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Corps, Lieux et Appartenances
Exposer l’Amérique. Sim Copans à la Radio Française (1946 – 1954)
Lucas le Texier
Résumé | Mots-clés | Sommaire | Texte | Auteur | Notes | Références
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RÉSUMÉ

La politique culturelle américaine à l’étranger resta largement jusqu’à l’Après-guerre le fruit d’initiatives privées. À la suite de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis la développent intensément en Allemagne, dans l’optique de « modifier la société dans un sens démocratique » (Yves-Henri Nouailhat, « La politique culturelle des États-Unis en France », Relations internationales, printemps 1981, n° 25, p. 93) : l’action culturelle est alors conçue comme un instrument de politique étrangère. Pour la France, il faudra attendre 1947 et surtout 1948, soit le début de la Guerre froide, pour que le gouvernement américain investisse pleinement ce champ d’action afin de garder la France dans le camp occidental et de contrer l’influent Parti communiste français. Persuadés de la méconnaissance française sur leur pays, les États-Unis mettent au point un dispositif d’échanges et de diffusion d’informations à leur propos.

Simon Copans (1912-2000) – dit « Sim » Copans – a joué un rôle crucial dans l’exposition et la découverte de l’Amérique grâce à son travail d’homme de radio sur les ondes françaises. Professeur à l’Université de Colombia à la suite d’une thèse menée en France sur les relations franco-américaines, il décida de s’engager lors de la Seconde guerre mondiale en tant qu’opérateur radio dans l’Office of War Information (OWI, l’agence gouvernementale des États-Unis qui opérait par les médias pendant la Seconde Guerre mondiale). À la fin de la guerre, Simon Copans décida de rester en France, et occupa un poste dans la politique culturelle des États-Unis menée dans le pays – politique relevant non plus de la branche militaire de l’OWI mais de la branche civile de l’United States Information Service (USIS) sous le contrôle du Département d’État. Cette activité le conduisit à intervenir sur les ondes françaises, en tant que simple collaborateur mais aussi producteur d’émissions radiophoniques.

Simon Copans va alors s’atteler à exposer l’Amérique et le triptyque qui nous intéresse ici : les corps, les lieux et les appartenances. Grâce à la diffusion de la musique américaine, ponctuant une narration radiophonique qui apporte des éléments sur la culture, les communautés et la géographie des États-Unis, les interventions de Copans nourrissent la curiosité des français pour les États-Unis et répondent aux ambitions du gouvernement américain qui cherche (non sans intérêt donc) à faire connaître leur pays en France. La musique et le son participent à dépeindre une Amérique vaste et diverse : des bruits des grandes métropoles à la Nouvelle-Orléans en passant par les Great Smoky Mountains ; du folklore des fêtes religieuses américaines à celui des marins ou des indiens ; des chansons qui dépeignent les corps des travailleurs, les danses cow-boys ou l’entertainment de Broadway, etc. Si le contenu des discours et les manières de présenter les extraits sonores nous intéresseront particulièrement, les propriétés du discours radiophonique de Sim Copans, qui convie l’auditeur à un véritable voyage en faisant référence à des éléments corporels, devront également être étudiées.

Grâce aux documents et textes d’émissions radiophoniques fournis par le fonds Sim Copans à Souillac, ainsi qu’aux retranscriptions des émissions radiophoniques disponibles dans les archives de l’Institut national de l’audiovisuel, cette communication cherchera à montrer le rôle de Sim Copans, les enjeux et les opérations de l’exposition radiophonique de l’Amérique par les trois notions qui nous intéressent.

Haut de page MOTS-CLÉS

Mots-clés : Sim Copans, émissions radiophoniques, audiovisuel, musique américaine, jazz
Index géographique : France, États-Unis
Index historique : xxe siècle, Après-guerre
SOMMAIRE

I. New York, ville moderne
II. Folklore des montagnes
III. Mississippi River
IV. L'immensité américaine
Haut de page TEXTE
 

« La musique américaine sera utilisée afin de corriger l’impression commune en Europe que les États-Unis sont un pays d’illettrés musicaux[1] ».

Si le rôle de la radio a bien été étudié dans le domaine politique de la Guerre froide, notre contribution souhaite interroger une partie des outils du programme de diplomatie culturelle états-unien autour du média radiophonique. Les relations franco-américaines qui se tissent au travers de la radio trouvent leur origine dans l’Entre-deux-guerres, alors que les géants états-uniens des télécommunications installent leur réseau de correspondants et de transmissions en ondes courtes au sein de l’Europe[2].

En tant que média largement répandu aux États-Unis et en Europe au milieu du siècle[3], la radio est une technologie cruciale dans le dispositif de la propagande américaine pendant la Seconde Guerre mondiale et la Guerre froide. Lors du conflit de 39-45, c’est l’agence gouvernementale de l’Office of War Information (OWI) (créée le 13 juin 1942) qui est chargée de coordonner l’ensemble de la propagande américaine. La radio y occupe une place de choix pour souder le moral des Alliés et contrer la propagande nazie. The Voice of America (VOA), la radio de la branche extérieure (Overseas Branch, i.e. à destination hors des États-Unis) de l’OWI[4], fut un outil indispensable dans la préparation d’une future collaboration entre les États-Unis et l’Europe de l’Ouest. Signe de cet intérêt, les américains installent dès le mois d’avril 1944 un réseau de transmetteurs sur le sol britannique pour faciliter la diffusion de la VOA sur le territoire européen : l’American Broadcasting Station in Europe ou ABSIE[5].

