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Instituer le patrimoine : enjeux et limites
La création du patrimoine artistique dijonnais pendant la Révolution par l’inventaire de François Devosge : collections et institutions
Katherin Landais
Résumé | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Notes | Références
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RÉSUMÉ

L’étude des institutions patrimoniales muséales françaises est un sujet d’envergure qui a fait l’objet de nombreuses publications et continue d’être le motif à de nouvelles recherches scientifiques. À l’heure où le musée des Beaux-Arts de Dijon entre dans une nouvelle ère de son histoire en mai 2019, il est intéressant d’apporter un nouveau regard sur la création de ce site historique et ses collections. Son histoire est associée au travail de François Devosge (1732-1811), professeur de l’école de dessin, chargé dès 1792 d’inventorier les œuvres d’art confisquées par l’État présentes dans les églises et dans les institutions religieuses, ainsi que dans les hôtels particuliers des émigrés. Comme Alexandre Lenoir à Paris, Devosge sut en cette période pleine de bouleversements assurer la sauvegarde et la conservation des biens devenus nationaux. Par cette prise de conscience du patrimoine, des œuvres sauvées de la vente et de la destruction prirent plus tard place dans l’ancien Palais des Ducs et des États de Bourgogne, ainsi que dans d’autres institutions muséales, ecclésiastiques et culturelles. Les recherches actuelles amènent à de nouvelles découvertes et de nouvelles attributions sont possibles afin de reconstituer le patrimoine artistique dijonnais.

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Mots-clés : Dijon, Bourgogne, Révolution, patrimoine, art, François Devosge, inventaire, culture, musée.
Index géographique : Bourgogne, Dijon, musée de Dijon
Index historique : xviiie-xixe siècles
SOMMAIRE

I. Le musée, une institution favorable à l’instruction : une collection emblématique d’un lieu historique
II. Des collections privées aux institutions, pour la transmission d’un patrimoine artistique
III.Des détails précieux pour des identifications possibles
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L’étude des institutions patrimoniales muséales françaises et de ses collections est un sujet d’envergure qui a fait l’objet de nombreuses publications[1] et continue d’être le sujet de nouvelles recherches scientifiques. À l’heure où le patrimoine est mis en lumière pour sa sauvegarde, les musées ne cessent de se développer par leur création ou leur rénovation, en termes d’innovation architecturale ou d’attractivité, à l’instar du musée des Beaux-Arts de Dijon qui se prépare à vivre une nouvelle ère de son histoire par sa restauration et sa rénovation en mai 2019. Au lendemain de la Révolution française, partout en France, des musées virent le jour constituant leurs collections à la suite des saisies révolutionnaires et par des envois de l’État. Au xviiie siècle, à Dijon, la présence d’institutions culturelles comme l’Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres fondée en 1741 grâce au doyen des Conseillers au Parlement de Bourgogne, Hector-Bernard Pouffier, et l’École publique et gratuite de peinture, sculpture et de dessin créée par François Devosge dès 1766 a participé très tôt à réunir des personnalités intellectuelles et à susciter un intérêt public pour les arts du dessin. Celui-ci permit une conscience patrimoniale lors des confiscations des biens et des épisodes de vandalismes liés aux bouleversements politiques de la Révolution qui met un terme à l’Ancien Régime.

Dans le cadre de ma thèse[2], cette étude abordera le processus de patrimonialisation des œuvres d’art à Dijon à travers l’inventaire de François Devosge, une liste manuscrite décrivant plus de cinq mille deux cents œuvres saisies en 1792. Dans un contexte d’urgence, la problématique était le choix des œuvres à préserver de la vente ou de la destruction. L’auteur de l’inventaire devait faire preuve d’intuition visionnaire en ayant à l’esprit les destinations des œuvres utiles à l’instruction et aux institutions : le musée, l’École centrale, les salles de l’Administration, ainsi que les églises paroissiales (Notre-Dame, Saint-Michel ou la coupole des Bernardines) et la cathédrale nouvellement créée en 1791 (Saint-Bénigne). L’étude de l’inventaire de 1792 et de l’histoire de quelques exemples d’œuvres d’art sauvegardées à Dijon permet l’analyse de la création du patrimoine artistique dijonnais. Comment les œuvres ont été choisies sans réels critères de sélection, si ce n’est la conformité avec le fait que les objets « intéressent les arts, l’histoire et l’instruction » ? Quels détails offrent ce manuscrit dans la recherche des œuvres d’art patrimonialisées qui aident à retracer leur histoire et leur provenance au sein des institutions actuelles ?

I. Le musée, une institution favorable à l’instruction : une collection emblématique dans un lieu historique

Dijon est en 1789 une ville parlementaire de 23 000 habitants environ, surnommée comme beaucoup d’autres villes du royaume la « ville aux cents clochers ». En effet, plus d’une trentaine de monuments religieux marquent le tissu urbain qui correspond actuellement au secteur sauvegardé de Dijon et plus d’une centaine d’hôtels particuliers construits pour la plupart au xviie siècle et remaniés au xviiie siècle embellissent la ville.

Lors des événements révolutionnaires, la question des biens des émigrés et des ecclésiastiques avait suscité un vif intérêt de la part de l’Assemblée nationale constituante puis législative. Cette dernière les déclara biens nationaux, suite à la confiscation des biens de l’Église par le décret du 2 novembre 1789, ainsi que celle des propriétés des émigrés et de la Couronne dès le 8 avril 1792. Entre le désir de conservation des chefs-d’œuvres des arts et la volonté de destruction des signes de la féodalité et de la royauté, l’Assemblée suivie par la Convention promulgua plusieurs décrets en faveur d’actions assez contradictoires, amenant à des actes de vandalisme. Toutefois, suite à la destruction des tombeaux royaux de l’abbaye de Saint-Denis en août 1793, la Convention annonça le 24 octobre 1793 (3 brumaire an II) un nouveau décret contre les destructions des « objets qui intéressent les arts, l’histoire et l’instruction » et pour le transport des objets dans les musées[3]. L’idée d’un patrimoine utile à l’instruction a été très tôt développée par Talleyrand et l’abbé Grégoire.

