Laboratoire
Interdisciplinaire de
Recherche
"Sociétés, Sensibilités, Soin"
UMR 7366 CNRS-uB
Transversales
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Corps, Lieux et Appartenances
« Corps, Lieux et Appartenances ». Introduction
Karine Montabord, Linda Zuo, Lucas le Texier
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RÉSUMÉ

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Introduction

La journée d’études doctorale du LIR3S intitulée “Corps, Lieux et Appartenances” s’est tenue le 22 octobre 2020 à la bibliothèque du Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche “Sociétés, Sensibilités, Soin”. La thématique que nous souhaitions interroger correspondait à un triptyque souvent monopolisé dans les sciences humaines et sociales. Lors de notre approche pour définir les articulations entre ces trois notions, nous avons insisté dans notre appel à communications sur trois points qui nous paraissent pertinents dans l’optique de susciter une réflexion définitionnelle et théorique de notre triptyque.

Un premier ensemble de questions s’est formé autour du rôle des corps et des communautés dans la formation des lieux. Comment une portion déterminée d’espace, un lieu géographique devient un lieu d’importance historique, sociale ou culturelle, voire un haut lieu ? Déterminé par « sa situation dans un ensemble, par la chose qui s’y trouve ou l'événement qui s’y produit » un lieu peut donc se créer par le rassemblement d’individus, de corps dans un même espace. Plus encore l’appartenance à un lieu pourrait définir l’identité d’un individu (Norberg-Schulz 1981). De là, il devient possible d’interroger la manière dont ses caractéristiques intérieur/extérieur, vaste/exigu, confortable/inconfrotable) agissent sur les individus et permettent de créer une effervescence et une émulation particulière. Comment se traduit corporellement l’expérience d’un rassemblement en plein air ou de la promiscuité d’une scène de stand up ? Le corps est entendu ici au sens large : comme un objet organique dans l’espace siège d’expériences multiples, comme une corporéité (Bernard, 1972).

Se regrouper n’est pas une activité stérile, en découle la formation de liens sociaux, de pratiques. L’étude des lieux et des corps permet de comprendre par quels procédés et sous quelles modalités, instables et changeantes, les espaces participent à construire le sentiment d’appartenance. Nous définissons ce dernier comme « les subjectivités collectives cristallisées comme identités de “soi”, qui s’expriment à partir d’un lieu propre, et la quête éventuelle de reconnaissance universelle » (Jewsiewicki, 2002). Les liens des territoires et « espaces propres » (Gennart, Vannotti, 2014) avec l’appartenance sont instables et soumis à des négociations permanentes de la part des individus. À l’inverse, on peut interroger ce qui se joue lorsque le fait d’appartenir à un groupe pousse à se réunir dans un lieu et ainsi provoquer une rencontre physique. Ce sentiment d’appartenance peut être une conséquence ou être la volonté première qui motive le rassemblement. Le phénomène de la fête et des rassemblements qui rythme la vie d’une communauté (mariages, rites de passage, fêtes religieuses et laïques, etc.) sont à prendre en compte d’autant qu’ils engagent généralement fortement le corps (danses, chants, discours, marches, costumes, transes, etc.).

La présence au monde de l’individu tient toujours de sa « corporéité en action » (Le Breton, 2014) : le corps fixe les limites propres de l’individu, et délimite l’espace personnel qu’autrui identifie comme tel. Si l’on est d’abord circonscrit et définit individuellement par son enveloppe charnelle aux yeux des autres, le corps s’éduque, se nourrit d’expériences et mémorise des gestes et des postures qui vont participer à en faire un médiateur entre un individu, autrui et l’environnement (Merleau-Ponty, 1945 ; Le Breton, 2014). En organisant des moments et des endroits où l'on se trouve et se retrouve, les événements liés à la culture populaire sont des lieux privilégiés pour la mise en place de ces phénomènes. On peut ainsi questionner les modalités qui permettent aux corps de maîtriser et de restituer des répertoires de gestes, de mimiques, de perceptions sensorielles, d’émotions et d’affects au sein d’espaces et de communautés.

