19-20 novembre 2020
Manifestation reportée à une date ultérieure
Colloque : Le consentement dans les espaces du soin, de l’intimité
et de l’affectivité
Organisation : Georges Charbonneau (Université Paris 7 - Denis Diderot) et Jean-Philippe Pierron (LIR3S, UMR 7366 CNRS-uB)
[Colloque organisé en partenariat avec le département de philosophie de l’Université de Bourgogne, la Chaire Valeurs du soin, la Revue le Cercle herméneutique et l’Espace Ethique de Bourgogne Franche Comté. Avec le soutien du CRPMS (Université Paris Diderot) et l’École Française de Daseinsanalyse (Archives Husserl, ENS, Paris rue d’Ulm)]
Qu’il s’agisse de consentements affectifs et sexuels, de consentements médicaux sous ses différents aspects (aux soins qui nous sont proposés, que nous subissons et auxquels nous devons nous soumettre), de divers consentements juridiques et commerciaux, ou de toutes autres natures, la question du consentement s’érige en question majeure pour les sciences humaines. Elle émerge sur fond d’une crise des accords tacites dans les rapports interpersonnels.
A - Le Consentir et la volonté.
En consentant, nous acceptons une possibilité de sens qui n’est pas celle que nous avions projetée. Cette possibilité de sens nous surprend dans notre indétermination à ce que nous voulons et ce que nous sommes prêts à concéder. Il faut au consentant actualiser ce qu’il veut et à quel prix il le veut et il peut y renoncer, et aussi ce qu’il ne veut pas. On rencontre ici une philosophie de la volonté sur un nouveau front : celui de ce que nous ne voulons pas et de ce que nous voulons. Il nous faut subitement éclaircir, redéfinir ou ajuster nos projets de sens, laissés indéterminés le plus souvent. La volonté se porte alors sur ce point d’acceptation, tendu entre résistance, refus et résignation. Comprendre devient admettre et faire sien le sens reçu. Lorsqu’il n’est pas approprié´, il y a pure résignation. Le rapport de force nous contraint. Une question se pose pourtant : l’existence n’est-elle pas faite aussi de résignation et de consentement, aussi bien actifs que passifs ? Dans l’expérience, il y a toute une temporalité du consentement qui, à chaque moment, découvre un sens qui peut être différent : le sens avant et après l’acte, et celui de sur l’instant : de cette détermination découlent plusieurs sens qu’il faut concilier, en prenant garde à ce que le sens d’un acte ne soit pas seulement celui qui a été élaboré et déterminé a posteriori. Le sens d’un acte, juridiquement, est principalement son sens présent, tel que nous le vivons au moment où il se présente, mais il ne peut pas être différent du sens tel qu’il est compris a posteriori, autrement dit sera reçu par autrui. S’il n’en était pas ainsi, il n’y aurait pas de responsabilité morale. Ce travail des sens en direction d’un sens unifié ne permet-il pas un juste consentement.
B - Trouver le « juste consentir » est difficile car il s’exerce en régime d’intimité,
notamment dans le monde du soin qui donne une place majeure et exige « un consentement éclairé ». Cette structure de l’intime doit être explorée dans ses grandes déterminations. C’est un être-ensemble particulier qui tend à abolir les défenses intersubjectives au profit de ce nous qu’elle crée et met en partage. L’intimité est aussi une ambiance qui amortit, absorbe, pardonne, compense les tensions, avec des équilibres qui ne sont pas dicibles depuis le champ social, sauf pour des situations extrêmes, qui précisément peuvent rompre son édifice. Le « juste Consentir » interroge alors la nature du contrat qui lie les interactants. Le contrat du consentement en matière d’intime est-il un contrat au sens libéral du terme, qui peut être entièrement explicité ? Comme tous les accords affectifs, ne recèle-t-il pas toute une richesse de conditionnalité, comme ces « Oui à condition que... », etc., qui ne sont pas opposables ?
C- Le consentement, non seulement par ses vices (vices du consentement qui les invalident) expose à entrer dans l’étude des violences qu’il peut subir, que ce soit de simples violences psychologiques, celles de la criminologie et de la médecine légale. Criminologie sur ses deux versants : agressologique et victimologique. Un schéma domine, celui du couple agresseur-empriseur (ou non) / victime passive-dépendante (ou non). La pertinence de ce schéma est indiscutable dans de nombreuses situations. Lorsqu’il y a psychose ou troubles graves et reconnus de la personnalité, les responsabilités ne posent pas de difficultés. Par contre, lorsqu’on s’approche davantage de la normalité, et qu’on se pose en terrain seulement psychodynamique, les questions sont plus difficiles à analyser. N’en va-t-il pas là de la détermination de la vulnérabilité, qui est centrale dans l’approche du consentement ?
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