C’est dans ce contexte mouvementé que l’Administration du District de la Côte-d’Or fit appel à François Devosge, peintre et sculpteur, professeur de l’école de dessin de Dijon, en raison de ses qualités artistiques et professionnelles, afin de travailler à la conservation des objets d’art en Côte-d’Or dès 1791. Sollicité très tôt pour surveiller les monuments des arts, il commença son travail d’inventaire avec un « Catalogue » de toutes les œuvres saisies le 13 novembre 1792 (soit le 23 brumaire an I de la République française) et le remit officiellement le 17 novembre 1794 (27 brumaire an III), mais continua à remanier le manuscrit bien des années plus tard. Il dressa la liste de tous les biens saisis dans les demeures des religieux et religieuses dont une grande partie provenait du couvent des Ursulines ou de l’abbaye de Cîteaux, ainsi que dans les hôtels particuliers et résidences des émigrés à Dijon et dans ses alentours. Les émigrés étaient pour la plupart issus de la noblesse de robe de Dijon, de la noblesse d’épée, mais certains étaient des bourgeois, d’autres des négociants et il faut naturellement y inclure des prêtres réfractaires. Dans ce répertoire classé par propriétaires des biens saisis, Devosge décrivit des milliers de tableaux et sculptures d’artistes de renommée tant internationale que régionale, une grande quantité de gravures qui atteste l’intense diffusion des œuvres d’art et un bon nombre de dessins, sans compter des objets d’art jugés remarquables comme une pendule décorée « de deux excellentes figures en bronze » et de nombreux livres illustrés. En effet, cet inventaire « des monuments des arts » composé de cent trente-six feuillets est le premier document officiel dans la politique de sauvegarde des objets intéressant les sciences et les arts. Sa précision et ses annotations détaillées en font un manuscrit rare permettant de connaître la culture visuelle à Dijon à la fin de l’Ancien Régime. Dans l’inventaire de François Devosge, chaque œuvre d’art est inventoriée ainsi : le numéro (sauf pour les livres et quelques œuvres), puis la description brève de l’œuvre avec son sujet, son support, sa technique parfois, son auteur ou son attribution, ses mesures et son mode de présentation (cadre, piédouche, porte-feuille, etc.). Devant chaque item, des lettres en majuscule C.M., C., V., C.D., C.E.C., C.St.B., C.St.M. et C.N.D. renseignent sur le sort des œuvres fixant un état présent dressé après la rédaction de l’inventaire : destinées à être vendues, à être conservées au Musée des Beaux-Arts de Dijon, à aller dans d’autres lieux tels que les salles de l’administration centrale, l’École centrale, l’Église Saint-Bénigne, l’Église Saint-Michel ou l’Église Notre-Dame à Dijon, ou encore rendus à leur propriétaire. François Devosge (fig. 1) devint au moment de la rédaction de l’inventaire, conservateur des monuments des arts le 30 décembre 1794 (10 nivôse an III) faisant ainsi partie de la Commission des sciences et des arts[4]. Il fut élu aussi directeur de l’École de dessin le 9 juin 1795 (21 prairial an III), puis, fonda le Musée des Beaux-Arts de Dijon en 1787 qui ouvrit au public en 1799.

<b>fig.1</b>François Rude, François Devosge
fig.1 François rude, François Devosge, plâtre, xixe siècle,
dépôt de l’École Nationale des Beaux-Arts de Dijon, Musée de la Vie Bourguignonne de Dijon
source : © Musée de la Vie Bourguignonne Perrin de Puycousin/Katherin Landais

Bon nombre d’œuvres furent conservées grâce à son travail difficile et désintéressé qui l’amena à entrer dans les demeures des personnalités qu’il avait côtoyées et à sélectionner par son jugement artistique les tableaux et sculptures. Il conserva des œuvres jugées médiocres soient destinées à servir à la vente, soient au musée en particulier, certainement pour servir à l’enseignement.

Dans l’inventaire, le directeur de l’École de dessin n’oublia pas d’indiquer comme à conserver les sculptures et tableaux de ses anciens élèves, tels Nicolas Bornier, Charles-Alexandre Renaud, Pierre Petitot et Antoine-Henri Bertrand ou bien, Bénigne Gagnereaux, Jean-Claude Naigeon et Pierre-Paul Prud’hon, qui faisaient déjà partie de la collection du Musée attenant à l’École de dessin, puisque sous l’entrée du Musée de la Maison nationale : « Tableaux, statues, bustes de marbres, et plâtres qui composent le Musée de la Maison Nationale de Dijon », il inventoria huit tableaux faits à Rome et les sculptures exécutées en cette même ville (cinq marbres en pied et six bustes, dix plâtres). Il indiqua résolument son dessein valorisant leur utilité et leurs auteurs, en précisant :

« À la suite de l'École de dessin, peinture, et sculpture, est le Musée, servant à l'instruction des élèves. Cette salle est décorée de treize statues, trois sont en marbre, le gladiateur de la Vigne Borghèse, la Vénus de Médicis, le Méléagre[5], et six bustes aussi de marbre, exécutés par les élèves de l'École de Dijon, qui ont mérité d'être envoyés à Rome étudier les chefs-d’œuvres que cette ville renferme. Les dix autres figures sont en plâtre, moulées sur l'antique […]. Les bustes en marbre sont placés sur des gaines entre chaque statue, le salon qui renferme ces productions de l'art, est éclairé par cinq grandes croisées dont on modifie à volonté la lumière on y entre par trois portes décorées d'arabesques sculptées, sur chacune des croisées et portes sont placés un bas-relief, […] douze exécutés en terre cuite, par les élèves de l'École »[6].

De plus, cet inventaire renseigne sur la présence d’œuvres qui ont disparu comme le célèbre Laocoon (en plâtre) d’après le groupe du Laocoon et ses fils attribué à Agésandros, Athènodoros et Polydoros (en marbre, conservé au Musée Pio-Clementino, Vatican). Tout comme son pendant, l’Apollon Pythien du Belvédère, sculpté en marbre par « Claude » (en fait Charles-Alexandre) Renaud selon l’inventaire de François Devosge (d’après l’Apollon du Belvédère du Musée Pio-Clementino du Vatican) qui est en plus visible par un plâtre moulé sur le marbre antique, la Junon dite du Capitole (d’après celle du Palais Cesi) d’Antoine-Henri Bertrand en marbre (qui a aussi son double en plâtre), avait été déplacée dans les salons près de la Salle des Festins du Palais des États[7]. La plupart des plâtres, que François Devosge désirait tant pour son école et le musée, ayant été déplacés pour faire de la place dans les siècles suivants ont parfois été détruits.

Le musée des Beaux-Arts de Dijon qui a terminé en mai 2019 sa rénovation complète (depuis 2011, après deux phases de chantier) a fait restaurer les premières salles du musée d’origine. L’ancien « Sallon des antiques » et actuelle salle des statues recevaient avant même que le musée n’ouvre en 1799 les œuvres sculptées des élèves de François Devosge. Le musée est l’un des rares en France à avoir conservé une salle d’époque du xviiie siècle et les œuvres pour laquelle elles ont été faites[8]. Dans cette salle, sont exposées de nouveau quelques-unes des fameuses sculptures, des envois de Rome, comme Le guerrier combattant dit Le Gladiateur de la Vigne Borghèse ou Le Gladiateur Borghèse[9] (fig. 2) sculpté par Pierre Petitot à Rome en 1786. Grâce au travail de François Devosge et sa passion, le musée a pu s’enorgueillir d’avoir cette reproduction d’antique à Dijon, bien avant que le Louvre n’acquît l’original en 1807. Le socle de Dijon est décoré de bas-reliefs en terre cuite réalisés en 1825 par le sculpteur dijonnais Joseph Garraud qui s’inspira probablement d'après des dessins ou des gravures du xviiie siècle, sans toutefois les imiter[10], des quatre reliefs en marbre du sculpteur romain Agostino Penna ornant l’original souhaité au xviiie siècle par Marcantonio IV Borghèse, et réalisé par Antonio Asprucci qui fut l’inventeur du socle en 1782 pour la Villa Borghèse. Le piédestal de Dijon reconstitue les dimensions et le répertoire décoratif de son socle qui surplombait le spectateur, trace de son mode d’exposition à Rome[11]. François Devosge mentionne dans sa description son élève et manifeste sa fierté quant à la copie qu’il a réussi à procurer à l’école : « Pierre Petitot de Langres élève de l'École de Dijon, envoyé à Rome en qualité de pensionnaire sculpteur a fait dans cette ville une copie en marbre blanc du célèbre chef-d’œuvre de l'art connu sous le nom du gladiateur de la Vigne Borghese fait par Agasias d'Éphèse. Winckelmann, assure que cette figure vu la forme des lettres est la plus antique de toutes les statues de Rome ; Dijon possède une fidèle copie de cette sublime figure, elle porte six pieds de hauteur ». La composition audacieuse de cette sculpture et la précision de sa musculature ont amené les artistes à la reproduire en dessins, moulages et copies de marbre, tout en l’adaptant comme le fit Nicolas Poussin dans Le jeune Pyrrhus sauvé de 1634 conservé au Louvre. La description de François Devosge montre le goût affirmé de l’Antiquité à Dijon à la fin du xviiie siècle.