La France occupe par son emplacement géographique une position-clé en Europe, ce qui motive les américains à préserver sa place dans le monde libre. Dès la Seconde Guerre mondiale, une attention toute particulière est portée à étendre l’influence des États-Unis sur la France : le bureau français de la VOA, chargé des programmes pour les français restés sous l’Occupation, est « le plus important de tous par le nombre de ses collaborateurs[6] ». Afin de garantir le succès des forces libérales et démocratiques françaises face au puissant Parti communiste français, et pour contrer une image écornée des États-Unis pendant la guerre et à la Libération, l’Amérique investit dans un programme de diplomatie culturelle qui se concrétise dans les centres de l’USIS (United States Information Service), des antennes de réception de la propagande américaine en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient[7]. D’abord sous le giron de l’OWI pendant la guerre, les USIS passent sous la responsabilité de l’administration civile après le démantèlement de l’agence en 1945 ; l’antenne parisienne de l’USIS est créée en août 1944[8].

C’est dans ce contexte que l’américain Simon Jacob Copans (1912-2000), surnommé « Sim » Copans, va jouer un rôle déterminant dans la diffusion de la culture américaine, et participer ainsi à faire connaître les États-Unis aux français. Un bref retour sur son parcours s’impose. Né en 1912 à Stamford dans le Connecticut, il débute dans les années trente une thèse sur les relations franco-américaines du xixe siècle. Au début des années quarante, il est nommé enseignant à la Columbia University. Ce parcours d’universitaire est interrompu en hiver 1943-1944 où il s’engage comme officier radio dans l’OWI. Il prend part au conflit en opérant en Angleterre pour l’ABSIE au printemps 1944, avant de rejoindre en juin 1944 la France où il sillonne les campagnes à l’aide de son camion sonorisé par lequel il diffuse des nouvelles et de la musique américaine aux civils. Il rejoint Paris en août 1944 et passe de l’OWI à l’USIS, se rattachant ainsi à l’administration civile à partir de septembre 1944.

En réalité, ce n’est qu’à la mort accidentelle en 1946 dans un accident de jeep en France du collègue américain de Copans avec lequel il est rattaché à la section radio, Bravig Imbs, que le premier hérite de la production d’émission et des tâches liées à la coopération radiophonique franco-américaine. Il devient la « voix de l’Amérique » sur les ondes de la Radiodiffusion française.

En fonction des archives textuelles et audios qui nous étaient disponibles, notre choix s’est porté sur deux émissions. La première est une émission culturelle d’une demi-heure intitulée Tour du monde autour d’une table, présentée par Jacques Pauliac (?-1950) puis Olivier d’Horrer (1914-1984) à la mort du premier. Le programme est diffusé le dimanche et/ou le mardi soir, sur la chaîne parisienne et la chaîne nationale. Chacun des intervenants représente officiellement ou officieusement une des radios du monde. Ils sont invités à présenter des musiques et des sons de leurs pays selon un thème imposé pour chaque émission. Simon Copans représente la radio des États-Unis dès la création de l’émission en septembre 1946[9]. Selon les archives de l’administration américaine conservées par Sim Copans, l’audience nationale de l’émission est estimée à 2 500 000 personnes en 1953[10].

La deuxième émission sur laquelle nous allons nous pencher se nomme L’Amérique en musique. Elle est animée par Bravig Imbs jusqu’à son décès en 1946, et il faut attendre le début de 1947 pour que le programme soit réintégré à la Radio française le dimanche à l’occasion de la création d’une nouvelle chaîne, Paris-Inter. Elle est alors confiée à Sim Copans, qui articule des extraits musicaux ou sonores des États-Unis autour d’un thème précis. Ce programme est diffusé le dimanche de 11h30 à 12h00 (saison 1947-1948) et de 12h30 à 13h03 à partir du 10 octobre 1948[11]. On estime en 1953 l’audience nationale de l’émission à 1 200 000 personnes[12].

Nous avons décidé d’investir notre enquête jusqu’à la démission de Simon Copans de la VOA, effective le 1er février 1954[13] – officiellement pour se consacrer à ses recherches universitaires, officieusement, ironie de l’histoire, parce qu’il était susceptible d’être inquiété pour ses sympathies communistes.

Nous souhaitons ici interroger le rôle des lieux, formés par les communautés et corps qui les composent, comme une des dimensions de la diplomatie culturelle américaine. Pour Sim Copans, c’est sous la houlette de la musique que se concrétisent les lieux états-uniens. Pourquoi parler de lieu ? L’agencement et l’organisation proposés par Sim Copans répondent à la tradition géographique américaine qui se conçoit dans une dichotomie entre espace et lieu : à un « espace commandé et contrôlé par des institutions[14] », on y confronte le lieu qui « traite de l’échelle où les individus se rencontrent et organisent leur quotidien[15] ». « Dans cette perspective on comprend que l’espace territorial américain s’organise à partir d’un ensemble de lieux[16] », et c’est toute cette diversité qui est mise à jour par Sim Copans.

La musique tient une place écrasante dans ces émissions et joue un rôle moteur dans la définition des lieux américains. Le tournant culturel pris par la géographie dans les années 1990-2000 a mis en avant la musique comme un « construit cognitif permettant d’appréhender un phénomène spatial[17] » tout comme un « géo-indicateur des sentiments d’appartenance[18] » ; elle permet aussi aux divers corps américains de s’affirmer, par le truchement de la voix. Au côté de la musique, les deux autres matériaux radiophoniques (le discours et les bruits) permettront de rendre compte des lieux américains et de leurs représentations. La mise en avant des communautés corporelles et d’appartenances états-unienne doit, si ce n’est rendre amicale, normaliser le rapport aux États-Unis.

