11 mars 2021 - uB – 2 bd Gabriel – Salle 319 (3e étage du bâtiment droit)
de 14 h 00 à 18 h 00 (accès/informations pratiques ici)
Transversales : Journée d'étude doctorale du LIR3S : Sensibilités et souffrances animales
Organisation : Arnaud Malaty (doctorant en histoire contemporaine, LIR3S UMR CNRS uB 7366)
En
ce début de XXIe siècle, les questions relatives à la souffrance des
animaux sont omniprésentes dans la sphère publique ; en témoigne, entre
autres, la couverture médiatique des révélations de l’association L214 sur les
élevages intensifs et les pratiques d’abattage ou encore les débats sur les
chasses traditionnelles. Ces questions interpellent aujourd’hui, non seulement
les acteurs de la protection des animaux, mais également une large part de la
société attentive, ou se sentant concernée par la souffrance faite aux bêtes
[1]. Partant du principe que
le positionnement des Hommes sur la condition animale est une construction
sociale et culturelle, la prise en compte de ces problématiques par les Sciences
Humaines et Sociales apparaît indispensable pour éclairer et situer les
évolutions de nos rapports aux animaux dans le temps et dans l’espace.
Depuis
une quarantaine d’années, le monde universitaire a ouvert un grand chantier
d’études animales. Les chercheurs se sont alors intéressés aux relations entre
les hommes et les animaux à travers l’histoire de leur protection qui a permis
de révéler le statut accordé aux non-humains, les pratiques à leurs égards et
les conflits entre mondes humains et mondes animaux[2]
. Au fil des études, un
récit historique s’est progressivement imposé. Pour le cas de la France, la
question de la protection des animaux débuterait au XIXe siècle,
révélée par des évènements clés comme le concours de l’Institut national de
France en 1802 dont la question était « Jusqu’à quel point les traitements
barbares exercés sur les animaux intéressent-ils la morale publique et
conviendrait-il de faire des lois à cet égard ? », la fondation de la
Société Protectrice des Animaux en 1845 ou encore le vote, en 1850, de la loi
Grammont sur les mauvais traitements
envers les animaux domestiques. Le XIXe siècle est ainsi
considéré comme une première période de protection et de contrôle sur les
violences faites aux bêtes. Cependant, cette protection est perçue comme
relative puisque centrée sur l’Homme plus que sur l’animal. C’est
principalement les arguments utilitaristes (les animaux mieux soignés sont plus
productifs) et de morale publique (la protection des animaux est une pédagogie
philanthropique) qui ont façonné les discours et les actes sur la protection
des animaux[3].
Un
changement majeur dans la teneur des discours sur la protection des animaux
aurait opéré à partir des années 1980. Les voix qui s’élèvent aujourd’hui
prêchent de manière prédominante le refus de la souffrance infligée aux
animaux. Dès lors, comme l’a souligné l’historien Éric Baratay,
« la période actuelle apparaît, aux
yeux des chercheurs et des partisans ou des adversaires de la cause animale,
comme une révolution philosophique fondamentale pour les uns, comme une
dangereuse déviation misanthropique pour les autres »[4]. Cependant, la dernière
décennie de recherche sur l’histoire animale a réinvesti les temporalités de la
sensibilité des hommes à la souffrance des animaux depuis le début du XIXe jusqu’à nos jours. Il s’avère que cette dernière n’était pas si marginale dans
les discours au XIXe siècle et au début du XXe siècle.
L’objectif
de cette journée transdisciplinaire est de permettre aux doctorants de LIR3S,
toutes disciplines confondues, d’investir ce champ d’étude et ces débats
contemporains en mobilisant les méthodes et les techniques des Sciences
Humaines et Sociales. Comment, au gré des générations et des acteurs et
détracteurs de la protection animale, les questions sur la souffrance des
animaux ont évolué, se sont diversifiés, en fonction des objectifs recherchés,
de l’adhésion ou non de la société, des savoirs mobilisés, de l’instauration de
politiques publiques, de la création d’un droit spécifique, de l’influence des
contextes internationaux et de bien d’autres facteurs encore. Nous invitons les
doctorants du laboratoire à répondre à cet appel : les propositions
peuvent prendre la forme d’études de cas concrets ou offrir des perspectives
plus théoriques, qu’il s’agisse du droit à accorder aux animaux, de sociologie
de la sensibilité à la souffrance animale, de l’évolution dans le temps et dans
l’espace de ces questions. Les thématiques possibles sont nombreuses et peuvent
porter, entre autres, sur les animaux domestiques (abandons, mauvais
traitements), les animaux comme produits industriels (élevage intensif,
pratiques d’abattage, expérimentations animales), les animaux
sauvages (pratiques cynégétiques, gestion de la nature et de la faune
sauvage), le développement des discours antispécistes,
les rapports entre mondes ruraux et urbains, etc.
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