<b>fig.2</b>Pierre Petitot, <i>Guerrier combattant</i> ou Gladiateur Borghèse
fig.2 Pierre Petitot, Guerrier combattant ou gladiateur Borghèse, d'après Agasias d'Éphèse
(v. 100 avant Jésus-Christ), 1786,
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/Katherin Landais

La sortie des sculptures et des peintures pendant le déménagement du musée a été considéré comme un événement historique, au point de « célébrer » de façon contemporaine le moment. Par un système de grutage, la sculpture a quitté, pour la première fois depuis des siècles, le musée pour retrouver les réserves, traversant les fenêtres de sa salle historique, calée dans une caisse semi-ouverte, sous le regard de son public, tout en musique. L’illustration de l’invitation à cette journée représentait la statue avec une guitare électrique, le poing levé comme le font des artistes en concert, ou plutôt comme un combattant du patrimoine qui a survécu à bien des époques. Le fait de détourner le message véhiculé par l’œuvre originale à des fins de communication ou commerciales se répand dans les grandes institutions artistiques. Cela permet de moderniser et d’ouvrir le musée par des manifestations culturelles à un large public (expositions, nocturnes ou journées du patrimoine) et d’apporter des ressources financières (issues du tourisme notamment par les recettes des boutiques de musées etc.). Cela n’est pas un danger à la mission du musée de faire découvrir et d’instruire si le contenu scientifique demeure en son sein de qualité, et est non soumis à la simplification.

En ce qui concerne les peintures sauvegardées, le plafond de Pierre-Paul Prud’hon (fig. 3) peint à Rome en 1786 sur une toile de plus de quarante mètres carrés représente La glorification de la Bourgogne ou Allégorie à la Gloire du Prince de Condé, gouverneur de la province de Bourgogne , d’après le plafond peint du Palais Barberini sous le pontificat d’Urbain VIII, le Triomphe de la Divine Providence de Pierre de Cortone, entre 1633 et 1639. François Devosge ne le nota pas dans son inventaire comme une gloire au Prince de Condé mais bien, gloire de la province de Bourgogne, certainement pour ne pas que la toile soit mutilée. Comme pour les sculptures, à l’occasion des travaux de réaménagement du musée, la toile fut descendue du plafond et enroulée afin d’être restaurée. Ses couleurs sont redevenues intenses, redonnant à la salle toute sa splendeur.

<b>fig.3</b>Pierre-Paul Prud'hon, <i>La Glorification de la Bourgogne ou Allégorie à la gloire du Prince de Condé</i>
fig.3 Pierre-paul Prudhon, La Glorification de la Bourgogne ou Allégorie à la gloire du Prince de Condé, gouverneur de la province de Bourgogne, 1786,
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay

II. Des collections privées aux institutions pour la transmission d’un patrimoine artistique

Les œuvres sont arrachées à leur lieu d’origine et sont toutes rassemblées à Saint-Bénigne et dans d’autres dépôts dès 1793-1794 ; commence alors leur processus de patrimonialisation. Certaines, destinées à la vente disparaissent souvent de l’Histoire, alors que d’autres connaissent une nouvelle vie dans de nouvelles configurations. François Devosge a laissé des inscriptions au revers des tableaux qui concordent à son inventaire, et elles permettent d’identifier les œuvres. Le Portrait de Louis XIV en médaillon d’après le célèbre portrait en pied de Hyacinthe Rigaud de 1701 conservé au Louvre a la particularité d’avoir une inscription : « O. N°.12. » et « R. 1704 » (fig. 4). Ces inscriptions révèlent que cette œuvre correspond au n° 12 de la liste des tableaux appartenant à la Maison Périgny faite par François Devosge (O pour Périgny) et qu’elle fut peinte probablement en 1704. L’inventaire est en cela très important car il garde la trace d’œuvres qui auraient pu disparaître, de nombreux portraits des Rois de France et de personnalités princières ont été malheureusement brûlés, indiqués dans la marge : « Brûlé ». Ce portrait atteste aussi de la diffusion de l’effigie royale, et des reproductions faites pour les notables d’après le célèbre portraitiste du Roi. De plus, les inscriptions relèvent de la manière d’inventorier, mise en place par les Instructions en 1790 et bien plus précise en 1793[12], avec les premières mesures de conservation.

<b>fig.4</b>Anonyme français, <i>Portrait de Louis XIV</i>, d'après Hyacinthe Rigaud
fig.4 Anonyme français, Portrait de Louis XIV, d'après Hyacinthe Rigaud, 1704,
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay

François Devosge s’intéressa à toutes les œuvres de toutes les périodes (antiquités égyptiennes, sculptures médiévales, œuvres contemporaines), mais, il est vrai que les périodes antérieures à l’époque moderne sont moins représentées, en raison du goût et des connaissances de l’époque. L’une des rares peintures de la Renaissance provenant des collections parlementaires est le portrait allégorique de la Dame à sa toilette (fig. 5) qui appartenait à Bénigne Legouz de Saint-Seine, dernier Premier Président de la Grand’Chambre du Parlement de Dijon en 1789. Sur une cent cinquantaine de tableaux parmi trois cent cinquante œuvres d’art inventoriés chez cet émigré, François Devosge retint cette toile. Cette peinture très intrigante montre un contraste entre une figure dont la nudité est soulignée par les détails des objets et des bijoux, attributs de la beauté ou de la passion amoureuse, et la scène de genre domestique mise à l’arrière-plan, qui marque la fusion des motifs italiens et flamands, très caractéristique de l’art de Fontainebleau. Cette peinture à l’huile sur toile entra au musée dès sa création en 1799, sans attribution ni identification. Toutefois, elle fait partie des chefs-d’œuvre du musée pour cette période.

<b>fig.5</b> Anonyme de l’École de Fontainebleau, <i>Dame à sa toilette</i>
fig.5 Anonyme de l’École de Fontainebleau, Dame à sa toilette, fin xvie siècle,
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/Bruce AUFRERE/Tiltshift

Succinct dans la description de cette peinture, François Devosge s’attardait plus longuement pour d’autres œuvres. Il n’explique pas forcément ses critères de sélection, mais, a sans doute institué un degré d’importance entre les œuvres. Le manuscrit révèle l’utilisation de symboles (œil, croix, cercle, trait). Ses appréciations et ses avis montrent le choix qu’il fit en raison de l’intérêt artistique, historique ou de la rareté, mais aussi de la curiosité que les œuvres peuvent susciter : « un excellent tableau de l’école des Pays-Bas » ou « ce tableau dont le mérite est à considérer ». François Devosge a gardé chez l’émigré Jehannin de Chamblanc un vase de bronze monté sur trois têtes d’éléphants qui forment les pieds, serti d’un couvercle décoré de fleurs et d’ornements sur lequel repose un enfant portant sur son dos une corbeille de fruits, d’une vingtaine de centimètres de haut, objet au décor animalier qui marque le goût de l’exotisme au xviiie siècle. Des détails précieux qu’il glissa peuvent aussi nous révéler l’année de création de l’œuvre, des indices biographiques intéressants, la manière dont étaient considérés certains artistes au xviiie siècle par son avis ou son jugement artistique quant à la qualité des œuvres d’art, la facture de l’œuvre peinte en se concentrant sur la touche et la couleur, ou bien des références utiles pour mettre en lien des œuvres aux attributions ou aux sujets incertains. La plupart du temps, il indiqua l’emplacement de l’objet pour les grands ensembles religieux (chœur, sacristie, réfectoire), ce qu’il ne fait presque jamais lorsqu’il inventoriait les œuvres des émigrés. C’est un renseignement utile pour la reconstitution visuelle des œuvres au sein d’un monument détruit.

