Elena Apostoli Cappello
« Libérer » la ville pour fabriquer la citoyenneté : ethnographie de pratiques d’occupations à Rome

Cette communication prend appui sur une recherche réalisée à Rome sur des pratiques d’occupation illégale d’espaces sujets à l’abandon ou à la spéculation immobilière, pratiques revendiquant une identité politique fondée justement sur la « libération » des espaces sociaux soumis à des logiques du profit. Dans ce répertoire d’actions citoyennes centrées sur le squatting et des propositions de démocratie délibérative, on peut observer des temporalités spécifiques, autour de récits mobilisant la nostalgie d’une « ville d’avant », en partie imaginée et idéalisée, tout en revendiquant par ce biais l’idée d’un futur utopique.
La résistance au capitalisme, incarné par les investissements immobiliers spéculatifs et la gentrification, s'enracine, entre autres, dans des récits sur une ville pleine d’ « espaces culturels à sauver » propres à un passée récent : un théâtre occupé dans le centre historique, un cinéma des années 1970 ou encore des copropriétés populaires destinées à être transformées en hôtel de luxe dans le quartier universitaire. Cette communication visera à comprendre comment un patrimoine culturel, urbanistique et architectural « à défendre » et à se réapproprier par des occupations peut incarner un patrimoine social et politique, un ordre alternatif, lieu de la reproduction de la société et de ses symboles. Cette société « vivante », par opposition aux logiques impersonnelles destructives, n'est pas gouvernée par la logique du profit économique mais par la valeur des « biens communs » et la gestion collective des espaces partagés de la ville.
Peut-on considérer le répertoire des pratiques de gestion collective (par des assemblées) de ces espaces occupés comme un « patrimoine culturel » ? On essaiera de mettre en perspective des matériaux ethnographiques avec la catégorie de « patrimoine » pour montrer comment les pratiques politiques observées à Rome tentent de résister à un capitalisme destructeur de ce qui est « humain ».