! »
Mais à vouloir regarder le vote CPNT que sous cet angle particulier,
voire méprisant, on peut passer à côté d'une réalité plus complexe, celle de la
« révolte des terroirs », selon les mots mêmes de ses dirigeants. Les
mots donnent du sens au combat, mais ont aussi un sens. Dès lors, il s'agit de
comprendre l'écologie des villes et l'écologie de campagnes.
Jean Vigreux
UMR CNRS 5605, Centre Georges Chevrier,
Université de Bourgogne