Les œuvres saisies dans les monuments religieux, églises paroissiales et monastères, occupent une place moins importante mais toute aussi précieuse dans l’inventaire de François Devosge. Un grand nombre indiquées comme à conserver ont pu être retrouvées dans les musées dijonnais (Musée des Beaux-Arts et Musée d’Art Sacré[13]) et dans les églises de Dijon (Saint-Bénigne, Notre-Dame et Saint-Michel), parfois inscrites ou classées au titre des Objets Mobiliers par les Monuments Historiques. Des œuvres de Notre-Dame de Dijon sont restées dans le lieu pour lequel elles ont été faites. Pour la Chartreuse de Champmol, le taux d’identification et de conservation (presque la moitié) est remarquable au regard des monastères dijonnais. En effet, trente-deux œuvres inventoriées par François Devosge sur les soixante-dix enregistrées ont été retrouvées, comme la série des sept tableaux sur la vie de la Vierge Marie et de l’enfant Jésus autrefois dans le chapitre des Chartreux, peint par Franz-Anton Kraus (1705-1752) en 1737, marquant la volonté à cette époque de renouveler le décor des églises de façon plus moderne[14] (M.A.S. et église Saint-Michel). Dans ce contexte, Carl Van Loo avait peint Saint Georges terrassant le dragon et La Condamnation de saint Denis (fig. 6 et 7) en 1741 afin d’orner les autels du Chœur des Frères (M.B.A.) avec leur cadre de style rocaille, décrits par François Devosge. Celui-ci manifeste dans son manuscrit l’admiration qu’il a pour le peintre par de nombreuses informations (éléments biographiques, traits de caractère, décorations honorifiques, talents). Ces peintures contemporaines changeaient la culture visuelle des religieux, habitués aux anciens tableaux dorés du xve siècle tels Le Retable de saint Georges d’un anonyme bourguignon (M.B.A.) et Le Retable de saint Denis d’Henri Bellechose de 1416 (Louvre). François Devosge sauva également les précieux retables en bois dorés des Chartreux commandés par Philippe le Hardi et Marguerite de Flandres conservés au musée des Beaux-Arts.

<b>fig.6</b>Carl Van Loo, Saint Georges terrassant le dragon
fig.6 Carl Van Loo, Saint georges terrassant le dragon, 1741,
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay
<b>fig.7</b>Carl Van Loo, <i>La condamnation  de saint Denis</i>
fig.7 Carl Van Loo, La condamnation de saint Denis, 1741,
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay

La Chartreuse de Champmol qui fut démolie au xixe siècle aurait pu voir tous ces chefs-d’œuvres détruits par le vandalisme à la Révolution. Les monuments funéraires des Ducs en sont le parfait exemple. Déplacés à la cathédrale Saint-Bénigne, les cénotaphes furent détruits en grande partie, mais n’ont pas disparu grâce au travail de passionnés. Au moment de la destruction des monuments, Nicolas Auvert a inventorié les débris des tombeaux des Ducs de Bourgogne avec soixante-dix petits Chartreux « sous différentes attitudes et expressions drapées, d’un assez bon goût pour le temps ». Cette liste intéressante par la précision des pleurants est reliée à l’inventaire de François Devosge. L’art gothique n’est pas à la mode à cette époque, mais n’est pas négligé par les curieux et artistes. Les tombeaux des Ducs de Bourgogne sont destinés très tôt au musée. Leur présentation à la suite de leur restauration par le conservateur Févret de Saint-Mesmin marque le regain d’intérêt pour ces chefs-d’œuvre gothiques. Charles-Balthazar Févret de Saint-Mesmin est un ancien émigré dont les biens furent inventoriés par François Devosge lorsqu’il était aux États-Unis probablement. Des peintures sur bois d’Hubert Robert Les Thermes de Julien à Paris et Intérieur d’un Temple antique vers 1766 enrichirent le musée. Sa bibliothèque inventoriée en partie par François Devosge témoigne de son érudition artistique et intellectuelle : de nombreux traités, essais, réflexions sur l’art, ainsi que des catalogues de vente. En 1814, de retour en France, il mit à profit ses talents en devenant conservateur du musée de 1817 à 1852, retrouvant exposés quelques-uns de ses tableaux. Il s’intéressa à la restauration et le musée lui est redevable de l’aménagement de la Salle des Gardes en 1827 où demeurent depuis presque deux siècles les fameuses sculptures ducales. Tout en veillant à la conservation des œuvres d’art, il chercha à les rendre accessibles au public en abandonnant l’ancien classement par salles et en adoptant l’ordre alphabétique par écoles[15].

Le conservateur a une place à part dans le domaine des arts par son intelligence en la matière. Les monuments qui étaient placés dans le chœur de l’église du monastère se trouvent dans l’ancienne Salle des Festins au temps des Ducs de Bourgogne où prenaient place les festivités en face de la cheminée de style gothique flamboyant (restaurée), qui servit de Salle des Gardes par la suite et enfin de Salle des Tombeaux des Ducs de Bourgogne (fig. 8). L’atmosphère évoque plus la contemplation et le recueillement que la fête comme auparavant, mais la salle spacieuse présente une décoration gothique et avait le plancher assez solide pour accueillir ces monuments de mémoire. Après le vandalisme, ces œuvres sauvegardées de ce temps ont eu à surmonter bien des tumultes et non des moindres par la suite.
<b>fig.8</b>Claus Sluter, Clause de Werve et  jean de Marville,<i>Tombeau de PHilippe le Hardi</i>
fig. 8 Claus Sluter, Claus de Werve et Jean de Marville, Tombeau de Philippe le Hardi, 1381-1410,
Musée des Beaux-Arts de Dijon, attribution du Conseil Général de la Côte d'Or, 1827, oeuvre classée au titre des Monuments Historiques depuis 1862
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay

Cependant, toutes les œuvres ne peuvent être exposées, certaines d’un intérêt particulier demeurent en réserves, d’autres en raison de leur état lacunaire. Le double portrait de Jean Jacques Bouhier de Lantenay (1666-1744), premier évêque de Dijon de 1731 à 1743, et de Claude Bouhier de Lantenay (1681-1755), second évêque de 1743 à 1755 (frère de Jean Bouhier (1673-1746), Président à mortier au Parlement de Bourgogne), peint par Didier Louet en 1744 et qui appartenait à Bénigne Bouhier dans son Château de Lantenay porte des marques de vandalisme sur des parties sur le visage, les mains ou les parties intimes, les parties emblématiques du pouvoir de la personne. Inventorié par François Devosge, il n’était pas encore mutilé et fut destiné à la vente (fig. 9). Acquis par le Musée de la Vie Bourguignonne à la fin du xxe siècle, la toile est exposée avec les vicissitudes de son temps, dans le but de sensibiliser aux questions patrimoniales, à l’histoire et à la mémoire. Des tableaux et des sculptures même mutilées ont toutes les raisons d’être exposées, en archéologie, cela marque le temps et nombreuses sont les pièces de sculptures en marbre en morceaux présentées au public dans un souci de reconstitution réversible. 

