12 octobre 2022 - En visioconférence via zoom de 18 h 00 à 20 h 30
Atelier « Les “monstres” et les morts. Imaginaires et rationalité : ce qui entrave ou rend possible la relation » : Du cadavre au monstre, du monstre au cadavre
Organisation : Anna-Maria Sienicka (LIR3S UMR 7366 CNRS-uB) et Giulia Lelli (Université Lyon 3 – Jean Moulin)
Présentation de l'atelier
Cet atelier de recherche interdisciplinaire se propose d’étudier conjointement la relation qui peut exister entre une personne susceptible d’être perçue comme « monstrueuse » et une personne se percevant elle-même comme « normale » d’une part, la relation entre une personne vivante et une personne morte d’autre part. Nous ne nous intéressons pas à de purs monstres ou à des morts largement reconstruits par l’imagination, mais à des personnes qui se trouvent vues comme « monstrueuses » et à des personnes ayant effectivement existé mais étant vues comme n’ayant plus d’être autonome du fait de leur mort. Nos objets sont les relations qui, en droit, pourraient avoir lieu avec ces personnes. Notre constat est que ces relations sont, de fait, souvent manquées ou empêchées. Notre hypothèse est qu’elles le sont en raison d’un même type d’obstacle : en raison d’imaginaires (du monstrueux et des morts agissants : vampires, fantômes, etc.) qui viennent recouvrir la personne susceptible d’être perçue comme « monstrueuse » et la personne morte et qui empêchent de saisir adéquatement ce qu’elles sont et ce qu’elles peuvent faire. Notre pari méthodologique est que l’étude conjointe de la relation aux personnes susceptibles d’être perçues comme « monstrueuses » et aux morts est féconde, en raison de ces obstacles imaginaires communs. Notre ambition est d’étudier ces obstacles et de montrer de quelles manières ils peuvent être levés.
[Toutes les séances de l'atelier ici]
Programme de la séance
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Floriane Tanguy,
Inspectrice d’académie-Inspectrice pédagogique
régionale de philosophie des académies de Dijon et
Besançon, responsable de la valorisation des archives de
Louis-Vincent Thomas
Un jour, le monstre viendra : les morts, les monstres et Le
Vieux Thanatosaure
(Louis-Vincent Thomas)
Si le
monstre est conçu et représenté comme ce qui est
au-delà ou en-deça de toute mesure, il est sans doute toujours ce
qui déjoue la norme, soit dans la réalité, soit dans
l’imaginaire. Dès lors, le monstre pourrait bien se définir
par les effets qu’il produit : s’il dépasse la mesure
ou la norme, il est essentiellement de l’ordre de
l’altérité, ce qui déjoue toute identité, la met
en question, interroge nos certitudes quant à l’ordre de la
nature, de notre nature telle que nous la vivons intimement . En ce
sens qu’y a-t-il de plus monstrueux que la mort, les morts, les
cadavres qui nous ramènent sans cesse à notre finitude, notre
faiblesse et la conscience que notre identité est menacée par
l’altérité qui nous guette (l’unité du corps est
menacée de morcellement, de dégradation... ) ou à laquelle
nous sommes voués (nous deviendrons tous cadavre) ?
« Il est l’autre qui dérange, pose des problèmes,
met en question, harcèle notre quiétude et exacerbe nos
fantasmes », écrit Louis Vincent-Thomas dans Les Chairs de la mort. Penser les monstres, réels ou
imaginaires, n’est-il pas toujours penser notre inquiétude
existentielle, le rapport au corps et la façon dont chaque culture
cherche à conjurer la mort par laquelle « un jour le monstre
viendra » ?
C’est bien cela qui donne à la monstruosité une place
importante dans les textes de Louis-Vincent Thomas, depuis Le Cadavre jusqu’aux Chairs de la mort, en passant
par Civilisation et divagations et Fantasmes au quotidien.
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