I. New York, ville moderne

Dans le parcours au travers des États-Unis que nous propose Sim Copans, la côte nord-est est le thème de nombreuses émissions ; la ville de New-York est l’un des éléments présentés de façon récurrente par l’animateur qui insiste sur la dimension moderne de la ville[19]. Dans cette optique, Sim Copans n’hésite pas à diffuser des extraits sonores des infrastructures de la Big Apple :

« New York est représentée en général comme une ville de gratte-ciel, comme une ville moderne et dynamique par excellence. On oublie souvent que New-York est composée de cinq grands arrondissements peuplés par près de huit millions d’habitants. Les compositeurs américains ont été frappés avant tout par le côté dynamique de la ville […]. Voulez-vous écouter pendant quelques secondes la voix de la ville ?[20] »

Cette voix de la ville et ce rapport à un corps mécanique et architectural de Copans, se retrouvent au sein de trois émissions où Sim Copans diffuse des extraits des bruits de New-York[21]. Dans une des émissions du Tour du monde autour d’une table intitulée « Carte postale de New-York en musique[22] », c’est bien l’environnement sonore de la ville qui est présenté par Sim Copans. Il y diffuse les bruits du métro, des trains de la gare centrale, les klaxons des voitures, avant de réaliser un montage cacophonique superposant l’ensemble de ces sons. Copans insiste sur les différences sonores qu’il existe entre des moyens de transport pourtant bien identifiés et connus par les auditeurs français. Dans une autre émission du Tour du monde autour d’une table autour des sons et musiques liés aux ports[23], Sim Copans nous fait entendre l’atmosphère sonore du port de New-York. Bien que quelques similitudes puissent se glisser pour les auditeurs francophones comme le bruit des mouettes, d’autres éléments comme les signaux sonores des navires s’affirment comme des entités sonores singulières de la ville, comme le ferry-boat faisant la jonction entre New-York et le New Jersey. Ils constituent ainsi une porte d’entrée sensitive idéale pour entendre et découvrir l’Amérique[24].

II. Folklore des montagnes

La musique est un véritable outil pour Sim Copans. Elle agit directement dans l’idée de rapprocher l’Amérique d’une réalité, qui se manifeste dans une représentation tangible dont le corps se porte garant, à la fois au singulier par le truchement de la voix, et dans le collectif, par les communautés et les appartenances qui forment ces endroits.

Les descriptions qui sont faites par l’animateur des chaînes de montagnes sont particulièrement pertinentes pour illustrer notre propos. Pour créer une représentation sonore et tangible des montagnes, Copans évoque les instruments typiques de ces régions et/ou les manières particulières de les jouer. Le banjo, bien que connu et répandu en France dans les années 20/30 comme instrument « africain », a été le fruit d’une réappropriation progressive par les classes moyennes blanches américaines, devenant un symbole (et se limitant) du (au) style bluegrass[25] et plus largement à celui de la country que l’on entend dans les montagnes états-uniennes.

Olivier d’Horrer :

« Eh bien quant à vous Sim, je parierais que vous avez un choix d'instruments extraordinaires et peu connus dans notre vieille Europe. »

Jan Brusse :

« Oui Sim, faites-nous un récital de tambour indien ou de quelque chose de ce genre ! [rires] »

Simon Copans :

« Je regrette, mais vous allez entendre ce soir les instruments qui n’ont certainement jamais été entendu sur le continent américain avant l’arrivée des colons du xviie siècle. »

Georges Laurent :

« Oh ! Alors dans ces conditions, sans avoir de dons de pythonisse, je parie qu’on peut prévoir un petit air de banjo ! Est-ce que c’est exact ? »

Simon Copans :

« On ne peut rien vous cacher Georges Laurent. Et aussi, pour récompenser à la fois votre intuition et votre érudition, voici Raggin’ the banjo, “en grattant le banjo”[26].  »

Certains instruments peuvent être aussi connus en Europe mais présentés dans un contexte différent. À ce titre, le fiddle, appellation du violon que l’on réserve à la musique populaire, est un bon exemple. Au xixe siècle, on trouve le fiddle dans tous les États-Unis. Les techniques de jeu irlandaises et écossaises sont importées et « améliorées » en Amérique, tandis que l’instrument est un indispensable des orchestres de danse[27]. Ce son brut du fiddle, avec un jeu rythmique et généralement sur plusieurs cordes, devient une référence pour évoquer les orchestres montagnards.

Cecilia Reeves :

« Je me demande Sim si vous allez nous présenter comme instrument le violon montagnard que nous vous avons envoyé de l’Irlande ! »

Simon Copans [en riant légèrement] :

« Oh Cécilia, pas de luttes de sphères d'influences ce soir ! [rires] Car voici précisément un violon montagnard, aigrelet à souhait, et quand même croyez-moi typiquement américain[28].  »

Copans opère une stratégie double qui tient à la fois dans la distinction et dans le rapprochement de l’Amérique avec le continent européen : si les montagnards ont bien inventé leur propre danse, c’est grâce à l’importation de cultures européennes que cela fut possible.

Grâce à sa discothèque très importante, Simon Copans peut personnifier dans des musiciens et musiciennes américain(e)s ces lieux géographiques et sociaux qu’il décrit, et ainsi les faire s’incarner dans des corps précis. Ce sont généralement des figures récurrentes dans les extraits sonores présentés par Copans. Prenons pour exemple le massif des Appalaches qui fait l’objet d’une attention toute particulière. Sim Copans aborde au travers de ses émissions les nombreuses subdivisions de cette chaîne montagneuse. Pour les montagnes Blue Ridge que Copans traduit par les « Montagnes Bleues[29] », qui forment la partie orientale du massif des Appalaches, Copans fait appel au chanteur Jimmy Nakely et à son trio sur « Blue Ridge Mountain Trail[30] ». Pour les Great Smoky Mountains au sud – les « Montagnes Fumeuses[31] » pour les auditeurs français –, qui font partie des montagnes Blue Ridge, l’animateur diffuse les chansons jouées par Burl Ives comme « On Top of Old Smoky[32] » ou par le musicien Pete Seeger avec par exemple « My Home’s Across the Smoky Mountains[33] ». Enfin, pour les Montagnes du Kentucky qui font partie des montagnes Cumberland (elles-mêmes sur l’extrémité sud des Appalaches), ce sont les Coon Creek Girls et leur titre « Banjo Picking Girls[34] » qui sont réquisitionnés.