<b>fig.9</b>Didier Loüet, <i>Jean et Claude Bouhier, premiers évêques de Dijon</i>
fig. 9 Didier Louët, Jean et Claude Bouhier, premiers évêques de Dijon, 1744,
Musée de la Vie Bourguignonne
source : © Musée de la Vie Bourguignonne Perrin de Puycousin/Katherin Landais

III. Des détails précieux pour des identifications possibles

François Devosge inventoria des œuvres sculptées et peintes, mais aussi des objets en tout genre, moins nombreux, et tout autant intéressants. Ses descriptions exhaustives sont précieuses pour la connaissance de la culture matérielle et visuelle de la fin du xviiie siècle et l’identification des œuvres d’art. À côté des nombreux Christ en croix en ivoire sur fond de velours, des sujets brodés en soie, des médailles avec des têtes antiques, mythologiques ou royales, des vases et des coupes, des objets que l’on peut qualifier d'artistiques en raison de leur caractère ouvragé et des artistes qui les ont composés sont à noter. La collection de Jehannin de Chamblanc[16], Conseiller honoraire à la Chambre de la Tournelle au Parlement de Bourgogne, était la plus riche en termes d’art et de sciences. Elle comptait des tableaux et des sculptures, un nombre impressionnant d’estampes[17] conservées en grande partie au musée des Beaux-Arts et à la bibliothèque patrimoniale et d’étude de Dijon, des dessins, ainsi que des objets en tous genres. La majorité des œuvres non vendues ont été conservées au musée. Un Hanap constitué d’une noix de coco ornée de figures ouvragées portée sur un pied marqua l’attention de François Devosge (fig. 10). Cet objet exotique d’un anonyme hollandais de 1606 est actuellement conservé au musée des Beaux-Arts.

<b>fig.10</b>Anonyme hollandais, <i>Hanap</b>
fig.10 Anonyme hollandais, Hanap, 1606 (Groningue),
Musée des Beaux-Arts de Dijon
source : © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay

D’autres informations de l’inventaire de François Devosge sont à étudier afin de comprendre la genèse du manuscrit et le sort des œuvres durant cette période. Dans la marge, des mentions à des personnalités indiquent souvent que les objets vont être présentés à un autre expert. Cent quatre-vingt-six volumes ont été ainsi « remis au citoyen Baillot » (quatre-vingt-sept entrées), la plupart avec des gravures, traitant de l’art, de l’histoire et des sciences. François Devosge devait faire la liste de tous les objets intéressant les arts, les livres avec des gravures ou liés aux beaux-arts en faisaient donc partie. Toutefois, il n’en inventoria qu’une centaine provenant de Legouz de Saint-Seine, de Joly de Bévy, de Richard fils, de Févret et de Dumontier (ou Desmontiers). Cette mission fut attribuée à Pierre Baillot (1752-1815) à qui il remit les livres le 23 mars 1793 et les 19 et 29 juin 1793. De même, les estampes reliées étaient considérées comme des livres. D’ailleurs, en règle générale, la plupart des estampes sauvegardées, encadrées sous verre, sont conservées au musée, celles en feuilles recueillies dans des porte-feuilles et dans des recueils furent déposées à la bibliothèque, actuelle bibliothèque patrimoniale et d’étude. Mais, le cabinet des estampes du musée au xixe siècle était constitué de nombreuses gravures encadrées et en feuilles dont une partie fut donnée à la bibliothèque. Le Collège des Godrans[18] était l’ancien Collège des Jésuites et est devenue l’École centrale en 1795 après la Révolution, dans l’enceinte de l’actuelle bibliothèque[19]. Pierre Baillot[20] était professeur de rhétorique et d’éloquence au Collège des Godrans sous l’Ancien Régime et fut nommé commissaire bibliographe en 1790. En 1795, à la création de l’École centrale, il continua d’être enseignant à Dijon et professeur de littérature à la faculté de Dijon au xixe siècle. Organisant les livres pour la future bibliothèque publique, il classe les ouvrages sans distinction de provenance. Seuls l’inventaire de François Devosge et les inventaires menés par les commissaires sous la Révolution peuvent redonner un sens aux collections patrimoniales et reconstituer les bibliothèques des émigrés.

Très ouvert sur plusieurs domaines, François Devosge inventoria aussi des instruments de physique tels qu’un baromètre chez Joly de Bévy, enrichi de sculpture dorée, ainsi que des globes et sphères provenant de Villedieu de Torcy. Une identification probable de ces objets est possible suite aux recherches menées et à l’étude des globes terrestre et céleste de Claude Buy de Mornas (fig. 11 et 12) conservés à la Bibliothèque patrimoniale et d’étude de Dijon. Dans l’inventaire, François Devosge fit la liste d’objets intéressants dans la collection provenant de l’ancien parlementaire et émigré Vivant-Mathias-Léonard-Raphaël Villedieu de Torcy[21], doyen du Parlement de Dijon et qui faisait partie des Conseillers titulaires de la Grand’Chambre au Palais de Justice[22]. Ces instruments scientifiques géographiques et astronomiques sont ainsi décrits (page 23 de l’inventaire de François Devosge à la lettre F pour Villedieu de Torcy) : « Nos 25 et 26 Deux globes, l'un terrestre, et l'autre céleste d'un pied, deux pouces de diamètre, montés sur leurs pieds, leurs boussoles et enveloppes en toile. », suivis de : « N os 27 et 28 Deux sphères chacune d'un pied, deux pouces de diamètre, l'une de Copernic, et l'autre de Ptolémée avec leurs enveloppes en toile. », les quatre objets mesurant donc 37,89 centimètres de diamètre environ. Ces globes et sphères ont la taille moyenne des instruments utilisés auparavant dans les cabinets de physique. Tous sont notés « remis au citoyen Jacotot » à l’exception d’un globe (dont la mention « remise au citoyen Jacotot aîné » à la suite des sphères). Parmi les deux cent sept œuvres inventoriées, se trouvent quatre tableaux et cent quatre-vingt-dix-neuf estampes. Villedieu de Torcy s’intéressait aux arts et aux sciences à en juger par les sujets des œuvres.

<b>fig.11</b>claude Buy de Mornas, <i>Globe terrestre</i>
fig.11 Claude Buy de Mornas, Globe terrestre, 1768,
Bibliothèque patrimoniale et d'étude (B.M.D.)
source : © B.M.D./Katherin Landais
<b>fig.12</b>Claude Buy de Mornas, <i>Globe céleste</i>
fig.12 Claude Buy de Mornas, Globe céleste, 1768,
Bibliothèque patrimoniale et d'étude (B.M.D.)
source : © B.M.D./Katherin Landais