À travers les interventions qui ont été présentées, nous espérons avoir apporté des réflexions approfondies sur le dialogue entre ces trois notions, d’autant plus que cette question est abordée sous différents angles, et sous un regard multidisciplinaire, regroupant les disciplines de l’histoire, des arts, de la sociologie, de la philosophie et de l’éducation. Dominique Moreno a introduit la journée par sa communication Les émotions de l’élève : quels effets sur le jugement évaluatif enseignant ? suivie par celle de Xiaoyan Xia, portant sur L’apparition du paysage : Une approche de la phénoménologie merleau-pontienne et de la poésie de paysage chinoise. Si, dans les deux communications précédentes, l’interaction se fait dans le monde physique et environnant, Lucas Le Texier a proposé de s’interroger sur la dimension sonore et, en quelque sorte, imaginaire, avec Exposer l’Amérique. Sim Copans à la Radio française (années 1940-1950). Karine Montabord lors de sa conférence La dynamique des lieux comme condition de rencontre. Dada et la danse entre Zurich et le Monte Verità, et Linda Zuo qui s’est intéressé au Club des Américaines de Paris : Espaces familiers et identité, ont mis en avant notre triptyque et les différentes dynamiques qu’il peut susciter dans des groupes artistico-culturels. Enfin, Léandre Bricout a clôturé les communications en étudiant le monde carcéral et les transformations que celui-ci suscite dans l’identité et les pratiques des individus avec sa communication intitulée La culture et appropriations des lieux en prison.

On le voit, cette journée a permis à la fois de décomposer le triptyque corps-lieux-appartenances en de nombreuses variations pouvant dialoguer et s’opposer et à la fois offrir aux participants un moment enrichissant d’échanges. Nous tenons à remercier particulièrement Isabelle Marinone, maître de conférences en histoire du cinéma, pour son investissement dans notre projet, et Sylvie de Vesvrotte, qui, par ses efforts, a rendu possible cette rencontre.

 

Bibliographie

Michel Bernard, De la création chorégraphique, Pantin, Centre National de la danse, 2001.

Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges Vigarello [dir.], Histoire du corps, Paris, Le Seuil, 3 vol., 2006.

Michèle Gennart et Marco Vannotti, « Espaces familiers et identité ; quand l’espace propre est hanté… », Thérapie Familiale, 2014, vol. 35, n° 4, p. 439-450.

Bougmil Jewsiewicki, « Vers une impossible représentation de soi », Les Temps Modernes, 2002, n° 4, p. 101-114.

David Le Breton, « Le corps entre significations et informations », Hermès, La Revue, 2014, vol. 1, n° 68, p. 21-30.

Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 1945.

Christian Norberg-Schulz, Genius Loci : paysage, ambiance, architecture, Bruxelles, P.  Mardaga, 1981.

Greta Tommasi, « Renégocier le lien entre territoire et appartenance. L’exemple de la Montagne limousine », Pour, 2015, vol. 4, n° 228, p. 113-122.

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Karine Montabord, Linda Zuo, Lucas Le Texier,
LIR3S Laboratoire interdisciplinaire de Recherche “Société, Sensibilités, Soin”, UMR 7366 uBFC/CNRS

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Pour citer cet article :
Karine Montabord, Linda Zuo, Lucas Le Texier, « Corps, Lieux et Appartenances ». Introduction, Revue TRANSVERSALES du LIR3S - 18 - mis en ligne le 6 avril 2021, disponible sur :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/prodscientifique/Transversales.html.
Auteur : Karine Montabord, Linda Zuo, Lucas Le Texier
Droits :
http://tristan.u-bourgogne.fr/CGC/publications/Transversales/menus/credits_contacts.html
ISSN : 2273-1806