En observant les conducteurs des émissions de L’Amérique et sa musique, on s’aperçoit qu’il ne faut pas surestimer la place du discours radiophonique chez Sim Copans : dans l’émission du 1er août 1948 consacrée à une visite dans les Montagnes des États-Unis, l’ensemble des extraits musicaux totalise 81% du temps de l’émission. C’est bien l’accroche tendue à l’auditeur avec les chansons qui permet de créer des espaces historico-culturels et de les replacer dans un contexte géographique plus large états-unien.

III. Mississippi River

Sim Copans va user principalement des mêmes approches pour parler des nombreux fleuves états-uniens. Par souci de place, nous nous limiterons à celui qui semble être le plus traité dans les émissions de Copans, le Mississippi River. Deux émissions de L’Amérique en musique sont consacrées à celui-ci[35] :

«  Le grand fleuve Mississippi qui prend sa source du Nord des États-Unis dans le Lac du Minnesota, traverse tous les États-Unis pour aller se jeter dans le Golfe du Mexique. Pendant quatre mille kilomètres, le Mississippi traverse les états [sic] du Minnesota, Wisconsin, Iowa, Illinois, Missouri, Arkansas, Tennessee, Louisiane et Mississippi. Il n’est donc pas étonnant que les Indiens Américains aient nommé ce fleuve : Le Mississippi – le Père des Fleuves, et il n’est pas surprenant non plus que ce Père des Fleuves ait été une source importante d’inspiration pour la musique américaine[36]. »

La taille du plus grand fleuve des États-Unis est tellement importante qu’elle devient prétexte à explorer de nombreuses facettes de la culture américaine qui bordent les rives. Pour la musique, Sim Copans diffuse la pièce du compositeur Ferde Grofé, Mississippi Suite (1926) ou encore « Ol’ Man River » du chanteur Paul Robeson, tirée de la comédie musicale Show Boat (1927) sur les déboires d’un bateau-théâtre dans un port de Louisiane, devenue un classique de la chanson américaine.

Le Mississippi possède un lien privilégié avec la musique de jazz, par son delta qui fut l’un des berceaux sinon un foyer de jazz précoce aux États-Unis ; beaucoup de termes ou d’éléments qui lui sont associés sont utilisés par les jazzmen[37]. Copans y fait directement référence :

«  Tout le monde sait que le jazz a pris naissance en Nouvelle-Orléans, mais je me demande si tout le monde connaît le rôle important joué par le grand Mississippi River, et surtout par les bateaux du Mississippi dans l’histoire du jazz. Les musiciens qui jouaient sur ces bateaux ont introduit le jazz dans le Nord des États-Unis, et surtout à Chicago d’où le jazz est ensuite parti à la conquête du monde. Louis Armstrong, Sidney Bechet, et beaucoup d’autres grands musiciens ont joué dans les petits orchestres de jazz des bateaux du Mississippi[38]. »

Le jazz reste l’un des outils principaux de la propagande culturelle américaine à l’Après-guerre. Il faut cependant l’apprivoiser car, s’il contribue à rendre audible l’Amérique partout, la culture et les « succès » des africains-américains en son sein participent à faire de cette musique un vecteur de résistances et de contestations contre les États-Unis[39]. La promotion publique du jazz par le Département d’État qui mettra en avant les musiciens africains-américains lors de tournées mondiales[40] permettra de tordre le cou aux critiques anti-américaines qui pointent la question raciale et la manière dont sont traités les noirs-américains aux États-Unis[41] : le jazz est alors utilisé comme vitrine d’une société apaisée. Ici, une partie du Mississippi River est donc concrétisée par son lien avec la musique de jazz, à un moment où celle-ci s’affirme comme musique populaire en France au milieu du siècle[42].

Pourtant, on aurait tort de voir dans le jazz un argument facile chez Sim Copans. Il y a de nombreux exemples dans la mise en scène du Tour du monde autour d’une table où les interlocuteurs, associant étroitement les États-Unis et la musique (de danse) au jazz, se voient proposer une alternative telle qu’une valse, un titre de musique de cow-boy, une opérette ou encore une pièce classique. La question du jazz est évitée ou décentrée, comme si l’Amérique que l’on associait étroitement à lui devait s’en dégager pour offrir une mosaïque musicale dont le jazz ne pourrait qu’en suggérer une partie.

Olivier d’Horrer :

« Eh bien c’est à vous Sim que je pose en premier la question : quoi de neuf en provenance des États-Unis ? »

Simon Copans :

« Quoi de neuf… Voyons, voyons… »

Jan Brusse :

«  Un orchestre de jazz ? »

Sim Copans :

« Ah non non non non… »

Georges Laurent :

« Ou bien une chanson de charme. »

Simon Copans :

« Pour la seconde fois, non. »

Cecilia Reeves :

« Que diriez-vous de la dernière opérette made in Broadway ? »

Simon Copans :

« Ah non non non non. Trois fois non. Vous entendrez ce soir des nouveautés du folklore américain[43]. » 

Olivier d’Horrer :

« Eh bien Sim, puisque c’est par vous que nous commençons ce soir, j’espère que ce sera vraiment de la musique folklorique de danse au village, et non pas du jazz sous quelques formes que ce soit, que vous nous proposez de nous faire entendre. » 

Simon Copans :

« Ne craigniez rien Olivier, vous entendrez l’orchestre au village. J’ai l’intention de vous faire faire une visite imaginaire à travers quelques États du Sud. Nous admettrons que nous sommes un samedi soir, c’est le samedi soir qu’on danse surtout, n’est-ce pas ? [rires] Eh bien, nous ne resterons pas longtemps dans chacune des salles de bal, et vous vous rendrez compte que l’on peut encore danser aux États-Unis sans un orchestre de jazz et […] je crois que l’on s’amuse tout autant[44].  »

Olivier d’Horrer :

« Eh bien, notre propos étant de présenter quelques airs de jazz et de danse, il est naturel que je propose à Sim Copans d’ouvrir le bal – si je puis dire – puisque Sim représente le pays où se situe la naissance du jazz.