Dans l’inventaire[23] dressé par les commissaires nommés par arrêté du Directoire du District de tous les biens de la maison rue Chabot-Charny, dans le cabinet de M. Villedieu, sont inventoriées des œuvres peu détaillées et à l’article 60 : « Quatre sphères montées sur leurs boiseries avec chacune leur enveloppe une serrure avec sa clef estimé 4 livres ». Auparavant, l’article 58 mentionne un bureau en bois de noyer estimé 10 livres et l’article 59 décrit le contenu des tiroirs. Ces sphères correspondent à celles inventoriées par François Devosge avec leurs boiseries et leur enveloppe, comme il le précisa. À la fin de l’inventaire, sont listés les livres de la bibliothèque. Parmi les ouvrages, bon nombre ont trait à l’intérêt de ce parlementaire pour les voyages, la géographie, les expériences de physique expérimentale, tels que le montrent les livres de Jean-Baptiste D’Anville, de James Cook (dont il avait un portrait gravé) ou de l’Abbé Nollet. D’autres émigrés possédaient de riches bibliothèques, et quelques-uns manifestaient le même intérêt pour cet élargissement du monde, lié au siècle des Lumières. Même si l’acquisition de globes peut être répandu chez les aristocrates, aucuns ne furent inventoriés par François Devosge hormis ces sphères et peu de ces objets sont conservés dans les collections actuelles et surtout à Dijon. Villedieu de Torcy a probablement acheté ces objets à Paris, où plusieurs géographes et fabricants d’instruments scientifiques de renom avaient enseigne. Si deux de ses biens correspondent aux deux globes céleste et terrestre dont la description concorde tout à fait à ceux conservés à la bibliothèque, alors il les aurait achetés auprès de l’ingénieur-géographe du Roi Claude Buy de Mornas (1ère moitié du xviiie siècle – 1783), à Paris chez Jean Fortin (1750-1831) ou Jean Nicolas Fortin[24], célèbre fabricant d’instruments scientifiques, ingénieur-mécanicien du Roi, qui a construit les globes de la bibliothèque de Dijon en 1768. La provenance de ces derniers est inconnue, mais, ce sont sans doute des saisies révolutionnaires. La dédicace à Monseigneur le Comte de Saint-Florentin[25], Louis III Phélypeaux (1705-1777), homme d’État, membre de l’Académie des Sciences en 1740, Secrétaire d’État et Ministre des Affaires Étrangères, rappelle le milieu scientifique qui se développait sous Louis XV. De plus, le milieu académique et scientifique était florissant autour de Guyton de Morveau qui se fournissait en instruments scientifiques sur Paris. Pierre-Louis Baudot (1760-1816) lui fit envoyer de Paris un eudiomètre construit par Fortin vers 1786. Tous ces échanges entre scientifiques et érudits avec les notables dijonnais sont favorables à cette hypothèse. François Devosge a inventorié ces globes et sphères uniquement chez cet émigré. Pierre Jacotot (1755-1821) ou Jacotot l’aîné[26] fut professeur de physique au Collège des Godrans, puis, à l’École centrale. Il fut préposé aux instruments de physique et a dû sûrement les destiner au laboratoire de physique créé au sein de l’École centrale[27].

Le 4 février 1805, Pierre Jacotot a dressé l’inventaire du Cabinet de physique de cette École centrale, servant de base à l’étude des instruments de la collection de l’université de Bourgogne – Franche-Comté[28]. Le cabinet était demeuré dans l’actuelle bibliothèque jusqu’en 1856, date à laquelle il est transféré à la Faculté des Sciences de la rue Monge. En 1957, la faculté déménagea sur le campus Montmuzard, la collection disparut en grande partie lors des déménagements. L’Inventaire des instrumens qui composent le Cabinet de physique de Dijon est l’unique trace des objets scientifiques du xviiie siècle. Dans la catégorie de l’astronomie, sont inventoriés deux sphères armillaires, une sphère céleste, avec un planétaire et deux planisphères entre autres. Aucune trace d’objets similaires n’est mentionnée. Deux sphères et une sphère céleste peuvent faire référence aux deux sphères (Copernic et Ptolémée) et au globe céleste remis à Jacotot par François Devosge, à l’exception d’un globe. Les globes céleste et terrestre vont généralement par deux et peuvent s’associer à des sphères toutes de même format. Le globe terrestre a peut-être été placé dans une salle de cours plutôt que dans le cabinet de physique à cette époque. L’hypothèse que j’avance serait que n’étant pas inventoriées dans le Catalogue du laboratoire de physique de 1897[29] de la Faculté des Sciences de l’université de Dijon après la dispersion d’une majorité d’objets scientifiques à la suite des déménagements, les sphères auraient disparu et les deux globes restés sur place dans les locaux de l’actuelle bibliothèque auraient été réunis comme auparavant. Une inscription sous la table d’horizon du globe terrestre écrite à la main : « 26 » ou « 06 » renseigne de la fin d’un numéro, le n° 26 de l’inventaire Devosge ou 1806 l’année suivant l’inventaire de Jacotot peut-être. Toutes les raisons portent à croire que ces globes de la collection de Villedieu de Torcy saisis en 1792 correspondraient à ceux de provenance inconnue conservés dans ce lieu culturel et qui n’auraient pas changé de place depuis plus de deux siècles.

Finalement, la patrimonialisation des œuvres de l’inventaire de François Devosge s’est faite en plusieurs époques et continue encore par l’étude et la recherche. La base de données que j’ai créée au sein du Centre Georges Chevrier est le socle de cette étude. De la sauvegarde sélectionnée, François Devosge a réussi à conserver le patrimoine dijonnais, sans compter des villes aux alentours, mais aussi, les ouvrages, les objets d’art dans des institutions spécialisées. Le musée des Beaux-Arts est l’une des institutions, comme le musée d’art sacré installé dans l’ancien monastère des Bernardines, qui trouve sa place dans un lieu chargé d’histoire, mais qui a la particularité de lier certaines de ses collections historiques aux salles de la même époque restaurées. À l’heure où justement la politique des musées fixe son attention sur l’architecture nouvelle (Fondation Louis Vuitton de Frank Gehry en 2014, le Mucem de Rudy Ricciotti en 2013) qui prend le pas sur la collection parfois répondant à une mise en valeur sur les critères d’une nouvelle scénographie pour une muséographie innovante, un intérêt grandissant pour la conservation et la modernisation est toujours de rigueur, avec la superposition de nouveaux espaces aux anciens liés aux monuments historiques (Musée Baron Gérard de Bayeux des architectes Millet Chilou Gardette en 2013, Musée Unterlinden par Jacques Herzog et Pierre de Meuron de Colmar en 2016). Les missions des différentes institutions patrimoniales suivent un protocole commun de préservation et de conservation dans une logique de continuité. Que ce soit dans le domaine muséal ou architectural, l’institutionnalisation du patrimoine est intimement liée aux décisions des gouvernements et des acteurs à l’échelle locale. Lier l’ancien et le contemporain, donner une nouvelle attribution à un lieu, donner du sens entre la collection conservée et le site, le patrimoine dijonnais au sein de ces institutions diverses a su se démarquer de ce fait suite à la longue évolution débutée à la veille de la Révolution. Le musée actuel est l’exemple d’une ancienne institution qui, par une nouvelle scénographie, cherche ainsi à retrouver le lien établi entre le lieu d’exposition avec ses salles historiques et les objets exposés.

 

Haut de page AUTEUR

Katherin Landais,
Centre Georges Chevrier, UMR 7366 uBFC/CNRS
(Sous la direction d’Olivier Bonfait)

Haut de page NOTES

[1] La référence en la matière est : Dominique Poulot, Le passé en Révolution. Essai sur les origines intellectuelles du patrimoine et la formation des musées, 1774-1830, Paris, Université Paris I – Panthéon-Sorbonne, Thèse de Doctorat sous la direction de Daniel Roche, 5 volumes, 1989.

Dominique Poulot, Musée, nation, patrimoine : 1789-1815, Paris, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard, 1997.

Dominique Poulot [dir.], Goûts privés et enjeux publics dans la patrimonialisation, XVIIIe-XXIe siècles, Paris, Collection Histo.art, Publications de la Sorbonne, 2012.

Dominique Poulot, « Le patrimoine en France : Une génération d’histoire. 1980-2010 », Culture & Musées, Hors-série, 2013, p. 189-213 [en ligne]

Sur la pratique des collections et ses enjeux épistémologiques, voir : Krzysztof Pomian, Collectionneurs, amateurs et curieux, Paris, Venise : XVIe-XVIIIe siècles, Paris, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard, 1987.

Plus récemment, sur les problématiques patrimoniales, voir aussi : Nathalie Heinich, La fabrique du patrimoine, De la cathédrale à la petite cuillère, Paris, Collection Ethnologie de la France, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2009.

