Laboratoire
Interdisciplinaire de
Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin"
UMR 7366 CNRS-uB
Transversales
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L’objet et la production de commun(s)
Introduction. De l’objet A la Mise en commun
Camille Mestdagh et Jérémy Sauvineau
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RÉSUMÉ

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L’actualité académique et bibliographique autour du/des « commun(s) » est particulièrement dense, et se situe au cœur de réflexions variées et de courants de pensées discordants – désignant ainsi un concept relativement versatile et révélant différentes définitions selon les disciplines. Les nombreuses variations terminologiques des différents auteurs en témoignent : doit-on parler de common(s) ? De commun ? Des communs ? De mise en commun ? De communalisation ? Ce maquis terminologique et conceptuel, gage de sa richesse, suscite nombre de questionnements au cœur des sciences sociales, motivant cette journée d’étude à vocation pluridisciplinaire.

Plutôt que de partir du concept polysémique de(s) commun(s), nous nous saisirons de la réflexion du sociologue Laurent Thévenot sur l’activité d’une mise en commun, nécessaire à toute communauté (Thévenot, 2008-2017 ; Stavo-Debauge, 2009). Thévenot distingue ainsi plusieurs « grammaires » de la mise en commun, dont la grammaire par « affinités à des lieux communs », qui semble subsumer les différents articles publiés ici. Par lieux communs, Thévenot entend ces topos qui rassemblent un public profondément « attaché » à ces mêmes lieux, quels qu’ils soient (une voiture, un jardin public, un met, etc.). Ici, le commun se construit au plus près des personnes : l’épreuve de cette mise en commun tient, toujours selon Thévenot, à l’émotion ressentie quand des attachements profondément investis en passent par le même lieu (Thévenot, Tsinman, Zambiras, 2017).

Cette notion, examinée à travers le prisme du rapport à l’objet, en tant que production humaine, aboutit à des raisonnements ambivalents sur l’accès, la possession, et l’usage d’objets comme pivot de liens entre individus. Ces liens qui se tissent autour d’une activité de mise en commun apportent une vision nuancée selon les échelles envisagées, locales ou globales. La mesure des échelles semble en effet déterminante pour l’analyse des communs, comme en témoignent les articles réunis, partant du voisinage de quartier, au régional, à la métropole, à l’universel. Charly Dumont et Gaëtan Mangin étudient, par leurs enquêtes de terrain, des pratiques de mises en commun à partir d’attachements personnels. Charly Dumont analyse la circulation d’outils dans un quartier pavillonnaire, où par l’usage et le partage, l’objet se trouve au cœur d’un lien social dynamique ; il démontre cependant l’ambiguïté de cette mise en commun qui laisse apparaître une forte singularisation au sein du récit et de l’expérience, cristallisant alors l’idée de patrimoine intime. Gaëtan Mangin s’intéresse à la possession d’une automobile, moteur d’échanges et de rassemblement où l’objet et l’espace privés sont investis dans une dynamique sociale. Illustrant davantage l’envers de la mise en commun, la communication de Léa Mestdagh sur le mobilier et les projets participatifs urbains démontre comment l’espace public, investi par des règles et des normes instituées par la classe dominante, contribue de fait au tri social, illustrant les répercussions d’une culture matérielle construite sur la structure d’une société fragmentée. Suivant une approche théorique, Céline Marty s’intéresse au commun immatériel qu’est la connaissance et comment, à l’échelle globale, ce qui est à portée universelle fait l’objet d’une appropriation capitaliste, accolant une valeur marchande à une production non-quantifiable.

Ainsi, si la relation à l’objet permet une mise en commun, un dialogue, elle suscite aussi un tiraillement entre le potentiel de communs et l’intérêt individuel, qu’il s’agisse de préservation d’un patrimoine intime, de la distinction sociale ou du profit économique. Au-delà de l’analyse contemporaine, c’est justement ce tiraillement qui est lourd de sens pour l’historien, l’archéologue ou l’anthropologue, tous au cœur de l’étude de la singularité des objets, tant dans leur usage quotidien que dans l’attribution d’un statut particulier. « Pour beaucoup, les objets apparaissent désormais comme l’un des meilleurs outils pour appréhender le fonctionnement des collectifs humains, y compris à des échelles transnationales et globales. » comme le souligne François Jarrige dans son article conclusif.

 

Bibliographie

Stavo-Debauge Joan, Venir à la communauté. Une sociologie de l’hospitalité et de l’appartenance, Thèse de doctorat en sociologie, sous la direction de Laurent Thévenot, Paris, EHESS, 2009.

Stavo-Debauge Joan, « L’idéal participatif ébranlé par l'accueil de l'étranger. L’hospitalité et l’appartenance en tension dans une communauté militante », Participations, 2014a, n° 9, p. 37-70.

Thévenot Laurent, « Sacrifices et bénéfices de l’individu dans un espace public libéral », Cahiers d’éthique sociale et politique, 2008, 5, p. 68-79.

Thévenot Laurent, « Voicing concern and difference : from public spaces to common-places », European Journal of Cultural and Political Sociology, 2014b, 1:1, p. 7-34.

Thévenot Laurent, « “Des liens du proche aux lieux du public”. Retour sur un programme franco-russe pionnier », Revue d'études comparatives est-ouest, 2017, 46, p. 7-43.

Thévenot Laurent, Tsinman Janna, Zambiras Ariane, « En commun, en différend. Politiques comparés dans l’apprentissage de la Vie ensemble en Foyer Étudiant », Revue d’études comparatives Est-Ouest, 2017, 48, p. 45-93.

 

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Camille Mestdagh et Jérémy Sauvineau
LIR3S Laboratoire interdisciplinaire de Recherche “Société, Sensibilités, Soin”, UMR 7366 uBFC/CNRS

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Pour citer cet article :
Camille Mestdagh et Jérémy Sauvineau, « Introduction. De l’objet A la Mise en commun », Revue TRANSVERSALES du LIR3S - 19 - mis en ligne le 2 juin 2021, disponible sur :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/Transversales.html.

Auteurs : Camille Mestdagh et Jérémy Sauvineau
Droits :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/publications/Transversales/menus/credits_contacts.html
ISSN : 2273-1806