Simon Copans :

 « Je demande pourtant la permission de commencer par la danse, sans le jazz[45]. »

Simon Copans [après la diffusion d’un chant de marin] :

« Puisque nous sommes en Nouvelle-Angleterre, nous pouvons, après ce très dur travail que nous venons d’accomplir sur un bateau de pêche, hisser l’ancre, nous pouvons, dis-je, danser un peu. »

Georges Laurent :

«  Eh bien dansons. Mais… Il y a de la musique typique en Nouvelle-Angleterre ? Moi je croyais qu’il y avait surtout du jazz… »

Simon Copans :

« Oh mais si, nous avons des airs de danses typiques. D’ailleurs, vous allez juger vous-même en écoutant deux danses de la région[46]. »

À côté de son activité d’animateur, le travail de conférencier mené en France par Sim Copans participa à étendre l’influence du jazz auprès de nouveaux publics en offrant à la population des accroches pour les inscrire dans l’histoire de cette musique. Les conférences de Copans présentaient l’histoire du jazz comme « un phénomène à la fois étranger et intérieur[47] », appréhendable dans une histoire et des cultures étrangères, mais aussi dans un roman national : Sim insistait dans son récit sur des éléments ayant trait à l’histoire coloniale française – participation à l’esclavage atlantique, présence dans les colonies caribéennes, dans l’Afrique française moderne ou à la Nouvelle-Orléans – et glorifiait une participation supposée de la France à la naissance et à la maturation de ce courant musical[48]. En somme, le jazz ne devient plus une propriété seulement américaine, mais aussi (un peu) française.

C’est dans ce contexte que la Nouvelle-Orléans, par l’intermédiaire du jazz et de la culture créole, devient un moyen d’échange culturel et une accroche pour parler des États-Unis – une sorte de caution française. Copans se plaît à rappeler le poids de la culture française de la ville, notamment en utilisant des extraits musicaux composés de morceaux créoles à base lexicale française. Il signifie ainsi l’influence de la culture de la France au sein de la Nouvelle-Orléans et rend ainsi tangible et concret le lien commun entre la France et l’Amérique par le truchement du jazz et de la culture nouvelle-orléanaise :

« Les musiciens de la Nouvelle-Orléans ont eu un faible pour les chansons créoles et les ont transformées en musique de jazz ; j’ai choisi trois exemples, et, détail séduisant, les paroles sont chantées en Français, ou plus exactement dans le dialecte de la Nouvelle-Orléans. Voici pour commencer l’histoire de Jean-Baptiste, chant d’amour cajun, interprété par quelques musiciens de la Nouvelle-Orléans [diffusion de l’extrait]. Après le chant d’amour cajun en costume moderne, je vous invite à écouter deux chansons créoles interprétées par l’Orchestre Créole de Kid Ory […]. La première de ces chansons créoles est assez connue en France. Elle est intitulée : CREOLE BO BO. C’est l’histoire d’un petit garçon qui a reçu la fessée [diffusion de l’extrait]. Voici la seconde chanson créole par Kid Ory et son orchestre créole : EH, LA BAS. Cette fois, c’est l’histoire de gens qui mangent trop. Je vous signale que dans ses deux morceaux, les paroles sont chantées par Kid Ory, tromboniste, qui est lui-même d’origine créole.[49]  »

IV. L’immensité américaine

Le dernier point qui nous semble d’intérêt est de s’intéresser aux « voyages » que propose Sim Copans, permettant d’illustrer la multitude des lieux américains à la fois spécifiques mais pourtant superposés dans une unité américaine au sein du discours de Copans. C’est ainsi que le 8 août 1948, Sim Copans propose une promenade musicale autour de la route nationale 66, qui s’étend de Chicago à Los Angeles[50] ; elle met en évidence un ensemble de lieux qui se côtoient tout en ayant leur propre différence par le biais de la diffusion de musique : le boogie-woogie de Chicago (« East Chicago Blues »), les ballades country du Missouri (« Missouri Valley », par Carson Robison & his Buckaroos), les chansons de cow-boy de l’Arizona (« Arizona Here I Come » par The Ranch Boys) ou de la Californie transportent l’auditeur de toute part de l’Amérique, et dans des Amériques bien différentes.

Cette idée d’une traversée et d’un voyage se retrouve aussi dans l’émission que Sim Copans consacre aux chansons de route et à la figure emblématique du hobo américain que l’animateur traduit avec le cheminot pour la rendre intelligible auprès du public français : « Le Vagabond ou le Hobo est un personnage légendaire aux États-Unis. En France c’est le chemineau qui traduit plus ou moins le hobo américain[51] ».

Il apparaît évident que cette thématique de l’immensité américaine tend à être particulièrement pertinente dans l’évocation de l’Ouest américain (Far West) et de ses avatars comme le western  « qui ont alimenté l’imaginaire depuis la naissance de l’Amérique[52] ». Le western et ses communautés qui le composent – les cow-boys et les indiens, pour schématiser – génèrent des «  “pratiques culturelles” (films, romans, BD, mais aussi rodéos, peinture de l’Ole West, musique country)[53] » et offrent des représentations pour imaginer l’Amérique en France.