Christian Hottin et Claudie Voisenat, Le tournant patrimonial, Paris, Collection Cahiers d’ethnologie de la France, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2016.

Jean-Louis Tornatore, Le patrimoine comme expérience. Implications anthropologiques, Paris, Collection Ethnologie de la France et des mondes contemporains, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2019.
[2] Mon sujet de thèse concerne l’analyse de l’inventaire de François Devosge à travers lequel je souhaite reconstituer l’univers artistique dijonnais à la Révolution dans la sauvegarde et la protection du patrimoine à Dijon. Le manuscrit est conservé aux Archives Municipales de Dijon : 4 RI – 1.
[3] Albert Soboul, Dictionnaire historique de la Révolution française, Mayenne, Quadrige / PUF, 2014. Roland Schaer, L’invention des musées, Paris, Gallimard / Réunion des Musées Nationaux – Grand Palais, 1993. Marie-Anne Sire, La France du patrimoine, Les choix de la mémoire, Paris, Gallimard / Monum, Éditions du patrimoine, 1996.
[4] Archives Départementales de la Côte-d’Or, Série Q 678, Arrêté du 10 nivôse an III par le représentant du peuple Jean-Marie Calès, 1794 : « Considérant qu’il importe à la gloire et au bien de la république de s’opposer au progrès et aux ravages du vandalisme. […] Sont nommés conservateurs des monuments des arts dans le département de la Côte-d’Or [...] François Devosge, Jean-Baptiste-Guillaume Gevigné, Joseph Antoine, Alexandre-Auguste Volfius, François Robert, Pierre Renaud, Claude-Auguste Durande neveu, Claude Renon, François Attiret, François-Jacques Hoin, Pierre Baillot, N. Legras, Philibert-Bénigne Gagneraux, Pierre Jacotot [...] formant la commission temporaire des arts et des sciences […] avec injonction au dit Auvert de rétablir entre les mains de la Commission à l’exhibition du présent arrêté, sans délai, tous les objets relatifs aux arts et aux sciences ».
[5] Ces statues sont le Gladiateur Borghèse de Pierre Petitot (n° 12) qui suit, la Vénus de Médicis de Antoine-Henri Bertrand (n° 11), d’après la statue du Musée des Offices de Florence du IVe siècle avant Jésus-Christ, d’après Praxitèle et l’Antinoüs du Belvédère dit le Méléagre ou le Lantin (ou Mercure) de Nicolas Bornier (n° 13) d’après une sculpture romaine copie d’un original grec, conservé au Musée Pio-Clementino au Vatican, tous ces marbres sont conservés au musée des Beaux-Arts de Dijon. Voir : Sophie Jugie et Emmanuel Starcky [dir.], L’Art des collections, bicentenaire du Musée des Beaux-Arts de Dijon, du siècle des Lumières à l’aube d’un nouveau millénaire, catalogue d’exposition, Dijon, Musée des Beaux-Arts de Dijon, 2000.
[6] A.M.D., 4 R I – 1, Inventaire de François Devosge, 1792, p. 92-93.
[7] La statue de Junon en marbre avait été destinée à orner en 1957 le Parc de la Colombière jusqu’au xxie siècle, ce qui la fragilisa. Elle est conservée actuellement au musée.
[8] Ces statues de marbre sont presque des immeubles par destination.
[9] Cette statue en marbre blanc est la copie du Guerrier combattant d’Agasias d’Éphèse, sculptée vers 100 avant Jésus-Christ, découverte au début du xviie siècle.
[10] Ibidem. Sophie Jugie et Emmanuel Starcky [dir.], L’Art des collections, voir p. 100. Contrairement à ce que l’article sur la copie du Gladiateur Borghèse affirme, les bas-reliefs de Dijon intitulés Gladiateurs ou Guerriers combattant, Pugilistes au ceste (côtés face et revers), Gladiateur ou Guerrier agenouillé avec son bouclier et Hercule portant la peau du lion de Némée et le sanglier d’Erymanthe les pattes liées (côtés avant et arrière) ne reproduisent pas les reliefs du Louvre sous les désignations suivantes : Gladiateurs ou Guerriers, Lutteurs, Pugilistes et Joueurs de boules mais sont une interprétation du sculpteur dijonnais au xixe siècle. À titre d’exemple, les dessins de l’album de « Croquis faits hors des murs de Rome de 1786 à 1791 » par Charles Percier sont une source précieuse dont la Vue du décor intérieur de la Villa Borghèse montre la Salle du Gladiateur du Casino de la Villa Borghèse avec la statue sur son piédestal, conservé à la Bibliothèque de l’Institut de France. Le statuaire s’est inspiré des pugilistes originaux qu’il a vêtus déclinant la thématique sur les quatre côtés, mais n’a vraisemblablement pas pu contempler les reliefs au Louvre, ni les copier, il réalisa les bas-reliefs en 1825 âgé de dix-huit ans lorsqu’il était élève de Nicolas Bornier. Il quitta ensuite Dijon vers 1826 pour Paris où il œuvra dans l’atelier de Ramey et de Rude. Voir Jean-René Garraud, Un artiste dijonnais. Joseph Garraud, statuaire, directeur et inspecteur général des Beaux-Arts, 1807-1880, Dijon, Darantière, 1887, p. 25. Le statuaire exposait en 1825 « quatre bas-reliefs en argile crue d’après l’antique » qui ont orné par la suite le piédestal de la statue du gladiateur du musée de Dijon. La mention d’après l’antique signifierait faisant référence à l’Antiquité comme le faisaient les reliefs d’Agostino Penna.
[11] De plus, selon la documentation du Louvre et de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, la statue au Louvre était visible sur son socle au xixe siècle et ce serait au xxe siècle que la scénographie nouvelle aurait amené à la dissociation des deux éléments. Les bas-reliefs souhaités par Marcantonio IV Borghèse sont toujours exposés au Louvre. Le Gladiateur Borghèse est mis en scène sur un socle plus réduit afin de mieux l’admirer.
[12] ADCO, Série Q 676.
[13] Le musée d’art sacré fut créé en 1980 dans l’ancien monastère des Bernardines et chapelle Sainte-Anne (l’église fut achetée par la ville de Dijon en 1950 et les bâtiments en 1979) par le Chanoine Marilier et fut géré par le musée de la vie bourguignonne - Perrin de Puycousin. Cet établissement prit place dans le cloître (dans l’hôtel Aubriot, 40, rue des Forges, en 1935, et rattaché au musée des Beaux-Arts en 1949), intégrant la Direction des Musées et du patrimoine en 2015.
[14] Les peintures sont La Présentation de la Vierge au Temple, L’Annonciation, La Visitation, L’Adoration des bergers, L’Adoration des Mages, La Présentation au Temple de Jésus et La Fuite en Égypte. Quelques artistes célèbres avaient été sollicités afin de participer à la nouvelle décoration de la Chartreuse, dont Jean Restout.
[15] La Notice des ouvrages de peinture et de sculpture, exposés au musée du département de la Côte-d’Or de l’an VII (1799) est une première liste des œuvres cataloguées à l’usage du visiteur, comme du conservateur, faisant un premier état des biens de l’État. Suite à cette publication, la Notice des tableaux, statues, bustes, bas-reliefs, vases, bronzes, antiquités, dessins, estampes, etc. exposés au musée de Dijon, publiée en 1818 et rédigée par Févret de Saint-Mesmin constitue aussi bien un guide du visiteur qui a la possibilité d’acheter le livret à l’entrée qu’un catalogue inventoriant les œuvres classées par catégories (peintures, sculptures, etc.) et par écoles (française, italienne, etc.), même celles qui ne sont pas exposées en raison d’une restauration, du manque d’espace du local ou du fait qu’elles ornent d’autres établissements de la ville. En 1834, la Notice des objets d’arts exposés au musée de Dijon, et catalogue général de tous ceux qui dépendent de cet établissement rend compte dans son titre de cette fonction de catalogue du musée qui marque un tournant dans la constitution des nouveaux catalogues. Elle est composée en outre de quatre parties dont une cinquième était prévue pour le Cabinet des estampes qui correspondent aux catégories d’œuvres, suivant une numérotation continue comme c’était le cas pour celle de 1818.
