Dans l’Ethique, Spinoza affirme : « Personne n’a encore jamais dit que peut un corps ». Si cette phrase se présente d’abord comme une provocation et une remise en cause d’une grande partie de la philosophie qui l’a précédée, elle précise cependant l’une des grandes lignes directrices de sa pensée. Organisée autour des notions d’effort et de puissance, la démarche de Spinoza aboutit à cette conclusion que l’essence d’un corps ne peut s’envisager que par rapport à ses capacités. Un corps n’existe que comme l’ensemble des actions qu’il peut produire et comme l’ensemble des effets qu’il peut subir.
Dire que peut un corps, c’est d’abord interroger les limites qui encadrent sa capacité à agir et à subir sans entrer dans un processus de décomposition. C’est ensuite comprendre comment ces limites sont elles-mêmes produites à travers une série de faits politiques, sociaux, économiques et techniques. Si le corps est action et passion, il faut pour le définir envisager ces processus de construction. Enfin, le corps se donne aussi comme signe : pour lui-même à travers les affects, mais aussi pour autrui. Il faut donc aussi interroger cette construction du corps comme signification sociale.
Élodie Sanchez et Sébastien Conry
Centre Georges
Chevrier,
UMR 7366 CNRS-uB