Cela passe chez Sim Copans par l’évocation, comme dans les montagnes, de figures légendaires qui marquent la mythologie américaine du western comme Billy the Kid[54]. Sim Copans raconte son histoire entre les diffusions du ballet du compositeur américain Aaron Copland consacré au bandit :

Cecilia Reeves :

« Alors, en attendant, quelle est l’histoire que vous allez nous raconter pour commencer ? J’aime les histoires moi !  »

Simon Copans :

« Eh bien c’est l’histoire de Billy the Kid - il faut traduire je suppose Billy le Gosse.  »

Georges Laurent :

« Mais qu’est-ce que c’est que Billy the Kid ? Billy le Gosse ? Est-ce que ça a un rapport avec le film de Charlot[55] ?  »

Cecilia Reeves :

« Moi je sais qui est Billy the Kid ! C’est un bad man, un bandit du Far-West.  »

Simon Copans :

« Mais Cécilia, comment le savez-vous ?  »

Cecilia Reeves :

« Tout simplement parce que j’ai assisté à une représentation du American Ballet Theatre il y un an, au Palais de Chaillot.  »

Jan Brusse :

«  Mais quel rapport y’a-t-il entre le ballet et un bandit du Far-West ?  »

Simon Copans :

«  Eh bien, Jan Brusse, le rapport est très intime, puisque le compositeur américain Aaron Copland a composé un ballet qui raconte la vie de Billy the Kid. Et ce sont justement quelques extraits de ce ballet que j’ai l’intention de vous faire entendre[56].  »

Sim Copans diffuse aussi ce qu’il appelle des chansons ou des danses de cow-boy, bien que celles-ci n’aient pas d’identité stylistique précise et stabilisée :

 « Faisons maintenant un grand saut sur la carte des États-Unis depuis New York jusqu’au Texas. Nous aurons juste le temps d’entendre une chanson mexicaine. De nombreux mexicains travaillent comme cowboys dans les grands ranches [sic] du Texas et ils ont leurs chansons. Voici THE HE MAN BULL – le taureau très masculin – une chanson humoristique, chantée par les cowboys mexicains du Texas.[57] »

Les objectifs de la politique culturelle états-unienne vers la France se résumaient à une présentation « objective » de l’Amérique : l’Interim International Information Service, qui hérite après la Seconde Guerre mondiale des activités de l’OWI et du Coordinator of Inter-American Affairs (CIAA, l’« OWI » de l’Amérique latine), doit veiller « à ce que les autres peuples aient une image exacte et complète de la vie américaine ainsi que des buts et de la politique du gouvernement américain[58] » comme le déclarait le successeur de Franklin Roosevelt, Harry Truman. Si l’on ne sera pas dupe en prenant pour argent comptant cette phrase au vu des tensions internationales qui se jouent entre les deux blocs et en raison du rôle de la radio dans les dispositifs de propagande des deux superpuissances, le média radiophonique occupe néanmoins une fonction-clé dans la consolidation des relations entre états-uniens et français, qui apprennent à s’écouter les uns et les autres par ondes interposées[59].

Faire connaître les lieux américains qui forment une mosaïque hétéroclite et variée rentre pleinement dans le cadre des objectifs de la diplomatie culturelle états-unienne vers la France à l’Après-guerre. Comme dans la tradition géographique américaine, Sim Copans cherche moins à présenter les espaces institutionnels que les lieux formés par les communautés et appartenances américaines dont la musique devient le vecteur principal. Bien qu’orales, ces émissions que Copans produit ou dans lesquelles il participe, permettent de donner des représentations tangibles et concrètes des États-Unis, qu’elles soient nouvelles ou qu’elles se raccrochent à des idées existantes (le jazz et le Mississippi, New-York et la modernité, les cow-boys et l’Ouest américain). D’autres programmes de la VOA usent aussi d’éléments géographiques dans le dispositif de propagande culturelle américaine – comme le programme de la VOA destiné à l’Amérique latine en février 1948 Know North America[60]. La présentation de la géographie américaine en musique n’est qu’un outil de Sim Copans. On aurait pu tout aussi bien insister sur les ressemblances avec les fêtes religieuses, ou sur la présentation d’opérettes et comédies musicales hollywoodiennes et new-yorkaises pour évoquer les outils de la diplomatie culturelle américaine à l’étranger. Il existe en France et en Europe Occidentale une véritable fascination pour le folklore américain et les territoires pionniers qui ne cesse de s’affirmer à partir de l’Après-guerre[61].

Les textes de Sim Copans ne rendent pas compte des tensions qui existent aux États-Unis sur le dispositif de propagande extérieure. Ce qui en témoigne le plus reste le départ de Sim Copans de ses fonctions du Département d’État, moins pour ses manières de travailler, qu’il va perpétuer sur la Radio française, que par peur d’être inquiété par cette nouvelle chasse aux sorcières qui frappa le budget et le personnel de la politique culturelle américaine étrangère sous la houlette du maccarthysme et de tensions nouvelles avec les soviétiques.

 

Bibliographie :

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Derek W. Vaillant, Across the Waves. How the United States and France Shaped the International Age of Radio, Urbana, University of Illinois, 2017.