[16] Bibliothèque Municipale de Dijon, Ms 2049-2086, Manuscrits de Louis-Bénigne Baudot, Ms 2061-2065, Dictionnaire des auteurs de Bourgogne, Tome 3, lettres I à M, Ms 2063, fol. 49 recto, Jehannin de Chamblanc (Jean-Baptiste-François).
[17] B.M.D., Ms 2477-2484 Inventaire des ouvrages confisqués à la Révolution ; établissements religieux et émigrés, 1792 – début du xixe siècle, Ms 2481, Bibliothèques d’émigrés : inventaire des estampes de M. Jeannin, 1796. Annie Haïk, Recherches sur la collection d’estampes d’un amateur bourguignon du xviiie siècle, Dijon, université de Bourgogne – Franche-Comté, Thèse de Doctorat sous la direction de Paulette Choné, 2016.
[18] ADCO, Série D 3-116 Collège Godran de Dijon (1215-XVIIIe siècle), D 3 Fondation (1581), D 13-15 Expulsion des Jésuites (1595-1765), D 16 Saisie des biens des Jésuites et leur cession à la nouvelle administration du collège (1762-1765).
[19] GRAS Pierre, « Les bâtiments de l’ancien collège des Godrans », Mémoires de la Commission des Antiquités du département de la Côte-d’Or, tome 24, 1954-1958, p. 217-240. De plus, la collection Jehannin de Chamblanc, saisie à la Révolution, constitua le cabinet d’histoire naturelle qui se trouvait dans une des ailes de l’École centrale, malheureusement, aucune trace de ces spécimens. Le cabinet d’histoire naturelle fut cédé en 1833 à l’Arquebuse. Cependant, le Museum d’histoire naturelle fut bombardé pendant la Seconde guerre mondiale, ce qui détruisit une bonne partie de cette collection ancienne. Sa collection géologique fut sauvegardée uniquement.
[20] ADCO, Série D 21 et D 24. François Seichepine, « Fardeaux communs et destins variés : les commissaires bibliographes de la Côte-d’Or durant la Révolution », dans Citoyennes et citoyens de Côte-d’Or en Révolution, Christine Lamarre et Claude Farenc [dir.], Dijon, Cahier du Comité départemental pour l’histoire de la Révolution en Côte-d’Or, nouvelle série n°3, Archives Départementales de la Côte-d’Or, 2010, p. 219-245.
[21] ADCO, Série Q 1134. Voir aussi : B.M.D. Fonds Juigné, Documentation historique et généalogique, Généalogies bourguignonnes, Fatras généalogiques, Ms 1443-1458-54, Ms 1458, Tome XV-Thi-X, XIXe siècle, parchemin relié, 419 f.
[22] A.-S. Des Marches, Histoire du Parlement de Bourgogne de 1733 à 1790, Société d’histoire et d’archéologie de Châlon-sur-Saône, J. Dejussieu, Châlon-sur-Saône, 1851.
[23] ADCO, Q 1134 Villedieu de Torcy, 22 août 1792, Inventaire des effets de M. Villedieu de Torcy.
[24] Actif surtout en 1778, son enseigne se trouvait rue de la Harpe, près de la rue du Foin à Paris. Il cotoya le chimiste Antoine Lavoisier pour lequel il fit une balance de précision que posséda aussi Guyton de Morveau et créa le baromètre Fortin. Sur le globe céleste, la mention suivante indique : « Se fait et se vend chez le Sr Fortin, Ingénieur pour les Globes et Sphères rue de la Harpe au coin de la rue du Foin, à Paris ».
[25] B.M.D., Ms 1738, f. 6, Lettres officielles du Comte de Saint-Florentin concernant la conduite de Richard de Ruffey à la Chambre des Élus, 1743-1748, adressées au Président à la Chambre des Comptes de Dijon Gilles-Germain Richard de Ruffey (1706-1794) dont le fils Charles Richard de Vesvrotte (1757-1840) est étudié ici (Richard puis-aîné ou Richard fils) dévoilent un trait de la personnalité de ce parlementaire et révèlent les liens étroits qu’ont les notables dijonnais avec le Secrétaire d’État.
[26] ADCO, Série L 1080, arrêté du 14 ventôse an IV ou 4 mars 1796 (voir Q 881). B.M.D., Dictionnaire des auteurs de Bourgogne de Louis-Bénigne Baudot, Ms 2061-2065, Tome 3, lettres I à M, Ms 2063, Lettre J, f. 16 recto, Jacotot Pierre.
[27] L’École centrale donnait un cours de physique et de chimie expérimentale. Le laboratoire de physique contenait des instruments scientifiques acquis au cours des années et enrichi probablement par les saisies révolutionnaires. Pierre Jacotot s’occupa du cabinet dès 1791, en tant que professeur de physique. Certains instruments scientifiques des xviiie et xixe siècles se sont retrouvés à l’université de Bourgogne lorsque l’université a pris place sur le campus Montmuzard et une partie au musée de la vie bourguignonne quand elle fit le choix au début du xxie siècle de les faire conserver dans cette institution muséale.
[28] Archives Municipales de Dijon, 1 R 2/2, Instruction publique primaire, an III – 1849, Inventaire de Pierre Jacotot, 4 février 1805 ou 15 pluviôse an XIII, suivi d’une lettre adressée au maire de Dijon. Dans cette liasse, une lettre de Villedieu de Torcy, adjoint au Maire, au Vicaire général Monsieur Collin (rue Bossuet, Hôtel Saint Louis) du 23 juin 1828 atteste des liens avec le Comité d’arrondissement pour l’instruction primaire, par déduction, des lieux d’instructions et des enseignants. Michel Pauty, Description illustrée des plus beaux instruments de physique de l’université de Bourgogne, Dijon, 2008. Cet ouvrage est le fruit d’une étude remarquable faite sur l’histoire et la découverte des instruments de physique utilisés dans le premier cabinet de physique de l’École centrale, à la Faculté des Sciences, puis à l’université de Bourgogne, et donne des pistes très intéressantes pour la recherche des instruments de physique.
[29] Michel Pauty, Inventaire conservé aux Archives départementales de Côte-d’Or décrivant les instruments de physique de l’ancien Observatoire de la ville de Dijon, Dijon, 2000. Ce livre contient le Catalogue du Laboratoire de physique de la Faculté des Sciences de l’université de Dijon de 1897 faisant référence à l’ancien catalogue du Laboratoire de 1847. Tous les instruments inventoriés se trouvaient dans la collection. L’inventaire mentionne les pièces typiques de Sigaud de Lafond.
Haut de page RÉFÉRENCES

Pour citer cet article :
Katherin Landais « La création du patrimoine artistique dijonnais pendant la Révolution par l’inventaire de François Devosge : collections et institutions », Revue TRANSVERSALES du Centre Georges Chevrier - 15 - mis en ligne le 26 novembre 2019, disponible sur :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/Transversales.html.
Auteur : Katherin Landais
Droits :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/publications/Transversales/menus/credits_contacts.html
ISSN : 2273-1806