Haut de page AUTEUR

Lucas Le Texier,
LIR3S Laboratoire interdisciplinaire de Recherche “Société, Sensibilités, Soin”, UMR 7366 uBFC/CNRS (Sous la direction de Philippe Poirrier )

Haut de page NOTES


[1] Robert William Pirsein, The Voice of America. An History of the International Broadcasting Activities of the United States Government, 1940-1962, New York, Arno Press, 1979, p. 96.
[2] Leur but est de nourrir l’appétit du public américain pour la culture et la politique européennes. Il faut signaler que cette fonction éducative facilite l’obtention de licences qui sont distribuées par le gouvernement américain. Sur les rapports radiophoniques entre français et américains, voir Derek W. Vaillant, Across the Waves. How the United States and France Shaped the International Age of Radio, Urbana, University of Illinois, 2017.
[3] Anya Luscombe, « Eleanor Roosevelt and radio in early Cold War France », Women’s History Review,2019, n° 29-2, p. 216.
[4] Nicholas John Cull, The Cold War and the United States Information Agency. American Propaganda and Public Diplomacy, 1945-1989, Cambridge & New-York, Cambridge University Press, 2008, p. 15.
[5] Robert William Pirsein, The Voice of America…, op. cit., p. 80-81. L’ABSIE arrêtera sa diffusion en juillet 1954.
[6] Emmanuelle Loyer, « La “Voix de l’Amérique”. Un outil de la propagande radiophonique américaine aux mains d’intellectuels français », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 2002, n° 74-4, p. 94-95.
[7] François Doppler-Speranza, « Entre amitié et émancipation. Les militaires, les femmes et les principes démocratiques de la diplomatie culturelle américaine en France, 1944-1967 », Les cahiers Irice, 3 décembre 2014, n° 12-2, p. 121
[8] Ibid, p. 122.
[9] Annotations manuscrites de Sim Copans regroupées dans la boîte II – SC – 17, Texte Sc, Cinquantenaire débarquement. le rôle de la radio américaine dans la France libre en juin 1944, p. 12, à consulter au Fonds Sim Copans à Souillac.
[10] III – SC – 34, Job Descriptions, Fonds Sim Copans.
[11] Une note qui évoque le changement d’horaire de l’émission au début de la saison radiophonique de 1948. Voir la boîte III – SC – 8, L’Amérique et sa musique. Note du 13 septembre 1948.
[12] III – SC – 34, Job Descriptions, Fonds Sim Copans.
[13] III – SC – 40, Démission de la Voix de l’Amérique 1953-1954, Fonds Sim Copans.
[14] Cynthia Ghorra-Gobin, « Territoires et représentations. L’imagination géographique de la société américaine », Revue française d’études américaines, 2006, vol. 108, n° 2, p. 86.
[15] Ibid.
[16] Ibid.
[17] Jacques Lévy, Michel Lussault [dir.], Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés , Paris, Belin, 2003, p. 675. Cité par Yves Raibaud. « Musiques et territoires : ce que la géographie peut en dire », Colloque international de Grenoble MUSIQUE, TERRITOIRE ET DEVELOPPEMENT LOCAL, Novembre 2009, Grenoble, France, p. 9. ⟨hal-00666220⟩
[18] « Géographie et musiques : quelles perspectives ? », Laboratoire Espaces, Nature et Culture 8/06/2006, Université de Paris IV Sorbonne. Cité par Yves Raibaud, « Musiques et territoires : ce que la géographie peut en dire », Colloque international de Grenoble MUSIQUE, TERRITOIRE ET DEVELOPPEMENT LOCAL, novembre 2009, Grenoble, France, p. 9. ⟨hal-00666220⟩
[19] « Pour le xxe siècle, le mouvement de civilisation qui avançait vers l’Occident et aboutissait à Rome chez Saint-Augustin, débouche sur New York, condensé de modernité ». Crystel Pinçonnat, New York, mythe littéraire français, Genève, Droz, 2001, p. 17. Par ville « moderne », nous entendons la redéfinition du rapport qui se joue entre ville et architecture au milieu du xxe siècle, qui accorde le primat aux infrastructures. Cf. Virginie Picon-Lefèbvre, Paris-Ville moderne : Maine – Montparnasse et la Défense, 1950-1975, Paris, Editions Norma, 2003, p. 41.
[20] « L’Amérique et sa musique », émission du 4/04/1948, texte d’émission, p. 1. Tous les textes cités de ce programme sont accessibles au Fonds Sim Copans.
[21] « L’Amérique et sa musique », émission du 4/04/1948, texte d’émission.
[22] « Carte postale de New-York en musique », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 23/10/1949, Paris, Programme National. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040815, timecode : 00.00.09-00.02.20.
[23] « Croisière vers les ports des États-Unis », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, Paris, émission du 18/11/1952, Programme Parisien. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040955, timecode : 19.34.20-19.36.13.
[24] Ils « […] produisent chez ceux qui les écoutent, à travers les émotions qu’ils procurent, la sensation immédiate des espaces imbriqués qui composent le paysage (ce qui est « caché » par les images) ». Ils sont « infiniment plus que la parole, […] aptes à rendre le réel dans ce qu’il a d’immédiatement concret, dans toute la richesse de sa manifestation, dans sa vérité », Roger Veillé, La radio et les hommes, Paris, Minuit, 1953, p. 106. Cité par Frédéric Antoine, « A la recherche (désespérée) des univers sonores radiophoniques », Médiatiques : récit et société, 2002, vol. 29, p. 3. Sur les transformations du reportage sonore et du rapport de la radio à l’utilisation du son, voir l’article de Frédéric Antoine.
[25] Dans son livre consacré à l’instrument, Laurent Dubois, professeur d’histoire à la Duke University, montre que l’origine du banjo se situe dans le commerce triangulaire. Le banjo a été central dans le processus pour la création d’une origine culturelle commune correspondant au territoire africain de la part des populations d’esclaves réparties dans les Amériques. Peu à peu investi par des musiciens et entrepreneurs blancs, en plus de perdre son ancrage avec la majeure partie de la musique populaire américaine, le banjo se limite au style bluegrass dont il est un des symboles. Voir Matthew B. Karush, Review of The Banjo : America’s African Instrument by Laurent Dubois, and Kīkā Kila : How the Hawaiian Steel Guitar Changed the Sound of Modern Music by John W. Troutman, Journal of Social History, 2017, vol. 51, n°1, p. 199-204. Project MUSE, https://muse.jhu.edu/article/671395.
[26] « Instruments de musique typiques de chaque pays », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, Paris, émission du 25/11/1952, Programme Parisien. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040956, timecode : 00’04’53-00’07’23.
[27] Michael Broyles, « Immigrant, folk, and regional musics in the nineteenth century », dans David Nicholls, The Cambridge history of American music, Cambridge, Cambridge University Press, 1998, p. 141.
[28] « Instruments de musique typiques de chaque pays », Tour du monde autour d’une table, op. cit., timecode : 00’07’23-00’08’39.
[29] « L’Amérique et sa musique », émission du 1/08/1948, texte d’émission, p. 4.
[30] Ibid, p. 5.
[31] Ibid, p. 3.
[32] Ibid, p. 3.
[33] « Folklore américain », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 15/01/1951, Paris, Programme national. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040861, timecode : 00’00’43-00’04’24.
[34] « L’Amérique et sa musique », émission du 27/04/1947, texte d’émission, p. 1.
[35] « L’Amérique et sa musique », émission du 21/03/1948, texte d’émission ; « L’Amérique et sa musique », émission du 17/10/1948, texte d’émission.
[36] « L’Amérique et sa musique », émission du 21/03/1948, texte d’émission, p. 1.
[37] Voir le standard qui a été écrit en son nom « (Up A) Lazy River  » par Hoagy Carmichael et Sidney Arodin (1930) ; quelques autres également soulignent le rapport des fleuves avec la Nouvelle-Orléans (sans doute en parlant, une nouvelle fois, du Mississippi) : « Take a ferryboat down to New Orleans », « Riverboat shuffle ».
[38] «L’Amérique et sa musique », émission du 21/03/1948, texte d’émission, p. 3-4.
[39] George McKay, Circular Breathing. The Cultural Politics of Jazz in Britain, Durham, Duke University Press, 2005, p. 11.
[40] Voir Lisa E. Daveport, Jazz Diplomacy. Promoting America in the Cold War Era, Jackson, University Press of Mississippi, 2010.
[41] Nicholas John Cull, The Cold War and the United States Information Agency… , op. cit., p. 29-30.
[42] Ludovic Tournès, « La popularisation du jazz en France (1948-1960) : les prodromes d’une massification des pratiques musicales », Revue Historique, 2001, vol. 617, n° 1, p. 109-130.
[43] « Quoi de neuf en mouvements musicaux », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 16/12/1952, Paris, Programme Parisien. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040958, timecode : 19’31’11-19’31’32.
[44] « L’orchestre du village », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 13/01/1953, Paris, Programme Parisien. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040952, timecode : 19’31’27-19’32’00.
[45] « Tour du monde autour d’une table : danse et jazz », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 08/09/1953, Paris, Programme Parisien. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040993 ; timecode : 19’31’22-19’31’37.
[46] « Simon COPANS : folklore américain », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 09/04/1951, Paris, Programme National. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040885, timecode : 19’04’21-19’04’44.
[47] Celeste D. Moore, « Une passerelle : Sim Copans et la traduction de la musique afro-américaine », dans Vincent Cotro et al, La catastrophe apprivoisée. Regards sur le jazz en France, Paris, Outre Mesure, 2013, p. 156.
[48] Ibid.
[49] « L’Amérique et sa musique », 31/10/1948, texte d’émission, p. 3-4.
[50] « L’Amérique et sa musique », émission du 8/08/1948, texte d’émission, p. 1-4. Les chansons citées dans le paragraphe en sont issues.
[51] « L’Amérique et sa musique », émission du 16/05/1948, texte d’émission, p. 2.
[52] Lauric Guillaud, Gilles Menegaldo, « Introduction », dans Gilles Menegaldo, Lauric Guillaud [dir.], Le western et les mythes de l’Ouest : littérature et arts de l’image, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, p. 15. Les français commencent à s’intéresser au genre à partir des années 1950-1960. Cf. Ibid, p. 12.
[53] Ibid, p. 16.
[54] Ibid, p. 15.
[55] Georges Laurent évoque ici le film de Charlie Chaplin « The Kid » de 1921 (« Le Gosse » en français) et son personnage Charlot.
[56] « Histoire de Billy the Kid et variétés américaines », Tour du monde autour d’une table [Émission radio], Producteur : Radiodiffusion Télévision Française, émission du 22/10/1951, Paris, Programme National. Consultable à l’INAthèque, identifiant : PHD86040924, timecode : 00’01’27-00’02’15.
[57] « L’Amérique et sa musique », émission du 4/05/1947, texte d’émission, p. 5.
[58] Yves-Henri Nouailhat, « Aspects de la politique culturelle des États-Unis à l’égard de la France de 1945 à 1950 », Relations internationales, printemps 1981, no 25, p. 89.
[59] Derek W. Vaillant, Across the Waves…, op. cit., p. 154.
[60] Nicholas John Cull, The Cold War and the United States Information Agency…, op. cit., p. 42.
[61] Didier Francfort, « Chansons et transferts culturels entre les États-Unis et l’Europe occidentale (1945-1991) », Les Cahiers Sirice, 2020, n° 24-1, p. 40.
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Pour citer cet article :
Lucas Le Texier, « Exposer l’Amérique. Sim Copans à la Radio Française (1946 – 1954) », Revue TRANSVERSALES du LIR3S - 18 - mis en ligne le 6 avril 2021, disponible sur :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/Transversales.html.
Auteur : Lucas Le Texier
Droits :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/publications/Transversales/menus/credits_contacts.html
ISSN : 2273-1806